2-235

2-235

Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 17 OCTOBRE 2002 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Question orale de Mme Marie Nagy au ministre des Télécommunications et des Entreprises et Participations publiques, chargé des Classes moyennes, sur «les négociations en vue du rachat du Berlaymont» (nº 2-1078)

M. le président. - M. Marc Verwilghen, ministre de la Justice, répondra au nom de M. Rik Daems, ministre des Télécommunications et des Entreprises et Participations publiques, chargé des Classes moyennes.

Mme Marie Nagy (ECOLO). - Je voudrais remercier le ministre de la Justice de répondre au nom de M. Daems. J'avais interpellé ce dernier sur la Tour des Finances et le ministre des Finances avait répondu. Je pense que c'est une habitude dans le chef du ministre Daems de déléguer un collègue pour répondre aux questions qui lui sont adressées.

Si l'on en croit les diverses informations parues dans la presse ces derniers jours, un accord entre le gouvernement belge et la Commission européenne sur le rachat du Berlaymont par cette dernière devrait aboutir dans les prochains jours. Un montant de 545 millions d'euros représentant la totalité des annuités a été cité. Même si un audit estime le bâtiment à 632 millions d'euros, ce qui sera vraisemblablement inférieur au coût des seules rénovations, soit 129,95 millions d'euros pour le désamiantage et 607 millions d'euros pour la rénovation, cette somme pourrait a priori passer pour un compromis honorable. Toutefois, un certain nombre d'éléments suscitent à mes yeux quelques inquiétudes.

Le bien-fondé de cette transaction est, en effet, lié à la date effective de mise à disposition du Berlaymont à la Commission européenne. Le ministre Daems nous dit avec plus ou moins de conviction que, pour fin 2003, cela devrait être chose faite ; il le confirmait encore au début de cette année. Malheureusement, il semble être le seul à partager cette opinion. Plusieurs sources s'accordent effectivement pour estimer qu'il faudra au moins deux ou trois années supplémentaires pour arriver à la fin des travaux. Dans ce cas, l'opération dont il est question s'avérera bien moins intéressante qu'il n'y paraît à première vue. En effet, des indemnités annuelles de 15 millions d'euros seraient prévues dans le cas où les travaux ne seraient pas terminés dans les délais impartis. L'État devra, de surcroît, continuer à payer les locations de remplacement des bâtiments occupés actuellement par la commission. Le Conseil des ministres a d'ailleurs encore récemment approuvé, sur proposition du ministre, la prolongation des contrats de location de plusieurs de ces immeubles. La possibilité de prolongation des contrats au-delà du 30 juin 2005 étant prévue, il s'avère de facto que le ministre estime toute finalisation de la rénovation en date du 31 décembre 2003 comme virtuellement impossible, voire exclue.

Dans le cas où les travaux de rénovation du Berlaymont ne seraient pas terminés le 31 décembre 2003, l'État belge devrait donc supporter, outre une indemnité annuelle de retard de 15 millions d'euros, le coût de la location des immeubles de remplacement et le loyer fictif actuellement payé par la commission.

En ce cas, quel sera l'état de la trésorerie de Berlaymont 2000 dès janvier 2004 ?

M. le ministre pourrait-il nous éclairer sur les informations contenues dans la presse ? Alors que de nouveaux dérapages techniques et des procédures judiciaires émaillent le chantier et risquent de retarder sensiblement les travaux en cours, pourrait-il nous préciser les raisons du retard encouru ?

Par la même occasion, peut-il nous informer sur les mesures qu'il compte prendre afin de raccourcir le délai de réalisation, d'autant que l'on n'a encore réalisé qu'un tiers des plans et travaux au cours des trente derniers mois ? Comment, dans ces conditions, B2000 pourra-t-elle envisager de finaliser les deux tiers restants sur la moitié de ce temps, soit quinze mois ?

Le recours à des entreprises tierces confirme l'incapacité de B2000 à assumer elle-même la mission de maître d'oeuvre et de maître d'ouvrage, dévolue par le gouvernement le 19 janvier 1999. Un tel recours s'effectue-t-il en fonction des obligations imposées par la loi du 24 décembre 1994 sur les marchés publics ?

Le ministre peut-il aussi nous fournir une estimation actualisée des coûts de rénovation ainsi que du coût global de l'opération ? De Morgen du 7 octobre avance le chiffre de 1,4 milliard d'euros. Le ministre peut-il, par la même occasion, nous donner une estimation du coût total pour l'État belge de chaque semestre de retard sur la livraison prévue pour le 31 décembre 2003 ?

Quels sont les obstacles qui l'empêchent de présenter un projet de convention Commission européenne-gouvernement fédéral ?

Enfin, quand envisage-t-il de soumettre cette proposition d'accord au Conseil des ministres ainsi qu'à la commission des Finances du Sénat et de la Chambre, établie à partir des recommandations contenues dans le rapport de Deloitte&Touche ? En janvier 2002, le ministre nous avait promis de nous en communiquer le contenu. À cette date, il ne l'a toujours pas fait. Quand cette communication aura-t-elle finalement lieu ?

M. Marc Verwilghen, ministre de la Justice. - Je comprendrais que mon collègue, M. Daems, se fasse remplacer par le ministre des Finances pour répondre à une question sur la Tour des Finances. J'ai cependant du mal à croire qu'il me demande de le représenter pour parler du Berlaymont, car il pourrait y avoir un procès à ce sujet !

Les négociations avec la Commission européenne sont en effet en phase finale. Un projet de convention sera soumis au Conseil des ministres du 23 octobre 2002. Il ne paraît toutefois pas opportun d'en communiquer les détails tant que la convention n'est pas finalisée et signée par les deux parties.

À l'heure actuelle, je peux vous affirmer que différentes réceptions provisoires sont prévues, chacune à une date spécifique, une pour l'immeuble de base, une pour le treizième étage et une dernière pour le lot multimédia.

La réception de l'immeuble de base est prévue pour le 31 décembre 2003. Les deux autres auront lieu plus tard, mais cela n'empêche pas que le 31 décembre 2003 vaut comme date de départ des périodes de six et de dix-huit mois, après lesquelles les obligations de l'État belge concernant la prise en charge de l'hébergement de substitution cessent d'exister.

La faisabilité des dates pour les réceptions provisoires a encore été confirmée cette semaine par la SA Berlaymont 2000.

À l'heure actuelle, il n'y a aucune raison de modifier le planning approuvé par l'entrepreneur pilote.

Fin août 2002, 45,45% des travaux étaient exécutés et non un tiers. Maximum 10% des études doivent encore être réalisés. En outre, il faudra tenir compte du fait que durant les trente mois précédents, le chantier a été paralysé un certain temps.

Quant à la prorogation des baux pour cet hébergement de substitution, un avenant a en effet été passé stipulant que les délais de bail prendront fin le 30 juin 2005, comme déterminé par la loi, pour une partie des baux et le 31 décembre 2005 pour une autre partie, mais avec possibilité pour le locataire de renoncer aux baux respectivement le 30 juin 2004, le 30 septembre 2004, le 31 décembre 2004, le 31 mars 2005, le 30 juin 2005 et le 30 septembre 2005.

Il n'a pas été fait appel à des entreprises tierces pour la coordination des travaux. La coordination est en fait une tâche de l'entrepreneur pilote, tout comme la coordination des études. Une convention-cadre a été passée à cet effet. La désignation de cette convention-cadre s'est déroulée conformément à la réglementation relative aux marchés publics.

Le prix total des travaux, en ce compris les travaux supplémentaires demandés par la Commission européenne relatifs au treizième étage et le lot multimédia, est à présent estimé à 358 millions d'euros. Ce prix comprend la disposition particulière relative aux risques, aléas et travaux supplémentaires inattendus.

Le prix total incluant le pilotage, les charges financières, la maîtrise du chantier et les claims a été estimé à 607 millions d'euros.

Les pénalités au cas où l'immeuble de base ne serait pas achevé le 31 décembre 2003 font partie du contenu de la convention. Elles seront communiquées dès que l'accord sera définitif.

Je rappelle enfin que la convention et le rapport du bureau d'audit seront soumis aux commissions des Finances du Sénat et de la Chambre dès que la Commission aura obtenu un accord définitif.

Mme Marie Nagy (ECOLO). - Je remercie le ministre Daems de cette réponse. Il s'était engagé en commission du Sénat à nous transmettre les conclusions des études et audits concernant le Berlaymont mais, à ma connaissance, il n'a pas tenu parole. Quoi qu'il en soit, quand il me dit que seulement un tiers des travaux ont été réalisés en l'espace de 36 mois et que deux tiers restent à réaliser en 15 mois, je me rends compte qu'il sera presque impossible de respecter les délais. Le ministre n'étant pas en mesure de communiquer une fiche indiquant comment il entend répondre aux différents étapes du chantier, je crains que la Belgique - et donc les contribuables belges - ne doive payer les pénalités prévues par la convention. Dès lors, je souhaiterais que le ministre puisse répondre clairement à cette problématique des retards.