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9 JUILLET 2002
Nous, parlementaires russes et belges, avons partagé nos analyses, nos statistiques, nos informations économiques et politiques, et constatons ensemble :
La migration est un phénomène qui s'accroît en Europe et en Russie, et qui continuera de croître au moins pendant toute la prochaine décennie. Cette situation a des causes socio-économiques et politiques profondes liées à l'espace de liberté que représentent l'Europe et la Russie. Parmi ces raisons, nous citons :
la pauvreté et l'inégalité des conditions de vie;
le changement de l'équilibre mondial, tant en Europe que sur le territoire de l'ex-Union Soviétique et la disparition des frontières;
le besoin de découvrir un monde nouveau, qui s'ouvre à l'Est pour les Européens, et à l'Ouest pour les citoyens russes;
le besoin de jouir de sa liberté de mouvement;
la recherche de nouvelles opportunités économiques de part et d'autre;
pour certains, la recherche d'activités criminelles rentables dans des zones aisément accessibles depuis peu.
Étant un phénomène dynamique soumis à toute une série de raisons objectives et subjectives, la migration peut avoir un effet tant positif que négatif sur la stabilité socio-économique et politique des pays. Ainsi que le montre l'expérience du passé, dans la majorité des pays soumis à des pressions migratoires, les rythmes de la migration dépassent les capacités des États à réguler les processus migratoires et à réagir à leurs conséquences. Il est clair que si les pressions migratoires ont un caractère chaotique et ne peuvent être régulées, le degré de sécurité des États diminue. Cette situation provoque souvent de nombreux problèmes dans les pays d'accueil des migrants, focalisant ainsi l'attention de la communauté internationale.
Nous, parlementaires russes et belges, avons échangé les chiffres permettant d'évaluer ce phénomène. En ce qui concerne la Belgique, il s'agit de statistiques de 1997 à 2000. Pour la Russie, il n'existe pas encore de statistiques disponibles, mais bien une estimation générale du nombre d'étrangers et des tendances dans le domaine des migrations.
Il ressort des données disponibles que la migration n'est pas un fait typiquement belge, mais bien un phénomène que l'on rencontre également en Russie. Les flux de migration pour nos pays ressemblent à ceci :
Immigration ventilée par nationalité (10 premières nationalités hors l'Union européenne)
Land Pays |
1997 | 1998 | 1999 | 2000 |
Algerije. Algérie | 8 878 | 8 452 | 8 313 | 7 685 |
Democratische Republiek Congo. République démocratique du Congo | 12 130 | 12 397 | 12 458 | 11 357 |
Indië. Inde | 3 059 | 3 156 | 3 309 | 3 400 |
Marokko. Maroc | 132 831 | 125 082 | 121 984 | 106 822 |
Polen. Pologne | 6 034 | 6 319 | 6 749 | 6 928 |
Roemenië. Roumanie | 2 150 | 2 063 | 2 311 | 2 391 |
Tunesië. Tunisie | 4 655 | 4 243 | 4 159 | 3 615 |
Turkije. Turquie | 73 818 | 70 701 | 69 183 | 56 172 |
Verenigde Staten. États-Unis | 12 592 | 12 394 | 12 235 | 11 852 |
Ex-Joegoslavië. Ex-Yougoslavie | 1 309 | 8 942 | 10 466 | 5 951 |
Totaal. Total | 257 456 | 253 749 | 251 167 | 218 173 |
(1) Source : INS.
Immigration ventilée par sexe
Continent Continent |
1997 | 1998 | 1999 | 2000 | ||||
M/H | V/F | M/H | V/F | M/H | V/F | M/H | V/F | |
Europa (buiten EU). Europe (hors UE) | 49 301 | 51 968 | 47 730 | 51 448 | 49 621 | 53 854 | 40 988 | 46 032 |
Azië. Asie | 12 411 | 13 266 | 12 123 | 13 511 | 12 647 | 14 318 | 12 724 | 14 927 |
Afrika. Afrique | 91 495 | 79 629 | 86 996 | 76 341 | 85 696 | 75 363 | 76 451 | 67 294 |
Amerika. Amérique | 10 176 | 11 859 | 10 115 | 11 967 | 10 287 | 12 315 | 10 257 | 12 303 |
Oceanië. Océanie | 341 | 349 | 373 | 349 | 392 | 399 | 413 | 433 |
Vluchtelingen. Réfugiés | 10 773 | 8 924 | 9 803 | 8 098 | 9 810 | 8 099 | 8 223 | 6 734 |
Staatlozen onbekend. Apatrides inconnue | 389 | 193 | 195 | 195 | 444 | 259 | 463 | 309 |
Totaal. Total | 472 864 | 430 256 | 464 834 | 427 146 | 465 903 | 431 207 | 445 908 | 415 777 |
Totaal. Total | 903 120 | 891 980 | 897 110 | 861 685 |
D'après les estimations des experts, presque 10 millions d'étrangers résident actuellement dans la Fédération de Russie, dont environ 5,5 millions d'immigrants illégaux citoyens étrangers ou apatrides. Cependant, ces chiffres sont tout à fait approximatifs, dans la mesure où il n'y a pas en Russie de système unique de recensement des entrées, des séjours et des départs des citoyens étrangers, et qu'il est difficile d'obtenir des données statistiques fiables à ce sujet.
Durant les cinq dernières années le nombre d'immigrants illégaux arrêtés aux frontières a plus que décuplé. La majorité des immigrants illégaux sont des citoyens des États membres de la Communauté des États Indépendants (CEI), essentiellement de Transcaucasie et d'Asie Centrale, mais également d'Afghanistan, de Chine, du Vietnam, d'Iran, du Pakistan, de Corée du Nord, du Sri Lanka, ainsi que d'un certain nombre d'États africains.
Rien qu'en 1999, l'accès légal au territoire a été refusé à environ 30 000 citoyens étrangers, immigrants illégaux potentiels, qui se présentèrent aux postes-frontières de la Fédération de Russie. En 2000 il s'est agi de plus de 61 000 personnes, et au cours du premier semestre 2001, de plus de 34 000 personnes.
Les principaux facteurs causant l'afflux en Russie d'immigrants illégaux sont : sa situation économique plus solide et son niveau de vie relativement élevé par rapport aux indices analogues des États membres de la CEI et d'un certain nombre d'États plus lointains, l'apparition sur le marché russe des formes alternatives de propriété; ainsi que des possibilités d'emploi. De plus, la situation géographique de la Russie facilite le transit entre l'Asie et l'Europe.
L'afflux des immigrants illégaux est également causé par le relâchement substantiel du régime des visas tant en Russie que dans la plupart des États membres de la Communauté des États indépendants, l'existence de certains secteurs peu contrôlés de la frontière russe (secteur Russie-Kazakhstan), ainsi que la quasi-transparence des frontières entre les États-membres de la CEI. L'afflux d'immigrants illégaux constitue un des facteurs de la criminalisation de la société russe. Les groupes criminels composés d'immigrants illégaux ont créé dans les grandes villes de la Russie un marché de biens et de services échappant à tout contrôle; ils fraudent le fisc et mènent des activités commerciales illégales, trafiquent des armes et de la drogue, ce qui complique la situation criminogène. En 2000, les immigrants étaient responsables de 7,5 % des crimes commis sur le territoire de la Fédération de Russie.
Les flux migratoires grandissants vers la Russie, l'utilisation de son territoire comme zone de transit de l'immigration illégale, ainsi que le renforcement des frontières extérieures de l'Union européenne, des pays baltes, de l'Ukraine et de la Pologne, entraînent une concentration massive des immigrants illégaux sur le territoire de la Russie.
Un des problèmes les plus aigus à l'heure actuelle provient de l'augmentation de l'afflux illégal en Russie de main-d'oeuvre étrangère. Selon différentes estimations, la migration économique illégale sur le territoire de la Fédération de Russie représente de 3,5 à 5 millions de personnes. De plus, les travailleurs étrangers illégaux occupent souvent sur le marché du travail des postes qui pourraient être occupés par des citoyens russes. Cela mène donc à une augmentation du chômage des citoyens russes.
Les problèmes liés à l'immigration illégale sont aggravés par le nombre important de demandes d'asile en Fédération de Russie, dont l'examen requiert la prise en considération tant des intérêts de la sécurité de l'État que des principes humanitaires et des règles du droit international.
Tout cela nécessite d'urgence de mettre en place un ensemble de mesures, y compris législatives, pour lutter contre l'immigration illégale, gérer les processus migratoires, perfectionner les règles juridiques relatives à l'entrée et au séjour des citoyens étrangers et des apatrides sur le territoire de la Fédération de Russie.
Nous, parlementaires russes et belges, constatons qu'un simple échange de statistiques et d'analyses montrent que des progrès importants doivent encore être faits pour résoudre le problème de l'immigration illégale dans nos pays. Cet effort est nécessaire de part et d'autre. Il faut notamment améliorer d'urgence la collecte et le traitement des statistiques relatives aux citoyens étrangers et aux apatrides résidant en Belgique et en Russie, tant en ce qui concerne leur qualité que le délai dans lequel elles sont disponibles. On devrait en effet pouvoir déterminer les flux migratoires et les groupes de population entrant dans nos pays à l'aide de ces statistiques.
Nous, parlementaires russes et belges, estimons qu'il convient de distinguer à cet égard :
les règles de Schengen
la législation russe et
la législation belge.
La Convention de Schengen date de 1990. Ses principes de base sont les suivants :
Il existe des règles uniformément applicables aux postes diplomatiques ou consulaires des États membres de l'Espace Schengen déterminant le poste auquel l'étranger doit s'adresser, lorsque tous les pays partenaires sont représentés dans son pays.
Si un pays partenaire ne dispose pas de poste dans le pays de l'étranger, il peut s'y faire représenter par un poste d'un autre pays partenaire.
En fonction du but de son voyage, l'étranger s'adressera donc au poste « Schengen » de sa première destination ou de sa destination principale pour recevoir son visa.
L'étranger qui demande un visa doit indiquer le but de son voyage.
Pour un visa de court séjour, il doit disposer de ressources suffisantes pour la durée prévue de son séjour.
Avoir les moyens de retourner dans son pays d'origine ou sur son lieu de séjour initial et pouvoir présenter en conséquence un billet d'avion aller-retour intransmissible.
Lorsque le dossier est en ordre, le poste peut délivrer un visa d'office.
En cas de doute, l'Office des étrangers est consulté.
Pour certains pays, la Convention de Schengen impose un contrôle par le « Système Vision » et l'accord de certains partenaires avant de délivrer un visa.
Après que l'étranger a reçu un visa, il doit faire la preuve de ses ressources lors de son entrée sur le territoire.
La décision de l'Office des étrangers dépend des informations qu'il reçoit du poste consulaire. L'Office des étrangers peut refuser de délivrer un visa.
Nous, parlementaires russes, constatons que l'accès et le séjour des citoyens étrangers sur le territoire de la Fédération de Russie sont régis par la législation russe en ce qui concerne les aspects suivants :
Entrée des citoyens étrangers sur le territoire de la Fédération de Russie
Régularisation de l'accès au territoire
Éventuelles restrictions de l'accès des citoyens étrangers au territoire de la Russie
Procédure du voyage en transit
Les dispositions permettant aux citoyens des États membres de la CEI de voyager sans visa (à l'exception de la Géorgie et de la Turkménie).
En ce qui concerne le séjour, il existe une procédure d'enregistrement et de recensement des citoyens étrangers
Procédure générale d'enregistrement des citoyens étrangers
Enregistrement spécial des citoyens étrangers séjournant dans les institutions d'accueil et les hôtels par le ministère russe des Affaires étrangères
Procédure d'enregistrement des citoyens étrangers dans les institutions du ministère de l'Intérieur
Prolongation de la durée du séjour des citoyens étrangers
Procédure d'obtention du permis de séjour permanent en Russie
Départ des citoyens étrangers hors de la Fédération de Russie
Procédure de départ des citoyens étrangers hors de la Fédération de Russie
Éventuelles restrictions à la sortie de Russie
Octroi de l'asile sur le territoire de la Fédération de Russie (réglementé par la loi fédérale « des réfugiés »).
procédure d'accueil, de comptabilisation et de reconnaissance du statut de réfugié
droits et obligations des personnes reconnues comme réfugiés et ayant reçu l'asile politique ou temporaire
enregistrement des personnes ayant reçu asile et expulsion des personnes auxquelles l'asile est refusé
Responsabilité des citoyens étrangers
Limitation de la durée du séjour
Éloignement du territoire russe
Interdiction d'accéder au territoire russe
responsabilité administrative et pénale en cas d'infraction à la législation de la Fédération de Russie.
Cette matière est réglée par la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers.
Nous, parlementaires russes et belges, convenons qu'à l'instar de ce qui existe déjà en Fédération de Russie, lorsqu'une autorisation de séjour est accordée, en cas d'octroi du permis de séjour, l'étranger ou l'apatride doit avoir le droit d'entreprendre une activité économique ou professionnelle, pour une durée qui ne doit pas excéder celle de l'autorisation de séjour. Cependant, nous estimons qu'il serait prématuré de fixer dès à présent des règles générales et universelles. La situation des marchés du travail russe et belge est en effet suffisamment différente pour justifier que la réglementation soit différente de part et d'autre.
L'assouplissement de la procédure d'octroi des visas doit s'accompagner d'un renforcement commun du contrôle des activités criminelles supposées dans le pays d'arrivée : proxénétisme, prostitution enfantine, trafic de drogue, trafic d'armes de poing ou d'armes de guerre.
Nous proposons d'accorder une attention particulière à la responsabilité des entreprises de transport (les transporteurs) dans le transport de passagers non dotés de visas et de documents de voyages en bonne et due forme. Cette même responsabilisation doit s'étendre aux entreprises prestant des services touristiques, de telle sorte que le tourisme cesse d'être une des manières pour les immigrants illégaux de pénétrer sur le territoire des parties.
Nous, parlementaires russes, faisons remarquer qu'actuellement en Russie, l'activité des organes de l'appareil de l'État est orientée sur un renforcement du contrôle des entrées et des séjours des étrangers et des apatrides sur le territoire de la Fédération de Russie, en ce compris du régime des visas, ainsi que du travail des représentations consulaires de la Fédération de Russie.
Nous, parlementaires russes et belges, estimons que les filières organisées qui amènent moyennant paiement et de manière illégale des citoyens russes ou des personnes transitant par la Russie, doivent être combattues en commun. Les chefs d'État et les ministres des deux pays ont déjà discuté de la problématique des flux migratoires illégaux.
Nous appelons au développement des mécanismesde contrôle communs mis au point lors de ces discussions.
En particulier, l'échange horizontal d'informations entre les services compétents des deux pays, est d'une importance cruciale.
Un effort particulier doit être fait dans le cadre de la lutte contre l'exploitation sexuelle qui est une des principales raisons du trafic d'êtres humains et, dès lors de l'immigration illégale. Une lutte renforcée contre la criminalité organisée s'impose donc.
Nous, parlementaires russes et belges, estimons que l'accueil doit être humain et que tout comportement raciste doit être exclu; il est indispensable de veiller à ce que la liberté de l'immigré ne soit pas entravée, à moins qu'il ne constitue un danger pour l'ordre public. L'accueil en Belgique a lieu dans des centres ouverts, ou alors les demandeurs d'asile sont confiés au CPAS d'une commune en fonction du nombre d'habitants de celle-ci. Les demandeurs d'asile reçoivent une aide matérielle jusqu'au terme de la procédure, qu'ils reçoivent ou non ensuite une autorisation de séjour.
Nous constatons qu'une hausse sensible du nombre d'immigrants illégaux déclarant avoir la citoyenneté russe, a été enregistré en Belgique en 2000 et pendant le premier trimestre de 2001. La plupart d'eux ont demandé l'asile politique en prétendant être des réfugiés de la République de Tchétchénie. La grande majorité de ces personnes sont arrivées en Belgique via d'autres États européens de la zone Schengen, dépourvues de documents. L'examen des demandes d'asile a révélé que les prétendus « immigrés illégaux russes » peuvent être répartis en trois catégories : les citoyens de la Fédération de Russie, les citoyens des États membres de la Communauté des États indépendants, les ex-citoyens de l'Union soviétique en provenance des États de la CEI et des pays baltes.
Le problème des immigrés clandestins a été discuté au niveau des chefs d'État et de Gouvernement, ainsi que des ministres de l'Intérieur et d'autres représentants des deux pays.
En mai 2001 un groupe de travail formé de représentants des ministères de l'Intérieur et d'autres départements concernés des deux pays a été mis en place en vue de régler ce problème.
Ces efforts bilatéraux ont abouti à l'élaboration d'un mécanisme de contrôle des immigrés illégaux permettant de constater leur citoyenneté russe, et à l'établissement de procédures en vue de leur rapatriement.
Nous, parlementaires belges, considérons le droit d'asile comme un droit fondamental de la personne. La notion de réfugié doit avoir la même signification dans tous les pays européens, membres de l'Union européenne, candidats à l'adhésion, et en Russie. Il faut tendre vers une application uniforme et maximale de la Convention de Genève. Il convient de mettre en place un régime d'asile européen commun, fondé sur l'application intégrale et globale de la Convention de Genève pour assurer que nul ne sera renvoyé là où il risque d'être à nouveau persécuté.
Nous, parlementaires russes, considérons, conformément à la Déclaration universelle des droits de l'homme, que le droit fondamental de toute personne est celui de « chercher un asile et bénéficier de cet asile ». Néanmoins, le droit de demander l'asile n'engage pas les États à accorder cet asile. Le droit international traite le problème d'asile comme relevant de la compétence de l'État souverain, c'est pourquoi même ceux qui remplissent, sans aucun doute, la notion de « réfugié » dans le cadre de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 concernant le statut des réfugiés, ne doivent pas forcément compter sur le droit d'asile dans un pays concret. Il faut noter que la Fédération de Russie, s'étant jointe à la Convention et au Protocole, s'est engagée à accueillir les personnes à la recherche d'asile, à examiner leurs demandes d'asile et à assurer les droits des personnes reconnues comme réfugiés dont le principal est celui de ne pas être renvoyé dans un État où on a fait l'objet ou risque d'être la victime de persécutions.
En Belgique nous, parlementaires belges, souhaitons que l'administration de l'Office des étrangers soit mieux formée et mieux équipée. Nous souhaitons que les femmes isolées qui invoquent le statut de réfugié puissent bénéficier d'un traitement particulier, qui respecte la spécificité de ce type de demande.
Nous, parlementaires belges, insistons près de nos gouvernements à mettre au point un statut des mineurs non accompagnés, comportant une tutelle spéciale et leur assurant une aide psychologique, sociale, médicale et éducative.
Nous souhaitons également l'établissement d'un statut de protection temporaire individuelle, complémentaire au statut de réfugié, fondé sur l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme et les libertés fondamentales.
Nous, parlementaires russes, considérons que la Fédération de Russie possède une législation sur les réfugiés dans laquelle les critères du statut de réfugié correspondent pleinement à la définition de la notion de « réfugié » de la Convention de 1951 sur le statut de réfugiés. La loi fédérale « sur les réfugiés » fait abstraction du critère du sexe, mais, lors de la procédure d'asile on tient compte de la spécificité des demandeurs et on applique une approche différenciée en fonction de leur sexe et de leur âge.
Selon nous, parlementaires russes, le statut de réfugié représente un type de protection temporaire individuelle, puisque la durée de sa validité est limitée par les circonstances ayant justifié l'octroi de ce statut. Par ailleurs, la loi fédérale « sur les réfugiés » prévoit encore un type d'asile individuel, ce que l'on appelle asile temporaire. Il est octroyé pour des motifs humanitaires à ceux qui, n'ayant pas de justificatifs en vue d'obtenir un statut de réfugié ou refusant volontairement son octroi, ne peuvent pas être renvoyés (ou ne peuvent pas repartir volontairement) sur le territoire du pays de leur origine civile pour des raisons objectives, dont une maladie grave du demandeur.
Nous, parlementaires russes et belges, nous nous fondons sur l'idée que le droit à la spécificité culturelle est un des droits et des libertés de l'homme universellement reconnus.
En même temps, il n'y a pas de droits sans devoirs : s'intégrer comporte, pour les étrangers, la nécessité et la responsabilité d'apprendre la langue de la communauté où ils résident, celle de respecter les valeurs démocratiques et les lois locales.
Nous invitons les gouvernements de nos États à élaborer des mesures à tous les niveaux en vue de l'insertion des immigrés et des réfugiés.
Ces mesures doivent comprendre notamment : un bilan médical de chaque réfugié et immigré; une information détaillée sur les droits et les obligations des citoyens étrangers et des apatrides sur le territoire de nos États; une assistance dans leur orientation vers les structures les plus adéquates en regard des besoins médicaux, sociaux et psychologiques, ainsi que des besoins en termes d'éducation et de niveau de formation, et d'aptitudes professionnelles.
Nous encourageons la création de structures spécifiques (classes d'accueil, ONG spécialisées, bureaux d'information et d'assistance) visant à aider ces personnes.
Nous, parlementaires belges, considérons également qu'il convient de faciliter et d'accélérer les procédures de regroupement familial, ainsi que les procédures de mariage à condition qu'elles ne soient pas détournées à des fins de mariages blancs.
Nous, parlementaires russes, ne voyons pas la nécessité d'accélérer les procédures de mariage et de regroupement familial mais nous convenons que la procédure du regroupement familial doit être facilitée sous réserve de concrétiser la notion de « membres de la famille ». La mise en évidence des mariages blancs pose des problèmes dans n'importe quel pays. Outre cela, aucune disposition législative et réglementaire de la Fédération de Russie ne prévoit de sanction pour les mariages blancs.
Nous, parlementaires belges, estimons qu'il convient de se préoccuper du problème de la « fuite des cerveaux » et d'engager une collaboration en vue d'élaborer des projets d'accord avec les pays d'origine des immigrants, pour éviter cet effet négatif.
Nous, parlementaires russes, considérons que pour la Russie, la « fuite des cerveaux » met en lumière la nécessité de résoudre le plus rapidement possible les problèmes qui se posent, en vue de permettre aux spécialistes de revenir dans leur pays d'origine.
En ce qui concerne les demandeurs d'asile déboutés, nous, parlementaires russes et belges, plaidons en faveur d'une politique commune de retour vers le pays d'origine. À cet égard, le retour volontaire est préférable, mais le retour forcé doit être maintenu.
L'accueil dans le pays d'origine de l'immigrant doit être digne et garantir les droits fondamentaux de la personne humaine : les accords entre les différents gouvernements doivent y veiller.
Des mesures particulières en faveur des groupes de demandeurs d'asile les plus vulnérables et, en particulier des mineurs non accompagnés et des femmes s'imposent. Il y a lieu de prévoir des programmes d'enseignement adaptés et des cours de langues pendant la phase initiale d'intégration. Ces programmes spécifiques peuvent, par exemple, servir à aider les mineurs d'âge et les femmes à surmonter les barrières culturelles. Il y a lieu de prévoir l'encadrement et les ressources financières nécessaires à cet effet.
Nous, parlementaires belges, considérons qu'il serait judicieux de débattre, au niveau européen, de l'opportunité de prendre en considération des éléments tels que la crainte fondée de subir une mutilation génitale, de subir un viol au titre d'un acte de guerre ou d'être victime d'un mariage forcé, comme des motifs de reconnaissance de la qualité de réfugié.
Nous, parlementaires russes, estimons que l'introduction des motifs complémentaires pour la reconnaissance de la qualité de réfugié d'une personne empiète sur les principes fondateurs de la Convention de 1951 sur le statut des réfugiés, et nous considérons qu'il n'est pas nécessaire d'élargir la notion de « réfugié » en le complétant par les indices proposés.
Les motifs énumérés ci-dessus pour octroyer le statut de réfugié sont qualifiés, en règle générale, dans le cadre de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 sur le statut des réfugiés, y compris par la Fédération de Russie, comme persécution pour l'appartenance à un groupe social déterminé. Outre cela, pareils cas de demande d'asile pour les motifs indiqués sont rares.
Nous, parlementaires belges, estimons que la politique en matière d'immigration et d'asile doit être traitée essentiellement au niveau européen. La Commission européenne a invité l'Union et ses États membres à appliquer une politique d'égalité des chances combattant la pauvreté et l'exploitation sociale.
Il convient de créer un observatoire des migrations entre la Russie et l'Union européenne (cet observatoire fera partie de l'observatoire général des migrations).
L'Union européenne doit prévoir un cadre démocratique et institutionnel dans lequel elle confierait à Europol une mission opérationnelle consistant à combattre activement le trafic des êtres humains, dans le cadre d'équipes communes avec les États membres et en concertation avec Eurojust. Un contrôle interne et externe d'Europol doit être organisé afin d'éviter à l'avenir les abus constatés. Eurojust constitue pour nous une priorité absolue.
Nous suggérons à nos gouvernements de définir également une procédure commune simple et rapide pour le traitement des demandes d'asile. Pour l'Union européenne, nous sommes favorables à une procédure de « guichet unique », assortie d'une possibilité d'appel. Cette procédure permettrait le traitement centralisé de toutes les demandes d'asile introduites sur le territoire de l'Union européenne au sein d'une Agence européenne de l'asile, disposant de points de contact dans tous les États membres situés aux frontières extérieures de l'Union. Les demandes d'asile ne pourront êtres introduites qu'à ces seuls endroits, dans le respect de règles uniformes. Le principe du Traité de Dublin, en vertu duquel une demande d'asile doit être traitée par l'État membre sur le territoire duquel le demandeur est entré dans l'Union européenne, requiert l'entrée en vigueur rapide du traité Eurodac relatif à la comparaison des empreintes digitales.
Nous, parlementaires russes, en ce qui concerne les aspects européens, nous nous en tenons à la position suivante :
En ce qui concerne la création d'un observatoire des migrations entre la Russie et l'Union européenne, le statut de cet organe n'est pas encore clair, les buts de sa mise en place, ses fonctions, ses compétences etc. ne sont pas déterminés. Sur la base de cette perspective, on peut supposer que seule la Fédération de Russie fera l'objet de l'observation. Il est peu probable qu'un organe de contrôle pareil sur le territoire de la Fédération de Russie reflète et défende ses intérêts, c'est pourquoi le projet proposé est un sujet de discussion à l'avenir.
Pour ce qui est de l'activité spéciale d'Europol, le travail opérationnel est déjà mené actuellement par les instances compétentes des États, qui ont acquis une certaine expérience dans la coopération et ont une base contractuelle solide. Dans ces conditions, il est de mise de poser la question concernant le développement de la coopération de ces structures avec Europol.
La nécessité d'harmoniser la législation européenne en matières indiquées par la partie belge est réelle, bien que chaque État membre de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 sur le statut des réfugiés soit en mesure d'établir sa procédure de traitement des demandes d'asile en conformité avec sa législation, compte tenu de ses possibilités.
La proposition de créer au sein de l'Union européenne une procédure de « guichet unique » est prématurée et peut entraîner, étant donné le contrôle rigoureux de l'immigration dans les États membres de la zone Schengen et de la Convention de Dublin, des conséquences défavorables pour la Russie en raison de sa spécificité géopolitique.
Nous, parlementaires belges et russes, invitons les gouvernements à conclure des accords de réinstallation assortis d'un programme de développement, à élaborer de préférence avec l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Ces initiatives peuvent être soutenues par la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD), ainsi que par le Fonds de coopération au développement européen et bilatéraux.
Nous, parlementaires belges, estimons qu'une politique efficace en matière d'immigration et d'asile telle qu'elle a été définie dans ce rapport, implique un contrôle renforcé aux frontières extérieures de l'Union. Tous les États membres doivent contribuer de manière proportionnelle aux frais du contrôle renforcé aux frontières extérieures.
Nous, parlementaires belges et russes, voulons que la traite des êtres humains, le trafic des êtres humains et l'exploitation des immigrants soient combattus avec beaucoup plus de vigueur. À ce sujet, nous plaidons pour une méthode intégrée. Combattre vigoureusement la traite des êtres humains est une priorité dans la lutte contre la criminalité organisée. Pour pouvoir combattre plus efficacement cette forme de criminalité, il y a lieu de prévoir un renforcement radical des instruments disponibles.
Nous, parlementaires belges et russes, plaidons en faveur d'une politique active de lutte contre l'inégalité sociale et la pauvreté au niveau international, afin de combattre les causes structurelles de l'immigration et ce, notamment, en encourageant les programmes de développement au profit des pays les moins avancés et en assurant la promotion et le respect des droits et libertés fondamentaux.
Le problème de l'immigration illégale a un caractère universel. L'expérience des États européens, notamment, démontre que les meilleurs résultats en vue d'atténuer l'acuité de ce problème sont atteints s'il existe un organe dirigeant qui organise la lutte contre ce phénomène, une interaction concertée de tous les services policiers et spéciaux (de la police, des services de renseignements etc.), si les dirigeants des États prennent des décisions d'organisation et de gestion rigoureuses, si l'on crée des banques de données uniques pour cette catégorie de délits, prévoit le financement à cet effet et si on modifie la législation de façon opportune et adéquate.
Dans le contexte des nouveaux défis du XXIe siècle nous considérons la lutte contre l'immigration illégale et la gestion des processus migratoires sur les territoires du Royaume de Belgique et de la Fédération de Russie, aussi bien que sur le continent européen dans l'ensemble, comme un élément important pour combattre la menace du terrorisme international et la criminalité organisée transnationale, comme une contribution considérable à la défense des intérêts étatiques de la Belgique et de la Russie.
À cet égard, on ne peut séparer les nombreuses questions en suspens en matière de migration du contexte politique plus large et il faut entamer une analyse fouillée de leurs causes profondes. Sinon les décisions adoptées pourraient se révéler superficielles, non appropriées, voire même contre-productives.
Nous estimons que le présent rapport met en évidence les convergences et les divergences dans les positions des parlementaires belges et russes sur le problème en question et nous espérons qu'il contribuera à rapprocher les visions des législateurs russe et belge dans le domaine de l'immigration illégale.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 8 commissaires présents.
Les rapporteurs,
La présidente de la commission de l'Intérieur
et des Affaires administratives
du Sénat de Belgique,
Le président du Comité pour la sécurité
de la Douma de la Fédération de Russie,
Alexandre GOUROV.
Le texte russe est disponible uniquement sur support papier.