2-1116/3

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2001-2002

5 JUIN 2002


Projet de loi relatif au Conseil central des communautés philosophiques non confessionnelles de Belgique, aux délégués et aux établissements chargés de la gestion des intérêts matériels et financiers des communautés philosophiques non confessionnelles reconnues


Procédure d'évocation


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE LA JUSTICE PAR M. JEAN-FRANÇOIS ISTASSE


I. PROCÉDURE

Le présent projet de loi, qui relève de la procédure facultativement bicamérale, a été adopté par la Chambre des représentants le 25 avril 2002 par 88 voix et 27 abstentions. Il a été transmis au Sénat le 26 avril 2002 et a été évoqué le 2 mai 2002 par 15 sénateurs. Le délai d'examen expire le 20 juin 2002.

La commission de la Justice a discuté de ce projet de loi en présence du ministre de la Justice lors de sa réunion du 15 mai 2002.

II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DU MINISTRE DE LA JUSTICE

Lors de la révision constitutionnelle de 1993, l'article 117, actuellement article 181, avait été complété par un § 2 prévoyant que les traitements et pensions des délégués des organisations reconnues par la loi qui offrent une assistance morale selon une conception philosophique non confessionnelle sont à charge de l'État.

Cet article, établissant l'égalité de traitement entre les conceptions philosophiques non confessionnelles et les six cultes actuellement reconnus, n'a toujours pas été mis en oeuvre concrètement même si, d'un point de vue pratique, une subvention à charge du budget de la Justice a été allouée au mouvement laïque. Le présent projet entend combler cette lacune en mettant en place un cadre juridique complet de la reconnaissance de la laïcité, en application de l'article 181, § 2, de la Constitution.

Le précédent gouvernement, conscient du problème, avait déposé au Parlement, à la fin de la législature précédente, un projet de loi relatif au Conseil central des communautés philosophiques non confessionnelles de Belgique. Ce texte n'a toutefois plus pu être examiné avant la dissolution des Chambres par suite des élections de juin 1999.

Le texte du projet de loi précédent a servi de base au projet de loi actuel sous réserves d'une série d'adaptations qui y ont été apportées à la suite des discussions qui ont eu lieu avec les délégués de l'Unie Vrijzinnige Verenigingen et du Centre d'action laïque.

Pour le surplus, l'intervenant se réfère aux discussions qui ont eu lieu à la Chambre des représentants et au rapport établi par M. Giet (doc. Chambre, nº 50-1556/003).

III. DISCUSSION GÉNÉRALE

Mme De Schamphelaere soutient les objectifs du projet, à savoir la mise en oeuvre concrète de l'article 181, § 2, de la Constitution. L'intervenante constate cependant qu'il a fallu plus de deux ans et demi au gouvernement pour déposer un projet dont le ministre lui-même reconnaît qu'il est largement inspiré du texte du projet déposé en fin de législature par le gouvernement précédent. Pour l'intervenante, ce n'est certainement pas un exemple de gestion efficace.

Sur le fond, Mme De Schamphelaere estime que le texte à l'examen ne rencontre pas toute une série de remarques formulées par le Conseil d'État dans son avis du 8 octobre 2001.

Ainsi, le projet prévoit, outre la prise en charge des traitements et des pensions des délégués laïques, le maintien du régime des subventions allouées aux organisations laïques. Cette solution est-elle en conformité avec l'article 181, § 2 de la Constitution qui limite l'intervention de l'État à la prise en charge des pensions et des traitements du personnel ? Par ailleurs, les cultes reconnus ne bénéficient pas de telles subventions. Quelle raison objective permet-elle de justifier une telle différence de traitement ?

L'intervenante constate par ailleurs que le régime transitoire proposé en faveur des membres du personnel au service du prédécesseur du Conseil central laïque lors de l'entrée en vigueur de la loi est particulièrement généreux. Ces personnes cumulent en effet les avantages du secteur public et ceux du secteur privé. Ainsi, leur régime de pension est celui du secteur public alors que les délégués laïques n'ont pas le statut de fonctionnaire. Par contre, leurs échelles de traitement sont majorées de la prime de fin d'année et du double pécule de vacances calculé selon le régime plus favorable du secteur privé. Le projet crée de la sorte une différence de traitement injustifiée en faveur des délégués laïques par rapport aux ministres des cultes reconnus.

Lors des débats à la Chambre, le ministre a répondu que « les ministres des cultes, dont le traitement est effectivement inférieur à celui prévu par le projet de loi pour les délégués laïques, bénéficient de certains autres avantages. La loi leur donne par exemple droit à un logement à charge de la commune. Ces avantages ne concernent pas les délégués laïques et justifient (...) une compensation financière pour ceux-ci.

Il faut également remarquer qu'aucune compensation financière n'est prévue pour les délégués laïques qui seraient amenés à cumuler plusieurs fonctions, alors que les ministres des cultes affectés à plusieurs paroisses perçoivent un complément pouvant atteindre jusqu'à 150 % de leur traitement de base » (doc. Chambre, nº 50-1556-003, p. 10).

Afin de s'assurer de l'objectivité de la distinction de traitement opérée par le projet, l'oratrice demande que des informations soient fournies sur le nombre de ministres du culte qui se trouvent effectivement en situation de cumul, sur le pourcentage du complément effectivement versé ainsi que sur la manière dont ce système de cumul est appliqué au sein des différents cultes. Il faudrait également que le ministre puisse chiffrer la valeur moyenne de l'avantage patrimonial que représente la mise à disposition d'un logement pour les ministres des cultes.

Mme De Schamphelaere s'interroge également sur la logique qui prévaut quant à la répartition des compétences entre l'État et les régions. En effet, à la suite des accords du Lambermont, la compétence de l'organisation et de la tutelle du temporel des cultes a été transférée aux régions. Par contre, la laïcité reste une compétence fédérale. N'y a-t-il pas incohérence sur ce point ?

Enfin, le ministre a, par courrier du 25 février 2002, interrogé la Cour des comptes concernant la légalité de la subvention que le projet entend allouer aux organisations laïques. L'intervenante demande quelle a été la réponse de la Cour des comptes.

À propos de la position sociale très avantageuse que le projet prévoit en faveur des délégués laïques, le ministre répond qu'il a fallu tenir compte de la situation existante sur le terrain. Certains délégués qui offrent une assistance morale non confessionnelle sont déjà en service depuis plus de dix ans et le projet ne pouvait bafouer leurs droits acquis.

L'intervenant rappelle par ailleurs que la situation des ministres des cultes et des délégués laïques est, à la base, objectivement différente (logement, possibilité de cumul ...). Il est dès lors normal que le traitement qui leur est réservé ne soit pas identique.

En ce qui concerne la demande de données statistiques sur les cumuls effectués par les ministres des cultes, le ministre ne comprend pas la pertinence de cette information dans le cadre de l'examen d'un projet qui règle la reconnaissance des communautés philosophiques non confessionnelles.

Enfin, pour la réponse aux autres questions soulevées par la préopinante, l'intervenant renvoie à la note détaillée qui est publiée en annexe au rapport de la Chambre des représentants (doc. 50-1556/003, pp. 21 et suivants).

Mme Nyssens constate que le projet de loi organise la laïcité sur une base provinciale. Les provinces ont-elles été consultées car le projet prévoit que la province peut être appelée à intervenir financièrement lorsque les revenus de l'établissement d'assistance morale du Conseil central laïque sont insuffisants ? Par ailleurs, cette organisation provinciale permet-elle aux communes de continuer à subventionner la laïcité ?

Au niveau des principes, il faut assurer une égalité de traitement entre les cultes reconnus et les communautés philosopiques non confessionnelles reconnues. Comment cette égalité de traitement est-elle organisée en ce qui concerne les échelles de traitement mais aussi, de manière plus large, sur le plan de la position sociale. De même, à quel titre l'État assure-t-il le financement du secrétariat fédéral du Conseil central laïque ? Existe-t-il des équivalents pour les cultes reconnus ?

Le ministre répond que les subventions allouées à la laïcité par les communes sont des dépenses facultatives. Les communes ne devront plus supporter de telles dépenses car elles seront à charge des provinces. Les administrations provinciales, qui avaient été consultées lors de la préparation du projet par le gouvernement précédent, n'ont pas été, à nouveau, consultées lors de la préparation du projet à l'examen. Le texte du projet ne modifie en rien le rôle des provinces par rapport à ce qui était prévu dans le projet précédent, lequel n'avait suscité aucune remarque de la part des administrations provinciales.

En ce qui concerne l'égalité de traitement entre les ministres des cultes et les représentants de la laïcité, l'orateur rappelle que le statut des délégués laïques est sui generis. Tout comme, pour des raisons historiques, il existe des différences de statut entre les cultes reconnus, le statut des représentants laïques est spécifique car leur situation de base est différente de celles des ministres des cultes. Il ne faut cependant pas exagérer les différences. Qui plus est, le statut des délégués laïques vise un nombre assez réduit de personnes (354).

L'orateur signale ensuite que l'intervention de l'État dans les frais de fonctionnement du secrétariat fédéral du Conseil central laïque n'est pas une primeur. Une solution identique a été prévue pour le culte musulman. Ce financement est justifié car ces deux « courants » ne disposent pas d'un patrimoine dont les revenus permettent de couvrir les frais de fonctionnement de leur secrétariat fédéral.

Plusieurs orateurs ont fait état des différences dans le traitement des ministres des cultes. M. Dubié demande sur la base de quels critères ces différences sont arrêtées.

Le ministre répond que le traitement des ministres des cultes est fixé par le législateur. Cette matière est réglée par la loi du 2 août 1974 relative aux traitements des titulaires de certaines fonctions publiques et des ministres des cultes. Les différences de traitement sont liées à des raisons historiques et à la spécificité des fonctions selon les cultes. Pour les délégués laïques, afin d'assurer une parfaite transparence par rapport aux ministres des cultes, le Conseil d'État a insisté pour que leurs échelles de traitement soient insérées dans la loi de 1974.

Mme de T' Serclaes constate que l'organisation des communautés philosophiques non confessionnelles, tout comme les cultes d'ailleurs, relève de la sphère privée. L'intervenante ne comprend dès lors pas pourquoi le projet prévoit que les établissements d'assistance morale du Conseil central laïque sont des établissements de droit public. Par rapport à l'objectif poursuivi, qui relève de l'organisation libre d'une conviction privée, pourquoi faut-il quitter le champ de l'association privée et créer un établissement public ?

Mme Nyssens demande quels critères ont été suivis pour fixer les barèmes des délégués laïques : la nature de la mission, la durée du travail ... ?

Pour Mme De Schamphelaere, bien que l'article 181 de la Constitution traite dans deux paragraphes séparés la situation des ministres des cultes reconnus et celle des délégués laïques, il ne fait aucun doute qu'il faille assurer une égalité de traitement entre les cultes reconnus et les communautés philosophiques non confessionnelles. L'intervenante pense dès lors que la communication des données statistiques qu'elle a demandées, est importante pour apprécier, in concreto, la conformité du projet au principe constitutionnel de l'égalité de traitement.

M. Istasse se réjouit que le projet à l'examen coule enfin dans la loi l'organisation et la reconnaissance de la laïcité alors que les principes en ont été fixés dans la Constitution depuis 1993. Il rappelle que le projet a été adopté à la Chambre par 88 voix et 27 abstentions, ce qui prouve qu'il fait l'objet d'un très large consensus.

L'intervenant remarque que l'article 181 de la Constitution comprend deux paragraphes. Le premier traite des cultes reconnus alors que le second vise les communautés philosophiques non confessionnelles. Le constituant avait clairement à l'esprit que la laïcité organisée a sa spécificité par rapport aux cultes reconnus. Il n'est donc pas possible d'arriver à une identité de traitement parfaite entre la laïcité et les cultes reconnus. Il faut assurer, comme le fait le projet, un traitement qui ne soit pas discriminatoire entre les cultes et la laïcité.

En ce qui concerne l'intervention des communes en faveur des maisons de la laïcité, M. Istasse rappelle que ces subventions sont facultatives et qu'elles restent possibles même après l'adoption du projet à l'examen.

Pour M. Vandenberghe, le projet pose une question fondamentale concernant le rôle qu'il fait jouer à l'État dans l'organisation de la laïcité. L'article 181, § 2, de la Constitution, pose que les traitements et les pensions des délégués laïques sont pris en charge par l'État. Or, dans le projet, le gouvernement va beaucoup plus loin puisqu'il précise la manière dont la laïcité doit s'organiser. Le gouvernement n'a pas tenu compte des remarques du Conseil d'État sur ce point, lequel estime « qu'en vertu des principes constitutionnels de la liberté d'association et d'opinion, il n'appartient pas à l'État d'intervenir dans la nomination et dans l'installation des délégués qui ont pour mission d'offrir à la population une assistance morale selon une conception philosophique non confessionnelle » (doc. Chambre, nº 50-1556-001, p. 63). Selon l'intervenant, le rôle du législateur doit se limiter à la seule reconnaissance des communautés philosophiques non confessionnelles.

Mme Vanlerberghe insiste pour que le régime proposé soit transparent en ce qui concerne l'identification de l'autorité qui allouera les subventions : est-ce la commune, la province ou l'État fédéral ?

En réponse à un préopinant, M. Istasse considère que le système d'organisation de la laïcité qui est proposé ne met pas en péril la liberté d'association. Les établissements provinciaux d'assistance morale chargés de la gestion des intérêts matériels et financiers de la communauté philosophique non confessionnelle seront administrés par des personnes élues par l'assemblée générale de l'établissement de la province concernée parmi les candidats qui ont posé leur candidature auprès du Conseil central laïque. Pour être membre de l'assemblée générale de l'établissement provincial d'assistance morale, il faut être représentant d'une association laïque qui fait partie du Centre d'action laïque ou de l'Unie Vrijzinnige Verenigingen. Ce système d'élection préserve le principe constitutionnel de la protection de la vie privée et familiale. Par ailleurs, chaque association restant libre de désigner ou non des représentants à l'assemblée générale, il n'y a pas d'immixtion du législateur dans la façon dont ces associations s'organisent sur la base du cadre qui est retenu dans le projet de loi.

Pour M. Vandenberghe, il n'est pas indiqué que le législateur fixe le cadre légal au sein duquel la laïcité doit s'organiser. C'est une atteinte à la liberté d'association.

M. Istasse fait remarquer que les cultes reconnus ont un droit interne qui organise le culte. Cela n'est pas le cas pour les associations laïques. Il est dès lors logique que l'État fédéral, en concertation avec les associations laïques organisées, propose un cadre pour les communautés philosophiques non confessionnelles.

M. Dubié rappelle que les milieux laïques concernés sont favorables au projet de loi. Pourquoi dès lors faudrait-il aller à l'encontre des attentes du terrain ?

Pour le ministre, le texte de l'article 181, § 2, est clair : ce sont les traitements des délégués laïques des organisations reconnues par la loi qui sont à la charge de l'État. Le constituant a voulu limiter la prise en charge des traitements des délégués laïques aux institutions qui étaient suffisamment organisées. Il faut éviter que des fonds soient alloués à des institutions n'offrant pas une structuration suffisante. L'intervenant ne partage dès lors pas l'avis du Conseil d'État sur ce point. L'organisation de la laïcité telle qu'elle est proposée dans le projet répond parfaitement à la ratio legis de l'article 181, § 2, de la Constitution.

En ce qui concerne les informations demandées sur la manière dont les différents cultes sont organisés et les échelles de traitement qui sont appliquées, l'intervenant reconnaît qu'il existe des différences. Celles-ci sont le fruit des évolutions historiques et ont été arrêtées par le législateur.

À la base, la situation de la laïcité ­ qui n'est pas un culte ­ n'est pas la même que celle des cultes reconnus. Les différences de traitements des délégués laïques par rapport aux ministres des cultes sont objectives et justifiables. Elles ne constituent en aucune manière une discrimination par rapport au statut réservé aux ministres des cultes.

Enfin, en réponse à la question relative à la légalité des subventions que le projet prévoit d'allouer au secrétariat fédéral du Conseil central laïque, la Cour des comptes a, par courrier du 13 mars 2002 répondu :

« Par la lettre du 25 février 2002, vous avez demandé l'avis de la Cour des comptes concernant le subventionnement d'un secrétariat fédéral pour l'assistance morale non confessionnelle du Conseil central laïque, qui sera créé conformément au projet de loi susvisé, actuellement examiné par la Chambre des représentants.

La Cour des comptes constate que la section de législation du Conseil d'État a déjà émis à deux reprises un avis au sujet dudit projet de loi et que cette section a avancé un certain nombre d'objections d'ordre constitutionnel. La Cour des comptes observe en outre qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur la conformité des lois à la Constitution.

Pour ce qui est, par contre, de ses propres compétences sur le plan budgéraire et comptable, découlant de la législation organique ­ les lois coordonnées sur la comptabilité de l'État ­, la Cour des comptes indique que tout tout sudside doit avoir un fondement légal (article 12, alinéa 3 des lois susvisées) et que le contrôle de son utilisation doit s'effectuer conformément aux articles 55 et 58 de ces mêmes lois. »

M. Vandenberghe estime qu'aucune réponse n'a été fournie à la remarque selon laquelle l'État n'a pas à s'immiscer dans l'organisation de la laïcité. L'intervenant renvoie à l'avis du Conseil d'État :

« Pas davantage que les ministres des cultes, les délégués ne pourraient être qualifiés de fonctionnaire public.

La circonstance que les traitements et pensions de ces délégués sont, en vertu de l'article 181, § 2, de la Constitution à charge de l'État, n'autorise pas ce dernier à s'immiscer dans l'organisation interne du mouvement philosophique non confessionnel.

Il doit ainsi revenir au Conseil central laïque le pouvoir de déterminer la nature juridique de la relation qu'il aura avec ses délégués, dans le cadre de l'assistance morale et, dès lors, de fixer le type de rémunération et de pension dont ils bénéficieront, l'État ayant pour seul devoir la prise en charge de celles-ci.

En effet, l'article 181 de la Constitution ne peut être interprété comme faisant de l'État, l'employeur des ministres des cultes reconnus et des délégués du Conseil central laïque.

(...)

L'État doit donc limiter son intervention à la fixation des seuils de rémunération en tenant compte des responsabilités respectives assumées par les délégués, celles-ci ayant été, au préalable, définies par le Conseil central laïque.

La plupart des nouvelles dispositions du projet ne rencontrent pas cette observation. »

Mme Nyssens demande quelles sont les différences entre le projet déposé sous la législature précédente et le texte à l'examen.

Le ministre répond que le projet actuel a été adapté pour mieux tenir compte des attentes du terrain. Le texte concrétise la situation existante. En ce qui concerne le choix de la forme juridique de l'établissement de droit public, l'intervenant estime ce choix logique car, pour les cultes reconnus, c'est également cette forme qui a été retenue. Il cite par exemple le cas des fabriques d'église.

Mme De Schamphelaere constate que la Cour des comptes, à juste titre, ne se prononce pas sur la constitutionnalité du cumul du régime des subventions allouées aux institutions laïques et de la prise en charge des traitements et pensions des délégués laïques. Or, lors des débats à la Chambre, le ministre avait, en réponse à l'observation formulée sur ce point par M. Van Parys, proposé de soumettre la question à la Cour des comptes. L'intervenante constate dès lors qu'aucune réponse satisfaisante n'a été fournie à ce sujet et que le risque d'annulation de certaines dispositions du projet est réel.

Pour M. Mahoux, au niveau de l'organisation de la laïcité, il n'y a pas de magister, ce qui constitue une différence fondamentale par rapport aux cultes. Le magister n'existant pas, l'autorité laïque s'en remet à un type d'organisation habituel dans le fonctionnement d'un État démocratique et pluraliste. C'est donc intentionnellement que la laïcité s'en remet à l'État car c'est une garantie du caractère non confessionnel de cette laïcité.

M. Ramoudt soutient ce projet qui permet de concrétiser l'article 181, § 2, de la Constitution et qui ne lèse aucune communauté confessionnelle.

IV. DISCUSSION DES ARTICLES

Article 1er

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à apporter une correction linguistique au texte néerlandais de l'article 1er.

Article 2

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 2 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à améliorer la concordance entre le texte néerlandais et le texte français de l'article 2 en remplaçant les mots « niet-confessionele morele diensten » par les mots « morele dienstverlening in niet-confessionele zin ».

Le ministre estime que les mots « niet-confessionele morele diensten » correspondent à l'usage courant au sein des communautés philosophiques non confessionnelles.

Article 3

En ce qui concerne l'amendement nº 3 de M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere (doc. Sénat, nº 2-1116/2), les auteurs renvoient à la discussion de l'article 2.

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 4 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à remplacer, dans le texte néerlandais de l'intitulé du chapitre II du projet, le mot « centra » par le mot « diensten ». Les auteurs estiment que leur amendement améliore la cohérence terminologique.

Le ministre répond que le mot « centra » correspond à l'usage courant au sein des communautés philosophiques non confessionnelles.

Article 4

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 5 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) qui vise à apporter, au deuxième alinéa de l'article 4, la même modification terminologique que celle proposée à l'amendement nº 4.

Article 7

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 6 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) qui vise à améliorer la lisibilité de la disposition en renvoyant au 1º proposé, à l'article 9.

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 7 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à remplacer le 4º proposé. Les auteurs estiment que le texte proposé conduit à un accaparement du principe du libre examen en faveur de la laïcité. D'autres conceptions philosophiques ou religieuses peuvent également adhérer au principe du libre examen.

M. Dubié rappelle que le principe du libre examen est de refuser toute vérité imposée par un dogme. C'est la raison qui doit, en toute chose, vérifier la véracité des choses. Par conséquent, il y a, de fait, une adéquation entre le libre examen et la laïcité.

Pour Mme Leduc, le libre examen est une méthode qui est très largement répandue dans le monde de la laïcité mais elle n'en a pas le monopole. Cette méthode peut être appliquée par tout le monde.

Mme De Schamphelaere estime que l'article 7, 4º, montre à quel point le projet règle le contenu de la laïcité. C'est en contradiction avec le principe même du libre examen que de confier cette tâche au législateur.

M. Mahoux rappelle que le projet à l'examen a pour but d'organiser la reconnaissance de la laïcité et la formalisation de celle-ci pour mettre fin à une forme d'injustice en défaveur des communautés philosophiques non confessionnelles. La laïcité se reconnaît dans le texte du projet et il est important de le finaliser dans les meilleurs délais.

Pour Mme Nyssens, le texte du projet ne part pas d'une discussion philosophique sur le rapport entre l'État, les religions et la reconnaissance de la laïcité. Il s'inscrit dans un cadre historique belge tout à fait particulier. Dans une société postmoderne, le rapport entre l'État, l'église et la société civile est en pleine évolution et l'intervenante est convaincue que les cultes et la philosophie appartiendront à l'avenir à la sphère culturelle plutôt qu'à la sphère politique.

Le ministre plaide pour le maintien du texte en projet. L'intervenant remarque que l'article proposé est identique à celui du projet déposé lors de la législature précédente. L'adhésion au principe du libre examen telle qu'elle est proposée au 4º est une expression consacrée.

Article 8

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 8 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à ajouter à la liste des incompatibilités applicables aux membres du Conseil d'administration, la fonction de secrétaire d'État à la Région de Bruxelles-Capitale. L'amendement a pour but de combler une lacune car le libellé actuel ne prévoit aucune incompatibilité dans le chef desdits secrétaires d'État, ce qui est illogique.

Le ministre remarque que l'article proposé est identique à celui du projet déposé lors de la législature précédente.

Article 9

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 9 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) qui vise à renvoyer à la procédure de désignation des administrateurs telle qu'elle est prévue à l'article 6. Ce renvoi améliore la lisibilité du texte.

Le ministre estime que cette précision est superflue.

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 10 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à assurer un minimum d'ouverture à la laïcité non organisée en ce qui concerne la composition du conseil d'administration du Conseil central laïque.

M. Mahoux demande comment l'on déterminera qui est le représentant de la laïcité non organisée à peine pour celle-ci de s'organiser.

Article 11

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 11 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) qui a pour but d'éviter une situation de blocage dans le fonctionnement du conseil d'administration du Conseil central laïque. En application du texte en projet, le président du conseil d'administration doit s'adresser à lui-même sa lettre de démission, ce qui peut poser problèmes. Les auteurs proposent dès lors que le président du conseil d'administration adresse sa démission au vice-président.

Article 12

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 12 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à remplacer la dernière phrase de l'article proposé par une formulation juridiquement plus usuelle.

M. Mahoux pense que les améliorations proposées sont de nature technique et ne nécessitent pas l'adoption d'un amendement.

M. Vandenberghe rappelle qu'une correction technique requiert l'accord unanime des membres. À défaut, il n'est pas possible de modifier les textes sans l'adoption d'amendements. Pour le surplus, l'intervenant maintient son amendement nº 12.

Article 13

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 13 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à intervertir les alinéas 2 et 3 de l'article 13 proposé afin d'en améliorer la lisibilité.

Article 14

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 14 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à améliorer la lisibilité du deuxième alinéa proposé.

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 15 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à apporter une correction d'ordre linguistique en remplaçant, dans le texte néerlandais du troisième alinéa proposé, le mot « samengesteld » par le mot « vastgesteld ».

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 16 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à remplacer le quatrième alinéa proposé afin d'assurer une meilleure concordance entre le texte français et le texte néerlandais.

Article 15

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 17 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à supprimer le dernier alinéa proposé. La disposition proposée doit être insérée dans le règlement d'ordre intérieur du conseil d'administration mais pas dans la loi reconnaissant la laïcité.

Article 17

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 18 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à apporter une correction d'ordre légistique à la fin du deuxième alinéa proposé.

Article 18

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 19 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à supprimer le dernier alinéa proposé. Les auteurs estiment que cet alinéa est superflu.

Article 22

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 20 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à compléter la disposition proposée. Les auteurs considèrent que lorsque le Conseil Central Laïque saisit le ministre de la Justice à la suite d'une décision prise par un conseil d'administration d'un établissement provincial, il doit en informer le conseil d'administration de l'établissement provincial concerné.

Article 25

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 21 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à clarifier l'article 25, 6º, proposé.

Article 26

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 22 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à assurer une plus grande cohérence dans le texte néerlandais entre l'article 25, 9º, proposé et l'article 26, 2º, proposé.

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent ensuite un amendement nº 23 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à apporter une correction linguistique à l'article 26, 4º, proposé.

Article 33

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 24 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) de nature linguistique.

Article 35

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 25 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à supprimer le deuxième alinéa proposé. Les auteurs estiment qu'il n'y a pas de raison objective justifiant la mise en place d'un système de douzièmes provisoires, d'autant plus qu'un tel régime n'existe pas en faveur des cultes reconnus.

Article 37

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 26 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à remplacer la disposition proposée afin d'en améliorer la lisibilité.

Article 40

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 27 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à préciser la portée de la disposition. Selon les auteurs, ce sont les comptes annuels qui doivent être soumis à l'approbation du ministre de la Justice.

Article 41

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 28 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à préciser la portée de la disposition. Les auteurs renvoient à l'amendement nº 27.

Article 42

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 29 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à corriger une erreur au dernier alinéa de l'article 42 proposé. Pour les auteurs, il faut renvoyer à l'article 43, alinéa 2, et non pas à l'article 44, alinéa 2 comme proposé.

Pour M. Mahoux, le renvoi à l'article 44, alinéa 2, est une erreur matérielle qui ne nécessite pas l'adoption d'un amendement.

Article 46

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 30 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à adapter, dans le texte néerlandais de l'article 46, alinéa 3, proposé, le montant pour l'exprimer en euro.

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 31 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à améliorer la lisibilité du dernier alinéa proposé.

Article 47

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 32 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à préciser que le secrétariat fédéral du Conseil central laïque jouit de la personnalité juridique, comme l'avait d'ailleurs suggéré le Conseil d'État.

Article 48

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 33 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) qui a pour but de limiter l'intervention de l'État fédéral au paiement des traitements et pensions des délégués laïques. Les auteurs proposent dès lors de spécifier que les frais de fonctionnement du secrétariat fédéral sont supportés par les établissements d'assistance morale. Cet amendement prend en compte les observations formulées par le Conseil d'État sur ce point auxquelles il a largement été fait référence lors de la discussion générale.

Article 49

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 34 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à supprimer le 3º de l'article 49 proposé. Les auteurs considèrent que l'intervention de l'État doit se limiter au remboursement des traitements des délégués laïques, à l'exclusion d'autres types d'indemnités telles que prévues au 3º.

Article 51

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 35 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à supprimer l'article 51 proposé. Les auteurs renvoient à la justification de l'amendement nº 34.

Article 54

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 36 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à ajouter, au § 1er, 2º, proposé, le mot « législatives » entre le mot « assemblées » et le mot « européennes ».

Article 64

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 37 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à apporter une amélioration de type légistique à l'article 64 proposé en le subdivisant en plusieurs articles distincts en fonction des modifications à apporter à différentes dispositions de la loi du 2 août 1974 relative aux traitements des titulaires de certaines fonctions publiques et des ministres des cultes.

Article 70

M. Vandenberghe et Mme De Schamphelaere déposent un amendement nº 38 (doc. Sénat, nº 2-1116/2) visant à supprimer les §§ 2 à 6 de l'article 70 proposé. Les auteurs estiment qu'il n'est pas souhaitable de prévoir des échelles de traitement spécifiques en faveur des conseillers laïques qui cumulent les avantages du statut public et ceux du secteur privé.

V. Votes

Les amendements nºs 1 à 38 sont rejetés par 7 voix contre 3 et 1 abstention.

L'ensemble du projet est adopté par 7 voix et 4 abstentions.

Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 11 membres présents.

Le rapporteur, Le président,
Jean-François ISTASSE. Josy DUBIÉ.

Le texte adopté par la commission
est identique au texte
du projet transmis par
la Chambre des représentants
(voir le doc. Chambre nº 50-1556/5)