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M. Philippe Monfils (PRL-FDF-MCC). - Tout en partageant l'objectif de cette campagne, je m'étonne de ce que, sur chaque affiche, s'étale le logo d'une compagnie d'assurances. L'affiche est d'ailleurs si mal - ou si bien ? - conçue que l'automobiliste voit plus le logo que le texte ou le dessin de l'affiche.
Des questions se posent à l'égard de cette singulière collusion entre l'IBSR, qui travaille naturellement pour le service public, et une compagnie d'assurances privée.
Comme l'IBSR est soutenu par le ministère des Communications et que cette campagne est approuvée par la vice-première ministre et ministre de la Mobilité et des Transports, Mme Durant, y a-t-il eu appel d'offres auprès des autres compagnies d'assurances ?
Combien la compagnie a-t-elle payé en contrepartie de la publicité réalisée sur chaque affiche de la campagne ? Je crois savoir qu'il y aurait 37.000 affichettes sans compter les affiches de 20m² des routes et autoroutes et les spots télévisés et radiodiffusés du 27 septembre au 14 octobre sur RTL-TVI, la Une, la Deux, VTM, TV1, VT4 et Kanaal 2 ?
Enfin, comme la publicité est interdite le long des autoroutes, en vertu de l'article 10, alinéa 2 de la loi du 12 juillet 1956 -, sauf dérogation au profit d'un service public, comment la ministre a-t-elle admis qu'une compagnie d'assurances puisse, par le subterfuge de la sécurité routière, être présente sur toutes les autoroutes du Royaume ?
Mme Isabelle Durant, vice-première ministre et ministre de la Mobilité et des Transports. - C'est aussi brièvement que je vous apporterai une réponse précise. Y a-t-il eu appels d'offres ? Oui, il y a eu effectivement appels d'offres pour chaque campagne. Les compagnies d'assurances qui ont contribué aux précédentes campagnes sont diverses : les AP, P&V pour la campagne sur les sièges d'enfants, la Royale belge pour la campagne sur la courtoisie, la KBC pour la campagne sur l'angle mort.
Par ailleurs, il existe un accord de collaboration entre l'IBSR et le ministre Daerden en Région wallonne concernant l'utilisation des panneaux d'affichage.
L'article 6 auquel vous avez fait référence dispose que compte tenu de la mission de service public confiée à l'IBSR, moyennant l'assentiment d'un comité de concertation - ce comité réunit des représentants des ministres compétents en matière d'équipement de la Région wallonne, de la Région flamande et de l'IBSR - des accords peuvent être conclus par dérogation permise à l'article 10 de la loi du 12 juillet 1956. Les logos des sociétés privées pourront être reproduits sur les affiches, à condition de ne pas dépasser un huitième de la hauteur du panneau et de ne pas comporter, outre le logo, de messages publicitaires.
Les revenus générés par l'apposition de ces logos serviront en outre exclusivement à augmenter la médiatisation des campagnes visées.
Cette collaboration est donc prévue et le comité de concertation qui se réunit régulièrement, au moins une fois par an, émet un avis concernant les modalités de répartition des panneaux d'affichage, le calendrier et la coordination des campagnes, ainsi que sur le thème des campagnes elles-mêmes, fixé en accord avec l'IBSR.
Les compagnies d'assurances sont en effet les principaux sponsors de l'IBSR et sont très sensibles à tout ce qui touche à la sécurité routière. Leur collaboration s'étend d'ailleurs bien au-delà des campagnes d'affichage. Ce partenariat permet à l'IBSR de lancer de grandes campagnes multimédias, visant à informer et sensibiliser tous les usagers de la route, ce que, je pense, personne ici ne conteste. En effet, ce que l'on peut espérer en ce qui concerne le changement de comportement ne peut se produire que par des campagnes répétées permettant d'appuyer le message.
Je ne dispose pas ici du montant précis en jeu. Je peux vous le communiquer par écrit. Je souligne qu'il y a chaque fois appels d'offres, que les compagnies sont diversifiées et qu'en fonction des dossiers et des thèmes, le comité de concertation décide de déroger à la règle afin de permettre le financement de campagnes importantes en termes de sécurité routière.
M. Philippe Monfils (PRL-FDF-MCC). - Il s'agissait d'une question d'actualité et il est évident que la ministre ne devait pas communiquer de chiffres ici.
En ce qui concerne la démarche politique, je trouve parfaitement inacceptable ce type d'attitude. C'est de la pure hypocrisie de dire que l'on peut autoriser l'intervention d'une firme privée pour autant que son logo n'excède pas un huitième de l'affiche.
Je ne sais pas si madame Durant se promène sur les autoroutes. Moi, je parcours quotidiennement l'autoroute Liège - Bruxelles et je constate qu'il s'agit d'affiches où on ne voit que le logo AP, le reste étant un embrouillamini épouvantable de quelques voitures qui se croisent. Le slogan est vague et pratiquement illisible. Il est donc manifeste qu'il s'agit incontestablement d'une démarche commerciale, ce qui est scandaleux dans la mesure où cette pratique est interdite, sauf dérogation, pour le service public. Personne n'a pensé en 1956 que cette dérogation allait permettre de faire de la publicité pour des compagnies d'assurances. C'est totalement inacceptable ! Je constate donc que l'écologie s'arrête aux bornes de l'intérêt commercial !
Mme Isabelle Durant, vice-première ministre et ministre de la Mobilité et des Transports. - Je pense, au contraire, que ce partenariat avec les compagnies d'assurances, avec lesquelles l'IBSR travaille régulièrement, permet d'accroître le soutien de campagnes massives et importantes que d'aucuns, ici, souhaitent d'ailleurs voir amplifiées. J'estime que les règles sont respectées. La dérogation est permise et les compagnies d'assurances travaillent en étroite relation avec l'IBSR, non seulement sur les campagnes mais aussi dans d'autres domaines, comme la modulation des primes d'assurances en fonction de certaines attitudes, notamment pour les jeunes. Je pense que ce travail doit être réalisé conjointement.
Cela n'a rien de commercial mais permet de donner une valeur ajoutée en termes financiers et de diffuser une masse plus importante de messages en matière de sécurité routière. Je ne puis, en aucun cas, partager votre avis.
M. Philippe Monfils (PRL-FDF-MCC). - Ce sont des campagnes publicitaires maquillées, diffusées sous le couvert d'un service public. Pour le reste, nous aurons l'occasion, madame la ministre, de vous interpeller sur votre politique de mobilité, en ce compris l'attitude à l'égard des compagnies d'assurances.