(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais
D'après les rumeurs, les derniers événements liés aux poursuites religieuses au Viêtnam sont très inquiétants et de nature à interpeller tous les démocrates. Les personnes dont la religion est différente du catholicisme sont arrêtées et emprisonnées sans autre forme de procès. Tel est le sort qui a été réservé à M. Ha Hai, secrétaire général de l'Église bouddhiste Hoa Hoa.
Le 7 décembre 2000, un millier de manifestants pacifiques qui dénonçaient les violations de la liberté de culte par les autorités ont été arrêtés sans ménagement par la police et incarcérés à la prison de Cho Moi.
Un prêtre catholique, Nguyen Van Ly, de la paroisse Nguyêt-Biêu, a été coupé du monde extérieur et est soumis à des tracasseries constantes de la part des autorités pour avoir revendiqué la liberté de culte et critiqué la saisie des terres de l'évêché de Huë et la mainmise des autorités sur les activités de l'Église catholique au Viêtnam.
Ces événements dramatiques seraient la conséquence de la répression politique et des violations des droits de l'homme commises par le régime communiste du Viêtnam.
La communauté vietnamienne de Belgique est également préoccupée par le maintien et l'extension des restrictions à la liberté syndicale et à la liberté de la presse au Viêtnam. De plus, elle est choquée par les nombreux obstacles que les autorités mettent en place afin d'empêcher les organisations religieuses d'offrir leur aide aux victimes des inondations. La communauté viêtnamienne en Belgique a exprimé ses préoccupations dans une résolution dans laquelle elle demande au gouvernement belge :
de protester contre les violations de la Convention des droits de l'homme au Viêtnam;
de demander à l'ambassadeur de Belgique à Hanoï, M. Philippe Dartois, de bien vouloir s'informer auprès des autorités vietnamiennes du sort de Mme Dung, de M. Ha Hai et de sa famille et du père Nguyen Van Ly;
d'exiger la libération immédiate et inconditionnelle de toutes les personnes détenues au Viêtnam pour des raisons d'appartenance philosophique;
d'acquitter le solde de la dette viêtnamienne et d'associer ce geste au respect des droits de l'homme par les autorités viêtnamiennes.
Étant donné que notre gouvernement attache énormément d'importance à la lutte contre la violation des droits fondamentaux de l'homme, j'aimerais poser les questions suivantes à l'honorable ministre :
1. Le gouvernement belge est-il au courant des violations du droit fondamental à la liberté de culte par les autorités viêtnamiennes ? Dans l'affirmative, quelles sont les intentions du gouvernement belge à ce propos ?
2. Est-il exact que la Belgique a accordé au Viêtnam une remise de dette de plus de 20 millions de dollars sans exiger formellement que ce pays respecte les droits de l'homme et la démocratie ?
Réponse : Il est vrai que le Viêtnam n'a pas toujours adopté la voie d'une démocratie pluraliste. Cependant, depuis une dizaine d'années, l'attitude du régime est plus ouverte et plus souple.
Les médias et l'Assemblée nationale se font de plus en plus l'écho des problèmes de la population et des critiques qu'elle formule à l'encontre des autorités. Le Parlement fait son travail : il discute et adopte les textes législatifs nécessaires à la mise sur pied d'un État de droit. Il questionne également les ministres qui doivent répondre de leur gestion des affaires publiques.
En matière religieuse, des progrès sensibles ont été réalisés. La liberté individuelle de culte n'est ni réprimée ni découragée même si elle est encore, c'est vrai, strictement contrôlée. Seules les organisations religieuses reconnues par le gouvernement peuvent opérer ouvertement. Il s'agit de six cultes : bouddhisme, catholicisme, protestantisme, Cao Dai, Hoa Hao et la culte musulman.
Les autres mouvements non reconnus sont donc considérés comme illégaux. Il arrive dès lors que leurs fidèles ou dirigeants soient arrêtés ou détenus de manière administrative sous prétexte qu'il y a atteinte aux intérêts et à la sécurité de l'État.
En ce qui concerne le cas soulevé par la communauté viêtnamienne de Belgique, celui de M. Ha Hai, de l'Église Hoa Hoa, je puis vous donner les informations dont je dispose. Un comité de ce culte a été reconnu en 1999 dans le Sud du Viêtnam. Un rassemblement a d'ailleurs réuni plusieurs centaines de milliers de personnes cette année-là. M. Ha Hai dirigeait un comité qui lui n'a pas été reconnu. Il vient d'être condamné par un tribunal de Cho Moi à deux peines de prison. L'une pour violation des mesures de surveillance prises à son égard par les autorités. L'autre peine, pour avoir abusé des droits démocratiques à l'encontre des intérêts de l'État. M. Ha Hai pouvait faire appel de cette décision.
Quant au cas du prêtre Nguyen, je n'ai pas à ce stade d'informations plus précises que celles dont dispose la communauté viêtnamienne de Belgique.
En ce qui concerne la remise de la dette viêtnamienne, la DGCI a racheté au Ducroire la dette garantie, et ce en complément d'initiatives agréées sur le plan multilatéral. Suite aux accords signés avec le gouvernement viêtnamien en décembre 2000, la contre-valeur, soit 317 millions de francs belges, sera versée en monnaie locale par le Viêtnam dans un fonds destiné à financer les dépenses sur place de nos projets bilatéraux de coopération. Comme vous le savez, notre coopération avec le Viêtnam s'inscrit dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, plus particulièrement d'ailleurs en milieu rural. En allégeant cette dette, notre objectif est donc de soulager un pays en développement tout en veillant, par les accords que nous avons conclus avec le gouvernement, à ce que la contrepartie versée par les autorités viêtnamiennes finance directement les projets qui visent au mieux-être de la population.
Cependant, il est important de préciser qu'en ce qui concerne l'approche des problèmes de services de dette, de manière générale, la Belgique ne prend pas seule les décisions. Nous agissons en étroite collaboration avec tous les autres membres du Club de Paris. En outre, l'expérience, y compris celle des organismes internationaux tels la Banque mondiale ou le FMI, a démontré que conditionner l'aide au développement ou même l'allégement de la dette au respect des droits de l'homme ne porte pas les fruits que l'on pourrait théoriquement espérer.
Le respect des droits de l'homme est un des principes de base inscrits dans notre accord général de coopération avec le Viêtnam. Ne coopérer qu'avec des pays où ce respect serait sans faille est utopique. Dans ce cas-là, nous ne pourrions pas travailler avec nos pays de concentration. En revanche, nous coopérons avec des pays qui ont la volonté politique d'améliorer la situation des droits de l'homme et où des progrès en la matière sont visibles.
Ce qui ne signifie nullement que nous n'abordons pas la problématique des droits de l'homme, y compris la liberté religieuse. Nous le faisons à chaque fois que nous avons l'occasion de nous entretenir avec les autorités politiques du Viêtnam. Et lorsque des diplomates européens rencontrent les dirigeants de ce pays et cela arrive régulièrement cette question est également soulevée. Des cas précis sont traités. Notre pays faisant partie de la Troïka, je puis vous assurer que nous continuerons à dialoguer avec le gouvernement viêtnamien pour poursuivre dans cette voie d'un meilleur respect des droits de l'homme.