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Mme Marie Nagy (ECOLO). - La presse a fait état ces derniers jours d'un événement qualifié d'incident qui se serait déroulé au-dessus de la commune de Woluwe-Saint-Pierre, dans le prolongement de la piste 25 de l'aéroport de Zaventem. À cette occasion, un pilote de la Sabena a mentionné aux journalistes que ce genre de situation se produirait trois fois par mois, à l'aéroport de Bruxelles National.
La presse a également fait état de l'enquête qui aurait été menée par vos services et des mesures d'urgence que vous auriez prises en réaction à ces événements, dont l'obligation d'atteindre l'altitude de 2 000 pieds, au lieu de 1700 pieds actuellement, avant d'effectuer un tournant à gauche.
L'inconvénient soulevé par les riverains et les associations attentives au problème du survol d'une capitale comptant près d'un million d'habitants est que cette mesure risque d'avoir pour conséquence que les appareils aillent plus loin, vers les communes densément peuplées de la Région bruxelloise, ce qui comporte un risque pour la sécurité des habitants, mais aussi des inconvénients sur le plan du bruit, donc de la qualité de vie des Bruxellois.
Madame la vice-première ministre, pouvez-vous nous indiquer quels sont les résultats de cette enquête et l'ampleur du risque réel auquel les personnes se trouvant à Bruxelles à ce moment-là ont été soumises ?
Pouvez-vous nous dire quelle est la nature et la portée précises des décisions que vous avez prises ? Ne pensez-vous pas que seule l'interdiction pure et simple du survol d'une agglomération comme Bruxelles permette d'écarter le risque d'une catastrophe majeure ?
Enfin, ne trouvez-vous pas que le manque de transparence - aucune information officielle n'a été communiquée - qui entoure ce genre d'événement augmente à tort ou à raison l'inquiétude de la population et qu'il serait peut-être important de trouver un canal d'information qui donne un état exact de la situation plutôt que de laisser d'éventuelles suppositions accroître ce sentiment de peur ?
Mme Isabelle Durant, vice-première ministre et ministre de la Mobilité et des Transports. - Je voudrais peut-être faire un petit rappel des faits. Que s'est-il réellement passé, voici quelques jours, au-dessus de Woluwé-Saint-Pierre ? Selon le communiqué de Belgocontrol, compétent dans ce domaine, un avion de la Sabena venait de décoller de la piste 25R, avec un virage à gauche ; un avion de la Lufthansa qui avait, lui, reçu l'autorisation d'atterrir sur la piste 25L - la piste parallèle - a été contraint de remettre les gaz. Conformément aux procédures en vigueur, le pilote a averti la tour de contrôle qui avait observé la manoeuvre imprévue et des instructions ont été données au pilote par la tour de façon à recréer au plus tôt les conditions de séparation standard entre deux appareils.
Cet incident n'a donc jamais débouché sur une situation dangereuse, conduisant à un risque d'abordage. De plus, le contrôle visuel a toujours été maintenu. Contrairement à certaines images vues dans la presse et même à des montages donnant l'impression que les ailes de ces deux avions allaient se toucher, Belgocontrol est immédiatement intervenu, via la tour de contrôle, pour restaurer la séparation nécessaire et obligatoire entre les deux avions à l'oeuvre.
Dans le cadre de ses compétences, Belgocontrol a immédiatement pris des mesures internes qui visent à renforcer encore davantage la coordination entre les contrôleurs, de manière à éviter précisément que des incidents ne puissent se produire ou se reproduire. De plus, les procédures de vol publiées à l'intention des pilotes ont été légèrement adaptées de façon à éviter que semblable situation ne se reproduise.
Au-delà des mesures urgentes qui devaient être prises, une enquête a été demandée dans le but de pouvoir vraiment identifier les problèmes. Cette enquête a été confiée à une cellule indépendante dénommée « Cellule d'enquête incidents », qui transmet ses conclusions à l'administration de l'aéronautique, laquelle a demandé à Belgocontrol de revoir la procédure afin d'éviter tout risque.
Vous avez souligné que cet incident a provoqué une certaine inquiétude chez les personnes survolées. On peut le comprendre et je partage votre avis selon lequel l'absence et le manque d'informations, voire des informations parfois erronées, attisent cette inquiétude et créent pour les riverains une situation très inconfortable. Dans le cadre du suivi des accords du 11 février 2000, un bureau d'information et de concertation sera d'ailleurs mis en place. Il s'agira d'un lieu où les riverains, les communes ainsi que les autorités locales concernées pourront obtenir des informations de la part de Belgocontrol et de BIAC, mais aussi pourront leur faire part de leurs craintes ou de faits observés. À défaut de résoudre tous les problèmes, cela permettra une information réciproque qui est absolument nécessaire.
Ce genre d'incident m'incite à faire référence au travail sur la réforme des procédure d'atterrissage et de décollage qui a été entrepris dans le cadre du suivi de l'accord du 11 février. Nous avons mis en place un groupe d'experts, dénommé Probru, lequel continue à travailler sur les modifications nécessaires. Sur quels critères distincts le groupe Probru travaille-t-il concernant le risque d'abordage ?
Premièrement, la priorité des priorités est évidemment d'éviter tout abordage ou conflit entre des avions. Il en a toujours été ainsi et il est hors de question que dans le cadre de la modification des procédures, on sorte de ce critère qui doit rester le premier en termes de sécurité. Deuxièmement, veiller, toujours pour des raisons de sécurité, et dans le respect du premier critère, à privilégier les routes et les procédures de départ qui évitent le survol des zones les plus densément peuplées.
Troisièmement, rechercher des trajectoires et des procédure de pilotage qui réduisent, d'une part, le nombre de personnes exposées aux nuisances des avions et, d'autre part, l'importance des nuisances imposées aux personnes survolées.
La modification de la procédure de décollage de la piste 25 R proposée par Belgocontrol a été évaluée selon ces trois critères et m'est apparue comme le meilleur compromis possible, toutes autres choses restant égales par ailleurs. J'ai notamment vérifié que cette nouvelle disposition n'empêche aucun avion de contourner le coeur de l'agglomération bruxelloise, comme défini par l'arrêté de 1958 concernant le survol de Bruxelles. Il apparaît cependant que ce premier critère - éviter les abordages - qui impose des distances minimales de séparation entre les avions limite, dans les conditions de trafic actuelles, les possibilités d'imposer à tous les avions décollant de Bruxelles-National les virages à gauche ou à droite qui leur permettraient d'éviter complètement le survol de la capitale.
Au-delà de toutes les mesures de sécurité se pose, derrière cet incident et les mesures adaptées et prises par Belgocontrol, la question de la croissance ou de la saturation de l'aéroport ou, en tout cas, de l'importance de nombre de vols à Bruxelles-National.
Dans le cadre de l'accord du 11 février, une étude a été commandée, visant à identifier quel est aujourd'hui le statut de l'aéroport, quel est le nombre de vols opérés à Bruxelles-National et quelles sont, du point de vue économique comme de celui des nuisances générées et des risques de sécurité, les perspectives de développement de cet aéroport, voire les perspectives de délocalisation d'une partie de l'activité à un terme de vingt ans. Cette étude est en cours et ses conclusions seront remises au gouvernement fédéral.
Pour le reste, en ce qui concerne la modification des procédures d'atterrissage et de décollage, j'ai déjà formulé des propositions qui seront prochainement discutées avec mes collègues du gouvernement. Elles visent à respecter à la fois les impératifs de sécurité que je viens d'énoncer et les objectifs de l'accord du 11 février, à savoir exposer le moins de monde possible aux nuisances sonores. J'espère que nous pourrons trancher assez rapidement cette dernière question, tant l'attente est grande et le problème difficile. Néanmoins, nous nous étions engagés à le résoudre et nous le ferons dans les meilleures conditions, sur la base des propositions émanant de ce groupe.
Telles sont les questions qui seront traitées, je l'espère, avant la fin de l'année, de façon à ce que l'on puisse, en matière de procédures d'atterrissage et de décollage, à la fois respecter notre objectif du 11 février et ne jamais céder aux impératifs de sécurité ainsi que, par ailleurs, d'information des riverains. C'est extrêmement important quand on sait combien la crainte peut être grande lorsque les informations sont données de manière rapide et lacunaire, voire erronée, ou engendrent une inquiétude encore plus grande.
Mme Marie Nagy (ECOLO). - Je remercie Mme la ministre de sa réponse, car elle nous a donné une information objective.
Je me permets de formuler deux requêtes. En premier lieu, serait-il possible d'obtenir une évaluation de la nouvelle procédure de décollage puisque le deuxième critère, celui du survol des zones denses, a été considéré comme moins important que les deux autres ? Cela répondrait aux inquiétudes actuelles.
En deuxième lieu, mon collègue M. Galand et moi-même serions fort intéressés de savoir si la ministre est en possession du rapport établi à la suite de l'enquête, rapport destiné à Belgocontrol et au ministère, et si elle dispose ainsi de l'ensemble des éléments d'appréciation.