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12 JUILLET 2000
L'accord de gouvernement du 7 juillet 1999 a défini, dans le chapitre intitulé « Une administration efficace et attentive », une série d'objectifs que les pouvoirs publics doivent atteindre pour pouvoir gagner à nouveau la confiance de la population :
un audit externe des administrations publiques;
un pacte pour la dépolitisation;
une nouvelle relation entre l'administration et les cabinets ministériels;
une simplification administrative et une évaluation de la législation;
une administration qui communique vraiment.
Le gouvernement n'a finalement pas estimé nécessaire d'organiser un énième audit, étant donné qu'il y en a déjà eu toute une série dans le passé, qui ont donné lieu à des analyses et à des conclusions similaires.
C'est pourquoi l'on a créé un groupe de travail au sein duquel siègent les fonctionnaires qui ont été associés à l'analyse de tous les audits passés.
Les travaux de ce groupe ont finalement abouti à la rédaction de la « note Copernicus », qui formera désormais la base de la politique gouvernementale en matière de modernisation des administrations publiques.
Bien que l'organisation de la fonction publique fédérale fasse partie des prérogatives gouvernementales (voir article 37 de la Constitution), la commission de l'Intérieur et des Affaires administratives du Sénat a estimé devoir suivre cette réforme en profondeur, puisque c'est depuis l'entrée en vigueur du statut Camu de 1937 que l'on n'avait plus envisagé d'apporter des modifications si radicales au statut des fonctionnaires fédéraux.
Le rapport qui suit est le reflet de ces travaux et des conclusions que la commission en a tirées.
Les diverses interventions relatées dans ce rapport datant de quelques mois, certains passages du rapport paraissent anachroniques. Il faut tenir compte de la date des auditions pour bien situer la portée des paroles de l'un et l'autre.
A. Procédure suivie
L'accord de gouvernement prévoit la modernisation de la Fonction publique. Il s'agit d'une priorité de tout premier ordre pour les années à venir. La structure de la Fonction publique n'est plus adaptée aux besoins de notre époque. Le statut de la fonction publique, c'est-à-dire le statut « Camu », date de 1937. Ce statut est caractérisé par une structure éminemment pyramidale.
Cette structure n'est pas adaptée aux structures et techniques actuelles de gestion. Toutes les grandes organisations ont des structures plus planes, avec un nombre limité de niveaux.
À l'origine, le but était de réaliser un examen des administrations fédérales par le biais d'un audit externe (cf. l'accord de gouvernement). Le gouvernement a cependant décidé de ne pas organiser un énième audit qui aboutirait d'ailleurs aux mêmes conclusions que les divers audits déjà réalisés dans plusieurs départements.
Voilà pourquoi on a aussi rassemblé tous les spécialistes en deux groupes de travail chargés d'examiner les besoins de modernisation. Un premier groupe de travail a examiné l'organigramme des services publics, et le deuxième le statut de la Fonction publique.
Leurs travaux ont débouché sur un rapport (dit « Rapport Copernic ») sur la base duquel le gouvernement compte se baser pour moderniser la Fonction publique. Cette modernisation n'empêche en rien une réforme parallèle d'une série de services spécifiques : l'armée, les services de police, etc.
Sur la base de ce rapport, le Conseil des ministres a approuvé une note qui comprend la majeure partie des conclusions du groupe de travail. Le ministre ayant la Fonction publique dans ses attributions pourra commenter cette note plus en détail.
B. Lignes de force de la réforme
B.1. Une première ligne de force importante de la politique de modernisation concerne les cabinets ministériels.
Dans le passé, les cabinets politiques formaient de véritables administrations parallèles. Malgré les réductions d'effectifs qui ont déjà été décidées dans le passé, les cabinets restent, à ce jour, très étendus.
Il faut donc instaurer une distinction plus précise entre la définition de la politique et l'exécution de celle-ci par l'administration. Le travail préparatoire est actuellement refait deux ou trois fois. Conformément à la réforme projetée, la définition de la politique sera confiée au ministre qui ne disposera plus que d'un secrétariat personnel et non plus d'un important cabinet. Le ministre sera à la tête d'un conseil stratégique, chargé d'esquisser la politique, qui sera exécutée par le département sous la compétence et la tutelle du ministre. Il y aura également un organe exécutif, à savoir le comité de direction, qui sera présidé par une personne mandatée à cet effet. Ce comité est composé de divers directeurs (personnel, technologie de l'information, stratégie et service d'études). Ce comité de direction exécute la politique et est donc responsable de l'aspect administratif de celle-ci.
Les cabinets sont supprimés; il ne restera qu'un secrétariat composé de 10 à 15 personnes.
La cellule stratégique est chargée de concevoir la politique à suivre par le ministère et le ministre. Contrairement aux autres membres du comité de direction, le directeur de cette cellule sera nommé pour la durée de la législature, parce que la stratégie doit être conforme à la ligne politique du ministre.
Il est important de souligner que ce n'est pas le ministre, mais bien le Bureau de sélection de l'administration fédérale, le Selor, qui recrutera (tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la Fonction publique) et choisira ces directeurs, en se basant sur un profil que le ministre aura établi pour chacune de ces fonctions de direction. À la fin de la procédure de sélection, le Selor proposera les trois candidats retenus au ministre, lequel désignera ensuite le candidat selon lui le plus approprié.
Le conseil stratégique, qui est une cellule stratégique composée du ministre, du président du comité de direction, du directeur de la cellule stratégique, et du comité de direction remplaca donc les cabinets ministériels actuels.
B.2. Une deuxième grande ligne de force de la modernisation est la création d'un système de mandats pour les cadres supérieurs au sein de l'administration.
Le gouvernement a l'intention de ne plus nommer des fonctionnaires dirigeants, comme c'est le cas actuellement pour les secrétaires généraux, mais de leur accorder un mandat pour une période de six ans. La durée de ces mandats dépasse donc celle de la législature. Le gouvernement a finalement décidé que la durée du mandat du président du comité de direction sera, elle aussi, de six ans. Seul le directeur de la cellule stratégique exercera un mandat dont la durée sera identique à celle de la législature.
Le Selor procédera également à la sélection pour ces mandats et proposera pour chacun d'entre eux trois candidats sur la base du profil déterminé par le ministre.
Lors de la présentation de la politique du gouvernement fédéral, le premier ministre a proposé de communiquer au Parlement toutes les nominations qui auront lieu dans ce nouveau système. Le Parlement peut suivre ces nominations dans le cadre d'une commission et demander les dossiers.
B.3. Une troisième grande modification comprend une réorganisation du contrôle. À l'heure actuelle, un double contrôle est opéré, le premier ex ante, par l'Inspection des Finances, le second ex post, par la Cour des comptes.
Le gouvernement propose un triple contrôle, c'est-à-dire d'ajouter un contrôle ex nunc à opérer dossier par dossier et au niveau de l'ensemble du ministère. L'avis de l'Inspection des Finances a été demandé sur cette proposition.
Il est prévu actuellement que l'Inspection des Finances procède à un contrôle et à des évaluations périodiques concernant l'ensemble, si bien qu'à l'avenir, sa tâche dépassera largement les limites du contrôle ex ante classique qu'elle exerce aujourd'hui. En étendant la surveillance à l'exécution de la décision sur le terrain, on offre plus de garantie qu'actuellement.
Pour pouvoir effectuer ce contrôle, l'on a défini une série de principes qui ont été approuvés par le Conseil des ministres.
B.4. Une quatrième grande ligne de force concerne la réforme de la Fonction publique dans son ensemble.
Le gouvernement a l'intention de remplacer la structure pyramidale de l'administration à quatre niveaux et subdivisions multiples par un système ne comprenant plus que trois catégories :
les fonctions dirigeantes;
les fonctions de management;
les collaborateurs.
La catégorie des collaborateurs comprend toutes les tâches exécutives. La rémunération dépendra en partie des prestations, surtout pour les fonctions supérieures.
B.5. La cinquième ligne de force vise une adaptation de l'organigramme fédéral. À l'avenir, on créera des administrations publiques tant horizontales que verticales. Les services horizontaux accomplissent des missions pour tous les services (budget, informatique et technologie, coordination générale, personnel, ...). Les services verticaux exécutent des missions homogènes, spécifiques (Finances, Affaires étrangères, Défense nationale, ...).
À cela s'ajoutent des missions spécifiques qui peuvent varier en fonction de la composition du gouvernement et des accents que celui-ci veut mettre. Ainsi, le gouvernement peut décider que la politique scientifique ou le développement durable nécessite une attention particulière. Il s'agit alors d'assurer une programmation horizontale par-delà tous les départements.
Outre les services horizontaux, on trouvera donc des services publics verticaux et, en fonction des priorités fixées par le gouvernement, une programmation horizontale par-delà tous les départements.
C. Les diverses phases du projet de modernisation
Plusieurs projets et un calendrier ont été définis sur la base de ces lignes de force. L'organigramme des services publics devra être établi sous la présente législature. L'homogénéisation de la nature des missions des services publics fédéraux et la création de services horizontaux, la suppression des cabinets ministériels et la création de cellules stratégiques au sein des divers services sont en tout cas des projets qui devront encore être réalisés au cours de la présente législature.
Le deuxième projet vise à instaurer un système de mandats pour tous les fonctionnaires dirigeants. Ce projet devra lui aussi être réalisé sous cette législature.
Le troisième projet vise à responsabiliser les gestionnaires en élargissant leur pouvoir de gestion et de contrôle de la gestion. À cet égard, l'Inspection des finances et les « contrôleurs des engagements » joueront un rôle capital.
On créera aussi un nouveau système de rémunérations. Le salaire dépendra des résultats atteints, surtout pour ce qui est des fonctions supérieures.
Le cinquième projet concerne la stratégie de communication interne et externe relative à ce plan (voir infra).
D. Le questionnaire
En dépit du fait que l'accord de gouvernement prévoyait initialement l'organisation d'une consultation populaire, le gouvernement a décidé d'y renoncer et de la remplacer par une enquête publique sur la réforme de la Fonction publique.
Dans une consultation populaire, la population doit s'exprimer sur une proposition de réforme complexe et bien définie. Toute la question est de savoir quelle est la plus-value d'une telle méthode. C'est pourquoi le gouvernement a préféré donner à la population la possibilité d'infléchir la réforme projetée en organisant une enquête en son sein plutôt qu'une consultation populaire dans le sens d'un référendum. Cette formule permet de répondre aux questions qui constitueront le fil conducteur de la réforme pour le gouvernement. Cette enquête répond à un double objectif. Elle permet de porter le projet du gouvernement à la connaissance de la population. Cette information revêtira la forme d'une « brochure d'information politiquement neutre ». Cette brochure sera accompagnée d'un questionnaire qui pourra être renvoyé sous le couvert de l'anonymat. Cette brochure sera envoyée à toutes les personnes âgées de plus de 16 ans inscrites au Registre national. Il s'agit donc de toutes les personnes qui ont des contacts avec l'administration.
Le questionnaire contient douze questions « fermées ». Certaines questions sont des questions à choix multiple, d'autres permettent de fixer une priorité.
À raison de 8 millions de destinataires, le coût de cette enquête est estimé à 80 millions de francs. Un contrat a été passé avec La Poste pour l'impression et la distribution des documents et des réponses. Le prix du traitement des réponses n'est pas inclus dans cette somme de 80 millions. Une adjudication a été lancée pour le traitement mécanique des réponses.
Les risques d'abus ont été limités à un minimum. Le formulaire est envoyé de manière nominative.
Les questions sont encore en cours d'élaboration mais l'objectif est de mener la campagne entre le 1er et le 20 juin 2000. Dès que les questions seront prêtes, elles seront communiquées au Parlement. Le but n'est cependant pas que le Parlement débatte du contenu de questions.
Les questions traitent avant tout de la philosophie de base de la modernisation.
La deuxième série de questions a trait à l'idée du remplacement des cabinets par un secrétariat ministériel. Le ministre souligne que la réponse à ces questions aura des effets non seulement pour le gouvernement actuel, mais aussi pour tous les gouvernements qui suivront. Il ne s'agit donc pas d'organiser un événement ponctuel de relations publiques pour la durée de cette législature.
Les questions ont également trait :
à la nomination définitive des hauts fonctionnaires;
à la liaison de la rémunération au résultat obtenu;
à l'objectivation des engagements et des nominations;
aux moyens de communication entre les autorités et la population;
à la mobilité entre le secteur privé et le secteur public;
aux priorités en matière de services assurés par les pouvoirs publics;
à la surveillance et à l'imposabilité d'une qualité minimum du service dispensé par les pouvoirs publics.
À partir du mois de septembre, le gouvernement mettra ces mesures en application. Il commencera par créer des panels d'utilisateurs et par lancer des enquêtes de satisfaction. Les membres des panels d'utilisateurs seront appelés, à intervalles réguliers, à donner leur avis sur les services dispensés par les pouvoirs publics. Ce genre de sondage est de mise dans toutes les grandes entreprises quand on procède à des changements importants.
Le gouvernement examine de quelle manière l'on peut garantir qu'il n'y aura aucune manipulation des résultats lors du traitement des questionnaires. Pour l'organisation de la consultation, le gouvernement a respecté la législation relative au Registre national et celle relative aux dépenses électorales.
À la demande du président, le premier ministre précise que le ministre de la Fonction publique a élaboré un calendrier précis. Il est tout à fait disposé à venir le commenter devant la commission.
Un autre membre marque son accord sur l'instauration d'un système de mandats pour les fonctions dirigeantes dans la Fonction publique. L'on supprime ainsi le caractère immuable de la fonction et de la rémunération des cadres supérieurs. Il estime cependant que cela ne peut en aucun cas porter atteinte au principe de la nomination à titre définitif des fonctionnaires ni aux droits qui en découlent. Il estime dès lors que la modernisation proposée doit être réalisée tout en nuances.
Le souci d'assurer la qualité du service est le défi de cette réforme.
En ce qui concerne l'instauration d'un système d'évaluation, il souligne que l'on a déjà quelque expérience en la matière au niveau flamand. Le ministre compétent pourra donc en bénéficier.
L'instauration d'un système d'évaluation ne peut toutefois pas paralyser les fonctionnaires. La création d'une administration fondée sur une structure à trois niveaux est en tout cas une bonne mesure à cet égard.
L'intervenant estime également que la réforme globale de la fonction publique ne doit pas empêcher que l'on puisse déjà procéder dans l'immédiat à celle de l'Office des étrangers. La présente commission émettra d'ailleurs un rapport à ce sujet.
La modification du rapport entre le ministre et l'administration qui résultera de la suppression des cabinets lui inspire une réflexion. Le pouvoir de l'administration dans le cadre de l'exécution de la politique ministérielle n'est pas négligeable. Voilà pourquoi il estime qu'une période transitoire est nécessaire. Il ne voit en soi aucun problème à ce que le président du comité de direction soit nommé pour une période plus longue que celle de la législature. Il ne faut cependant pas perdre de vue que c'est cette personne qui devra insuffler aux services la motivation nécessaire à l'exécution des décisions de politique. Le ministre doit en tout cas conserver une mainmise suffisante sur cette personne pour la contraindre, s'il y a lieu, à mettre en oeuvre la politique.
En ce qui concerne le contrôle ex nunc, il souligne que celui-ci incombe normalement au Parlement à moins que les informations ou les instruments dont il dispose soient insuffisants pour qu'il puisse l'exercer valablement. Ne peut-on pas prévoir une transmission des informations entre l'Inspection des Finances et le Parlement en vue de rendre plus efficace le contrôle de ce dernier (au moyen d'un rapport au Parlement ou de la communication de notes) ?
Un sénateur estime que tout le monde est d'accord pour dire que l'administration doit être modernisée. Il se réfère à cet égard au mémorandum du collège des secrétaires généraux demandant une modernisation et une responsabilisation des fonctions dirigeantes. Le gouvernement précédent avait déjà pris un arrêté royal, le 20 avril 1999, créant un mandat de cinq ans et instaurant la prime de direction pour remplir ce mandat. Le gouvernement actuel a suspendu cet instrument de responsabilisation. On va donc interroger la population sur une modernisation de la fonction publique qui existe déjà dans les textes du gouvernement précédent.
Dans son rapport, le groupe de travail utilise assez souvent le mot client. Or, dans l'administration fédérale, on n'a pas mal d'administrations d'autorité (Justice, Police, Gendarmerie, Défense nationale, Affaires étrangères, ...) dont la philosophie est différente. Dans ces administrations, le citoyen n'est pas seulement considéré comme un usager mais aussi comme un responsable qui n'a pas seulement des droits mais aussi des devoirs vis-à-vis de l'administration. Ceux qui sont considérés comme des condamnés ou des fraudeurs peuvent difficilement être considérés comme des clients par l'administration compétente. Cette philosophie anglo-saxonne du client n'est donc pas toujours adaptée aux administrations fédérales. Le ministre de la Fonction publique a reconnu, en séance publique, que ce mot apparaît trop souvent dans ce rapport. L'intervenant préfère que l'on emploie le mot « usager ». Une consultation populaire participe de la même philosophie lorsqu'on interroge les gens comme des ayants droits sans jamais considérer leurs devoirs dans notre société.
Une membre fait remarquer que c'est tout de même la société qui paie les administrations publiques, c'est eux qui payent le système. Cela va au-delà de la notion de client.
M. Barbeaux reste convaincu que c'est précisément pour cette raison que l'approche client doit être tempérée par la notion de « citoyen utilisateur de services ».
La réforme préconisée par le gouvernement se situe à trois niveaux :
le statut de la Fonction publique;
l'organisation interne des services;
la restructuration de l'organigramme de l'administration fédérale.
Il se demande s'il est utile de s'attaquer à ces trois niveaux en même temps. Ne risque-t-on pas de nuire à la réussite de la réforme en faisant tout à la fois ?
Il fait remarquer qu'actuellement, des départements horizontaux existent déjà : l'Inspection des finances, la Régie des Bâtiments, le Service d'administration générale de la Fonction publique avec son service informatique, le Service de la politique scientifique ...
Quels seront les changements à ce propos que le gouvernement actuel puisse encore apporter ? Pourquoi faut-il restructurer l'organigramme de l'administration ? Il craint que ces grands changements créeront une énorme cacophonie et un affaiblissement de l'État.
Le premier ministre demande si l'État actuel est tellement fort.
La Belgique compte autant de fonctionnaires fédéraux que les États-Unis d'Amérique, 10 000 de plus qu'aux Pays-Bas et nos services ne parviennent même pas à communiquer entre eux en raison de la diversité des systèmes informatiques utilisés. Pour ce qui est des revenus imposables, les divers départements du ministère des Finances ne sont même pas en mesure de s'échanger mutuellement des données. Avec ses 35 000 fonctionnaires, notre pays est sans doute en tête du peloton européen. Il y a plus de formulaires de déclaration à contrôler que partout ailleurs dans le monde, tant notre système fiscal est complexe. Les ordinateurs de la TVA ne sont pas reliés à ceux des services du fisc chargés de contrôler les déclarations à l'impôt des personnes physiques. Compte tenu de l'impossibilité de procéder à une vérification des revenus de quiconque, les carrousels à la TVA continuent tout simplement. Aucun autre pays de l'Union européenne ne connaît une situation comparable.
Le préopinant est d'accord qu'il faut mettre fin à une telle situation mais cela n'est pas une raison pour restructurer toute l'administration.
Sa troisième question porte sur la réduction des cabinets ministériels. Quelle est la position que le gouvernement adoptera en la matière ? Il semblerait que le secrétariat sera moins restreint que le premier ministre aurait souhaité. Quelle sera l'influence du conseil stratégique sur le comité de direction ? Pourra-t-il influencer les décisions de nomination ?
Le premier ministre répond que le directeur de la préparation de la politique sera membre et du conseil stratégique et du comité de direction.
Le même sénateur demande si on respectera les lois linguistiques au premier niveau de l'hiérarchie administrative et si oui, comment.
Comment le gouvernement va-t-il impliquer les fonctionnaires dans ce processus de restructuration ?
À propos de la constitutionnalité de la consultation, il se réfère à la réponse du ministre de la Fonction publique en séance publique qui n'y voyait aucun problème étant donné qu'il ne s'agit pas d'un référendum.
Le premier ministre répond qu'il partage cet avis.
Le même sénateur déplore que le gouvernement ne tienne pas compte de ce qui a décidé par le gouvernement précédent et du travail qui a déjà été mis en oeuvre par les fonctionnaires sous le prétexte qu'il y a des dysfonctionnements. Il a l'impression que le gouvernement actuel recherche une popularité temporaire au détriment d'un travail bien fait.
Une membre a déjà eu l'occasion de participer à la discussion sur le rapport du groupe de travail avec le ministre de la Fonction publique durant une réunion antérieure de la commission. Elle considère que le « Rapport Copernic » est le résultat des travaux d'un groupe de travail interne auquel aucun auditeur externe n'a été associé. L'important dans une réforme, c'est la motivation des fonctionnaires. Pour ce qui est de l'amélioration et de l'approfondissement de la communication interne, il reste beaucoup de pain sur la planche. La principale mission du gouvernement, s'il entend mener à bien une réforme, se situe principalement au niveau de la mobilisation interne. Il est donc curieux que le gouvernement fasse étalage de son projet auprès du grand public à un moment où rien n'est encore fixé. L'enquête projetée sera certes un exercice de démocratie directe, mais l'intervenante s'interroge sur la plus-value que cela apportera. Quelles sont les questions dont les réponses pourront avoir une utilité concrète pour le gouvernement ?
Elle estime aussi que l'on ne tient pas compte du fait que quand on fait appel à des panels d'utilisateurs, il faut définir préalablement avec précision ce que l'on veut mesurer et comment on va le faire. Les principes du libre marché ne peuvent évidemment pas être appliqués aux services publics. L'objectif premier doit donc être de fixer, pour chaque service, les critères de qualité et les objectifs (mission statement) pour que les fonctionnaires sachent exactement ce que l'on attend d'eux.
Elle demande également comment l'on fera pour respecter la législation linguistique dans le cadre de cette restructuration.
Un autre membre se réjouit que l'on informe la population et qu'on l'associe à la réforme. La rapidité et la qualité des services publics pose en effet problème. Souvent on rencontre des problèmes majeurs ne fût-ce que pour faire appliquer la loi. Pour cette raison il demande s'il y aura, après la réforme, une évaluation par les citoyens permettant de mesurer leur satisfaction.
Il voudrait aussi apprendre ce qui est prévu pour les fonctionnaires, au niveau de leur carrière, lorsque leur mandat de six ans se termine.
Aussi voudrait-il apprendre si cette réforme aura une suite auprès des institutions fédérées. Est-ce qu'on ne risque pas que le citoyen sera servi d'une autre façon en fonction du niveau du service public ?
Personnellement, il est choqué par l'utilisation du mot client dans ces rapports. Il s'agit pour les autorités publiques de citoyens, ce qui n'exclut nullement qu'il faut rechercher à augmenter le rendement et la qualité des services fournis par les institutions publiques.
Une membre émet une série d'observations au sujet de la mise en oeuvre des réformes. Dans toute réforme visant à améliorer la qualité, la participation du citoyen est un élément fondamental. Il importe donc de soumettre cette réforme au grand public. Elle se réjouit dès lors de l'annonce par le premier ministre de l'organisation d'enquêtes de satisfaction et de la création de panels d'utilisateurs. Il s'agit en effet d'instruments essentiels pour pouvoir mesurer les résultats de la réforme. L'intervenante n'a cependant pas appris grand-chose sur la manière dont le gouvernement souhaite associer les fonctionnaires à ces réformes car ce sont eux, en définitive, qui devront les appliquer sur le terrain.
Les indicateurs relatifs à l'amélioration de la qualité n'ont pas encore été définis (cf. l'ONEM s'est vu décerner le prix européen d'amélioration de la qualité grâce au raccourcissement sensible de la procédure de traitement des dossiers). Il faudra donc définir des indicateurs pour tous les services fédéraux. L'intervenante n'a guère trouvé d'éléments à ce sujet dans la réforme proposée.
De quelle manière assurera-t-on le feedback entre l'enquête publique et les fonctionnaires et comment tiendra-t-on compte des résultats de l'enquête ?
En ce qui concerne le système du mandat, elle considère qu'il ne suffit pas de responsabiliser les fonctionnaires. Il faut également leur donner les moyens d'atteindre les objectifs fixés.
En ce qui concerne la redéfinition de l'organigramme, elle demande si les exemples cités de programmation horizontale possible (développement durable, égalité des chances) ne devraient pas être considérés plutôt comme des départements horizontaux.
Le premier ministre estime qu'il n'y a pas lieu de créer des départements distincts en rapport avec les deux exemples cités. Le but poursuivi est précisément d'inscrire ces points de manière transversale dans le programme de divers départements au moyen d'incitants. Les départements horizontaux ont des missions qui doivent être exécutées dans tous les services (gestion du budget, gestion du personnel, coordination générale, information et technologie).
Elle demande également ce que le ministre entend précisément par « contrôle des engagements ».
Le premier ministre répond que le contrôleur des engagements est chargé d'approuver les engagements et de contrôler les ordonnancements.
Une membre avoue avoir sous-estimé l'ampleur du travail que le gouvernement veut réaliser. Elle est également frappée par l'attitude positive des syndicats. Elle propose d'entendre le ministre de la Fonction publique à propos de ce projet de modernisation et ensuite les syndicats.
À propos des candidats externes, elle demande comment le gouvernement fera face à la déperdition de fonctionnaires de haut niveau. Aura-t-on la possibilité de garder des experts en informatique, par exemple, et comment va-t-on les rémunérer ?
Le premier ministre répond que le projet de réforme prévoit aussi une modification des rémunérations pour les plus hauts gradés, ce qui doit permettre de les rémunérer en fonction des prestations et de la situation sur le marché.
M. Verhulst a été engagé pour s'occuper, au niveau fédéral, des TIC. Comme on est allé le chercher dans le secteur privé, il gagne le triple du traitement d'un secrétaire général. Comment veut-on attirer un manager du secteur privé si on ne peut pas lui offrir une rémunération décente ?
Il va de soi que cette réforme ne compromet pas la réforme approfondie d'un certain nombre d'institutions publiques spécifiques. La réforme de l'armée, des services de police, de l'Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire, de la magistrature ou de l'Office des étrangers ne peut pas être ralentie par cette réforme globale.
Le premier ministre souligne que la Belgique n'adopte pas le modèle anglo-saxon. Le gouvernement prévoit un recrutement et une sélection par Selor au lieu d'un recrutement direct des fonctionnaires supérieurs. Chaque année, l'OCDE et le FMI procèdent d'ailleurs à une radioscopie du fonctionnement de la Fonction publique. Depuis la réforme réalisée par le ministre Van den Bossche, l'administration flamande est d'ailleurs plutôt bien cotée dans ces radioscopies. Le pouvoir fédéral, lui, ne brille pas du tout dans ces radioscopies.
Le bureau ABC est d'avis qu'il faut créer des départements horizontaux. Il existe bien entendu déjà plusieurs formes de départements horizontaux (par exemple l'Inspection des Finances), mais, à l'avenir, cette structure sera beaucoup mieux élaborée, si bien que les responsables des divers départements communiqueront bien davantage entre eux (par exemple en ce qui concerne les TIC).
Cette réforme respectera évidemment les lois linguistiques cela vaut d'ailleurs tout autant pour ce qui est de l'enquête publique que le gouvernement organise.
Cette consultation aura lieu avant que la réforme ne prenne définitivement forme. Le questionnaire comporte un volet information et vise à associer la population à la réforme. Ces deux éléments se renforcent mutuellement. Lors de la mise en oeuvre, le public pourra à nouveau donner son avis par l'intermédiaire de panels d'utilisateurs ou de questionnaires. La plus-value du questionnaire vient de ce que l'on ne pourra, par exemple, jamais supprimer les cabinets politiques si l'on n'est pas soutenu d'une manière ou d'une autre dans cette entreprise par les citoyens.
Les fonctionnaires sont associés à la modernisation par le biais du Podium modernisation de la Fonction publique. Ce podium est constitué du comité des secrétaires généraux (13 personnes), renforcé par sept experts externes, le secrétaire permanent au recrutement (Selor) et le manager TIC, et il est présidé par le ministre. Ses compétences seront définies par un arrêté royal. Chaque secrétaire général doit assurer le suivi dans son département. L'objectif est de faire de ce podium le moteur de la réforme.
En ce qui concerne le souci de la qualité, on cherchera à développer des normes qualitatives minimales et contraignantes pour chaque département public. Tout dépendra toutefois des réponses au questionnaire. Au cas où ces normes ne seraient pas atteintes, il faudrait corriger le fonctionnement du service concerné ou prendre des sanctions.
Une membre trouve, certes, que la création du podium est une bonne chose, mais elle demande si la réforme a également été discutée avec les fonctionnaires proprement dits.
Le premier ministre répond que les fonctionnaires seront associés à la réforme lorsque ses lignes générales auront été définis, et ce, par l'intermédiaire du podium.
Il estime que compte tenu de l'expérience qu'il a acquise avec l'administration flamande, l'actuel ministre de la Fonction publique est la personne la plus appropriée pour mener cette réforme à bien.
Un sénateur estime devoir signaler que le questionnaire, tel qu'il a été commenté par le ministre, ne tombe pas dans le champ d'application de la législation sur les dépenses électorales.
Le ministre renvoie aux notes successives qui ont déjà été diffusées sur la réforme de la Fonction publique.
Une membre souligne que, outre la note Copernic, il y a également eu un exposé présenté en commission par les organisations syndicales représentatives de la Fonction publique, qui ont contesté certains points, comme par exemple l'application du système des mandats à partir du rang 13. Ces observations doivent également être prises en considération.
Le ministre affirme que c'est possible, mais que ce peut être une source de confusion. Ainsi, l'affirmation selon laquelle on travaillerait avec des mandats à partir du rang 13 est inexacte. En réalité, l'intention est d'identifier les fonctions de management chez tous les fonctionnaires à partir du rang 13. Il va de soi que dans les rangs 13 et au-delà, on trouve un grand nombre de fonctions qui n'ont rien à voir avec le management, par exemple des conseillers chargés de tâches d'exécution. Il estime la proportion des fonctions de management à environ 1/5 du nombre total d'agents appartenant à ces rangs-là (environ 400 sur 2 000).
Une membre constate que le recrutement d'experts ne posait pas problème pour les syndicats.
La simplification des systèmes d'évaluation non plus.
La modernisation des systèmes de rémunération ne vexe personne.
La suppression des cabinets était reprise sur la liste pour avoir l'adhésion de la population, selon les explications du premier ministre.
L'appréciation de la qualité et du rendement a soulevé certaines réflexions au sein de la commission. La nature de l'appréciation du rendement n'est pas encore assez bien définie pour qu'on puisse y adhérer.
Un sénateur rappelle que le gouvernement précédent a créé en avril 1999 le système des mandats et l'avait accompagné de concepts tels que le brevet de direction et la lettre de mission, qui détermine les objectifs à poursuivre, et qui octroie de ce fait une certaine autonomie à l'agent désigné. Le ministre Flahaut avait souhaité que les fonctionnaires dirigeants en place soient impliqués dans ce système au maximum des possibilités, en recevant d'office le premier mandat.
Un deuxième souci est le problème des comités de direction qui agissent sous l'impulsion des conseils stratégiques.
Le souci de maximaliser la liberté de gestion implique la limitation des influences des cabinets ministériels.
Quels sont les liens entre conseils stratégiques et comités de direction ? Y a-t-il des délégués des conseils au sein des comités de direction ? Si oui, ceci ne serait-il pas un moyen de politiser encore plus l'administration, le président du conseil stratégique étant l'homme de confiance du ministre ?
Enfin, comment le ministre voit-il la réorganisation des Services de la politique scientifique en tant que « ministère horizontal » ? Voit-il la réorganisation d'une série d'autres services horizontaux, par exemple l'Administration du budget avec l'Inspection des finances et l'administration SAG (Service de l'administration générale de la Fonction publique).
Une membre s'inquiète à propos des mandats qui ne sont assignés que pour la durée d'une législature.
Le ministre indique que ce concept ne s'appliquera finalement qu'à la cellule stratégique.
La même membre estime en outre que pour pouvoir concrétiser leurs intentions, les mandataires doivent pouvoir compter sur la collaboration de tous les membres du personnel de leur département. La façon dont les choses se passeront dépendra de la communication et de la motivation mais aussi de l'évaluation et des sanctions.
Ce concept de mandat n'est-il pas une difficulté plutôt qu'une plus-value pour la réforme ?
La Cour des comptes, qui devient un véritable auditeur externe, n'interviendrait ni dans la gestion financière ni dans le contrôle de cette gestion.
A-t-on suffisamment d'instruments pour fixer les normes de qualité ? Les missions sont-elles définissables par service et par fonctionnaire ?
Une autre membre rejoint l'intervenante précédente. Les mandats sont octroyés pour une durée de six ans avec une autonomie de moyens et d'effectifs. Comment ce mandat sera-t-il rempli correctement ? S'agit-il de fonctions temporaires ou les fonctionnaires seront-ils nommés pour six ans ?
Un des principes est la modification des normes de recrutement : on entend donner la préférence aux compétences plutôt qu'aux diplômes. Comment cela fonctionnera-t-il correctement ?
Une autre membre encore demande s'il y aura des changements par la voie d'une loi.
Le ministre admet que le système instauré par le précédent gouvernement ne lui plaît pas. Ceci est dû entre autres au fait qu'on lie l'octroi du mandat à l'obtention d'un brevet de direction. Personnellement, il n'y croit pas, parce qu'un tel brevet n'a pas de valeur spécifique.
On sélectionnera les candidats selon quatre groupes de mandats qui tiendront compte des exigences du travail. Le système fonctionnera dans chaque ministère, mais chaque mandat à la tête d'un quelconque département n'aura pas la même cotation. Il faut comparer des choses comparables.
On peut, par exemple, attribuer un facteur 1 au secrétaire général du ministère des Finances tandis qu'on attribuerait un facteur 2 au ministère de l'Intérieur.
Pour se voir attribuer un mandat, il faudra passer d'abord par un assessment de l'aptitude à diriger. Il s'agit d'un critère d'exclusion. Celui qui ne réussit pas ce test n'entre plus en ligne de compte.
Vient ensuite une sélection axée sur des qualités spécifiques à la fonction. Le résultat des deux procédures est une shortlist qui mentionne le nom des personnes pouvant prétendre au mandat.
Ce mandat impliquera évidemment une large autonomie en fait de gestion d'effectifs et de moyens.
Il n'est donc plus question d'une « lettre de mission » mais d'un véritable contrat avec le manager dans lequel on aura convenu clairement des objectifs en matière de moyens et de personnes dont l'on peut disposer afin d'atteindre ces objectifs. Des retouches pourront certes être apportées chaque année, mais en restant fidèles aux grandes lignes du mandat. Chacun saura donc parfaitement à quoi s'en tenir.
Il faudra atteindre l'objectif fixé avec les moyens convenus.
Dans l'administration actuelle, il y a trop de grades hiérarchiques. Il faut dès lors réduire l'élément hiérarchique et les fonctions de management ne peuvent être créées que là où elles apportent une valeur ajoutée.
Comme on l'a dit déjà, il évalue leur nombre à 400 pour l'ensemble de l'organisation.
Pourquoi ne pas attribuer le premier mandat aux « gradés » actuels ?
Parce que c'est une question de compétences. Les « gradés » actuels n'ont jamais subi de sélection sur la base de leurs compétences managériales. Le système existant est un système de sélection fondé surtout sur l'expertise et l'expérience et non sur l'aptitude à diriger.
Cela ne signifie pas qu'ils ne puissent pas poser leur candidature. Mais ils doivent passer le cap de la sélection et dès lors réussir l'assessment de gestionnaire.
S'ils réussissent ensuite la deuxième épreuve (de connaissances techniques), il est presque normal que la personne en place emporte la préférence. C'est ce qui se fait dans le privé, bien que l'on ne puisse pas en faire une règle formelle.
Tout le principe est de placer la bonne personne au bon endroit.
Jusqu'ici il pouvait arriver qu'un expert ne puisse être retribué pour ses compétences que par le biais d'une promotion, avec toutefois pour conséquence que l'expert arrivait parfois à une fonction où il obtenait certes une rémunération appropriée mais sans avoir les capacités de gestion liées à cette fonction.
L'expertise doit également être rétribuée correctement.
Outre le système du mandat, il y aura encore des missions spécifiquement temporaires, à savoir un emploi au sein de la cellule stratégique qui sera conféré par termes de quatre ans.
Ce nouveau système peut évidemment fonctionner avec des fonctionnaires nommés à titre définitif. L'option retenue consiste à ouvrir les deux principaux types de postes de gestion aux candidatures tant externes qu'internes. Cela signifie que les agents statutaires pourront décrocher ce mandat. Les deux niveaux de gestion inférieurs sont réservés aux agents statutaires. Les membres de la cellule stratégique seront sélectionnés sur la base de profils de compétences et ces postes seront ouverts à la fois aux candidats internes et aux candidats externes.
Les postes des deux premières catégories seront toutefois ouverts tant aux agents en place qu'aux extérieurs, et ce conformément aux conditions du marché. À l'heure actuelle, l'État ne rémunère pas les fonctionnaires dirigeants d'une manière conforme aux conditions du marché.
Les postes de la troisième et de la quatrième catégorie seraient attribués uniquement en interne, en veillant aussi à donner leur chance aux jeunes fonctionnaires dont on a pu distinguer les capacités à diriger.
Ceux-ci bénéficieront alors d'un sympathical leave pour leur permettre de suivre un cours présélectionné donnant accès au titre de diplômé en études spécialisées (formation académique continue).
Des négociations sont en cours à ce sujet avec l'Institut Solvay et avec le « Instituut voor overheidsmanagement » à Louvain.
Trente à quarante personnes pourraient suivre ce cours chaque année.
L'avantage des catégories 3 et 4 est que les « internes » pourront acquérir une expérience leur permettant plus tard d'entrer en compétition avec les « externes » des catégories 1 et 2.
Le conseil stratégique est présidé par le ministre. Il s'agit en fait du conseil de gestion.
En dessous de lui, il y a le comité de direction. Il est responsable du fonctionnement journalier du ministère.
Le ministre peut être présent, mais ne fait pas partie du comité. Il n'entre toutefois pas dans les habitudes d'un chef d'entreprise de rendre visite à son comité de direction.
S'il doit s'y rendre, il y a un problème :
soit le ministre s'y rend parce qu'il n'a pas compris le système;
soit le comité ne fonctionne pas et il y a là un manquement imputable à l'un ou l'autre mandataire, dont il faut alors révoquer le mandat.
La cellule stratégique est composée de gens sélectionnés spécialement pour leurs compétences dans l'exécution de l'accord gouvernemental. Il est logique que le ministre prenne régulièrement le pouls de cette cellule et y prenne la parole.
Le modèle des matrices est dépassé parce que c'est un modèle hiérarchique. Certains départements ont une fonction horizontale. S'ils installent une matrice virtuelle, en tant que département de haute compétence, ils décideront des grandes lignes et ce seront leurs homonymes dans le staff des départements verticaux qui se chargeront de l'exécution.
Il y aura un lien horizontal entre le spécialiste et son équivalent du département vertical, mais qui ne sera pas un lien hiérarchique.
La Fonction publique va changer complètement de nature, en ce sens qu'alors qu'actuellement il réglemente et qu'il contrôle, il sera davantage orienté vers le niveau des ressources humaines et la gestion, ainsi que celui de l'organisation.
Pour le ministère du Budget, on discutera surtout du cycle de contrôle. Il y aura plutôt un contrôle ex post qu'ex ante.
La Cour des comptes est une émanation du Parlement et il serait préférable qu'elle remplisse une fonction d'audit externe. On pourrait avoir alors un dialogue permettant de dégager des solutions qui amélioreront l'ensemble.
Les cellules de gestion des ressources humaines sont nécessaires pour donner aux nouveaux dirigeants une chance de mettre en oeuvre leur politique. Tous les départements horizontaux devront se doter de cellules de gestion des ressources humaines avec du personnel possédant des compétences spécifiques.
Il en va de même pour les TIC.
Tout cela implique un système d'entretiens de fonctionnement qui doivent permettre de mettre aussi en avant des objectifs de développement du personnel, y compris l'offre complémentaire spécifique de formation de cadres supérieurs, en réponse aux lacunes constatées lors de l'évaluation.
Donner un premier mandat aux personnes en poste n'offre aucune garantie d'un bon « transfert de propriété ». Il suffit que l'initiateur du processus de changement disparaisse pour voir surgir immédiatement des phénomènes de régression.
Pour être certain de réussir, il faut qu'une fonction cruciale de gestion soit occupée par des personnes qui portent toutes sans exception le processus de changement au long des années. Il s'agit d'un changement permanent dont seule l'intensité varie.
La plus-value de l'enquête du gouvernement sur l'opération Copernic est en fait inexistante.
Un processus de changement est toujours amorcé par une élite qui formule ses projets et qui se cherche ensuite des partisans. C'est ce qui se passe ici : on cherche des moyens permettant aux partisans de mettre en oeuvre le processus aux centres névralgiques.
De très nombreuses personnes sont associées à la mise en oeuvre. À ce stade, il s'agit de ce que l'on appelle un « processor-engineering », dans le cadre duquel on travaille du bas vers le haut.
Un plan de gestion n'a rien de passionnant pour le citoyen, car trop technocratique.
Ce qui intéresse par contre le citoyen, c'est le résultat. C'est pourquoi il est le client ou l'usager obligé. Il doit aussi pouvoir entrer en communication avec les pouvoirs publics.
Un plan technique ne l'intéresse pas.
Il y a certes un lien entre qualité et stratégie. Les objectifs sont définis pour la première fois. Dans une bureaucratie, le volet communication fait défaut. L'objectif est censé être porté par tous. Les priorités sont à présent intégrées, afin que l'on puisse atteindre les objectifs de qualité et procéder à une évaluation critique.
Le politique peut à nouveau en discuter en raison de la transparence, sans se heurter à des explications ou une mystification bureaucratiques.
L'évaluation n'est pas encore présente dans le plan Copernic, si ce n'est dans les grandes lignes.
Quelque 21 processus parallèles sont en cours.
Le recrutement ne devrait idéalement pas tenir compte du diplôme. Mais ce critère a finalement été retenu sous la pression des syndicats. Le diplôme est prépondérant lors de l'embauche, mais on peut déroger à l'obligation de diplôme dans une série de cas.
Après le stade de l'engagement, c'est la gestion des compétences qui doit primer, ce qui implique la mise en oeuvre de méthodes allant jusqu'à la reconnaissance temporaire de l'expertise (une évolution salariale permettant de sortir des échelles liées au niveau de diplôme).
Selon lui, l'instauration de ce système ne nécessitera pas de grandes modifications légales, sauf par exemple en ce qui concerne les exigences linguistiques liées aux fonctions de gestion. Le système des adjoints linguistiques n'est pas vraiment un système heureux. Modifier ce genre de choses suppose une loi.
Pour le reste, des arrêtés suffiront.
Une membre s'interroge sur le mesurage du rendement.
Le ministre répond que tout est lié à la qualité. L'on doit définir les objectifs et comparer les réalisations avec ces objectifs.
On n'est rentable que si l'on obtient son résultat avec les moyens alloués. À l'opposé de ce qui se passe dans les entreprises qui ne regardent que le bilan, l'on doit à l'État non pas se soucier de bénéfices, mais déterminer la rentabilité en fonction de processus en cours et d'objectifs fixés à l'avance.
Les objectifs définis seront classés par degré de priorité et la rentabilité dépendra de la réalisation de ces objectifs dans le bon ordre. Il y aura régulièrement une évaluation ex post qui vérifiera cette réalisation et qui vérifiera en plus s'il n'y a pas de facteurs exogènes survenus en cours d'exécution qui ont influencé l'évaluation ex post. Si c'est le cas, il faut intégrer ces facteurs dans un nouvel examen de priorités ex ante.
Un autre aspect de la rentabilité est d'estimer la charge de travail qu'exige tel ou tel autre projet. Dans ce domaine-là, il n'y a pas beaucoup de différence entre l'État et le secteur privé.
Le secteur public doit accepter ce principe.
Une autre membre constate que l'on introduit beaucoup de jargon du management. On sait toutefois que ces notions ne sont pas applicables aux secteur public. Il y a tout d'abord le débat sur la notion de cliente, ensuite, le débat sur la manière dont on peut élaborer, mesurer et évaluer les normes de qualité, sans tenir compte des notions de bénéfice et de perte. Il y a, au sein du secteur public, une notion d'intérêt général qui ne s'accorde pas avec le concept de management d'une entreprise privée.
On ne pourra, par exemple, pas choisir un autre bureau des contributions si le bureau compétent ne fait pas bien son travail.
Il faut dès lors appliquer les objectifs de qualité dans le contexte plus large de l'intérêt général et de l'intérêt des autres administrations. Il ne faudrait pas mettre d'autres administrations en difficulté en voulant travailler trop efficacement.
L'intervenante s'interroge également sur l'élaboration d'une architecture informatique. Cette architecture vaudra-t-elle uniquement pour la fonction publique fédérale ou vaudra-t-elle aussi pour les parastataux ou d'autres services ? Il faudra le cas échéant créer un intranet.
La réorganisation concernant le personnel des ministères aura-t-elle également une incidence sur les parastataux ?
La préopinante a le même souci pour l'Office des étrangers.
Un autre membre demande s'il peut savoir quelles seront les suites du questionnaire quand on sait qu'il est mal conçu. Les gens ne sont peut-être pas assez motivés pour aller jusqu'au bout du questionnaire ou sont peut-être mal informés pour comprendre la portée de celui-ci.
Les réponses seront donc à l'avenant. Une enquête ciblée aurait donné des résultats plus fiables.
Comment ces billets vont-ils être dépouillés ? Va-t-on tenir compte du fait que le questionnaire est tout à fait suggestif, c'est-à-dire qu'il mène tout droit à la réponse espérée ou trop simpliste, dans la mesure où celui qui veut y répondre doit déjà disposer d'une connaissance du fonctionnement de l'État ?
Par rapport à la sélection en deux étapes préconisée par le ministre, il ne peut qu'applaudir si cela change le système actuel de sélection qui est très désuet. Les connaissances requises sont en décalage constant avec les aptitudes demandées sur le terrain. Il se rappelle que des gens très compétents ont été recalés pour la Coopération au développement, tandis que ceux qui ont réussi la sélection n'ont pu démontrer que très peu de capacités de management sur le terrain.
Va-t-on faire appel à des bureaux extérieurs ? Là aussi, il a des appréhensions, à en voir des candidats qui avaient été présélectionnés par un bureau privé.
Il faut donc bien réfléchir avant de trancher la question.
Le ministre commence par dire que les réticences éventuelles concernant l'application de méthodes de management empruntées à certaines entreprises privées anglo-saxonnes ne sont pas justifiées. Il estime que ces méthodes sont bel et bien applicables mutatis mutandis. Dans la plupart des cas, l'opposition à ces méthodes n'est qu'un prétexte pour éluder le débat.
Il y a des similitudes entre le secteur public et le secteur privé. Il y a tout d'abord le cas des méga-entreprises qui risquent en permanence de se bureaucratiser, ce qui vaut pour ce qui est tant du secteur privé que du secteur public. Le ministre cite l'exemple de Philips. Aux États-Unis, il y a eu dans les années 70 la théorie qui avait prescrit une structure centralisée rigide. Cette structure n'a pas fonctionné efficacement, d'où le succès que les entités autonomes et la technique du management par objectifs (= targets) ont eu dans les années 80.
Il y aura ainsi une responsabilisation d'entités de plus en plus petites et le moment crucial sera celui de la conclusion de contrats relatifs aux objectifs en question (= contrats de gestion).
L'on créera ainsi une véritable atmosphère de responsabilité.
Le meilleur management est celui qui s'inspire de modèles existants et qui les applique aux circonstances du moment. Certains éléments de la politique des ressources humaines sont communs au secteur privé et au secteur public. Tel est le cas de la gestion des compétences.
C'est au niveau de l'évaluation que l'on voit apparaître des différences fondamentales. Dans le secteur public, le bilan des pertes et profits est remplacé par un système complexe.
La notion de « client » n'est pas la même dans le secteur privé que dans le secteur public. Le contribuable est un client obligé. C'est pourquoi il faut procéder à une évaluation ex ante concernant chaque processus. On peut disposer, par exemple, qu'un prisonnier peut jouir de certaines libertés et il faut garantir celles-ci au maximum (par exemple des soins adéquats). L'intérêt collectif prime certains désidératas individuels et l'analyse du bilan coûts et profits exclut certaines choses (par exemple une visite tous les deux jours de la famille).
Il y a également le problème du respect de la norme (en droit fiscal, par exemple, le fait d'accorder toutes sortes de dérogations en rend le contrôle très difficile).
En fonction de cela, on peut accorder certains droits au client et, notamment, lui accorder un délai pour qu'il puisse parvenir à une décision.
Aux États-Unis, l'interaction entre le secteur public et le secteur privé a été beaucoup plus importante. Les deux secteurs ont appris des choses au contact l'un de l'autre. Cela se reflète notamment au niveau de la formation universitaire où l'on constate une interpénétration plus grande des deux secteurs.
Dans cette optique, la consultation est un instrument utile dans la mesure où il permet, par exemple, d'identifier de nouveaux facteurs exogènes. Un sondage général concernant le niveau de satisfaction aura son importance, notamment en ce qui concerne les droits que le Sénat a mis lui-même en perspective vis-à-vis des citoyens.
L'enquête du gouvernement n'a jamais eu la prétention d'être scientifique. Le but est une enquête avec une signification politique. Une possible conséquence serait de donner l'idée à la population qu'elle puisse dialoguer autrement avec les gouvernants que par le passé.
La gestion TIC dépasse le cadre de l'autorité fédérale. Elle comprend également les parastataux et des phénomènes comme la banque-carrefour qui fait office de modèle, y compris pour l'étranger.
Au département des Finances, il y a un environnement de macro-ordinateur qui correspond à ce qui était considéré comme la norme il y a dix ans. Comme les huit à neuf macro-ordinateurs dont dispose le département ont été livrés par des firmes différentes, ils ne peuvent pas tous être interconnectés.
Il y a donc du pain sur la planche.
Le plus important dans l'élaboration d'un E-Government est de réaliser un portail ainsi qu'un PKI. Ce portail ne pourra toutefois fonctionner que lorsqu'on aura informatisé l'ensemble des services administratifs.
Il y a lieu également de conclure un protocole avec les communautés et régions.
L'Office des étrangers sera repris comme les autres services dans l'organigramme et ensuite dans le processus des re-engineering des processus.
Le ministre a vu par exemple trois managers TIC comme candidats, dont il en a retenu deux qui étaient équivalents. Il a choisi M. Verhulst parce que son caractère est plus conciliable avec l'environnement dans lequel il faut travailler.
Il faut rechercher les bureaux externes de la meilleure qualité pour avoir un bon résultat qui n'est toutefois pas absolu.
3.1.1. Les négociations au Comité commun des services publics nationaux, communautaires et régionaux (Comité B)
Le ministre de la Fonction publique et de la Modernisation de l'administration n'a pas attendu l'organisation d'une « concertation populaire » pour mettre ses projets de modernisation à exécution.
La modification de l'arrêté royal fixant les principes généraux du statut administratif et pécuniaire des agents de l'État (ARPG) ne figurait pas au programme de ce gouvernement. Ce fut le premier travail du ministre Van den Bossche.
La CCSP a accepté la modification de cet ARPG.
Elle considère que la décision de confier, en matière de fixation des statuts administratif et pécuniaire, plus d'autonomie aux gouvernements des entités fédérées relève de la responsabilité politique du gouvernement fédéral.
Elle a obtenu en négociation de sérieuses améliorations au projet initial, même si elle admet que le danger réside dans la manière dont les gouvernements du fédéral, des communautés et des régions vont traduire ces principes dans les statuts de leur personnel.
La CCSP a accepté le projet d'arrêté royal créant les cellules de gestion des ressources humaines dans les ministères fédéraux et prévoyant le recrutement de 14 experts en gestion des ressources humaines (externes et internes).
Elle n'a pas accepté le projet d'arrêté royal « régularisant » le recrutement d'un manager TIC sous les liens d'un contrat d'emploi (tâches auxiliaires et spécifiques). Elle souligne à cet égard qu'il y a une indécence à recruter un expert externe avec une rémunération au moins trois fois supérieure à celle des fonctionnaires dirigeants de la Fonction publique fédérale.
Elle a refusé de cautionner les projets d'arrêté royal relatifs aux nouvelles méthodes de sélection dans la fonction publique fédérale estimant qu'elles n'offraient pas les mêmes garanties d'objectivité que les procédures actuelles.
3.1.2. La modernisation de la Fonction publique fédérale
La CCSP s'est résolument engagée sur la voie de la modernisation de la Fonction publique. Le thème de son congrès statutaire d'octobre 2000 est d'ailleurs consacré à cette problématique.
Elle entend participer activement à la mise en place d'une administration moderne offrant un service de qualité au citoyen (appellation qu'elle préfère à la notion de client).
Elle rappelle que la réforme proposée par le gouvernement fédéral le plan Copernic provoquera un « choc culturel » dans les services publics fédéraux et qu'il conviendra dès lors d'attacher une grande importance aux préoccupations des agents telles que relayées par les organisations syndicales.
L'on ne peut faire table rase des situations existantes et ignorer les modifications positives intervenues ces dernières années dans la gestion des services publics.
Le ministre rencontre d'ores et déjà de façon informelle les organisations syndicales.
Un contact mensuel est prévu il ne s'agit évidemment pas de négociations pour faire le point sur l'évolution du dossier de la modernisation des services publics fédéraux.
Après une première présentation du rapport Copernic aux organisations syndicales, la CCSP a résumé ses premiers éléments d'analyse dans une note technique du 25 février 2000 remise au ministre.
Elle constate que le Conseil des ministres qui a finalement approuvé le plan Copernic n'a pas porté beaucoup d'intérêt à ces remarques, qui concernent :
la gestion des services publics fédéraux par des structures « apolitiques » peuplées de « mandataires » désignés par le pouvoir politique pour la durée d'une législature;
une forme de privatisation de la fonction publique fédérale par l'introduction de méthodes de gestion du privé et surtout le recrutement d'experts externes contractuels;
le glissement progressif d'une fonction publique statutaire vers une fonction publique contractuelle;
des moyens budgétaires réservés sans doute à quelques « super-managers »;
l'absence de perspectives pour une grande majorité d'agents qui ne sont pas directement concernés par un plan de modernisation qui remet avant tout en cause la gestion « bureaucratique » de l'administration et le « confort » des fonctions dirigeantes.
Une enquête interne à la CCSP 70 questions auxquelles plus de 500 affiliés ont répondu a permis de mieux cerner le sentiment des agents par rapport au projet de modernisation de la Fonction publique fédérale :
La réforme est nécessaire mais le scepticisme est grand.
L'autonomie de gestion est une solution mais les agents n'y croient pas parce que le « politique » voudra toujours avoir voix au chapitre.
La gestion du personnel pose problème.
Un meilleur service à la population passe par une décentralisation des services et un meilleur échange de données et d'informations.
Le travail à l'administration fédérale a perdu son attrait et il faut revaloriser le régime de rémunération (et les carrières).
3.1.3. La consultation populaire
Pour la CCSP, la consultation populaire décidée par le gouvernement relève d'une fumisterie qui ne servira en rien la réforme mais constituera sans doute un coup médiatique à quelques mois d'un scrutin électoral.
Des juristes éminents ont exprimé des doutes quant à la légalité de cette initiative. Le gouvernement a par ailleurs renoncé à prendre un arrêté royal organisant cette consultation craignant sans doute un éventuel recours au Conseil d'État.
La question n'est pas de prendre position « pour » ou « contre » le principe de la consultation populaire qui est une des formes de l'exercice de la démocratie.
Un représentant du premier ministre et le chef de cabinet du ministre de la Fonction publique ont rencontré les organisations syndicales et leur ont communiqué le mercredi 17 mai 2000 le projet de questionnaire approuvé par le Conseil des ministres du vendredi 19 mai 2000.
Si la procédure d'expédition et de renvoi des bulletins est connue, les modalités de dépouillement de l'enquête ne sont apparemment pas encore fixées.
Le projet de fascicule qui présentera les lignes de force de la réforme et le questionnaire ont été remis aux organisations syndicales.
Force est de constater que l'homme de la rue maîtrise encore très mal la notion de fonction publique fédérale et que la confusion est réelle.
Un tel amalgame ne risque-t-il pas de faire porter au service public fédéral la responsabilité de l'ensemble des dysfonctionnements de tous les services publics ?
L'enquête se fera durant le mois de juin, période à laquelle le citoyen contribuable est invité à remplir sa déclaration d'impôts, ce qui risque d'influencer le type de réponses apportées aux questions.
Les non-initiés se laisseront sans doute duper mais comment accorder un crédit à un questionnaire qui se résume à 11 questions d'une banalité déconcertante et qui suggèrent quasi les réponses ?
Une consultation d'une telle envergure (8 300 000 citoyens, toutes nationalités confondues) sur des sujets aussi essentiels aurait mérité une approche davantage scientifique.
Il existe par ailleurs d'autres moyens pour connaître l'opinion des citoyens et la CCSP aurait préféré que les nombreuses administrations publiques réalisent auprès des citoyens qui font appel à leurs services une enquête de satisfaction.
La CCSP ne peut par ailleurs admettre que le questionnaire interroge le citoyen sur des matières relatives au statut des agents qui relèvent directement de la négociation ou de la concertation syndicale.
Elle souligne enfin que, sur le plan de la simplification administrative domaine où des actions politiques sont indispensables , le gouvernement ne propose rien alors qu'un Commissariat à la simplification administrative a été créé et que le citoyen est en droit de s'interroger sur les initiatives prises pour simplifier la nature de ses rapports avec l'administration.
Les 80 millions utilisés pour cette initiative auraient pu être utilisés à d'autres fins.
3.2.1. Observations générales
Le Syndicat libre de la fonction publique (SLFP) peut souscrire pleinement aux objectifs définis par le gouvernement et que doit atteindre un secteur public fédéral moderne et performant.
En effet, ces objectifs correspondent quasi entièrement au point de vue défendu par le SLFP depuis 1987.
On peut toutefois se demander si les moyens prévus sont suffisants pour pouvoir les atteindre, même si on les considère comme réalistes, eu égard au fait qu'ils sont déjà appliqués à l'étranger et qu'ils correspondent à une série de tendances étrangères en matière de Human Resources Management, c'est-à-dire des tendances qui se font jour dans le cadre du management du secteur public dans une série d'autres pays.
Comme, par définition, des tendances ne peuvent qu'être descriptives, on ne peut ni y porter atteinte ni formuler des critiques à leur égard. Pourtant, ces tendances ne sont que des tendances.
On peut se demander s'il est indiqué de partir, sans autre justification, de l'idée de base qu'il n'existe qu'une seule méthode efficace pour remédier à certains dysfonctionnements qui surviennent au sein des administrations fédérales, à savoir celle qui passe par :
un projet de management qui tient compte de ces tendances;
dont la finalité serait purement financière;
et qui se fonderait entièrement sur des structures organisationnelles de droit privé.
Cette stratégie qui permettrait de résoudre les problèmes, à ce que l'on dit, et qui est présentée comme une panacée, soulève des questions :
1º pourquoi faut-il transposer au niveau de l'administration fédérale belge les tendances qui existent à l'étranger ?
2º pourquoi le recours à des structures organisationnelles du secteur privé compétitif et de moyens qui sont utilisés dans ce secteur pour améliorer la qualité devrait-elle nécessairement répondre à des critères d'efficacité et d'effectivité dans le secteur public ?
3º dans quelle mesure la mise en oeuvre peut-elle s'intégrer :
dans la culture administrative belge en général;
dans les segments du secteur public où il est impossible ou difficile de mesurer « l'output » et la « qualité » des services fournis ?
La stratégie qui permet de résoudre les problèmes se base également, à juste titre, sur une série de « missions » et de « valeurs » qui doivent faire partie intégrante de la fonction publique fédérale.
Le SLFP ne peut toutefois pas s'accommoder de l'effet stigmatisant que la stratégie de solution a pour un grand nombre d'agents des services publics fédéraux qui, à l'heure actuelle, travaillent avec zèle et s'acquittent de leurs fonctions de manière efficace et effective.
Bien qu'il y ait indiscutablement des manquements, on ne peut pas nier que nombre d'agents incarnent ces missions et ces valeurs dans le cadre de leurs fonctions. De plus, il est un fait que les autorités politiques sont responsables au moins en partie de l'image très négative dont la fonction publique est affublée et pas toujours à tort.
Le SLFP souhaite ajouter que « le renforcement de la sensibilisation à la problématique de la qualité et la mise en place d'un contrôle de qualité » constituent une des conditions permettant d'atteindre l'objectif et revêtent dès lors une importance essentielle pour la réussite de la réforme.
La perception qu'ont les fonctionnaires tant de leurs prestations personnelles que de celles de l'administration ou de la partie de celle-ci où ils exercent leur fonction est bien sûr un élément déterminant dans le cadre de la mise en oeuvre d'un processus de changement stratégique.
Le SLFP n'a pas encore la moindre idée de la manière dont cette perception fera l'objet d'un accompagnement justifié sur des bases scientifiques. La mise en oeuvre d'un modèle de « gestion de la qualité » doit être le point de départ. Le plus urgent est donc d'introduire un modèle unique. Ce genre de modèle s'intéresse à la manière dont la politique de personnel doit être menée dans une organisation hautement performante. Il est en effet fonction de la qualité en général et des performances en particulier.
Le SLFP n'aperçoit pas encore clairement qui seront ces personnes responsables de l'« approche optimale du travail de préparation et d'évaluation de la politique », de l'« organisation plus transparente de la mise en oeuvre de la politique et du contrôle de cette mise en oeuvre » et de la manière dont il sera satisfait de manière spécifique aux conditions permettant d'atteindre l'objectif, « et savoir transformer la fonction publique fédérale en une organisation moderne, soucieuse du client ».
L'essentiel des solutions proposées jusqu'à ce jour pour ce qui est de la politique du personnel modernisée porte uniquement sur le sommet de la pyramide de la fonction publique fédérale.
On manque cruellement d'informations sur le statut à modifier de la grande majorité des autres agents. Le SLFP a cependant l'impression que la protection dont le fonctionnaire jouit traditionnellement sera fortement rabotée de par la mise en oeuvre d'une politique du personnel aux accents inspirés par ce qui a cours dans le privé, sans être contrebalancée par les mesures de protection qui sont régies pour le secteur privé par les conventions collectives de travail (par exemple en vertu de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires.
Le SLFP rejette une « individualisation » plus poussée du statut des agents de l'État si celle-ci ne va pas de pair avec une « collectivisation » accrue de la protection, analogue à celle du secteur privé. Sinon, l'insécurité sera plus grande dans le secteur public que dans le secteur privé.
Le SLFP déplore que les autorités n'aient pas encore profité de l'occasion pour apporter au statut les modifications jugées nécessaires en adoptant un nouvel arrêté royal plutôt qu'en modifiant le statut du 2 octobre 1937. L'énumération de toutes les modifications apportées à ce statut prend déjà plus d'une page à elle seule.
De plus, il n'est pas indiqué d'insérer dans l'« ancien » statut des concepts « modernes » relevant de la gestion des ressources humaines. Le SLFP déplore en outre de ne pas disposer d'un aperçu complet de l'ensemble des modifications que le gouvernement fédéral entend apporter au statut. Présentées littéralement au compte-gouttes, les modifications proposées relèvent tantôt de la casuistique et s'inscrivent tantôt dans un projet global dans lequel elles sont défendables en tout ou en partie.
3.2.2. Observations spécifiques
a. Compétences et potentiel comme critères de sélection et d'évolution de carrière
Le SLFP est tout à fait conscient du fait que les diplômes ne constituent plus le seul critère de compétence. Ils fournissent toutefois une indication significative du « degré d'instruction » des candidats, tant sur le plan général (niveau d'enseignement) que sur le plan spécifique (orientation des études).
Il n'empêche qu'en mettant exclusivement l'accent sur la « concordance » entre les profils de compétence et les profils de fonction, l'on rompt, en fait et en droit, avec les caractéristiques de la notion de « fonctionnaire ».
L'essentiel dans la distinction qui est faite entre le « fonctionnaire » et le « membre du personnel contractuel », réside dans la nature des tâches et des missions. Pour ce qui est du personnel contractuel, elles sont fixées, d'une manière plus ou moins concertée, dans le contrat de travail qui le lie à l'employeur. Elles ne peuvent pas être modifiées unilatéralement par la suite. Les membres du personnel contractuels sont engagés en vue de l'exercice d'une fonction spécifique.
Il n'en était pas ainsi jusqu'à présent pour ce qui est des fonctionnaires, sauf en ce qui concerne une série de fonctions vraiment spécialisées. Conformément aux principes de la « variabilité » et de la « continuité » du service public, les pouvoirs publics peuvent d'ailleurs modifier unilatéralement le contenu des tâches et des missions qu'ils confient aux fonctionnaires.
Eu égard à ces principes, l'on a, dans la grande majorité des cas, veillé, lors du recrutement des fonctionnaires, à ce que les candidats retenus puissent être affectés à une large gamme de fonctions. Il faut continuer à le faire, même dans une société extrêmement technique, complexe, et sujette à des évolutions rapides. En effet, une telle société a besoin, non seulement de managers et d'experts, mais aussi et surtout de fonctionnaires qui peuvent se faire une idée d'ensemble des diverses matières qui relèvent du secteur public ou, en tout cas, d'une partie de celles-ci, et qui peuvent en établir et en conserver un aperçu complet ou partiel.
Le SLFP se demande dès lors si la « concordance » entre les profils de compétence et les profils de fonction est tout à fait justifiée pour ce qui est des « nouveaux » collaborateurs du cadre des hauts fonctionnaires et si cela ne débouchera pas, à terme, sur une exaltation outrancière et « mutilante » des spécialisations.
Les personnes qui ne sont pas titulaires d'un diplôme ou d'un certificat d'études correspondant au niveau du grade à conférer pourraient quand même devenir fonctionnaires publics à ce niveau. Elles peuvent être admises aux sélections comparatives qui précèdent le stage. Cette dérogation ne serait possible qu'en cas de pénurie sur le marché du travail et en cas de besoin dû à une circonstance particulière.
De plus, les titulaires d'un diplôme ou d'un certificat d'études qui donne accès à un niveau déterminé ne peuvent pas s'inscrire en vue d'une sélection comparative pour une fonction d'un niveau inférieur. Des dérogations à cette règle sont possibles dans des cas non précisés. Le SLFP estime qu'il y a lieu de limiter la possibilité de dérogation aux cas dans lesquels il y a pénurie sur le marché du travail et aux cas d'autres circonstances particulières nécessitant une dérogation.
b. Objectiver la sélection et les nominations
Il ne faut bien entendu pas rejeter par définition la sélection de candidats opérée sur la base des compétences, des connaissances et des aptitudes, et non plus sur la base du seul diplôme. On ne peut toutefois pas parler à cet égard d'une objectivation de la sélection. L'appréciation des compétences, des connaissances et des aptitudes en fonction d'autres critères que les diplômes constitue en effet, en soi, un élément, certes subjectif, mais pas nécessairement négatif.
Le gouvernement fédéral souhaite recourir à une nouvelle méthode de sélection pour les fonctions nécessitant de grandes connaissances, des aptitudes particulières ou une large expérience. On procéderait à cet effet à des sélections comparatives avec classement des candidats en catégorie A, B, C ou D selon le niveau de compétence acquis.
Ce système appelle nécessairement des réserves pour les raisons suivantes :
(a) les termes « grandes connaissances », « aptitudes particulières » ou « large expérience » prêtent à interprétation en raison de leur imprécision, d'où une incertitude quant à la validité des sélections et du recrutement des agents de l'État qui s'ensuit;
(b) on ne voit pas clairement quelle relation il y a entre les termes « grandes connaissances », « aptitudes particulières » ou « large expérience » et les termes « tâches nécessitant des connaissances particulières ou une large expérience de haut niveau », figurant à l'article 2, § 1er, 4º, du projet d'arrêté royal fixant les principes généraux du statut administratif et pécuniaire des agents de l'État applicables au personnel des services des gouvernements de communauté et de région et des collèges de la Commission communautaire commune et de la Commission communautaire française ainsi qu'aux personnes morales de droit public qui en dépendent, au sujet duquel divers protocoles ont été signés récemment au sein du comité des services publics fédéraux, communautaires et régionaux;
(c) cette nouvelle méthode de sélection constitue une obligation et il n'y aura plus aucune possibilité d'organiser, pour les fonctions nécessitant de grandes connaissances, des aptitudes particulières ou une large expérience, une sélection comparative aboutissant au classement des lauréats entre eux;
(d) le classement des lauréats les uns par rapport aux autres offre la plus grande garantie d'objectivité.
c. Possibilités d'auto-développement et d'amélioration des compétences
Selon les propositions du gouvernement fédéral, on optera de plus en plus, à côté de la carrière de management classique, pour des fonctions d'experts, qui seront de même niveau que les fonctions de management, tant sur le plan du statut que sur celui de la rémunération. Le SLFP doute fortement de la faisabilité de cet objectif.
d. Modernisation du système de rémunération
Le gouvernement fédéral estime que l'évolution des éléments de la rémunération doit être en relation directe avec les développements sur le marché du travail et qu'elle devrait, idéalement, réagir rapidement à ces développements sans perdre sa stabilité et sa cohérence (sentiment d'objectivité et d'honnêteté).
Le SLFP fait remarquer que les articles 10 et 11 de la Constitution ne garantissent pas seulement le sentiment d'objectivité et d'honnêteté, mais l'objectivité et l'honnêteté elles-mêmes.
e. Extension de l'occupation contractuelle dans le secteur public fédéral
Le SLFP estime que l'occupation contractuelle peut être indiquée ou nécessaire dans un certain nombre de services et/ou de fonctions publics, mais il faut que l'occupation contractuelle s'inscrive strictement dans les limites de la réglementation existante. Le gouvernement fédéral a déjà soumis pour négociation aux organisations syndicales des propositions qui permettent de conférer certaines fonctions de promotion sur une base contractuelle.
Le SLFP souligne en outre expressément que la situation de concurrence d'une personne morale de droit public avec d'autres opérateurs publics de marché ne justifie pas une occupation contractuelle.
Enfin, il estime qu'avant de recourir à des contractuels, il y a lieu de lancer un appel aux agents statutaires, tant du secteur public fédéral que des entités fédérées (communautés, régions et commissions communautaires), lorsqu'il s'agit d'engager des « experts » statutaires, que ce soit au niveau du recrutement ou à celui des promotions, et ce en tenant compte des conditions définies dans un accord de collaboration conclu entre le gouvernement fédéral et les entités fédérées.
3.3.1. M. Biamont rappelle que, par rapport à la philosophie de la réforme, il considère que toute fonction publique doit s'adapter continuellement aux besoins de la demande.
Il lui aurait semblé logique et rationnel que le gouvernement consulte d'abord le « marché » avant de réformer le secteur public fédéral. Le gouvernement agit en sens inverse : il réforme d'abord et demande ensuite à la population ce qu'elle en pense, comme s'il était possible de faire marche arrière.
3.3.2. À propos de l'objectif visé qui est d'organiser une fonction publique qui rende de meilleurs services aux moindres coûts, la CGSP aurait préféré que le secteur public fédéral soit restructuré de manière à ce qu'il soit capable de garantir aux citoyens la cohésion sociale. On constate qu'il y a dans notre société des exclus de toute sorte : les personnes exclues du logement, du travail, de la société, de l'enseignement. Notre secteur public devrait être structuré pour éviter ou endiguer le flot des exclus. Le gouvernement préfère restructurer le secteur public pour rendre service « aux clients » au moindre coût.
3.3.3. La philosophie de la réforme
La première question que le gouvernement va poser aux citoyens concerne la philosophie de la réforme.
Dans le plan « Copernic », l'on part du principe que l'administration n'a de sens que dans la mesure où elle vient en aide aux entreprises. À aucun moment, on sent une réelle volonté de restructuration qui tienne compte de la demande du citoyen.
La ligne directrice de la réforme, qui est déjà connue, et annoncée par le ministre Van den Bossche lors d'une réunion avec le comité de négociation B, est que le management domine le droit. Cela veut dire en clair que, comme dans le secteur privé, un employé qui ne plaît pas, même s'il est élu aux élections sociales, sera licencié.
C'est ce système que le ministre Van den Bossche veut introduire dans la fonction publique comme si l'administration pouvait être dirigée comme une entreprise privée qui ne vit que de la perspective de rapporter des bénéfices.
La CGSP réprouve ces notions sans contester toutefois que l'administration peut être améliorée en définissant mieux ses missions et ses moyens.
3.3.4. À propos du questionnaire, la CGSP estime que le fait d'interroger la population sur une matière qu'elle ne connaît pas, pas plus que le fonctionnement de l'administration, est à la limite de la manipulation.
Déjà la première question du formulaire est révélatrice de cette manipulation : qui ne veut pas d'une modernisation de l'administration fédérale. La CGSP va s'employer à « vulgariser » le contenu de cette enquête en expliquant aux citoyens la réalité du sens des questions.
Comment va-t-on utiliser les résultats de l'enquête ? Il n'y a aucune garantie sur l'objectivité de l'utilisation des résultats. Il n'y a aucune réponse non plus à la question relative à la base légale de cette enquête. Le gouvernement a répondu aux syndicats que le Parlement n'était pas compétent en cette matière.
La deuxième question du formulaire porte sur la communication avec l'administration. La CGSP estime que le gouvernement aurait pu se donner la peine d'expliquer au grand public ce que c'est que le « télétexte interactif » « l'internet à domicile ». Cette question n'est donc pas claire. Avec le gouvernement précédent, on avait envisagé de doter les bureaux de La Poste de terminaux internet. Cela n'est pas une mauvaise idée.
La troisième question porte sur l'attitude souhaitée de la part des fonctionnaires. Ceci est peut être une bonne question, mais la CGSP n'est pas convaincue de la sincérité du gouvernement en la matière.
La quatrième question porte sur les améliorations prioritaires (rapidité, simplicité). Jusqu'à présent l'intervenant n'a encore rien vu des résultats du commissaire du gouvernement, Mme André, si ce n'est des notes critiques sur la complexité de cette simplification.
La cinquième question porte sur la promotion des fonctionnaires. On va donc demander aux citoyens comment il faut promouvoir les fonctionnaires. Le ministre Van den Bossche a laissé entendre que le fonctionnaire est un bon à rien et que l'administration est peuplée de petits chefs incompétents. Il oublie de mentionner que son parti, comme les autres d'ailleurs, les a recrutés, promus, favorisés, protégés et couverts pendant cinquante ans.
Maintenant ce même gouvernement va mettre fin à la politisation de l'administration en demandant aux jeunes comment il faut promouvoir les fonctionnaires, alors que le jeune de seize ans doit encore obtenir son diplôme !
En fait, le gouvernement a déjà répondu à cette question. Par la restructuration du Secrétariat permanent de recrutement et son remplacement par SELOR, on a déjà pris un certain nombre de dispositions pour recruter ou promouvoir sans tenir compte du diplôme. Comment peut-on s'imaginer que le citoyen réponde qu'on ne peut pas promouvoir en fonction des compétences ? Le problème est qu'on ne dit pas comment mesurer ces compétences. Quel sera l'effet de pareille question sur quelqu'un qui s'efforce d'obtenir son diplôme ? On lui dit maintenant que ce diplôme n'aura aucune importance étant donné que l'on sera promu en fonction de ses mérites.
Les ministères seront remplacés par des services publics verticaux avec des managers à la tête.
On demande si la population veut que les cabinets ministériels soient supprimés. Cette décision est également déjà prise par le gouvernement.
Le gouvernement vient de recruter unmanager TI qui touche un traitement de pratiquement 10 millions de francs par an. Un secrétaire général, en fin de carrière, gagne le quart de ce que gagne ce M. Verhulst. Et le ministre veut que ce secrétaire général reste motivé.
Le fait que l'on puisse, en dépit de toute la concertation sociale, dans un dialogue singulier entre le ministre de la Fonction publique et le ministre du Budget fixer un tel salaire est une gifle pour les actuels secrétaires généraux.
À propos de l'orientation du plan de réforme, le questionnaire demande, en premier lieu, s'il est préférable que le gouvernement en établisse les lignes de force mais que ce soient les fonctionnaires qui décident eux-mêmes de l'aspect de la gestion journalière.
Peut-on s'imaginer que le comité interministériel, avec un cabinet restreint, intervienne lui-même dans la gestion journalière ? C'est une question qui n'a pas de sens.
En ce qui concerne la deuxième question : « Les fonctionnaires dirigeants de l'administration sont désignés pour une période limitée », M. Biamont fait remarquer que cette décision a été prise déjà par le gouvernement précédent. La CGSP avait des réserves pour les fonctionnaires du rang 15. L'avantage d'un mandat est que le ministre ne pourra plus se cacher derrière « l'hostilité » de son administration.
En ce qui concerne la troisième question : « L'administration publique veut attirer les collaborateurs les plus compétents pour ces fonctions dirigeantes et doit s'ouvrir aux candidats tant internes qu'externes. » M. Biamont rappelle que le gouvernement l'a déjà fait. On nous annonce la suppression de l'article 18 qui permettait les « primo-nominations » mais on fait la même chose autrement en recrutant des externes gagnant quatre fois le salaire d'un secrétaire général.
En ce qui concerne la quatrième question : « Les personnes exerçant une fonction dirigeante doivent être évaluées en fonction de leurs résultats. » La CGSP est d'accord mais rappelle que cela se fera aussi pour les agents qui seront organisés en « business units » en ayant des objectifs collectifs et évalués en fonction de ces objectifs. Cela est un élément positif à condition que l'agent puisse réagir. Ce ne sera certainement pas le cas. Les notions du droit ou de recours sont dépassées par le gouvernement actuel.
La cinquième question porte sur la suppression des cabinets.
M. Biamont rappelle que la question ne dit pas que la suppression des cabinets implique la descente des clients des cabinets dans les cellules stratégiques.
La sixième question porte sur les garanties de qualité des services fédéraux. Cela est parfait à condition que les services disposent de moyens et que la qualité soit mesurable.
La CGSP ne s'oppose pas à une modernisation de la fonction publique mais estime que cela nécessite l'accord et la collaboration des agents. Si les fonctionnaires ne sont pas complices, la réforme n'a aucune chance.
M. Van der Flaes, qui représente la CGSP, mais qui parle en son nom personnel, exprime quelque inquiétude à propos de ce qui se passe. Le Parlement a été élu démocratiquement et parle au nom des électeurs. Les représentants des organisations syndicales ont, eux aussi, été élus démocratiquement et ils représentent leurs membres au cours des concertations et des négociations.
En recourant à une consultation populaire, le gouvernement indique qu'il ne fait guère confiance au Parlement et qu'il n'écoute pas beaucoup les organisations syndicales. Cela gêne énormément l'intervenant.
Peut-être s'agit-il d'une manoeuvre électorale sans plus. Mais, s'il s'avérait que le gouvernement ne souhaite tenir compte ni du Parlement ni des organisations syndicales, l'intervenant veillera à ce que son organisation syndicale bloque les choses.
Un commissaire souligne que le législateur n'a pas été associé à la réforme très importante des services publics. Elle relève des prérogatives du Roi, c'est-à-dire du gouvernement. La commission suivra, certes, l'évolution des choses, et elle fera rapport en la matière, mais les choses seront réglées en grande partie par la voie d'arrêtés royaux.
Une autre commissaire constate que le questionnaire du gouvernement soulève bien des inquiétudes au sein de l'organisation syndicale. Elle ne partage pas le point de vue qui vient d'être développé qu'il n'appartient pas aux syndicats de se prononcer sur la façon dont le gouvernement organise la communication avec la population.
Chaque organisation syndicale perçoit différemment la réforme : l'une estime qu'elle ne concerne qu'un nombre restreint de fonctionnaires, tandis que l'autre la juge radicale et ne tarit pas de commentaires à son sujet.
L'intervenante partage l'avis des organisations syndicales selon lequel une réforme ne peut réussir que dans la mesure où l'on y a associé les fonctionnaires. Une des organisations syndicales (la CCSP) a mené une enquête auprès de ses membres. Les autres organisations syndicales ont-elles fait de même ou envisagent-elles de faire de même ? Comment les fonctionnaires pourraient-ils être associés à la réforme ?
Une autre membre dit n'avoir jamais bien compris le but de la consultation populaire, malgré le fait que bien des questions aient été posées à son sujet.
Quel avantage la consultation telle qu'elle est conçue présente-t-elle ? Elle constitue tout au plus un plébiscite, les réponses aux questions étant déjà connues. En fait, le gouvernement abuse d'un instrument politique important dans la mesure où la consultation n'est qu'une propagande déguisée en sa faveur. S'il entend vraiment améliorer la communication, pourquoi n'interroge-t-il pas d'abord les fonctionnaires eux-mêmes, pour savoir où pourraient surgir des difficultés ?
Pour pouvoir mener à bien les réformes proposées, il faut nécessairement apprécier les choses du point de vue qualitatif, ce qui suppose que l'on ait fixé des objectifs qualitatifs par service, de manière que chaque service et chaque fonctionnaire sachent ce que l'on attend de lui.
Un sénateur ne peut que constater que, selon plusieurs constitutionnalistes, le questionnaire serait inconstitutionnel. C'est pour cette raison que le premier ministre a déclaré qu'il ne s'agissait non pas d'une consultation populaire, mais d'une enquête publique, contrairement aux dispositions de l'accord gouvernemental qui prévoit pourtant une procédure (audit externe, examen général des administrations, évaluation des besoins en personnel), qui est court-circuitée aujourd'hui.
La consultation n'est qu'une action publicitaire du gouvernement. Il estime que cette consultation est même dangereuse puisqu'elle vise à assurer une pression populaire pour faire passer ces réformes et pour pouvoir dépasser certains blocages pouvant venir des organisations syndicales représentatives du personnel de la Fonction publique. La population « dira » comment il faut recruter et promouvoir dans la Fonction publique.
De cette façon, le gouvernement court-circuite la négociation prévue par une loi et des arrêtés d'exécution, alors que le rapport du groupe de travail précise qu'une réforme fondamentale ne réussira pas sans que le personnel y soit associé.
On accuse les syndicats de conservatisme. D'où sa question : est-ce que les syndicats sont d'accord avec une modernisation de la Fonction publique ? Est-ce qu'ils sont d'accord avec une responsabilisation des dirigeants ? Cela mènerait à une plus grande autonomie des administrations vis-à-vis du pouvoir politique et à une plus grande autonomie de décision.
Que pensent les syndicats des recrutements externes de contractuels, pour des périodes limitées dans le temps ?
Que pensent les syndicats du projet de modernisation qui s'attaque à trois niveaux en même temps, à savoir, la modification du statut des agents, la modification de l'organisation interne des départements (contrôle ex nunc) et la restructuration de l'ensemble des structures des ministères. On envisage, par exemple, de scinder les ministères des Finances, de la Santé publique et des Affaires sociales.
Une membre estime que, si certains avaient réalisé les réformes en leur temps, on ne serait pas obligé de discuter des réformes actuelles en les présentant sous un mauvais angle. La Fonction publique a fait, pendant des années, des promesses de modernisation sans jamais les réaliser.
La membre partage les critiques des organisations syndicales. Le danger de l'enquête publique est de se braquer sur la consultation qui risque de devenir un plébiscite. Les questions sont posées d'une telle manière que l'on peut difficilement y répondre négativement. Pour ceux qui défendent un appareil public au service d'un certain nombre de valeurs, l'enquête publique constitue un danger. Il faut donc se concentrer sur la réforme elle-même.
La réforme proposée contient des éléments intéressants qui peuvent améliorer la relation entre le gouvernement et son outil administratif. Un système de mandats peut assurer un bon équilibre dans un pays qui est habitué aux compromis. Prévoir un système de mandats à partir du rang 13 est en contradiction avec cet objectif puisqu'on touche alors à l'organisation même des services.
Un système de mandats n'est utile que pour les fonctionnaires généraux.
La durée du mandat facilitera la relation de confiance entre le ministre et son administration.
Bref, un système de mandats peut favoriser la dynamisation de la direction de l'administration. Le manque de capacité de mobilisation des hauts fonctionnaires actuels fait que l'on avance en ordre dispersé.
À propos de la disparition des cabinets, la membre partage l'analyse des syndicats. Son groupe a toutefois plaidé pour une réduction du volume des cabinets. Les cabinets ont un rôle d'impulsion politique mais le suivi et le traitement des dossiers doit être fait par les administrations. Il se fait que l'expertise de l'administration dans un certain nombre de domaines est contestée par le monde politique.
Dans cette réforme va se poser le problème de la conversion des niveaux 2, 3 et 4. Il est donc indispensable de définir les priorités en matière de la fonction de l'administration. Peut-on concilier les besoins d'efficacité avec le besoin social d'employer des gens qui n'ont peut-être pas beaucoup de chances sur le marché de l'emploi ? Elle peut accepter que la fonction publique a des missions qui dépassent celles de la rentabilité immédiate mais cadrent plutôt avec une rentabilité sociale.
Une autre membre demande si les syndicats envisagent un contrequestionnaire.
Sur l'absence de réaction des fonctionnaires vis-à-vis du plan du ministre de la Fonction publique, M. Biamont répond qu'il est impossible de communiquer avec le ministre.
Il est donc impossible de lui dire que les syndicats ne sont pas d'accord. Cela vaut également pour les fonctionnaires généraux. Cela démontre la considération qu'il a pour les fonctionnaires.
La CGSP n'accepte pas un système de mandats pour les rangs 15.
M. Biamont ne s'oppose pas à la réorganisation du département de la Santé publique et des Affaires sociales. Ce département ne fonctionne pas du tout. La fusion de ces deux départements n'avait aucun sens et la défusion est peut-être le seul aspect qui est acceptable.
Il partage le souci d'un intervenant sur la réorganisation du contrôle des flux financiers tombant sous la compétence exclusive de la Cour des comptes que l'on voudrait voir disparaître, ou de l'Inspection des Finances dont on veut réduire le rôle.
Il se demande d'où vient l'attestation que la réforme ne toucherait que 3 % des agents de l'État. Quand on réforme le système des promotions, il s'agit de l'ensemble des fonctionnaires.
La réforme envisagée constitue une déstructuration de la fonction publique. En introduisant les théories du management dans l'administration, on évoluera vers de grosses difficultés.
Comme l'intervenant, il estime que le gouvernement s'y prend à l'envers de ce qu'il avait déclaré initialement.
Il n'est pas persuadé que l'enquête aura un grand succès. Les syndicats ont demandé au premier ministre à partir de quel pourcentage les réponses seraient considérées comme un élément probant. Ils n'ont pas eu de réponse.
Il est clair aussi que le citoyen va réagir en fonction des derniers contacts avec l'administration. Il ne fera pas de distinction entre les administrations communale, provinciale, régionale, communautaire ou fédérale, La Poste ou les chemins de fer.
La CGSP ne restera pas inactive. Elle va commencer par expliquer, le plus largement possible, la réelle portée des questions. La population a le droit de savoir que l'actuel gouvernement la manipule.
Le premier ministre précédent s'est efforcé d'imposer un système d'évaluation des fonctionnaires. Cela était une grosse erreur. Le gouvernement actuel a suspendu le système d'évaluation.
Les syndicats représentatifs représentent probablement 80 % des agents de l'État. Le gouvernement n'a pas demandé leur avis, si ce n'est que formellement. Les relations avec le ministre Van den Bossche sont extrêmement pénibles, mauvaises et, en tout cas, probablement pas garantes d'une réelle paix sociale ou d'une réussite du plan. On fera l'impossible pour l'empêcher.
M. Herman déclare que le SLFP ne veut pas s'immiscer dans la manière dont le gouvernement communique avec la population. Le syndicat juge toutefois qu'il aurait dû être associé à cette opération. Si une « consultation de la clientèle » n'est certainement pas inopportune, la manière dont on s'y prend aujourd'hui a tout de l'autosatisfaction et ne sert qu'à faire confirmer la décision du gouvernement. La consultation ne permettra pas d'apprendre grand-chose d'utile pour la mise en oeuvre de la réforme.
Les syndicats sont à présent placés devant le fait accompli.
M. Herman ne peut pas se prononcer sur la question de savoir si la consultation est ou non constitutionnelle. Il ne s'agit en tout cas pas d'un référendum. En tout état de cause, il est dangereux de consulter le public sur la manière dont la réforme doit être réalisée. Si l'on ne tient compte que de la compétence, et non plus du diplôme, comme étalon de valeur, on n'a plus aucun critère.
Le SLFP est favorable au système des mandats et à la responsabilisation des fonctionnaires supérieurs. Cependant, vu qu'on entend appliquer ce système à partir du rang 13, les possibilités de carrière de beaucoup de fonctionnaires vont être limitées par la concurrence externe. L'extension du système des mandats jusqu'au rang 13 va donc trop loin.
Dans le passé, on a pas mal abusé du système des contractuels pour répondre à des besoins soi-disant « exceptionnels ». Ces contractuels sont maintenus en service de manière artificielle de sorte qu'à la longue, on ne sait plus très bien ce qu'il faut en faire. À la demande des syndicats, le ministre précédent a converti une série d'emplois contractuels en emplois statutaires. Cette éternelle confusion entre les besoins exceptionnels et le respect d'une fonction statutaire a quelque chose d'incompatible.
La réforme prévue dans l'accord Copernic intervient à trois niveaux. Il est sans doute judicieux de rationaliser certains départements, mais il faut d'abord déterminer avec soin quels sont les services nécessaires.
Tout ce plan de réforme fait penser l'intervenant à la réforme des polices, dans laquelle, après six mois de négociations, on ne connaît toujours pas le nombre d'officiers qui sera nécessaire pour faire fonctionner l'appareil policier.
Il souscrit aux objectifs de qualité énumérés par un membre de la commission. C'est un des moyens les plus importants pour inciter le fonctionnaire à accomplir convenablement sa tâche et donner du sens à sa fonction. La question est de savoir quelle méthode il faut utiliser.
M. De Vos répond que son organisation réfléchit encore à la réaction à donner au questionnaire. L'enquête est, malgré tout, une forme d'exercice de la démocratie et, sur le principe même, il n'a donc pas d'objections majeures. Par contre, son organisation a des objections sur la façon dont l'enquête est organisée.
À propos des remarques d'une membre, M. De Vos estime qu'il existe un syndrome « VDB ». Quelle que soit l'assemblée où VDB se présente, il a un tel pouvoir de persuasion que le public applaudit d'abord et ne réfléchit que par après. Le message VDB passe, à son étonnement, mieux au nord du pays qu'au sud. Peut-être parce qu'il a réformé l'enseignement et l'administration en Flandre. En Wallonie, 70 % de ceux qui ont répondu à l'enquête sont opposés au plan de réforme. Le ministre en est d'ailleurs conscient puisqu'il va lancer un « journal d'entreprise » qui sera différent au nord et au sud.
M. Van den Bossche pratique la transparence et discute mais ne pratique pas la négociation.
On ne peut pas nier non plus qu'on a un ministre de la Fonction publique qui a un projet et qui a le poids politique pour le réaliser. Le ministre semble être conscient du rôle social du service public. Au ministère des Finances, il y a plus de 12 000 agents de niveaux 3 et 4 sur un effectif de 28 000 agents. Le ministre a annoncé des mesures d'accompagnement social pour encourager les départs anticipés.
À propos de la défusion de certains départements, M. De Vos estime qu'il est inquiétant d'entrevoir dans le découpage de certains départements une préfiguration de ce qui pourrait faciliter un transfert de compétences vers les communautés et lés régions. Cela est certainement le cas pour le ministère des Finances.
La CGSP accepte le système de mandats. C'est une des découvertes de l'enquête interne.
Un système de mandats doit être bien précisé et les conséquences doivent être bien définies.
Plus inquiétante est la façon dont on va conférer les missions et responsabilités.
Le ministre est un partisan de « l'assessment » et SELOR deviendra un peu le paravent pour des sélections qui se feront en dehors de SELOR. On fera appel à des bureaux de consultation externes. Or, il n'est pas exact que l'on ne trouve pas d'expertise au sein de l'administration. Cela est un élément de la réforme avec laquelle le CGSP n'est pas d'accord.
Dans sa note technique, le CGSP critique cette forme de privatisation de la gestion publique. La philosophie du management n'est pas du tout transposable au niveau du secteur public comme elle existe au niveau du secteur privé.
Un des véritables problèmes de dysfonctionnement des administrations est précisément tout ce qui a trait à la simplification. Sur ce problème, le gouvernement reste muet. Le commissaire du gouvernement, chargé de la simplification administrative, Mme Anne Andrée-Léonard, n'a encore rien produit à cet égard.
Or, ce qui pose problème dans les rapports avec l'administration, que ce soit dans le chef du patron d'entreprise, ou du citoyen, est le fait de devoir s'adresser à trois, quatre ou dix guichets différents et à des administrations différentes, de devoir remplir les mêmes papiers et communiquer les mêmes renseignements à des administrations différentes, de devoir se déplacer, d'être confrontés à des fonctionnaires qui doivent appliquer des règlements parfois absurdes.
D'où une grande crainte : que cette enquête va être remplie par l'exclu du chômage, par celui qui a été confronté à la justice, que ce soit comme victime ou comme coupable, avec tout le problème du fonctionnement de l'administration pénitentiaire, les longs délais pour les victimes avant qu'un arrêt soit rendu. Tout cela n'a rien à voir avec le fonctionnement de l'administration fédérale telle qu'on veut la soumettre à l'enquête.
M. De Vos rappelle qu'il y a une réforme qui s'organise en douce, celle de l'autonomie de gestion des institutions publiques de sécurité sociale instaurée par une loi. Cette loi prévoit entre autres des indicateurs de performances. Les priorités du ministre Van den Bossche, par contre, sont les départements d'autorité.
La CCSP accepte donc la modernisation au travers de la responsabilisation mais un des grands problèmes de l'administration est la pauvreté des moyens mis à sa disposition (notamment au niveau de l'informatisation). On oublie aussi que, pendant des années, l'on a bloqué les recrutements. Il est vrai qu'il faut harmoniser l'informatisation de l'administration publique fédérale mais la CCSP n'est pas d'accord avec le fait qu'il faut aller chercher quelqu'un du secteur privé pour le faire.
À propos des 3 % touchés par la réforme, M. De Vos rappelle que c'est le ministre lui-même qui a déclaré que la note Copernic ne concerne que 3 % des fonctionnaires, c'est-à-dire les fonctionnaires dirigeants.
La note Copernic porte sur la manière de gérer mais il est normal que, quand on veut réaliser une administration à trois niveaux (haute gestion, niveau managérial, personnel d'exécution), le personnel s'inquiète parce qu'on ne sait pas ce quelles seront les conséquences pour le personnel d'exécution. Le ministre a promis qu'après l'étude à réaliser par un bureau privé, lui permettant de comparer les salaires du secteur public et du secteur privé, il prendra position à ce propos.
Dans son projet, le ministre a voulu, à un certain moment, supprimer les niveaux qui correspondent aux diplômes.
La CCSP ne veut pas réduire la note Copernic à ce reproche des 3 %. Un des reproches que l'on fait au projet est la contractualisation dans la gestion et dans les statuts du personnel.
C'est un leurre que de dire aux gens qu'on aura des administrations apolitiques lorsqu'on installe des conseils stratégiques et des cellules stratégiques.
Pour cette raison, la CGSP a décidé d'accompagner le processus de modernisation et de décision en fonction des dossiers mais il est clair qu'on n'a pas besoin de cette enquête pour avancer dans ce dossier.
Dans les prochaines semaines, l'État lance un appel aux candidats pour recruter des experts en gestion de ressources humaines.
La communication est tellement mauvaise qu'il y a des directeurs du personnel et des fonctionnaires dirigeants des départements qui ne savent même pas qu'ils vont devoir postuler via SELOR pour être candidat pour cette fonction.
1. Il est nécessaire de moderniser les administrations en vue de les adapter aux besoins de notre temps et de rétablir la confiance des citoyens dans les pouvoirs publics. En effet, dans bien des cas, les services publics ont une image négative.
2. Pour réaliser cette modernisation, il y a lieu de s'inspirer de l'expérience acquise par le secteur privé et par les services publics dans d'autres régions et pays, en veillant toutefois à ne jamais compromettre la spécificité du service public.
3. Si le fonctionnement des administrations publiques présente des déficiences, il faut cependant souligner que nombre de fonctionnaires incarnent actuellement la mission et les valeurs qui font partie intégrante du service public et qui sont mentionnées dans la note Copernic. La modernisation doit tenir compte de ces expériences positives. On devra s'inspirer également des résultats de la vaste enquête que le gouvernement a organisée en juin. Il en va de même des rapports des services de médiation, de la charte de l'utilisateur et des résultats du baromètre de la qualité.
4. La modernisation n'est pas uniquement une question de structures; c'est aussi l'affaire des personnes qui doivent les réalisés.
Il est dès lors important, non seulement de déterminer quels sont les services nécessaires et comment ils se situent par rapport à la politique, mais aussi de définir en toute clarté la position juridique et le statut des agents. Il est de la responsabilité du ministre de la Fonction publique de garantir l'implication du personnel dans les changements projetés.
5. Pour réussir, la réforme doit bénéficier d'un large soutien. Il faut donc rechercher des formules capables d'assurer un large consensus sur la manière dont elle sera mise en oeuvre dans les années à venir.
La modernisation de la fonction publique doit tenir compte de l'expérience acquise dans le cadre de la gestion intégrale de la qualité, dans le secteur privé comme dans le secteur public.
À ce sujet, il importe que les orientations générales soient définies par les responsables politiques.
Il y a lieu également de prévoir les moyens nécessaires, comme par exemple une marge suffisante dans l'emploi du temps des agents, des formations, des échanges d'information entre administrations et la désignation de responsables de la qualité dans chaque service.
Tous les segments du secteur public définiront leur mission et détermineront avec précision leurs objectifs ainsi que les résultats qu'ils comptent atteindre dans un laps de temps donné, avec les moyens et les effectifs disponibles.
Il importe également, pour tous les services, de dresser l'inventaire des processus et des activités nécessaires pour parvenir aux résultats proposés.
Par ailleurs, des critères objectifs doivent être définis pour apprécier les résultats ainsi obtenus.
Lors de cette appréciation, il faudra tenir compte à la fois de l'opinion des agents concernés, du point de vue des clients et de l'appréciation de la société.
Les techniques d'interrogation des usagers devront être introduites de manière systématique.
On conviendra et fixera en concertation avec les membres du personnel des normes objectives de prestation qui seront contrôlées selon des procédures d'évaluation clairement convenues à l'avance.
Les mandataires de chaque département devront disposer au préalable d'une vue claire des normes et des instruments sur la base desquels ils seront évalués.
Les mandataires devront pouvoir désigner leurs collaborateurs en toute autonomie et pouvoir négocier et connaître à l'avance les moyens qui seront mis à leur disposition.
L'administration doit pouvoir accomplir sa tâche de gestion en toute liberté, sans immixtion politique aucune dans l'exécution des décisions politiques.
Les rapports entre le conseil stratégique et le comité de direction doivent revêtir un caractère autonome. Toute forme de politisation doit être évitée.
Les conclusions ont été adoptées par 7 voix et 5 abstentions.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 12 membres présents.
La rapporteuse, | La présidente, |
Iris VAN RIET. | Anne-Marie LIZIN. |