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Belgische Senaat

Parlementaire handelingen

DONDERDAG 25 MEI 2000 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Vraag om uitleg van de heer Philippe Monfils aan de minister van Justitie over «het niet-naleven door de kabelmaatschappijen van de overeenkomsten die ze met de auteursverenigingen hebben gesloten» (nr. 2-130)

De voorzitter. - Mevrouw Isabelle Durant, vice-eerste minister en minister van Mobiliteit en Vervoer, antwoordt namens de heer Marc Verwilghen, minister van Justitie.

M. Philippe Monfils (PRL-FDF-MCC). - Le problème que je vais aborder n'est pas une question au gouvernement, mais plutôt une tentative pour essayer d'avancer dans un problème extrêmement sensible, celui de l'aide aux auteurs.

En effet, en adoptant la loi du 30 juin 1994 relative au droit d'auteur et aux droits voisins, la Belgique a transposé la directive européenne du 27 septembre 1993 relative à la coordination de certaines règles du droit d'auteur et des droits voisins. En transposant cette directive, la Belgique s'est engagée à rendre son dispositif légal de défense des titulaires des droits d'auteur efficace et non purement formel. En ratifiant la convention de Berne et les accords TRIPS, la Belgique s'est également engagée à défendre les titulaires des droits d'auteur.

Ces dispositions légales imposent aux câblodistributeurs de demander l'autorisation des titulaires des droits d'auteur pour retransmettre les programmes. Cette autorisation peut être soumise à toutes conditions normales qu'imposent les titulaires de droits, notamment percevoir une rémunération.

Malgré un accord passé entre les titulaires des droits d'auteur et les câblodistributeurs, qui permet à ces derniers de retransmettre les programmes - les vingt-cinq ou trente programmes que nous connaissons sur les chaîne francophones - il s'avère que, depuis 1996, les titulaires des droits d'auteur ne perçoivent plus les rémunérations compensatoires prévues. C'est comme si n'importe quelle entreprise ne payait plus ses fournisseurs depuis quatre ans et continuait pourtant à fonctionner normalement en vendant les produits aux clients et en empochant l'ensemble des recettes. En agissant de la sorte, les câblodistributeurs ne respectent pas leurs engagements contractuels et ils ne respectent pas non plus les dispositions légales belges et internationales sur les droits d'auteur. Puisque nous ne sommes jamais poursuivis pour les propos tenus à cette tribune, je dirai qu'il y a un double vol : non seulement on vole les auteurs, mais aussi ceux qui paient les abonnements, puisque ces derniers comprennent la rémunération des auteurs qui pourtant n'est pas versée par les câblodistributeurs.

En reproduisant puis en diffusant publiquement sans payer l'_uvre de quelqu'un, ils se rendent purement et simplement coupables de contrefaçon, ce qui est punissable.

Malgré des décisions de justice rappelant les obligations des câblodistributeurs, ceux-ci ne paient toujours pas et invoquent parfois les arguments les plus dilatoires pour se défendre et se soustraire à leurs obligations.

Fin 1999, les auteurs s'étaient déjà vu privés de 2,5 milliards de francs et on m'a dit avant-hier que la facture atteignait désormais près de 3 milliards. Cette situation est choquante et tout à fait intolérable.

Allons-nous devoir attendre qu'une action devant la Cour européenne de justice ou devant l'OMC soit intentée contre la Belgique pour manquement à ses obligations, afin que l'on nous force à régler cette situation?

Je rappelle à Mme la vice-première ministre que la déclaration gouvernementale a placé parmi ses préoccupations la volonté de soutenir la création, notamment en ce qui concerne ce que l'on nomme le statut des artistes, mais également en ce qui concerne les auteurs.

Il est bien temps. En effet, un de mes collaborateurs vient de me communiquer un document issu d'un dossier d'actualité de Yahoo sur Internet, selon lequel il n'existe toujours pas d'accord entre les quinze sur la directive sur les droits d'auteur mais qu'heureusement la France, l'Italie, l'Espagne et la Belgique veulent que la législation couvre le plus de domaines possible et ne lèse pas les auteurs. Un débat complémentaire très difficile apparaît en ce qui concerne les exceptions aux droits d'auteur. Nous sommes en pointe pour défendre les auteurs, nous le sommes aussi, depuis longtemps, dans la législation que nous avons votée et que nous défendons, mais nous n'arrivons pas à la faire appliquer.

Je sais que les Communautés disposent de compétences importantes en ce qui concerne la problématique des télédistributeurs. C'est néanmoins le ministre de la Justice qui est chargé de la matière des droits d'auteur et c'est aussi l'État fédéral qui est responsable du respect des obligations internationales de la Belgique en cette matière.

C'est la raison pour laquelle je m'étais permis de demander au ministre de la Justice de nous expliquer ce qu'il compte faire pour régler la situation. Je pense qu'à tout le moins une initiative pourrait être prise au niveau fédéral visant, par exemple, à organiser une concertation entre tous les acteurs en présence, c'est-à-dire les auteurs, les câblodistributeurs, les Communautés et l'État fédéral.

Ne pourrait-on pas également mettre en _uvre le mécanisme de médiation prévu par l'article 54 de la loi de 1994 relative au droit d'auteur et aux droits voisins. Je sais qu'il s'agit d'une médiation volontaire qui repose actuellement sur la bonne volonté des deux parties, mais il est quand même temps de réunir tout le monde autour d'une table, quitte à forcer certains par des mesures appropriées, afin que les auteurs reçoivent la rémunération à laquelle ils ont droit. Nous nous accorderons sûrement, madame la vice-première ministre, pour dire qu'il n'y a pas de création sans auteur et que l'absence de création signifierait la fin d'un élément qui me semble fondamental, c'est-à-dire l'imagination et le supplément d'âme que les créateurs peuvent apporter à un pays.

Mme Isabelle Durant, vice-première ministre et ministre de la Mobilité et des Transports. - Je réponds ici au nom de mon collègue Verwilghen. Effectivement, la question du non-respect par les sociétés de télédistribution des conventions passées avec les sociétés d'auteur pose d'énormes problèmes. Il faut donc se demander ce qu'il est possible de faire.

Pour d'évidentes raisons, le ministre de la Justice peut-il intervenir dans ce dossier et comment ?

Vous avez cité vous-même l'article 54 de la loi du 30 juin 1994 relative au droit d'auteur et aux droits voisins, qui prévoit en ses paragraphes 1er, 2 et 3, des systèmes de médiation auxquels faire appel en cas de conflit ou de difficulté.

Cet arbitrage est la seule possibilité offerte par la loi du 30 juin 1994 relative au droit d'auteur et aux droits voisins. Elle n'attribue cependant aucun droit d'injonction direct au ministre de la Justice. Entre-temps, les premières conventions entre les ayants droit et les sociétés de télédistribution ont pris fin. Apparemment, les sociétés de télédistribution refusent toute forme de collaboration. Il en résulte que plusieurs actions en justice ont déjà été intentées par des ayants droit. Compte tenu du principe de la séparation des pouvoirs, le ministre de la Justice ne peut s'exprimer à ce sujet.

La seule possibilité qu'il juge susceptible d'inciter les sociétés de télédistribution à respecter leurs obligations est une modification de l'article 54 de la loi sur le droit d'auteur, à la lumière d'une modification générale de la loi du 30 juin 1994 précitée.

Une modification globale de la loi pourrait intervenir après l'adoption de la proposition de directive relative à l'harmonisation des droits d'auteur dans la société de l'information sous sa forme définitive. Cette adoption pourrait avoir lieu d'ici la fin de l'année.

Voilà les éléments d'information que vous transmet, par ma voix, le ministre de la Justice.

M. Philippe Monfils (PRL-FDF-MCC). - Je remercie Mme la vice-première ministre d'avoir communiqué la réponse de M. Verwilghen, laquelle me convient assez bien. En effet, M. Verwilghen entrouvre, à la fin de son intervention, une porte qui me paraît tout à fait intéressante, à savoir une modification de l'article incriminé de la loi sur les droits d'auteur.

On pourrait en effet réfléchir à une telle modification et donner ainsi au ministre les possibilités de jouer réellement un rôle dans la problématique des droits d'auteur.

Ce n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd ! Je vais donc m'atteler immédiatement à la rédaction d'une modification de cet article. J'espère, si nous estimons que les modifications sont parfaitement légales et régulières, que le Sénat pourra très rapidement s'en saisir et en discuter avec, naturellement, la collaboration et le soutien du ministre de la Justice.

- Het incident is gesloten.