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29 AVRIL 1999
Proposition de loi relative aux effets de la dissolution des Chambres fédérales à l'égard des projets et propositions de loi antérieurement déposés
La proposition de loi déposée au Sénat vise à résoudre le problème de la caducité d'une autre manière que le texte voté par la Chambre. Elle prévoit d'appliquer en les adaptant les principes de la loi du 3 mars 1977 relative aux effets de la dissolution des Chambres législatives à l'égard des projets et propositions de loi antérieurement déposés, à la lumière de la procédure d'évocation. Cette solution est meilleure, parce qu'elle limite davantage le risque de déperdition du travail parlementaire effectué que la proposition votée par la Chambre. Quoi qu'il en soit, une nouvelle réglementation s'impose. Sans réglementation spécifique, on se trouverait confronté à une mission impossible au lendemain du renouvellement de la Chambre des représentants et du Sénat.
Bien qu'aucun amendement ne soit requis, on peut cependant faire les observations suivantes concernant le projet de loi en discussion. Il faut en effet que l'on sache clairement quelle procédure on suivra en la matière après le renouvellement des Chambres législatives.
L'article 2, deuxième alinéa, du projet de loi prévoit que lors des dissolutions des Chambres, tous les textes pendants deviennent caducs, mais qu'une loi ad hoc peut relever individuellement de caducité les projets de loi déjà été adoptés par une des Chambres si l'autre Chambre ne les a pas encore rejetés. Si le texte adopté ne dit rien de la qualification de cette loi ad hoc , les développements précisent quant à eux explicitement qu'il s'agit d'un projet qui doit être examiné suivant la procédure prévue par l'article 78 de la Constitution, considérant que, dans le cas contraire, le Sénat disposerait en quelque sorte d'un droit de veto à l'égard du relèvement de caducité de textes qui ressortissent à la procédure d'évocation et pour lesquels la Chambre a en principe le dernier mot. Si l'on adopte ce raisonnement, il va cependant de soi que, même dans l'interprétation de la Chambre, la loi ad hoc doit être examinée suivant la procédure bicamérale obligatoire (article 77 de la Constitution), car une loi ad hoc basée sur l'article 78 ne peut pas relever de caducité une proposition de loi relative à une matière visée à l'article 77.
L'argumentation de la Chambre n'est donc pas convaincante et, de surcroît, elle est contraire à l'article 77, premier alinéa, 3º, de la Constitution, qui dispose que sont bicamérales, les lois visées, entre autres, à l'article 82 de la Constitution, ainsi que les lois prises en exécution des lois et articles susvisés. Or, dans la construction proposée, les lois ad hoc exécutent le texte proposé.
En outre, qu'il s'agisse de projets bicaméraux ou de projets relevant de la procédure d'évocation, le relèvement de caducité a une incidence directe sur les compétences des deux Chambres, si bien que du point de vue de la technique juridique, la loi ad hoc concerne une matière visée à l'article 77 de la Constitution.
Par ailleurs, le deuxième alinéa de l'article 2 dispose également que les projets qui ont été adoptés dans une des Chambres ne peuvent être relevés de caducité que s'ils n'ont pas encore été rejetés par l'autre Chambre. On peut se demander pourquoi il n'est fait référence qu'à cette dernière hypothèse (rejet). Ce n'est pas qu'elle soit gênante, mais elle est en fait superflue. Elle apparaît évidente si on réfléchit un peu en profondeur au système.
En ce qui concerne l'article 3, la Chambre constate, elle aussi, que cet article présente une lacune. Elle a choisi d'y remédier dans la loi ad hoc . L'article 3 règle le sort, en cas de relèvement de caducité, des textes « 78 » (propositions ou projets qui ont été votés à la Chambre sur la base de l'article 78 de la Constitution et dont le Sénat sera de nouveau saisi) et des textes « 81 » (propositions qui ont d'abord été votées au Sénat sur la base de l'article 78 et dont la Chambre sera de nouveau saisie). Par contre, la situation des textes « 78 » dont la Chambre sera de nouveau saisie n'est pas réglée. La commission de la Chambre était consciente du problème, mais elle a estimé que le temps manquait et que la question était trop technique pour pouvoir encore régler le problème dès à présent. La loi ad hoc relevant de caducité ce genre de projets n'aurait qu'à s'en charger. Il faut bien se rendre compte que l'on crée de la sorte une construction très asymétrique. Pour certains catégories de textes, les principes figureront dans la loi relative aux effets de la dissolution, et pour d'autres, dans la loi ad hoc les relevant de caducité (avec de surcroît, si l'on suit la Chambre, une autre qualification, à savoir « 78 » au lieu de « 77 »). Il est à noter en outre que le projet de loi part du principe que tous les textes qui retrouvent vie au Sénat après avoir été relevés de caducité, c'est-à-dire donc aussi les anciennes propositions « 81 » et les projets « 78 », ne pourront être discutés en deuxième lecture (« deuxième navette ») par le Sénat que s'ils sont d'abord évoqués.
En ce qui concerne l'entrée en vigueur de la loi, l'article 6 du projet opte pour la formule classique de référence à la publication au Moniteur belge , et non pour un renvoi spécifique à la dissolution imminente des Chambres. Il s'ensuit que cette loi doit être publiée au Moniteur belge avant la dissolution, si on veut éviter des problèmes d'interprétation ou d'application. Si la loi n'est pas encore entrée en vigueur le jour de la dissolution, c'est la loi antérieure qui régira la dissolution. La loi doit donc être publiée au Moniteur belge avec la diligence voulue.
Un commissaire regrette de devoir constater, à l'examen de ce projet de loi, qu'une fois de plus, la confiance entre les Chambres fédérales n'a pas été particulièrement grande. Dès le 16 mars 1999, les présidents des six principaux groupes du Sénat avaient déposé une proposition de loi en la matière. Selon l'intervenant, cette proposition est meilleure, sur le plan juridico-technique comme sur le plan du contenu, que le projet de loi en discussion. Faute de temps, le Sénat se voit toutefois contraint de voter ce projet ne varietur . Tout en partageant l'interprétation du préopinant, le commissaire s'interroge néanmoins sur le moyen de s'assurer que la Chambre des représentants partagerait, elle aussi, cette interprétation. Selon lui, il ne suffit pas d'en faire état dans le rapport. Si l'on veut avoir la certitude que la loi ad hoc en question soit qualifiée de loi au sens de l'article 77 de la Constitution, il faudrait l'inscrire en toutes lettres dans le projet de loi.
Un autre commissaire réplique qu'aux termes du projet de loi sous sa forme actuelle, il n'est effectivement pas du tout certain que la loi dite « ad hoc » sera une loi relevant du bicaméralisme intégral. Il faudra suivre en l'espèce la procédure appropriée : étant donné que les points de vue de la Chambre des représentants et du Sénat divergent, la commission parlementaire de concertation devra se prononcer à ce sujet. Le texte de la proposition de loi de M. Vandenberghe et consorts est meilleur, mais la question a déjà été longuement débattue au sein de la commission parlementaire de concertation, qui s'est finalement ralliée au texte que la Chambre des représentants a maintenant adopté.
L'intervenant suivant se demande ce qu'il adviendrait si la commission adoptait la proposition de loi de M. Vandenberghe et consorts.
Le préopinant répond qu'il n'est pas certain que l'on trouverait, au Sénat, une majorité en faveur de la proposition de loi déposée au Sénat. Lors de la discussion en commission parlementaire de concertation, différents sénateurs se sont en effet ralliés à la proposition de la Chambre de représentants.
Si le Sénat ne vote pas le projet de loi transmis par la Chambre, cette dernière ne reviendra d'ailleurs pas sur sa position. Dans ce cas, il n'y aura pas de nouvelle loi et, après le renouvellement des Chambres législatives, le problème sera réglé par la loi existante, qui n'apporte aucune solution à la problématique de l'évocation.
Selon le rapporteur, l'application de la loi existante ne permet pas de déterminer clairement dans quel délai le Sénat peut user de son droit d'évocation. Les délais doivent-ils recommencer à courir ? Ces problèmes ne sont pas réglés. La formule proposée par le Sénat était meilleure. Il est néanmoins indiqué d'adopter le texte de la Chambre plutôt que d'être confronté à des problèmes d'application lors de l'installation de la Chambre des représentants et du Sénat. On devrait installer immédiatement la commission parlementaire de concertation et la charger d'examiner tous les projets pendants, sans compter qu'à ce moment, il n'y aurait sans doute pas encore de nouveau gouvernement. Le Sénat s'en tirerait indubitablement moins bien qu'en optant pour la solution proposée par la Chambre.
Un membre est d'avis lui aussi que l'adoption du texte de la Chambre des représentants est un moindre mal.
Article premier
Cet article est adopté à l'unanimité des 10 membres présents.
Articles 2 à 6
Ces articles sont adoptés par 9 voix et 1 abstention.
L'ensemble du projet de loi a été adopté par 9 voix et 1 abstention. En conséquence, la proposition de loi relative aux effets de la dissolution des Chambres fédérales à l'égard des projets et propositions de loi antérieurement déposés, de M. Vandenberghe et consorts (doc. Sénat, 1998-1999, nº 1-1321/1), devient sans objet.
Confiance a été faite au rapporteur en vue d'un rapport oral en séance plénière.
Le rapporteur,
Hugo VANDENBERGHE. |
Le président,
Frank SWAELEN. |
(1) Voir le doc. Sénat, 1998-1999, nº 1-1321/1.