1-1080/2

1-1080/2

Sénat de Belgique

SESSION DE 1998-1999

12 JANVIER 1999


Projet de loi modifiant l'article 1410, § 2, du Code judiciaire et l'article 2071 du Code civil


AMENDEMENTS


Nº 1 DE MM. BOURGEOIS ET VANDENBERGHE

Art. 3

Remplacer le point B) par ce qui suit :

« B) Le 5º est remplacé par la disposition suivante :

« 5º les sommes à payer

1. au bénéficiaire de prestations de santé, à titre d'intervention à charge de l'assurance soins de santé et indemnités ou en vertu de la loi du 16 juin 1960 ou de la législation relative à la sécurité sociale d'outre-mer;

2. à titre de soins médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et hospitaliers ou de frais d'appareils de prothèse et d'orthopédie à une personne victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, conformément à la législation sur les accidents du travail ou les maladies professionnelles. »

Justification

I. Le texte français des points A) et B) de l'article proposé utilise toujours le terme « bénéficiaire », tandis que le texte néerlandais utilise tantôt le terme « rechthebbende » (sous A), tantôt le terme « ontvanger » (sous B). Il y a lieu d'uniformiser la terminologie en remplaçant ce dernier terme par le terme « rechthebbende ».

Il convient d'ailleurs de souligner que la personne bénéficiaire de prestations de santé n'est pas toujours la personne à laquelle les montants sont versés à titre d'intervention à charge de l'assurance soins de santé et indemnités (par exemple lorsque le bénéficiaire des prestations de santé est un mineur). Il est donc préférable d'utiliser le terme « rechthebbende », qui correspond à la notion de « bénéficiaire » utilisée dans le texte français.

II. Au 5º, 2, la commission de la Justice de la Chambre a reformulé dans un sens plus général la référence à la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (doc. Chambre 1997-1998, nº 1287/4, p. 2). Le texte (du 5º, 2) initialement proposé faisait en effet référence, d'une part, à l'article 28 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail et, d'autre part, à l'article 31, alinéa 1er , 5º, des lois coordonnées du 3 juin 1970 relatives à la réparation des dommages résultant de maladies professionnelles (doc. Chambre, 1997-1998, nº 1287/1, p. 3). Ces articles concernent le remboursement des frais médicaux.

Les législations précitées prévoient également des indemnités pour incapacité de travail. Ainsi, l'article 22 de la loi sur les accidents du travail dispose que « la victime a le droit, à partir du jour qui suit celui du début de l'incapacité de travail, à une indemnité journalière égale à 90 % de la rémunération quotidienne moyenne ». Sans doute l'intention de la Chambre n'était-elle pas de rendre ces indemnités insaisissables.

Le présent amendement prévoit dès lors (d'une manière générale) que seules les sommes payées à la victime d'un accident de travail ou d'une maladie professionnelle à titre de soins médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et hospitaliers ou de frais d'appareils de prothèse et d'orthopédie ne sont pas susceptibles de faire l'objet d'une saisie (cf. l'article 28 de la loi sur les accidents du travail).

Nº 2 DE MM. BOURGEOIS ET VANDENBERGHE

Art. 4 (nouveau)

Insérer un article 4 (nouveau), libellé comme suit :

« Art. 4. ­ L'article 106, § 2, de la loi sur les hôpitaux, coordonnée le 7 août 1987, inséré par la loi du 5 août 1992, est abrogé. »

Justification

La disposition précitée était inscrite dans la proposition initiale, mais elle fut supprimée par la sous-commission de la commission de la Justice de la Chambre, après que celle-ci eut entendu l'avis de diverses organisations d'établissements de soins (doc. Chambre, 1997-1998, nº 1287/4, p. 9).

Les auteurs de la proposition avaient pourtant fait remarquer à juste titre que l'article 106, § 2, de la loi sur les hôpitaux, coordonnée le 7 août 1987, ­ qui dispose que les créances que les hôpitaux détiennent, dans le système du tiers payant, contre les organismes assureurs peuvent faire l'objet d'une dation en gage ­ devient sans objet à partir du moment où l'article 1410, § 2, 5º, n'est plus applicable en ce qui concerne les prestataires de soins et les hôpitaux. Les créances que détiennent les patients sur leurs organismes assureurs resteront seules incessibles et insaisissables. Les créances que les hôpitaux détiennent contre ces organismes échapperont alors à cette règle.

Il convient également de souligner que l'article 106, § 2, de la loi coordonnée du 7 août 1987 sur les hôpitaux renferme une discrimination entre les hôpitaux et les autres établissements de soins (maisons de repos, laboratoires). Ces derniers sont dans l'impossibilité d'invoquer ladite disposition, parce qu'ils n'entrent pas dans le champ d'application de la loi sur les hôpitaux.

André BOURGEOIS.
Hugo VANDENBERGHE.

Nº 3 DE MM. LALLEMAND, HOTYAT ET MAHOUX

Art. 2

Remplacer l'article 2071, dernier alinéa, proposé, par ce qui suit :

« Sauf les exceptions prévues par la loi, les biens incessibles en vertu de celle-ci ne peuvent être donnés en nantissement. »

Justification

Justification commune à l'amendement nº 4 à l'article 3.

Nº 4 DE MM. LALLEMAND, HOTYAT ET MAHOUX

Art. 3

Au B), remplacer le 5º, 1, proposé, par ce qui suit :

« 1. Au bénéficiaire de prestations de santé et aux établissements de soins de santé, à titre d'intervention à charge de l'assurance soins de santé et indemnités ou en vertu de la loi du 16 juin 1960 ou de la législation relative à la sécurité sociale d'outre-mer; »

Justification

Le projet de loi rend impossible, de manière générale, la mise en gage des biens incessibles. Par ailleurs, il limite l'insaisissabilité et l'incessibilité des sommes dues par l'assurance soins de santé aux seules sommes dues aux patients. Les sommes dues aux médecins et aux hôpitaux deviendraient cessibles et saisissables.

Le projet tend à mettre la loi en conformité avec un arrêt de la Cour d'arbitrage, qui a jugé que l'insaisissabilité des sommes dues aux prestataires de soins personnes physiques créait une discrimination injustifiée par rapport aux autres indépendants, quant à la saisissabilité de leurs revenus respectifs. Mais la Cour d'arbitrage ne s'est pas prononcée sur l'insaisissabilité des créances des hôpitaux à charge de l'AMI.

Le projet, qui rend les sommes dues aux hôpitaux cessibles et saisissables, pourrait affaiblir la gestion financière de nombreux établissements de soins de santé. En effet, beaucoup d'hôpitaux gagent leurs créances à charge de l'AMI auprès d'institutions financières pour garantir des crédits à court terme, ou des lignes de crédit permanentes. Les sommes dues à charge de l'AMI sont immédiatement payées sur le compte sur lequel le crédit est ouvert.

Des hôpitaux craignent que la saisissabilité des sommes n'affaiblissent leur sûreté, et que les banques soient désormais réticentes à ouvrir des crédits, ou le fassent à des taux plus élevés pour se prémunir d'un risque jusqu'ici inexistant.

L'on a dit que puisque les sommes dues aux hôpitaux seraient cessibles, comme le prévoit le projet, les institutions de soins de santé pourraient simplement organiser avec les banques une cession de la créance, plutôt que de passer par le système de la créance gagée. La banque ne prendrait alors aucun risque.

Ce système n'est pas satisfaisant non plus. En effet, les créances des hôpitaux à charge de l'AMI ne sont généralement pas certaines jusqu'à leur liquidation définitive. L'AMI peut toujours contester la réalité de certains soins, ou le montant du remboursement réclamé. Pour se prémunir du risque de la contestation d'une partie de la créance, les banques établiront un prix de cession qui risque d'être beaucoup plus élevé que le taux aujourd'hui réclamé pour les crédits à court terme.

Il paraît donc préférable de maintenir l'insaisissabilité des sommes à payer, à charge de l'AMI, aux institutions hospitalières.

L'éventuelle discrimination qui pourrait être relevée entre le dispensateur de soins personne physique et le dispensateur de soins personne morale ou entre les revenus des institutions hopsitalières et les revenus d'autres personnes morales, serait justifiée par la finalité d'intérêt public des hôpitaux.

Enfin, puisque le projet prévoit que les biens incessibles ne peuvent être donnés en gage, il convient de prévoir une possibilité d'exception dans le cas où les créances hospitalières resteraient incessibles et insaisissables. C'est le sens de l'amendement à l'article 2 qui prévoit que la loi peut déterminer des exceptions à l'interdiction du nantissement des biens incessibles. L'on pourrait alors considérer que l'exception légale existe déjà, puisque l'article 106, § 2, de la loi sur les hôpitaux coordonnée le 7 août 1987 organise la mise en gage des créances hospitalières.

Roger LALLEMAND.
Robert HOTYAT.
Philippe MAHOUX.