Questions et Réponses

Sénat de Belgique

SESSION DE 1996-1997


Bulletin 1-40

11 MARS 1997

Questions auxquelles il n'a pas été répondu dans le délai réglementaire
(Art. 66 du règlement du Sénat)

(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais


Ministre de la Justice

Question nº 257 de M. Anciaux du 7 février 1997 (N.) :
Activités illégales de l'organisation néonazie Excalibur.

J'ai organisé le 8 octobre 1996 une conférence de presse intitulée « Naar een weerbare democratie : een kordate aanpak van extreem-rechts » (« Vers une démocratie combative : pour une attitude résolue face à l'extrême droite). Le texte vous en a également été communiqué. Au cours de celle-ci, j'ai souligné, notamment, que les autorités belges ne sanctionnaient pas les infractions commises par diverses organisations d'extrême droite, en citant entre autres, l'exemple d'Excalibur (boîte postale 95 à Bruges). Trois mois plus tard, je constate que l'on n'a toujours pris aucune mesure, notamment contre cette organisation.

Excalibur s'occupe de diffuser des articles à caractère raciste tels que C.D., posters, T.-shirts et casettes vidéo montrant des scènes de ratonnades dans lesquelles des skinheads s'en prennent à des étrangers. Le texte des chansons incite au racisme, à la violence, etc.

Excalibur se veut très « internationaliste », comme en témoignent notamment les annonces que cette organisation place, par exemple, dans les éditions américaine et anglaise du réseau « Blood and Honour » qui regroupe toutes sortes d'organisations nazies exerçant des activités illégales. Excalibur entretient aussi des liens étroits avec Combat 18 (C.18) qui a des démêlés avec la justice britannique. J'avais déjà attiré l'attention sur ce point lors de ma conférence de presse du 8 octobre 1996. C.18 est en effet une organisation de skinheads qui a prouvé par le passé qu'elle traduisait en actes son discours haineux dirigé contre les immigrés et ses adversaires politiques. À cette fin, C.18 rassemble notamment des renseignements personnels sur ses adversaires politiques. Le « Stormer », journal réservé aux affiliés, publie donc régulièrement les adresses des adversaires du mouvement ainsi que d'autres renseignements. Après avoir eu des démêlés graves avec la justice anglaise, C.18 a transféré plusieurs de ses activités illégales et criminelles au siège d'Excalibur en Belgique, étant donné que cette dernière organisation n'y est pas inquiétée. Lors de ma conférence de presse, j'ai démontré à l'appui d'une publication d'Excalibur dans le « Stormer » que cette organisation brugeoise de skinheads offre ses services à C.18 en collectant des informations sur ses adversaires politiques. La justice belge n'intervient manifestement pas, bien que dans le passé C.18 se soit déjà rendu coupable de plusieurs tentatives d'élimination d'adversaires politiques.

Excalibur diffuse en outre diverses revues étrangères, souvent frappées d'interdictions dans leur pays d'origine.

Excalibur s'est aussi lancé récemment dans la production de disques sous le label « Excalibur records ». Ce faisant, l'organisation ne se limite pus à la distribution, mais passe à l'étape suivante en produisant des musiques et des textes à caractère raciste.

Lors de ma conférence de presse, j'ai cité le nom de Yannick Pollet comme l'élément moteur d'Excalibur. Le magazine anglais « Searchlight » qui s'est spécialisé dans l'étude des organisations néonazies de toute sorte s'est penché sur les activités de Yannick Pollet, dans son numéro du mois d'octobre (paru après ma conférence de presse). Ce magazine réputé pour son sérieux et qui collabore avec les instances policières et judiciaires anglaises, décrit les activités illégales d'Excalibur et de Yannick Pollet en particulier, et précise ensuite (p. 16) : « All this may seem strange for the Belgian police who consider Pollet as small fry and unimportant in the nazi scene. Perhaps this is why they have done nothing to secure his arrest after he jumped bail in England after being arrested at the disastrous C.18 gig at Becontree, Londen in 1994. In the same year he helped organise a similar flop in Belgium when a gig descended into violence, resulting in several arrests (il s'agit ici du festival skinhead d'Oudenburg auquel ont assisté quelque 300 personnes) et le « Searchlight » de poursuivre : « The violent international nazi movement uses Pollet as a clearing house for its illegal trash ». Les accusations que j'ai lancées au cours de ma conférence de presse du 8 octobre 1996 sont donc confirmées par ce magazine étranger réputé : des organisations d'extrême droite tranfèrent leurs activités illégales vers la Belgique en raison de l'absence de poursuites contre les infractions, notamment, aux lois antiraciste et antinégationniste de 1981 à 1995.

J'aimerais donc poser à l'honorable ministre les questions suivantes :

­ Pourquoi l'organisation Excalibur dont les activités sont manifestement illégales ne fait-elle l'objet d'aucune poursuite en Belgique ? Pourquoi la loi antiraciste de 1981 et la loi antinégationniste de 1995 restent-elles lettre morte et ne lui sont-elles pas appliquées ?

­ L'honorable ministre a-t-il une idée claire et exacte des activités actuelles d'Excalibur ?

­ A-t-on pris des contacts avec les instances judiciaires ou policières étrangères (anglaises, par exemple) concernant les organisations avec lesquelles Excalibur collabore (et concernant les activités de ces dernières) ?

­ Quelles mesures l'honorable ministre prendra-t-il afin que la Justice ne laisse pas impunies les infractions commises par Excalibur ?