(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais
Dans certaines villes et communes, des agences publicitaires diffusent des brochures reprenant l'inventaire de tous les habitants, par rue, par numéro de maison et, éventuellement, par numéro de téléphone. Parfois, ces brochures comprennent également des listes alphabétiques des noms de tous les habitants avec mention de leur adresse et, éventuellement, de leur numéro de téléphone. Ces informations sont diffusées sans le consentement des intéressés.
Comme je l'ai déjà indiqué dans le cadre de ma question au ministre de la Justice du 4 mars 1994, je juge ces pratiques contraires à la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée. Elles permettent non seulement de déduire quelles sont les personnes qui vivent ensemble à une adresse donnée, mais aussi de savoir où habitent des femmes seules, étant donné que les prénoms y sont également mentionnés, ce qui accroît le risque de visites ou de coups de téléphone indésirables.
À la suite de ma lettre du 25 juillet 1994 adressée à la Commission de la protection de la vie privée, celle-ci a formulé, le 18 juillet 1995, une recommandation relative à la publication de guides d'adresses de ce genre.
Dans cette recommandation, la commission confirme que de telles pratiques constituent une grave immixtion dans la vie privée des personnes concernées. En effet, la publication de telles données n'est autorisée que si les intéressés consentent à celle-ci. La commission estime également que le classement utilisé (par numéro de maison et avec mention du prénom et du numéro de téléphone) entraîne des risques inutiles pour la vie privée des citoyens. Selon la commission, il y a une disproportion entre l'intérêt poursuivi par le maître du fichier et les risques que courent les personnes concernées. C'est pourquoi elle estime que la finalité du traitement de ces données présente un caractère illégal.
J'aimerais que l'honorable ministre me dise :
1. quelle suite il a donnée à la recommandation de la commission;
2. si les agences de publicité concernées ont déjà été avisées de cette recommandation et dans quelle mesure les pratiques en question ont été interrompues depuis;
3. quelles mesures il compte prendre pour mettre fin définitivement à la diffusion de telles informations pour dépliants publicitaires et de quels moyens il dispose pour sanctionner ces pratiques.
Réponse : 1 et 3. Différentes dispositions légales actuellement en vigueur autorisent déjà les particuliers à porter plainte pour de telles pratiques.
L'article 5 de la loi du 8 décembre 1992 interdit les traitements dont la finalité est illégitime. L'article 9 oblige le maître du fichier à informer la personne concernée lorsqu'il traite des données la concernant.
L'article 39 de la même loi sanctionne pénalement la violation de ces deux dispositions. La recommandation 1/95 de la Commission de la protection de la vie privée constitue à cet égard un élément d'appréciation pour conclure à l'illégalité de telles pratiques.
Par ailleurs, l'article 6 de l'arrêté royal du 16 juillet 1992 relatif à la communication des informations contenues dans le registre de population et dans le registre des étrangers, dispose qu'aucune donnée des personnes inscrites au registre ne peut être communiquée à des personnes privées tierces. L'article 7 de la loi du 19 juillet 1991, relative aux registres de population, sanctionne pénalement la violation de cet article.
Il appartient dès lors aux particuliers de porter plainte et aux parquets d'y donner suite.
Je signale en outre à l'honorable membre que le texte de l'avant-projet de loi transposant la directive 95/46/C.E.E. du 24 octobre 1995 du Parlement européen et du Conseil relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, actuellement soumis à l'examen du Conseil d'État, prévoit une disposition qui donne droit à toute personne de s'opposer gratuitement et sans justification au traitement de données à des fins de marketing direct.
2. D'après les renseignements obtenus de la Commission de la protection de la vie privée, les sociétés en question ont reçu un exemplaire de la recommandation 1/95. Le parquet n'a pas cru devoir poursuivre pour des motifs d'opportunité.