1-176

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Sénat de Belgique

Belgische Senaat

Annales parlementaires

Parlementaire handelingen

SÉANCES DU JEUDI 26 MARS 1998

VERGADERINGEN VAN DONDERDAG 26 MAART 1998

(Vervolg-Suite)

QUESTION ORALE DE MME DARDENNE AU MINISTRE DE LA SANTÉ PUBLIQUE ET DES PENSIONS SUR « L'ÉTIQUETAGE DU SOJA ET DU MAÏS TRANSGÉNIQUES »

MONDELINGE VRAAG VAN MEVROUW DARDENNE AAN DE MINISTER VAN VOLKSGEZONDHEID EN PENSIOENEN OVER « DE ETIKETTERING VAN TRANSGENE SOJA EN MAÏS »

M. le président. ­ L'ordre du jour appelle la question orale de Mme Dardenne au ministre de la Santé publique et des Pensions.

M. le vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur répondra en lieu et place de son collègue.

La parole est à Mme Dardenne.

Mme Dardenne (Écolo). ­ Monsieur le président, vous me permettrez de m'étonner doublement du fait que ce soit le vice-Premier ministre qui réponde à ma question. En réalité, je l'avais adressée à M. le vice-Premier ministre Di Rupo en vue du Conseil des ministres européen des Affaires intérieures qui se tiendra le 30 mars prochain. Or, il semble que ce problème relève plutôt de la compétence du ministre de la Santé. Je ne sais toutefois pas qui assistera à ce Conseil des ministres européen, où sera discutée la proposition de règlement relative à l'étiquetage du soja et du maïs transgéniques.

Le soja et le maïs transgéniques ont été mis sur le marché avant le règlement Novel Food qui traite précisément de l'étiquetage de ces nouveaux aliments. Celui-ci ne leur est donc pas appliqué et le problème de leur étiquetage se pose actuellement.

La Commission européenne propose un règlement qui base l'étiquetage des aliments ou ingrédients alimentaires génétiquement modifiés sur la présence, dans ces produits, d'A.D.N. génétiquement modifié ou de protéines issues de modifications génétiques.

Les milieux industriels concernés mènent actuellement auprès des États membres un lobbying visant à restreindre la base de la réglementation en la ramenant à la seule présence détectée de protéines issues de manipulations génétiques.

Or, environ 85 % des aliments à base de soja ne contiennent pas de protéines ­ c'est notamment le cas de toutes les huiles ­ et échapperaient de facto à l'étiquetage. En outre, dans le maïs Novartis, il semble que ces protéines ne soient pas délectables. On comprend donc mieux pourquoi les milieux industriels préfèrent que les méthodes de détection se basent plutôt sur les protéines puisque, de cette manière, on ne pourra pas prouver grand-chose.

Enfin, d'après nos informations, la méthode de détection par l'A.D.N. génétiquement modifié est de loin la plus fiable. Même si la proposition de règlement de la Commission est encore incomplète, elle permet, à condition de maintenir les deux méthodes de détection, de garantir aux consommateurs une information claire, du moins pour certains produits.

J'aimerais savoir si le ministre compétent qui assistera lundi au Conseil des ministres pour le Marché intérieur défendra, en tant que responsable de la protection des consommateurs, le maintien de la proposition de la Commission ou, au contraire, cédera aux lobbies industriels.

Par ailleurs, puisque la proposition de la Commission reste insuffisante, le ministre serait-il d'avis de défendre à l'avenir le principe de la certification d'origine qui, conjuguée à la détection par l'A.D.N. et les protéines génétiquement modifiés, permet de garantir un étiquetage correct et conforme à l'information et la protection que les consommateurs sont en droit d'attendre ?

M. le président. ­ La parole est à M. Vande Lanotte, vice-Premier ministre.

M. Vande Lanotte, vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur. ­ Monsieur le président, la proposition de la Commission à laquelle fait référence Mme Dardenne concerne les denrées alimentaires dérivées du soja et du maïs transgéniques qui ont fait l'objet d'une autorisation de commercialisation dans l'Union européenne sur la base de la directive 90/220.

En raison de diverses difficultés que je n'exposerai pas ici ­ je vous transmettrai le document, madame Dardenne ­ une nouvelle réglementation s'imposait. La Commission a donc émis une proposition en ce sens, laquelle a été soumise au vote du Comité permanent des denrées alimentaires mais n'a reçu le soutien que d'une minorité de délégations : 25 voix sur 87. En conséquence, elle a, selon les procédures en vigueur, été transmise au Conseil fin février. Celui-ci a trois mois pour prendre une décision. Il devrait statuer le 18 mai 1998. S'il ne peut se prononcer selon les règles en vigueur ­ et c'est là que réside le problème ­ la proposition sera alors adoptée par la Commission.

La proposition de la Commission européenne ne vise pas la protection du consommateur ­ celle-ci étant assurée par les évaluations effectuées par les comités scientifiques ­ mais l'information de celui-ci.

Il convient de se prononcer sur l'appréciation de la différence entre les denrées traditionnelles et les denrées nouvelles. Cette appréciation doit se faire « sur la base d'une évaluation scientifique fondée sur une analyse appropriée des données existantes pouvant démontrer que les caractéristiques évaluées diffèrent de celles d'un aliment classique, compte tenu des limites admises des variations naturelles de ces caractéristiques ».

Durant les discussions, la délégation belge, avec une majorité de délégations, avait toujours défendu le point de vue selon lequel cette évaluation de la différence devait être interprétée au niveau de la présence d'une nouvelle protéine. Cette position n'avait nullement été prise à la suite d'interventions de lobbies industriels mais se basait sur des considérations pratiques relatives aux méthodes d'analyse : limites de la détection, reproductibilité et fiabilité.

La proposition de la Commission comporte également d'autres règles que la délégation belge, comme la grande majorité des délégations, ne pouvait accepter, telles que l'obligation d'indiquer dans l'étiquetage que la denrée « peut contenir » des organismes génétiquement modifiés en cas de doute sur leur présence ou leur absence. Les organisations de défense des consommateurs se sont également opposées à cette mention qui n'apporte aucune information mais qui, au contraire, suscite le doute.

Dans les semaines à venir, la présidence, constatant les divergences de vue, va s'efforcer d'obtenir une majorité qualifiée sur un texte qui pourrait également être accepté par la Commission. Voilà où nous en sommes dans la procédure. La Belgique s'efforcera dans toute la mesure du possible de collaborer à l'élaboration de ce compromis en vue d'obtenir enfin des dispositions européennes en la matière.

Certains souhaitent que, même en cas d'impossibilité de détection analytique du fait que les denrées alimentaires sont dérivées d'organismes génétiquement modifiés, l'étiquetage indique cependant que ces denrées dérivent d'organismes génétiquement modifiés. C'est ce que vous demandez quand vous parlez de certification d'origine. Ce genre d'étiquetage réclamé au nom « du droit de savoir des consommateurs » ne pourrait évidemment se faire qu'à l'aide de certificats d'origine crédibles. Rendre obligatoire l'utilisation de tels certificats dans le commerce international n'est pas de la compétence exclusive d'un État membre mais bien de l'ensemble de l'Union européenne et donc dépend essentiellement d'une initiative de la Commission.

La Belgique n'est pas favorable à l'utilisation de tels certificats difficilement crédibles et presque incontrôlables. En conclusion, tant que la fiabilité des contrôles et la crédibilité de certificats n'auront pas été améliorées, la Belgique ne défendra pas ce type d'étiquetage. Il ne s'agit donc pas d'un refus de principe mais bien de l'exigence de la qualité du contrôle.

M. le président. ­ La parole est à Mme Dardenne pour une réplique.

Mme Dardenne (Écolo). ­ Monsieur le président, je remercie le vice-Premier ministre et je comprends la complexité de la matière. Je déplore le fait que la Belgique ne manifeste guère de volonté de mieux informer le consommateur. En effet, la méthode de détection d'A.D.N. génétiquement modifié, qui est plus fiable que celle par les protéines, n'est cependant pas retenue. Par ailleurs, la certification d'origine ­ même si elle pose certains problèmes de garantie ­ indique tout de même d'où vient le produit.

J'en conclus que les aliments génétiquement modifiés vont se trouver sur le marché sans que le consommateur puisse en aucune manière les identifier comme tels. Mon collègue Mahoux a d'ailleurs déposé une proposition de loi visant à l'étiquetage de ces produits et je ne doute donc pas que cette réponse l'intéresse aussi tout particulièrement.

Je le répète, je suis désolée de constater l'attitude adoptée par la Belgique dans ce dossier.

M. le président. ­ L'incident est clos.

Het incident is gesloten.