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Sénat de Belgique

Belgische Senaat

Annales des réunions publiques de commission

Handelingen van de openbare commissievergaderingen

COMMISSION DE LA JUSTICE

COMMISSIE VOOR DE JUSTITIE

SÉANCE DU MARDI 21 JANVIER 1997

VERGADERING VAN DINSDAG 21 JANUARI 1997

(Vervolg-Suite)

DEMANDE D'EXPLICATIONS DE MME MILQUET AU MINISTRE DE LA JUSTICE SUR « LES INFORMATEURS »

VRAAG OM UITLEG VAN MEVROUW MILQUET AAN DE MINISTER VAN JUSTITIE OVER « DE INFORMANTEN »

M. le président. ­ L'ordre du jour appelle la demande d'explications de Mme Milquet au ministre de la Justice sur « les informateurs ».

La parole est à Mme Milquet.

Mme Milquet (PSC). ­ Monsieur le président, des demandes d'explications portant sur le même objet ont été déposées simultanément au Sénat et à la Chambre; dans cette dernière assemblée, elles ont déjà été traitées la semaine passée. Celle que je vais développer maintenant comporte toutefois quelques questions générales supplémentaires par rapport aux réponses que vous avez déjà communiquées, monsieur le ministre.

Un article de l'hebdomadaire Le Vif/L'express a révélé, au sujet de l'enquête relative à l'assassinat du ministre d'État, André Cools, le fait qu'un informateur aurait reçu une rétribution importante ­ un montant de huit à dix millions a été cité ­, bien supérieure par rapport à la pratique courante que constituent les « fameuses » primes délivrées par les services de police.

Cette pratique pose évidemment un certain nombre de problèmes « éthico-juridiques » déjà partiellement évoqués au sein de la commission d'enquête sur la criminalité organisée.

Je voudrais vous poser des questions d'ordre général mais aussi plus particulières.

Tout d'abord, nous savons que cette pratique a été organisée sur la base non d'un texte de loi mais d'une circulaire. Pourriez-vous nous donner une estimation quant au nombre annuel de cas pour lesquels on a recouru aux services rémunérés d'un informateur ? Cette technique est-elle toujours limitée à la lutte contre la criminalité organisée ou dépasse-t-elle parfois ce cadre ?

J'aimerais également savoir quel budget est annuellement consacré à cette pratique. Ce montant peut-il varier en fonction de certains éléments ? Je pense notamment aux faits qui se sont produits à cet égard au cours de l'année antérieure. Comment ce montant est-il fixé ?

J'en arrive à ma deuxième question. La circulaire ne mentionne pas de tarification en tant que telle. J'aimerais en savoir plus à ce sujet. Le tarif est-il fixé au cas par cas, en fonction de l'informateur ou du genre de délit dénoncé, selon le type de police ou par arrondissement ? Je voudrais, enfin, savoir qui fixe le montant.

Je voudrais également que vous précisiez le type d'infraction pour lequel on a le plus souvent recours à un informateur. Je pense par exemple à la drogue ou à la prostitution. Pouvez-vous nous donner un aperçu général du nombre d'enquêtes que cette technique a permis de résoudre ? Cette question porte en fait sur l'efficacité du procédé et sur le mode de recrutement des informateurs.

J'en arrive à ma dernière question. Qui décide, in fine, du paiement ­ ou du non-paiement ­ de l'informateur, du montant en question et selon quelles règles internes ? Les règles mentionnées dans la circulaire ne sont pas toujours très précises à cet égard. J'aimerais également savoir si vous envisagez de légiférer en la matière, de même d'ailleurs qu'en ce qui concerne les autres techniques spéciales. L'absence de protection quant aux policiers obligés de recourir à cette technique pose en effet notamment problème. Je suis toutefois bien consciente du fait que les services de police doivent garder une certaine autonomie et qu'il faut également tenir compte de l'évolution des pratiques criminelles. Quelles sont vos intentions à cet égard ? Comptez-vous prendre une initiative en la matière ?

Ma deuxième série de questions concerne plus particulièrement ce fameux informateur dans l'affaire Cools. Si vraiment un montant aussi important que celui qui a été cité a été payé à cet informateur, je me demande, comme tout le monde, pourquoi il est tellement plus élevé que la moyenne qui dépasse rarement 100 à 150 000 francs, si mes informations sont exactes. Ce montant a-t-il été payé avant la révélation des informations ou après comme le prévoit la circulaire ? Dans le cas où ce paiement aurait été fait avant, avait-on suffisamment de garanties concernant la véracité et le sérieux des informations, d'autant que dans cette affaire plusieurs témoins se sont déjà rétractés ? Dans le cas qui nous occupe, l'enquête est en cours, et je suis bien consciente que vous devez répondre avec prudence. J'aimerais cependant savoir quel a été le processus de prise de décision. De même, je souhaite savoir si des garanties ont été demandées ou exigées concernant l'affectation de la somme versée et si des conditions ont été imposées de manière à éviter que cet argent de l'État, et donc des contribuables, ne tombe dans des systèmes mafieux ou illégaux.

Monsieur le ministre, je suis consciente du fait qu'il n'est pas facile de répondre à certaines de mes questions qui concernent des pratiques policières qui ne sont pas établies au grand jour. Je vous demande cependant de tracer un cadre précis à ce sujet.

M. le président. ­ La parole est à M. Desmedt.

M. Desmedt (PRL-FDF). ­ Monsieur le président, je souhaite profiter de la demande d'explications de Mme Milquet pour émettre quelques considérations et pour poser quelques questions au ministre. Nous voulons bien admettre que les informateurs sont indispensables à une mission de police efficace en matière de criminalité, mais il est évident que cela pose d'importants problèmes éthiques qui sont d'ailleurs d'actualité dans une série d'affaires célèbres. C'est pourquoi je demande au ministre s'il envisage de revoir cette problématique. En effet, il importe de savoir jusqu'où on peut aller. Pour cela, il convient de préciser les critères moraux et éthiques à observer dans ce genre d'activité, et de définir clairement la déontologie imposée en la matière.

Dans le cas de l'affaire dite Cools, si j'ai bien suivi, on en est tout de même arrivé à mettre M. Van der Biest en prévention et en arrestation sur la base de ce qui avait été dit par un informateur. Cela signifie, d'une certaine façon, que cet informateur a dit des parcelles de vérité mais, qu'en même temps, il affabule. Sans aborder le fond de l'affaire qui est toujours à l'instruction, il faut admettre que tous ceux qui connaissent un peu M. Van der Biest et qui ont suivi cette affaire sont fort étonnés qu'on lui prête un rôle d'inspirateur dans cet assassinat. Lorsque l'on paie un informateur, est-on assuré de la fiabilité des informations ?

Dans le cas qui nous occupe, on débouche sur une piste qui semble être la bonne, mais qui était envisagée depuis des années sans, apparemment, que cet informateur se soit manifesté antérieurement. Il semble que c'était plutôt le juge d'instruction qui ne voulait pas accorder de crédit à cette piste. Or, il suffit qu'arrive cet informateur pour que, brusquement, cette piste apparaisse crédible !

On dit aussi que cet informateur a été sollicité. Je trouve assez extraordinaire de solliciter un informateur que l'on paie ensuite !

Par ailleurs, j'ai lu la semaine dernière dans le Compte rendu analytique de la Chambre que vous aviez refusé de préciser, monsieur le ministre, si les chiffres avancés étaient exacts ou non. Sur quelle base repose votre refus de répondre à la question d'un parlementaire ? Comme Mme Milquet, j'aimerais savoir également ce qui justifie, dans un cas particulier, l'octroi apparent, puisque vous ne l'avez pas confirmé, d'un montant sans proportion avec les chiffres nettement inférieurs cités à la commission d'enquête sur la Criminalité par le responsable de la police judiciaire.

Il y a donc un malaise certain. Sur le plan de la déontologie, jusqu'où peut-on aller ? Dans de nombreux cas d'indicateurs, une certaine tolérance est accordée à l'égard de leurs propres activités. Quelles sont les barrières qui doivent être prévues ? En l'occurrence, quel est le motif qui justifie le montant anormalement élevé de l'indemnité accordée et cet informateur a-t-il été sollicité ?

Quand on constate, après paiement du montant, qu'un informateur fournit des renseignements qui ne se révèlent que partiellement exacts, quelles conclusions en tire-t-on ? J'estime que toutes ces questions ne doivent pas totalement échapper au contrôle parlementaire.

M. le président. ­ La parole est à M. De Clerck, ministre de la Justice.

M. De Clerck, ministre de la Justice. ­ Monsieur le président, il est exact que j'ai déjà répondu à une question identique à la Chambre, mais je répèterai bien volontiers les informations en ma possession. Afin d'éviter ce genre d'inconvénient, il appartient peut-être aux services du Sénat de réagir avec un peu plus de célérité.

À la suite d'une indiscrétion, la presse a fait état du paiement d'une importante somme d'argent à un témoin anonyme dans le cadre du dossier de l'assassinat du ministre André Cools.

Avant d'aller plus loin, je tiens à m'arrêter un instant sur cette notion d'indiscrétion. C'est en effet un grand problème auquel nous sommes confrontés à l'heure actuelle. Il serait peut-être opportun que tous les acteurs de la justice en général, et la commission de la Justice en particulier, s'interrogent sur la façon de réagir face à ce fléau des indiscrétions et des fuites.

Nous sommes sans cesse confrontés à des informations relayées indûment par les médias, qui compliquent le fonctionnement de la justice. Ce n'est pas le débat d'aujourd'hui, mais le présent dossier en est une illustration.

J'en reviens au sujet de la demande d'explications. Par une circulaire du 6 avril 1990 et à la suite de la décision de supprimer l'administration de l'information criminelle, mon prédécesseur a actualisé le système de la mise à disposition de la police des fonds spéciaux inscrits au budget du ministère de la Justice et de la provision B. Ce budget avait été créé en 1981 pour être utilisé dans les recherches et les enquêtes dans le milieu criminel ou en rapport avec le crime organisé. Il existe en fait deux sortes de budgets : la provision A et la provision B.

Cette circulaire a ensuite été remplacée par une circulaire du 21 novembre 1991, puis par une circulaire du 1er octobre 1995 que j'ai personnellement signée.

Dans le cadre de la provision A, des fonds sont mis à la disposition des services de police de manière définitive et ceux-ci en assurent la gestion.

Dans le cadre de la provision B, des sommes sont prêtées aux brigades de police judiciaire, aux unités de gendarmerie et aux corps de police communale pour des opérations exigeant la présentation d'une somme d'argent telles que les pseudo-achats par exemple.

Cette provision B permet donc aux différents services de montrer qu'ils disposent d'argent pouvant servir à certains achats. Cela s'utilise par exemple dans le cas de la drogue. C'est donc de l'argent qui est en principe récupéré, à l'inverse de la provision A, où l'argent est définitivement acquis par les services en question.

Dans le cadre du dossier Cools, seuls les fonds mis à la disposition des services de police sont concernés. Ces fonds ne peuvent être utilisés que dans deux cas : d'une part, lors de prise de contact avec les indicateurs ou les informateurs et de paiement de prime; d'autre part, pour faire face aux frais inhérents aux enquêtes et aux recherches en rapport avec la grande criminalité organisée.

Depuis plus de quinze ans, un budget est prévu pour le paiement de primes à des informateurs, tant de la police judiciaire que de la gendarmerie. Ces fonds sont transférés, en début d'année, par mon département, au commissariat de la police judiciaire et à l'état-major général de la gendarmerie. Le système de contrôle a été mis en place au sein des deux services de police, lesquels remettent chaque année un rapport à l'administration des affaires pénales et criminelles justifiant de l'utilisation des fonds. Une copie de ce rapport est envoyée aux procureurs généraux et au magistrat national.

Un système de contrôle préalable a été instauré qui oblige le service de police à faire approuver par le procureur du Roi toute dépense supérieure à 20 000 francs et un système de contrôle a posteriori est effectué tous les trois mois par le procureur du Roi et le magistrat national. Les services ne disposent donc pas des montants prévus à la provision A comme ils l'entendent, puisque le procureur du Roi et le magistrat national exercent un contrôle spécifique en la matière.

En ce qui concerne l'opportunité d'utilisation de ces fonds, quelques principes généraux ont été déterminés. Le premier est d'éviter que des activités criminelles soient organisées dans le seul but de bénéficier de primes. Le deuxième consiste à ne payer aucune prime tant que des résultats concrets n'ont pas été enregistrés tels que l'arrestation d'auteurs d'infractions, la découverte d'un butin ou de pièces à conviction, etc. Le paiement n'est donc effectué que lorsque les faits annoncés s'avèrent ou lorsque l'on dispose de la preuve d'un élément concret supplémentaire.

Il n'existe aucune limitation quant au type d'infraction concernée par le recours à un informateur rémunéré.

La gestion des informateurs ­ avec lesquels un contact doit être maintenu ­ est réglée par une circulaire du 24 avril 1990 mise à jour par une circulaire du 6 mars 1992. Une série de directives y sont reprises qui ont pour objet de régler la manière dont les contacts avec l'indicateur doivent être organisés dans chaque service de police et de mettre au point un système de contrôle de ces personnes. La circulaire prévoit la désignation de gestionnaires qui doivent recevoir des « rapports de contacts » de la part de policiers de contacts. Il est également prévu d'encoder les informateurs dans un système informatique central de manière à vérifier si certains ne travaillent pas simultanément avec plusieurs services de police et à en exclure d'autres considérés comme non fiables. Les informations reçues doivent être coordonnées aux niveaux local et national. Le système prévoit donc d'éviter le double emploi et de centraliser les informations obtenues grâce à la collaboration organisée avec ces informateurs.

Dans le cadre du dossier Cools, une prime importante a effectivement été payée, conformément aux dispositions de la circulaire et sous le contrôle de la magistrature. Le témoin anonyme rétribué avait apporté des éléments déterminants, lesquels ont abouti à la découverte de l'arme du crime et à l'arrestation des tueurs tunisiens et de plusieurs coauteurs ou complices de l'assassinat.

Je me dois d'insister sur le fait que je ne suis pas en droit de vous communiquer des informations concernant la prime versée ou le nom des informateurs.

M. Desmedt (PRL-FDF). ­ Nous ne vous le demandons pas.

M. De Clerck , ministre de la Justice. ­ Il est de ma responsabilité personnelle de ne pas vous transmettre de telles informations. Une certaine publicité pourrait se révéler dangereuse. En effet, bon nombre d'informateurs sont impliqués dans ce type d'affaires. C'est la raison pour laquelle je suis tenu à la discrétion dans ce domaine. Par ailleurs, il convient de respecter l'essentiel du contrat passé avec les personnes concernées par ce dossier, lequel est soumis à l'obligation de secret.

M. Desmedt (PRL-FDF). ­ Pourquoi, dans le cadre de ce dossier précis, les chiffres sont-ils tellement disproportionnés par rapport à ceux qui nous ont été communiqués ?

M. De Clerck , ministre de la Justice. ­ C'est vous qui le dites.

Mme Milquet (PSC). ­ J'espère qu'il ne s'agit pas là de pratiques usuelles, auquel cas des millions seront nécessaires !

M. Desmedt (PRL-FDF). ­ Ce serait inquiétant !

M. De Clerck , ministre de la Justice. ­ Il n'est pas courant non plus que des fuites se produisent dans ce genre d'affaires. Je ne confirmerai ni n'infirmerai les informations en la matière. Celles-ci relèvent du secret auquel je suis tenu et qui s'attache à ce type de contrat.

Mme Milquet (PSC). ­ Pouvez-vous confirmer que le montant payé et que nous ne définirons pas, était relativement exceptionnel par rapport à la moyenne, que nous ne préciserons pas non plus ?

M. De Clerck , ministre de la Justice. ­ Je pense que oui.

Mme Milquet (PSC). ­ Selon vous, une telle somme était-elle justifiée ?

M. De Clerck , ministre de la Justice. ­ Cette question relève de la responsabilité de tous ceux qui sont concernés par la circulaire, ceux qui travaillent dans le système, opèrent un contrôle sur celui-ci et évaluent l'opportunité de prendre ­ et de respecter ­ de tels engagements, c'est-à-dire le magistrat national, les services de police, le procureur du Roi. Je n'ai aucun commentaire, aucune critique à formuler à cet égard.

Aujourd'hui encore, d'aucuns critiquent le fonctionnement de la Justice, se fondant sur le fait qu'une certaine personne ­ incarcérée ­ n'aurait pas reçu d'argent...

Mme Milquet (PSC). ­ Que cette personne n'a pas été visitée.

M. De Clerck, ministre de la Justice. ­ Si, elle l'a été. Je constate que dans certains cas, on nous reproche de ne pas agir suffisamment et, dans d'autres, de dépasser la mesure. C'est une question délicate. C'est la raison pour laquelle nous devons définir un cadre légal, élaborer une loi en la matière. En effet, la directive telle qu'elle existe n'est pas suffisante. Nous devons mener des discussions sur les aspects éthiques, les limites du système.

Sur le plan de la théorie, c'est bien de dire que nous devons mettre en place un sytème permettant d'élucider certaines affaires, jusqu'au moment où un cas concret apparaît, mettant en évidence des montants payés, des techniques utilisées. J'ai donc conclu un contrat de recherche avec le professeur Bosly de l'U.C.L., qui travaille sur cette problématique. Il m'a transmis le 20 décembre 1996, un premier rapport intermédiaire.

Sur cette base, j'ai l'intention de déposer un projet de loi dans les prochains mois. Nous aurons donc l'occasion d'examiner cette question. Des discussions ont déjà eu lieu dans le cadre de la commission d'enquête sur la criminalité organisée, laquelle a dressé l'inventaire de toutes les mesures nécessaires en la matière. Nous avons largement discuté des techniques spéciales, du travail mené avec les informateurs. Il convient également d'examiner la problématique des témoins, l'opportunité de passer des contrats ­ selon moi, il faut agir en ce sens ­ ainsi que la question des repentis, c'est-à-dire des témoins qui acceptent de déposer mais formulent, en contrepartie, certaines exigences, à savoir, par exemple, une protection, une diminution de peine, un changement d'identité. Parfois, ces demandes sont exceptionnelles. Cela s'est produit récemment en Hollande : on y a proposé à un témoin crucial pour la Belgique de le protéger. Jusqu'où peut-on aller ? Est-ce jusqu'au refus d'une extradition ? De grands problèmes éthiques et juridiques sont posés. J'espère que ce débat pourra avoir lieu au Parlement.

Dans le plan d'action du gouvernement contre le crime organisé approuvé au Conseil des ministres le 28 juin 1996, il est prévu de conformer le système des récompenses matérielles et immatérielles accordées aux informateurs à la situation qui prévaut chez nos voisins où je constate que se déroule le même débat, qu'ils aient ou non adopté le système. Quand une question de cet ordre est relatée dans la presse ­ notamment française et hollandaise ­ , elle suscite presque un débat de société. Il appartiendra au Parlement de faire un choix en la matière.

La criminalité organisée étant le plus souvent internationale, il est important de ne créer aucune concurrence entre les pratiques policières des différents pays pour éviter aux informateurs la tentation de faire du shopping à l'information.

Tout ce système qui est évidemment explicite est sous le contrôle des magistrats, du procureur du Roi et du magistrat national mais aussi de la Cour des comptes.

Telles sont les explications que je pouvais donner. Il m'est impossible, pour des raisons évidentes, d'entrer dans le détail des dossiers individuels.

M. le président. ­ La parole est à Mme Milquet.

Mme Milquet (PSC). ­ Monsieur le président, je remercie le ministre de sa réponse. Je partage entièrement son opinion en ce qui concerne la déontologie de la presse. Je pense que nous devrons pousser la réflexion plus loin avec tous nos partenaires.

En ce qui concerne plus précisément l'affaire que j'ai évoquée, mon intention n'était nullement de poser des questions irresponsables ­ d'ailleurs, je pense qu'elles ne le sont pas; je ne veux en rien mettre à mal une enquête ou quoi que ce soit; je voudrais seulement obtenir quelques précisions.

Permettez-moi, monsieur le ministre, de réitérer ma question : pouvez-vous nous indiquer le montant général du budget... (Signe de dénégation du ministre .) Peut-être cela donnerait-il des idées aux informateurs...

En ce qui concerne la tarification, la circulaire dont je dispose n'établit pas de fourchettes. Les services de police américains que nous avons rencontrés nous ont expliqué qu'ils disposent de fourchettes relativement flexibles pour rémunérer leurs informateurs. Peut-être faudra-t-il que nous établissions des indications relativement larges mais claires en la matière. J'ignore si nous devrons rendre cela public; c'est un autre débat.

On dit que cette pratique doit être vue dans le cadre de la criminalité organisée. Mais est-ce vraiment le cas ? Le recours aux informateurs ne déborde-t-il pas de plus en plus dans d'autres domaines ? Il est clair que la définition de la criminalité organisée n'est pas facile à cibler.

Vous avez parlé, monsieur le ministre, d'un rapport annuel. J'imagine que vous ne pouvez pas le rendre public; néanmoins nous sera-t-il possible de le consulter ? Peut-être la commission sur la criminalité organisée s'indiquerait-elle davantage pour ce faire. Il serait intéressant que nous puissions avoir un aperçu à titre tout à fait personnel. Ces informations resteront bien évidemment confidentielles.

Dans le cas d'espèce, la prime a-t-elle bien été payée après que les informations ont été données ? Vous dites en effet que la circulaire a été respectée. Les choses se sont-elles passées de la sorte ou bien la négociation a-t-elle eu pour conséquence que ce ne soit pas le cas ?

Des conditions ont-elles été mises à l'affectation du montant dont on devine où il peut aboutir ?

Telles sont les questions qui subsistent, monsieur le ministre, mais peut-être ne pouvez-vous pas y répondre...

M. le président. ­ La parole est à M. De Clerck, ministre.

M. De Clerck , ministre de la Justice. ­ Monsieur le président, je ne puis effectivement répondre à certaines questions en séance publique. Par contre, je reste à la disposition du Sénat pour fournir plus d'informations dans le cadre des travaux de la commission sur la criminalité organisée, pour autant qu'ils se déroulent à huis clos.

J'ai en effet vécu une mauvaise expérience en la matière. Après avoir communiqué récemment à la commission les rapports des procureurs généraux sur un certain nombre de dossiers, j'ai constaté que tous ces renseignements figuraient intégralement dans les journaux deux jours plus tard. Le problème ne se pose donc pas uniquement à l'échelon des médias. Si nous voulons avancer au Parlement dans la problématique des informateurs, nous devons trouver les moyens d'informer à 100 % mais avec la certitude que les informations ne seront pas divulguées. Il est impensable que je vous transmette dans le détail tous les renseignements dont je dispose sur les informateurs. Aussi, je ne puis vous indiquer le montant général du budget octroyé en ce domaine ni établir des fourchettes, comme vous le suggérez.

Sachez toutefois qu'un montant global de 15 millions est mis à disposition des services de police, lesquels ont leur méthode de travail et respectent des schémas précis. En outre, le solde de l'année précédente peut s'ajouter aux 15 millions attribués en début d'année. Des réserves peuvent ainsi être constituées.

Je ne peux vous donner de plus amples informations sur l'affectation de ces montants mais je peux en tout cas vous dire que des accords sont conclus et que le paiement n'est effectué qu'au moment où toutes les conditions sont remplies; on ne paie donc pas aveuglément. C'est bien de cette manière que les choses se sont produites dans ce dossier.

M. le président. ­ L'incident est clos.

Het incident is gesloten.

Mesdames, messieurs, l'ordre du jour de la réunion publique de la commission de la Justice est ainsi épuisé.

De agenda van de openbare vergadering van de commissie voor de Justitie is afgewerkt.

La séance est levée.

De vergadering is gesloten.

(La séance est levée à 15 h 10.)

(De vergadering wordt gesloten om 15.10 uur.)