1-383/1

1-383/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 1995-1996

10 JUILLET 1996


Proposition de loi modifiant les articles 488bis , b) , c) et d), du Code civil et l'article 623 du Code judiciaire

(Déposée par M. Vandenberghe)


DÉVELOPPEMENTS


La loi du 18 juillet 1991 relative à la protection des biens des personnes totalement ou partiellement incapables d'en assumer la gestion en raison de leur état physique ou mental a déjà apporté une série d'innovations importantes destinées à mieux protéger les personnes qui, par suite d'un handicap mental, sont censées ne pas être en mesure de gérer correctement leurs biens elles-mêmes.

La loi susvisée a ainsi inséré dans le Code civil un article 488bis, a), disposant que le majeur qui, en raison de son état de santé, est totalement ou partiellement hors d'état de gérer ses biens, fût-ce temporairement, peut, en vue de la protection de ceux-ci, être pourvu d'un administrateur provisoire, lorsqu'il n'est pas déjà pourvu d'un représentant légal.

Suivant les articles 10, 186 et 622 du Code judiciaire, le juge n'a de compétence que dans les limites du territoire qui lui est assigné par la loi.

Le juge de paix n'a de compétence que dans son canton, dont les limites territoriales sont légalement désignées.

Est seul compétent pour prendre connaissance de la demande, le juge de la résidence ou, à défaut, du domicile de la personne à protéger, lorsqu'il s'agit d'une demande prévue aux articles 488bis, a) à k) , du Code civil et faite en vertu de l'article 628, 3º, du Code judiciaire.

Le juge de paix, saisi par voie de requête, statue sur toute demande qui lui est adressée en application des articles 488bis, a) à k) , du Code civil et faite en vertu de l'article 594, 16º, du Code judiciaire.

Une fois le juge de paix saisi, la gestion des biens de la personne protégée reste centralisée dans son canton (un des 220 que compte le pays). Ce juge de paix prend toutes les mesures nécessaires afin que les biens soient correctement gérés.

Comme dans la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux, et plus spécialement en son article 35, modifié par la loi du 6 août 1993, il se pose un problème de territorialité lorsque la personne protégée quitte le canton pour installer sa résidence de manière durable dans un autre.

La gestion patrimoniale que le législateur a voulu personnaliser dans le canton où résidait la personne protégée devient alors quelquefois impossible.

D'une part, en vue de la continuité de la gestion et, d'autre part, conformément à la volonté du législateur d'assurer une gestion patrimoniale personnalisée, le dossier doit, dans certains cas, pouvoir suivre la personne protégée dans un autre canton, si le juge de paix qui a pris la mesure ou l'a maintenue après envoi antérieur, décide par ordonnance motivée de transmettre le dossier au juge de paix du canton de la nouvelle résidence.

Cette possibilité de transmettre le dossier n'a pas été prévue et requiert une modification de l'article 488bis du Code civil.

L'administrateur provisoire est tenu de rendre compte de sa gestion à la personne protégée et au juge de paix avant que le dossier soit transmis au juge de paix de la nouvelle résidence, suivant l'article 627, 2º, du Code judiciaire, ce qui requiert aussi une modification de l'article 488bis du Code civil.

Afin d'éviter des commission rogatoires ­ délégations faites d'un juge à un autre en vertu de l'article 11 du Code judiciaire ­ et afin de réaliser une administration personnalisée, le juge de paix qui a pris la décision de placer la personne concernée sous cette administration ou l'a maintenue après envoi, doit, s'il l'estime nécessaire, pouvoir sortir de son canton afin de visiter la personne protégée, ce dont il dresse procès-verbal valable.

Cela se produit surtout en cas d'hospitalisation ou de soins temporaires en dehors de la résidence dans le canton, ou encore si le juge de paix qui a pris la mesure ou l'a maintenue n'estime pas devoir transmettre le dossier dans un autre canton, bien que la personne protégée y réside d'une manière durable, par exemple quand celle-ci ou ses amis ou sa famille préfèrent continuer à dépendre du juge de paix du canton où la décision de placer la personne concernée sous cette protection a été prise.

Comme le juge de paix n'a de compétence que dans son canton, une modification de l'article 623 du Code judiciaire s'impose.

L'initiative du législateur s'impose vu l'insécurité juridique née des controverses persistantes dans la doctrine et la jurisprudence des justices de paix et des tribunaux d'arrondissement, controverses qui ne servent nullement les intérêts des personnes protégées.

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article premier

Conformément à l'article 83 de la Constitution, il est dit que la présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.

Article 2

Même lorsque la personne pour laquelle le juge de paix a désigné un administrateur provisoire s'établit dans un autre canton, le juge de paix restera compétent pour continuer à appliquer la mesure de protection, à moins qu'il ne décide de transmettre le dossier au juge de paix du canton de la nouvelle résidence de la personne protégée (cf. infra l'article 4).

Article 3

Cet article prévoit que, lorsque, conformément à l'article 488bis, d) , deuxième phrase (cf. infra l'article 4), le dossier est transmis à un autre juge de paix, l'administrateur provisoire doit rendre compte de sa gestion à la personne protégée et au juge de paix (qui transmet le dossier).

Article 4

Le fait pour la personne protégée de s'établir à demeure dans un autre canton que celui du juge de paix qui a désigné l'administrateur provisoire, ne portera pas atteinte au pouvoir de ce juge de paix (cf. supra l'article 2). En vertu de l'article qui nous occupe, le juge de paix pourra toutefois décider, soit d'office, soit s'il en est requis, de transmettre le dossier au juge de paix du canton où la personne protégée s'est établie.

Article 5

Cet article autorise le juge de paix à visiter la personne protégée également en dehors de son canton.

Hugo VANDENBERGHE.

PROPOSITION DE LOI


Article premier

La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.

Art. 2

À l'article 488bis , b), § 1er , du Code civil, entre le premier et le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa nouveau rédigé comme suit :

« Sous réserve de l'article 488bis, d), deuxième phrase, le juge de paix qui a nommé l'administrateur provisoire reste compétent pour l'application de toutes les dispositions du présent chapitre. »

Art. 3

À l'article 488bis , c) , premier alinéa, du même code, les mots « et dans le cas visé par l'article 488bis, d), deuxième phrase, » sont insérés entre les mots « chaque année » et les mots « et à la fin de son mandat ».

Art. 4

À l'article 488bis, d) , du même code, la phrase ci-après est insérée à la suite de la première phrase :

« À la requête des mêmes personnes ou d'office, le juge de paix peut, lorsque la personne protégée quitte le canton pour installer sa résidence principale de manière durable dans un autre arrondissement judiciaire, décider par ordonnance motivée de transmettre le dossier au juge de paix du canton de la nouvelle résidence principale. Ce dernier juge devient compétent. »

Art. 5

L'article 623 du Code judiciaire est complété par un deuxième alinéa, rédigé comme suit :

« Le juge de paix peut rendre visite en dehors de son canton à la personne protégée pourvue d'un administrateur provisoire conformément aux articles 488bis, a) à k) du Code civil. »

Hugo VANDENBERGHE.