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Question écrite n° 7-1163

de Latifa Gahouchi (PS) du 31 mars 2021

à la secrétaire d'État à l'Égalité des genres, à l'Égalité des chances et à la Diversité, adjointe au ministre de la Mobilité

Mariages forcés - Institut pour l'égalité des femmes et des hommes (IEFH) - Rapport - Chiffres - Lutte contre le phénomène - Mesures

mariage forcé
Institut pour l'égalité des femmes et des hommes
violence domestique

Chronologie

31/3/2021Envoi question (Fin du délai de réponse: 29/4/2021)
31/5/2021Réponse

Aussi posée à : question écrite 7-1162

Question n° 7-1163 du 31 mars 2021 : (Question posée en français)

Je suis interpellée par un article de presse qui relate que selon le dernier rapport de l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes (IEFH), le nombre de mariages forcés en Belgique est en augmentation depuis 2015.

Entre 2016 et 2019, on enregistre 110 cas relatifs à cette pratique, dont 52 dans l'arrondissement du Hainaut. Un chiffre recensé par les différents parquets du pays, et qui ne reflète «que la partie émergée de l'iceberg», d'après la porte-parole de l'IEFH.

Au sein du «Réseau Mariage et Migration», un centre d'action qui œuvre contre les mariages forcés en Belgique, on en compte entre 50 et 60 par an. «Depuis le mois de janvier, on a comptabilisé une bonne dizaine d'appels de victimes de mariage forcé. C'est bien entendu énorme», souligne la coordinatrice du réseau.

La situation sanitaire n'a visiblement pas arrangé les choses. «Avec la fermeture des frontières et le confinement, les jeunes filles sont beaucoup plus exposées à leurs familles et subissent encore plus de violences», confie l'association sans but lucratif (ASBL) Violences et mariages forcés.

D'après les données transmises par l'association, environ 80 % des victimes sont des femmes âgées de dix-huit à trente ans. «La plupart du temps, ces jeunes femmes sont promises à la naissance, et dès qu'elles atteignent la majorité, leurs parents les marient sans consentement. Il faut savoir que pour ces jeunes filles, ces pratiques sont d'une violence inouïe», affirme la présidente de ladite ASBL.

Comme le souligne la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes, les mariages forcés sont des actes de violence profondément traumatisants et doivent dès lors faire l'objet d'une incrimination par les États signataires.

Dans la mesure où tant le niveau fédéral que les entités fédérées, pour ce qui relève de leurs compétences, doivent veiller à la mise en œuvre concrète des dispositions de la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique du Conseil de l'Europe (Convention d'Istanbul), la question démontre par suffisance sa transversalité.

1) Avez-vous pu prendre connaissance de ce rapport émis par l'IEFH?

2) Quels sont les moyens qui sont mis en œuvre pour éradiquer ce problème inadmissible en 2021?

3) Disposez-vous d'informations complémentaires? Quel est l'état de la question?

Réponse reçue le 31 mai 2021 :

En tant que secrétaire d'État à l'Égalité des genres, je suis évidemment très préoccupée par les situations alarmantes relayées par l’Institut pour l’égalité des femmes et hommes. Deux situations de mariage forcé à très haut risque sont adressées à l’Institut chaque mois ce qui montre que de tels cas sont malheureusement loin d’être exceptionnels. En raison des spécificités de cette problématique, les victimes rapportent encore rarement les faits aux autorités policières et judiciaires mais les cas signalés auprès de l’Institut ou des associations spécialisées retiennent toute mon attention.

La lutte contre les mariages forcés relève effectivement de la compétence tant de l'État fédéral que des Communautés et Régions. Il s’agit donc d’agir collectivement afin d’éviter que des mariages forcés ne se produisent et d’intervenir efficacement lors que de tels mariages sont néanmoins contractés. Les entités fédérées ont un rôle important à jouer étant donné leurs capacités d’action en termes d’information, de sensibilisation, de formation, de prévention, d’éducation et bien entendu de prise en charge des victimes.

A ce titre, le secteur associatif effectue un travail remarquable avec les initiatives du Réseau Mariage et Migration, de l’asbl « violences et mariages forcés » ou d’autres associations soutenues par les entités fédérées francophones et bruxelloises. Ces entités vont notamment étudier la faisabilité d’un hébergement spécifique (de transit) et d’un accueil et accompagnement des victimes majeures en maison d’accueil. Elles prévoient également la désignation de personnes de référence au sein du secteur de l’aide à la jeunesse, la rédaction d’un guide de bonnes pratiques relatif à l’accompagnement des victimes, etc. Des initiatives positives sont également menées en Flandre. A titre d’exemples, la Ville de Malines développe actuellement un nouveau projet holistique couvrant la problématique des mariages forcés et le CAW de Malines a été nommé comme centre d’expertise au niveau flamand. La ville de Malines prévoit également des mesures de prévention des mariages forcés sur la base d’un code de signalement des mariages à l’usage des officiers de l’état civil élaboré par l’Institut. Le Family Justice Center du Limbourg a également reçu un subside des autorités flamandes afin de travailler spécifiquement sur les mariages forcés.

Au niveau fédéral, une circulaire de politique criminelle (COL 6/2017) dresse des lignes directrices pour les intervenants policiers et judiciaires. Je souhaite m’entretenir avec le Ministre de la Justice afin de procéder à une évaluation de cette circulaire et de procéder, le cas échéant, à des adaptations de son application. Le recours au code de signalement destiné aux officiers de l’état civil devrait faire également prochainement l’objet d’une évaluation plus approfondie menée par l’Institut. Cette évaluation sera aussi une opportunité de déterminer si de nouvelles mesures visant à renforcer la collaboration et le réseautage entre les secteurs (communes, police, justice et assistance) peuvent être entreprises au niveau local.