Version à imprimer bilingue Version à imprimer unilingue

Question écrite n° 6-842

de Petra De Sutter (Ecolo-Groen) du 1 mars 2016

au ministre des Classes moyennes, des Indépendants, des PME, de l'Agriculture, et de l'Intégration sociale

Pesticides - Glyphosate - Différence possible entre les chiffres officiels et les chiffres de vente en Belgique

herbicide
substance cancérigène
produit chimique
santé publique
pesticide
cancer
substance toxique
risque sanitaire
statistique officielle
fraude

Chronologie

1/3/2016Envoi question (Fin du délai de réponse: 31/3/2016)
31/3/2016Réponse

Aussi posée à : question écrite 6-839

Question n° 6-842 du 1 mars 2016 : (Question posée en néerlandais)

Après les constructeurs de voitures propulsées au diesel, les producteurs de pesticides semblent eux aussi s'adonner à des manœuvres frauduleuses. Il ressort d'un rapport récent de Greenpeace Pays-Bas qu'une grande différence existe entre les chiffres officiels de la consommation de pesticides du Centraal Bureau voor de Statistiek (CBS – le Bureau central des statistiques néerlandais) et les chiffres de vente du secteur lui-même. Il s'agit notamment de NEFYTO, organisation représentative des fabricants de pesticides.

Si l'on compare, pour l'année 2012, les chiffres de vente et les chiffres de consommation de trois pesticides controversés, il apparaît que le glyphosate a été vendu cinq fois plus qu'il n'a été consommé d'après les chiffres du CBS. Le glyphosate engendre des problème pour le captage d'eau potable et il a été catalogué par l'Organisation mondiale de la santé comme (OMS) « probablement cancérigène ». L'imidaclopride, toxique pour les abeilles, a été vendu deux fois plus qu'il n'a été consommé d'après les chiffres du CBS. Et ceux-ci ne tiennent même pas compte du métham sodium, produit de désinfection du sol, dont on a encore vendu plus de 1 500 tonnes en 2013.

Votre collègue néerlandais se base sur les chiffres communiqués par le CBS pour répondre à des questions parlementaires et pour définir sa politique. Vous ne le faites pas (encore). D'où mes questions :

1) Avez-vous pris connaissance du rapport de Greenpeace Pays-Bas ? Dans l'affirmative, une étude similaire a-t-elle été réalisée pour la Belgique ? En d'autres termes, y a-t-il une grande différence entre les chiffres officiels et les chiffres de vente de pesticides en Belgique ?

2) Quelle est la portée des chiffres dont vous pouvez disposer ? Avez-vous une idée des importations et des exportations au niveau fédéral et au niveau des Régions ? Avez-vous une idée de la répartition entre l'usage particulier, l'usage à des fins agricoles et autre ? Pouvez-vous faire une évaluation de l'utilisation de produits et marques de toutes catégories ? Dans l'affirmative, pouvez-vous me communiquer les derniers chiffres par rapport aux chiffres du CBS et aux chiffres réels de vente des Pays-Bas ?

3) Quels chiffres utiliserez-vous pour définir votre politique ? Allez-vous changer d'orientation, en coopération avec les entités fédérées, et suivre l'exemple néerlandais ? Ou continuerez-vous à ignorer aveuglément les chiffres réels de vente ?

Réponse reçue le 31 mars 2016 :

L’article auquel vous faites référence démontre en effet qu'il existe des différences entre les chiffres de vente et les données d'utilisation. Ces différences peuvent s’expliquer par différents facteurs, notamment la méthodologie utilisée pour obtenir ces chiffres. Si les chiffres de ventes des producteurs sont basés sur des données concrètes pour l’ensemble du pays, les données d’utilisation, pour leur part, découlent en général d'enquêtes et autres méthodes d’investigation. Du fait que ces dernières sont basées sur des échantillons ciblés, elles peuvent fournir une image moins complète, ce qui peut expliquer que les chiffres d’utilisation hollandais soient si bas. En particulier, pour ce qui concerne le glyphosate, les utilisations non agricoles ne sont probablement pas prises en compte dans les chiffres d’utilisation agricole. Ceci inclut notamment l'utilisation par des particuliers et des entreprises de jardinage.

Concernant la situation belge, la collecte des données d'utilisation est une compétence des Régions, tandis que mon administration rassemble les chiffres de ventes. Ces chiffres des ventes sont exigés de tous les producteurs et importateurs de produits phytopharmaceutiques et sont corrigés pour tenir compte des importations et exportations.

Dans le passé, les Régions effectuaient des enquêtes sur l’utilisation de produits phytopharmaceutiques dans un nombre limité de cultures agricoles. Depuis l’entrée en vigueur d'une nouvelle législation européenne, des données complètes sur l’utilisation de produits phytopharmaceutiques sont rassemblées par les Régions, mais seulement pour un nombre limité de cultures agricoles, conformément à cette législation européenne. Ces données sont évidemment partagées avec le niveau fédéral lors de leur rapportage au niveau européen. Mes services sont actuellement occupés à comparer les données obtenues pour l’année 2012 avec les chiffres de ventes nationaux. Au premier abord, il semble qu'il existe une assez bonne corrélation pour les substances dont l’utilisation se cantonne à une culture spécifique. Les substances utilisées dans différentes cultures ou en dehors de l’agriculture comme le glyphosate présentent par contre une moins bonne corrélation étant donné que seuls les chiffres de certaines utilisations sont collectées. En l’occurrence, les chiffres d’utilisation agricole du glyphosate couvrent à peine 19 % des ventes.

Concernant les chiffres de vente, je peux vous communiquer que la quantité totale de glyphosate vendue en 2012 avoisine les 700 tonnes de substance active, dont 10 % environ pour l’usage des particuliers. Pour 2013 et 2014, ces chiffres de vente avoisinent les 600 tonnes.

Le fait qu'en Belgique, au contraire d'autres États membres européens, des autorisations séparées soient depuis peu délivrées pour les produits phytopharmaceutiques à usage amateur permettra à l'avenir de faire la distinction complète entre les quantités vendues à destination des professionnels et des amateurs.

Pour conclure, les chiffres des ventes rassemblés par mon administration me semblent être actuellement le meilleur indicateur de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques en Belgique, et je n'ai, à ce stade, aucun élément probant me conduisant à conclure que les producteurs de produits phytopharmaceutiques « trichent » avec leur chiffres de ventes.

J’accorderai ma plus grande attention au suivi de ces données chiffrées ainsi qu’à leur analyse approfondie.