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Question écrite n° 6-305

de Petra De Sutter (Ecolo-Groen) du 10 décembre 2014

à la ministre des Affaires sociales et de la Santé publique

Soins de santé - Lutte contre la fraude - Approche structurelle - Collaboration avec les entités fédérées et d'autres pays européens - Partenariat éventuel avec les mutualités

sécurité sociale
assurance maladie
fraude
coopération internationale

Chronologie

10/12/2014Envoi question (Fin du délai de réponse: 8/1/2015)
21/1/2015Réponse

Question n° 6-305 du 10 décembre 2014 : (Question posée en néerlandais)

En mars 2014, l'European Healthcare Fraud and Corruption Network (EHFCN) et l'Association Internationale de la Mutualité (AIM) ont publié des chiffres frappants: dans l'Union européenne, on enregistre chaque année dans les soins de santé une perte de 30 à 100 milliards d'euros à la suite d'erreurs, de fraude et d'abus. En Belgique, l'INAMI a évalué ce montant à 9,17 millions d'euros pour 2013. Ce dernier est évidemment sous-évalué. Début décembre, le docteur Ide et les mutualités indépendantes ont soulevé la même problématique.

Il figure littéralement dans votre déclaration de politique générale qu'«il faut lutter contre les abus et les usages abusifs». Comme vous le savez, ces abus et prestations fausses et déloyales trouvent leur origine dans des consultations non effectuées, des examens qui n'ont jamais lieu, etc.

Je suis sincèrement préoccupée et j'aimerais obtenir une réponse aux questions suivantes.

1) Au-delà de l'approche individuelle des fraudeurs, comptez-vous aussi aborder structurellement le déficit de notre système en collaboration avec les entités fédérées et d'autres pays européens? Comment comptez-vous procéder?

2) Comment voyez-vous le partenariat avec les mutualités à cet égard?

3) Êtes-vous favorable au partage et à la comparaison de données de santé afin de lutter contre la fraude par delà les frontières linguistique et nationale? Dans l'affirmative, quelles initiatives comptez-vous prendre?

Réponse reçue le 21 janvier 2015 :

L'honorable membre trouvera ci-après la réponse à ses questions.

1) Depuis 2005, l’Institut national d’assurance maladie-invalidité (INAMI), en tant que membre fondateur, est très actif au sein du EHFCN (European Healthcare Fraud and Corruption Network), tant au niveau administratif qu’au niveau opérationnel.

D’une part, ce statut de membre permet au Service d’évaluation et de contrôle médicaux (SECM) de l’INAMI de confronter son approche de la lutte contre la fraude aux normes internationales et de tirer les leçons des meilleures pratiques dans d’autres pays d’Europe confrontés à des problèmes similaires de gaspillage, de fraude et de corruption.

À l’initiative du SECM, la « EHFCN Waste Typology » a été développée au titre de norme internationale en matière de lutte contre la fraude dans le secteur des soins de santé. Son application sera opérationnelle au sein du SECM en 2015.

D’autre part, le réseau européen crée un cadre au sein duquel le SECM peut collaborer bilatéralement ou multilatéralement avec d’autres autorités compétentes à l’organisation de la lutte contre la fraude transfrontalière. Ainsi, plusieurs dossiers de fraude ont déjà pu être traités avec succès avec la France et les Pays-Bas.

2) Au niveau national, en application de la loi du 10 avril 2014 portant des dispositions diverses en matière de santé (Moniteur belge du 30 avril 2014) et dans le cadre de la lutte contre des indices de fraude graves, précis et concordants, une Commission anti-fraude en Soins de santé a été créée le 15 octobre 2014. Les organismes assureurs et l’INAMI y planifient et coordonnent des actions communes dans le cadre de problèmes spécifiques se posant au niveau des assurés et des dispensateurs de soins, soit distinctement (par exemple : vol d’attestations de soins donnés et attestation de prestations non effectuées), soit mutuellement entre les parties (collusion entre un dispensateur de soin et son patient ou entre dispensateurs).

Dans le cadre élargi de la responsabilisation des dispensateurs de soins, l’INAMI a, en septembre 2014, élaboré avec le projet « Politique proactive » un plan d’action où les organismes assureurs ont eux aussi un rôle spécifique à jouer dans l’approche notamment des variations de pratique, de la surconsommation, du gaspillage et de la fraude.

En ce qui concerne l’aspect international de la lutte contre la fraude dans le secteur des soins de santé, l’INAMI collabore avec les organismes assureurs dans le contexte du EHFCN étant donné que ces organismes assureurs sont également membres du réseau européen via le Collège intermutualiste national (CIN).

3) Une première initiative de collaboration concrète a été mise sur pied en 2010 sous forme d’accord bilatéral conclu entre la France et la Belgique.

Un facteur de réussite pratique pour une lutte efficiente et efficace contre la fraude dans le secteur des soins de santé est l’accès à des données valables. Cela vaut tant au niveau national que dans le cadre transfrontalier.

L’accord fédéral de gouvernement, dans la partie Soins de santé, comprend un chapitre distinct intitulé « Politique de suivi ». Il énumère les différentes mesures qui doivent donner lieu à un contrôle plus adéquate du secteur des soins de santé. Le but consiste à développer, en collaboration avec les organismes assureurs, des techniques comme le contrôle des valeurs aberrantes, le datamaning, etc. Une concertation est prévue à cet égard avec les organismes assureurs.

L’échange de données pertinentes entre les autorités européennes compétentes dans le cadre de la lutte contre la fraude dans le secteur des soins de santé doit dès lors être encouragé, en application des réglementations nationales en vigueur et des directives européennes ad hoc. Des réseaux tels que l’EHFCN peuvent, dans ce contexte, jouer un important rôle de facilitateur.

Rechercher les risques de fraude éventuels dans le cadre de l’application de la directive européenne 2011/24/UE du 9 mars 2011 relative à l’application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers peut être une importante impulsion à cet égard. Ce type de recherches sera stimulé dans le contexte de la participation de l’INAMI en tant que membre de l’EHFCN.

La nouvelle « EHFCN Waste Typology Matrix » permettra aussi d’effectuer des analyses comparatives et un benchmarking.