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Question écrite n° 6-2129

de Lionel Bajart (Open Vld) du 14 janvier 2019

au vice-premier ministre et ministre des Finances, chargé de la Lutte contre la fraude fiscale, et Ministre de la Coopération au développement

Navires suspects - Coupure du système d'identification automatique - Terrorisme - Douane - Chiffres

bateau
transport maritime
sécurité maritime
trafic illicite
terrorisme
surveillance maritime

Chronologie

14/1/2019Envoi question (Fin du délai de réponse: 14/2/2019)
18/2/2019Réponse

Réintroduction de : question écrite 6-1443

Question n° 6-2129 du 14 janvier 2019 : (Question posée en néerlandais)

Il ressort d'une analyse de données réalisée par l'entreprise Winward du secteur de l'information maritime, que plus de 480 navires suspects ont pénétré dans les eaux néerlandaises. Pour une raison inconnue, ils avaient éteint leur gps pendant plus d'un jour, alors qu'ils se trouvaient dans des territoires connus pour être fréquentés par des terroristes ou des trafiquants de drogue. Le directeur de l'entreprise considère que cela pourrait être une indication d'activité illégale. La garde néerlandaise côtière n'exclut pas non plus des « motifs malhonnêtes ». Ces deux derniers mois, pas moins de 75 navires ont fait escale dans des ports néerlandais alors qu'ils n'étaient pas correctement enregistrés.

Compte tenu de l'importance de nos ports, il est plus que probable que des navires y ont également fait escale qui avaient volontairement éteint leur gps plus longtemps qu'un jour ou qui avaient modifié leur numéro d'identification (IMO – International Maritime Organization) durant le trajet. Le journal britannique The Guardian avait déjà abordé cette question antérieurement.

Ces navires qui éteignent leur gps lorsqu'ils se trouvent à proximité de territoires sensibles sur le plan du terrorisme, comme la Libye et la Syrie, sont les premiers à devoir être contrôlés lorsqu'ils arrivent dans nos ports. Ainsi, il s'avère qu'entre les mois de janvier et de février, 40 navires ont éteint leur gps alors qu'ils approchaient des eaux territoriales libyennes. Cela ne s'explique que par la contrebande. On peut penser au pétrole, mais également aux armes, à la drogue ou au trafic d'êtres humains. Éteindre le système d'identification automatique (SIA) n'est pas seulement dangereux en cas de collision, c'est aussi interdit.

Robert Latiff, ancien général à la Force aérienne américaine et actuellement professeur de technologies à l'Université de Notre-Dame aux États-Unis qualifie le fait d'éteindre le gps de « menace potentielle, de signe d'activité illégale». Selon lui, il est possible de trouver ces navires lorsqu'ils ont éteint leur gps mais cela coûtera cher, en argent et en moyens.

Aux Pays-Bas, le député VVD Ockje Tellegen va également interroger le gouvernement néerlandais à ce sujet.

Les services de sécurité britanniques passent également au crible les informations relatives aux navires qui éteignent leur gps ou modifient leur numéro d'identification, et ils augmentent les contrôles.

Quant au caractère transversal de cette question, l'accord de gouvernement flamand accorde de l'attention à la prévention de la radicalisation. Il évoque la création d'une cellule regroupant des experts de divers domaines politiques afin de détecter, de prévenir la radicalisation et d'y remédier. Cette cellule comporterait un point de contact central et travaillerait en collaboration avec d'autres autorités. C'est l'Agence flamande de l'Intérieur qui est chargée de la coordination de cette cellule. L'autorité fédérale joue un rôle clé, en particulier en ce qui concerne l'approche proactive et le contrôle. À l'avenir, un fonctionnaire fédéral du SPF Intérieur fera également partie de cette cellule. Il s'agit dès lors d'une matière régionale transversale. Je me réfère également au plan d'action mis récemment sur pied par le gouvernement flamand en vue de prévenir les processus de radicalisation susceptibles de conduire à l'extrémisme et au terrorisme.

J'aimerais dès lors obtenir une réponse aux questions suivantes :

1) Pouvez-vous indiquer, depuis le mois de janvier, combien de navires ont, pour des raisons inexplicables, éteint leur signal gps pendant plus d'un jour avant de faire escale dans nos ports ou ont modifié leur numéro d'identification durant le trajet ? Dans l'affirmative, pouvez-vous préciser votre réponse ? Dans la négative, ces données ne sont-elles pas conservées par nos services douaniers ou d'autres services publics ou de sécurité ? Pouvez-vous préciser votre réponse ?

2) Quel est le service public qui vérifie si un navire a éteint son système d'identification automatique (SIA) plus d'un jour sans raison légitime ? Pouvez-vous préciser votre réponse ?

3) Pensez-vous, comme les experts maritimes, qu'il doit y avoir un contrôle strict sur ces navires supects ? Peut-on, le cas échéant, se mettre d'accord sur cette question au niveau européen ? Pouvez-vous donner des précisions en ce qui concerne les modalités et le calendrier ?

4) A-t-on contrôlé les navires dont le système d'identification automatique (SIA) avait été éteint pendant plus d'un jour avant qu'ils ne fassent escale dans nos ports ? Dans la négative, pourquoi ? Dans l'affirmative, quels ont été les résultats ?

5) Pouvez-vous nous expliquer si nos services de sécurité conservent systématiquement ces données ? Craignez-vous, à l'instar des experts en terrorisme, que ces navires suspects ne se prêtent à des activités terroristes ou au trafic d'armes ?

Réponse reçue le 18 février 2019 :

1) Les navires qui ont un port belge comme destination finale ou intermédiaire et qui entrent dans les eaux belges sans activation de l’AIS sont appelés par les opérateurs du VTS (Vessel Traffic System) afin de s'identifier.

Aucun registre n'est tenu sur le nombre annuel de navires concernés.

Le nombre de navires entrant dans les eaux belges sans AIS et qui n’activent pas l’AIS après avertissement est toutefois particulièrement faible. En outre, le temps que ces navires passent dans les eaux belges lorsqu'ils sont en transit, c'est-à-dire sans faire escale dans un port belge, est très court puisqu'ils naviguent généralement via le TSS (Traffic Separation Scheme) Northhinder, et de ce fait sont hors de la portée radar et AIS de nos services

Les navires qui sont identifiés sont instamment priés de mettre en marche leur AIS. Sinon, un bateau de patrouille du SPN (Schepvaartpolitie) les identifiera.

La plupart des navires qui éteignent leur AIS dans la ZEE belge (Zone Economique Exclusive) sont des navires de pêche. Ils le font souvent de mauvaise foi pour pouvoir pêcher là où c'est en principe interdit.

Les navires qui se trouvent en dehors des eaux sous juridiction belge ne sont pas systématiquement survieillés à moins qu’ils ne soient qualifiés de « navire d’intérêt » par une des agences européennes (Europol, Frontex, etc.).

2) Si un tel navire a été notifié à l'avance en tant que « navire d'intérêt », cela fera l'objet d'une surveillance. En fonction de la nature du navire d’intérêt, un des services du MIK-CIM (Maritieme Informatie Knooppunt- Carrefour d’Information Maritime) assurera le suivi (marchandises, migration irrégulière, .......).

Dans les eaux territoriales belges, la navigation sans activation de l'AIS est contrôlé par le VTS (Vessel Traffic Service)- le service de guidage maritime et les services du MIK.

Le MIK de la Garde côtière belge (une coopération entre la Marine, la Police maritime, la DG Navigation et la Douane) assure la surveillance des mouvements de navires dans le cadre de la " sécurité ". Il s'agit principalement de navires qui déclarent naviguer vers des ports belges, de navires se trouvant dans la ZEE belge et les eaux territoriales belges ou de navires belges.

3) Un contrôle cohérent et efficace est nécessaire. Les applications européennes soutenues, entre autres, par l'AESM (Agence Européenne pour la Sécurité Maritime) et Frontex, sont en constant développement. Ce qui rend cette forme de surveillance et de contrôle de plus en plus possible.

4) Les navires naviguant dans les eaux belges sans AIS sont priés de l'activer. S'ils ne se conforment pas à cet appel, un patrouilleur (en premier lieu du SPN) doit être envoyé afin de l'identifier et d’inciter l’équipage du bateau à activer l’AIS. Le bateau de patrouille de la Douane actuel est également adapté pour cette tâche et peut s’en charger si le NSP n'est pas disponible ou si la Douane est la plus proche des lieux.

Jusqu'à présent, il n’y a eu aucun navire notifié pour lequel il a été constaté que l’AIS a été éteint pendant plus d’une journée pour une raison inexplicable.

5) Fin 2017, la Cellule de Sécurité Maritime a été mise en place au sein du MIK. Ce service poursuit trois objectifs :

1. La protection des navires belges dans le monde entier contre la piraterie ou d'autres menaces terroristes ;

2. La sécurisation de la zone économique exclusive belge, des eaux territoriales et des ports contre d'éventuelles menaces terroristes provenant de la mer ;

3. Le screening du personnel éventuellement radicalisé à bord des navires belges.

Le service se concentre donc sur la protection contre le piratage et le terrorisme, une compétence fédérale. A cette fin, cette unité travaille en étroite collaboration avec la Police maritime, la Douane, la Défense et d'autres services internationaux. Les navires peuvent, de cette façon, être suivis beaucoup plus longtemps et l'historique (de route) du navire est mieux suivi et de manière plus cohérente. La Cellule de Sécurité Maritime fonctionne en permanence, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.

Nous constatons en effet que les navires ne sont pas toujours utilisés aux fins pour lesquelles ils ont été construits, à savoir le transport de passagers et de marchandises légitimes. Nous constatons que pour les organisations terroristes ou d'autres organisations criminelles, les navires constituent un moyen idéal de contrebande de grandes quantités d'armes ou d'autres substances interdites, ou même un moyen d’être utilisé comme d'armes terroristes. C'est pourquoi la Cellule de Sécurité Maritime développe la coopération aux niveaux national, européen et international afin que l'historique de l'escale d'un navire puisse être mieux suivi et que les actions suspectes du navire puissent être détectées en outre beaucoup plus rapidement. Les données recueillies dans ce contexte seront également stockées de manière efficiente.