Version à imprimer bilingue Version à imprimer unilingue

Question écrite n° 4-963

de Margriet Hermans (Open Vld) du 14 mai 2008

à la vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique

Chirurgie plastique - Produits permanents de comblement de rides - Effets secondaires - Interdiction

chirurgie esthétique
droits du malade
sécurité du produit

Chronologie

14/5/2008Envoi question (Fin du délai de réponse: 12/6/2008)
13/6/2008Réponse

Question n° 4-963 du 14 mai 2008 : (Question posée en néerlandais)

Je me réfère à mes questions écrites sur le même sujet posées au cours de la précédente législature (question nº 3-5356, Questions et Réponses nº 3-72, page 7720, question nº 3-5166, Questions et Réponses nº 3-72, page 7706, et question nº 3-3043, Questions et Réponses nº 3-55, page 4907). Comme vous le savez, l’utilisation de produits permanents de comblement de rides en chirurgie plastique suscite beaucoup d’émoi depuis quelque temps déjà. Divers médias ont confirmé, dans notre pays et à l’étranger, mes accusations antérieures au sujet des effroyables effets secondaires de ces produits. Le produit de comblement de rides Dermalive est déjà interdit en Suisse et des directives particulières sont en vigueur aux Pays-Bas. Selon un avertissement lancé le 18 mai 2006 par l’Inspectie voor de Gezondheidszorg aux Pays-Bas, l’utilisation de produits permanents de comblement de rides entraîne des dommages graves et irréversibles.

Dès 2005, j’avais signalé que la Nederlandse Vereniging voor de Plastische Chirurgie avait émis, dans une directive, les plus grandes réserves à l’égard de l’utilisation de produits de comblement de rides.

Le prédécesseur de la ministre avait indiqué qu’en Belgique également, des incidents s’étaient produits mais qu’ils n’avaient été notifiés ni par les praticiens ni par les fabricants. Ils avaient cependant fait l’objet de publications dans des revues médicales spécialisées. Les chiffres communiqués par d’autres autorités montraient une incidence des effets indésirables « au moins 25 fois supérieure à celle prévue par le fabricant », pour reprendre les termes de la réponse donnée à l’époque.

Les spécialistes belges ont déjà décrit à plusieurs reprises les fâcheux effets secondaires dans des publications scientifiques mais selon le ministre de la Santé publique de l’époque, l’information ne parvenait pas aux instances compétentes.

Aujourd’hui, près de deux ans plus tard, j’attends toujours. Je reçois encore chaque semaine des plaintes de personnes dont le visage est abîmé de manière irréversible. Sur internet, on continue à faire de la publicité pour la chirurgie plastique utilisant des produits de comblement de rides (cf. http://www.wellnesskliniek.com/F_chirurgie_plastique/F_injections_antirides.htm). La mesure est comble et c’est pourquoi je demande d’agir. Dès 2006, un journal avait réuni quarante-six témoignages de personnes défigurées à vie à cause de l’utilisation de ces produits.

Je souhaite une réponse aux questions suivante.

1) La ministre a-t-elle déjà une idée précise de la raison pour laquelle, bien que les spécialistes belges traitent en détail de la question des effets secondaires des produits permanents de comblement de rides dans des publications scientifiques, les instance compétentes à ce sujet n’ont pas reçu d’informations ? Peut-elle l’expliquer de façon détaillée ?

2) La ministre peut-elle indiquer si les divers spécialistes ayant analysé les effets secondaires dans diverses publications ont signalé entre-temps ces complications aux services compétents ?

3) L’enquête du prédécesseur de la ministre allait également vérifier pour quelle raison les incidents n’avaient pas été signalés en dépit de l’arrêté royal du 18 mars 1999 selon lequel le signalement de tous les incidents est obligatoire. Quelles étaient les réponses des intéressés ? La ministre juge-t-elle ces réponses satisfaisantes ? Peut-elle donner des explications détaillées ?

4) La ministre est-elle disposée à améliorer l’arrêté royal du 18 mars 1999 relatif aux dispositifs médicaux selon lequel tous les incidents doivent être signalés et à l’assortir de sanctions étant donné qu’ actuellement, cet arrêté n’est manifestement pas respecté ? Dans la négative, pourquoi pas ? Que fera la ministre pour garantir que les complications, notamment des implants et des dispositifs, soient déclarées ? Peut-elle détailler sa réponse ?

5) Interdira-t-elle finalement le produit Dermalive ? Peut-elle détailler sa réponse ?

6)Ne craint-elle pas que l’autorité s’expose à des actions juridiques étant donné qu’elle n’a toujours pas interdit l’utilisation de Dermalive en dépit de l’afflux de publications scientifiques concernant les graves effets secondaires ?

7) La ministre connaît-elle l’étude de E. Steenkiste, K. Marien, J. van den Oord, “Dermalive Granuloma: A Lesion With Distinctive Histological Features”, The Internet Journal of Dermatology, 2005. Volume 3 Number 1? N’est-elle pas convaincue par cette étude? Quelle est sa réaction face à cette étude?

8) La ministre connaît-elle le cas clinique “adverse granulomatous reaction (Granuloma formation) and pseudomonas superinfection after lip augmentation by the new filler DermaLive” publié dans The European Journal of Plastic Surgery de mars 2008? N’est-elle pas convaincue par cette étude? Quelle est sa réaction face à cette étude? Une interdiction n’est-elle pas indiquée?

9) La ministre est-elle disposée à interdire également d’autres produits permanents de comblement de rides étant donnés qu’ils génèrent également des problèmes ? Dans l’affirmative, lesquels et quand ? Dans la négative, que compte-t-elle faire ?

Réponse reçue le 13 juin 2008 :

1. Il faut d'abord remarquer que les spécialistes publiant sur les effets secondaires des anti-rides ne sont pas nécessairement les médecins ayant injecté les produits. Par exemple il peut s'agir de médecins dermatologues. Les motifs pour ne pas notifier peuvent être : la crainte d'atteinte à la réputation ou bien la crainte de se mettre dans une position désavantageuse en cas de litige ou d'autres encore. Pourtant la confidentialité est garantie. Le but essentiel est l'amélioration de la qualité des produits.

2. Les auteurs des études n'ont pas notifié parce qu'ils n'ont pas administré le produit mais constaté les effets.

3. La réponse reçue concernant le manque de notification par le fabricant est qu'il s'agissait d'effets secondaires connus et décrits dans la notice. La réponse habituelle des praticiens pour ne pas notifier est qu'ils ignoraient l'obligation.

Ceci n'est évidemment pas satisfaisant. Les obligations sont bien sûr rappelées et des procès verbaux peuvent être établis.

4. A priori une approche éducative est préférée à des mesures répressives. Le service des dispositifs médicaux tente donc de susciter la notification d'incidents en faisant comprendre que cela contribue à l'amélioration des produits et à l'élimination du marché des produits non satisfaisants mais occasionnellement des procès verbaux sont établis et des amendes infligées. Ceci contribue à augmenter les notifications mais il faudra encore beaucoup de persuasion.

5. Du fait de la faible notification des incidents mes services ne disposent pas d'éléments concrets permettant de démarrer une procédure officielle de retrait du marché, qui, étant donné la libre circulation de ces produits sur le marché communautaire, doit se faire au niveau européen. L'utilisation de ces produits continuera donc d'être découragée mais un retrait du marché n'est pas possible.

6. Je ne crains pas des actions juridiques étant donné les éléments dont nous disposons mais ceci devrait être réévalué si nous avions plus d'informations à l'avenir.

7. Mes services connaissent l'étude de E. Steenkiste et al. Cette étude intéressante indique des méthodes de diagnostic mais ne donne malheureusement pas de chiffres d'occurrence des granulomes.

8. Je demanderai à mon administration d'examiner cette étude qui ne nous est pas connue. Mais nous avons connaissance d'autres études et rapports dont certains très récents qui montrent en effet les risques des anti-rides permanents.

9. Mes services ont fait cesser l'utilisation d'un anti-ride permanent qui avait été mis sur notre marché sans marque CE de dispositif médical. En ce qui concerne les produits marqués CE, faute de chiffres suffisant, nous devons, comme les autres États membres, nous en tenir à des recommandations. Je rappelle qu'étant donné la libre circulation des dispositifs médicaux marqués CE sur le marché européen, une interdiction qui ne porterait que sur le marché belge serait sans effet puisque le produit pourrait être livré d'un pays tiers.

Nous faisons appel au sens des responsabilités des praticiens. Mes services ont effectué, ces derniers mois, des inspections dans des cliniques esthétiques et chez des distributeurs d'implants esthétiques. La publicité fait aussi l'objet d'une surveillance régulière.

Il a été constaté que les recommandations étaient prises en compte et que les patients étaient mieux informés des risques des différentes alternatives. Les inspections et la surveillance seront poursuivies.

Le public doit aussi faire preuve d'une certaine prudence et de maturité et faire l'effort de se renseigner car c'est son intégrité physique qui est en jeu. La presse tant écrite que télévisée a également un rôle à jouer en présentant une information objective et complète et non une promotion sans nuance des interventions esthétiques.