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Question écrite n° 4-6988

de Christine Defraigne (MR) du 12 février 2010

au ministre du Climat et de l'Énergie

Changements climatiques - Point de vue de Mr Harald Welzer dans le livre "Les guerres du climat"

réchauffement climatique
ressource naturelle
gestion des ressources
réfugié
dégradation de l'environnement
guerre
courant migratoire
coût environnemental

Chronologie

12/2/2010Envoi question (Fin du délai de réponse: 18/3/2010)
16/3/2010Réponse

Question n° 4-6988 du 12 février 2010 : (Question posée en français)

À l'heure actuelle, avec les changements climatiques existants, le constat est alarmant : de plus en plus d'hommes disposent de moins en moins de ressources pour (sur)vivre. Les ressources vitales s'épuisent à grande vitesse. Le modèle occidental d'exploitation des ressources naturelles arrive à sa limite.

Le psychosociologue et directeur du Centre de recherche interdisciplinaire sur la mémoire à Essen, Harald Welzer, le rappelle dans son dernier livre : Les guerres du climat. Selon lui, la distinction entre les réfugiés fuyant la guerre et ceux qui fuiront leur environnement, entre les réfugiés politiques et les réfugiés climatiques, ne sera plus pertinente tant se multiplieront des guerres nouvelles générées par la dégradation du milieu. De véritables guerres pour les ressources s'ajouteront aux conflits religieux comme à des guerres de convictions.

1. J'aimerais connaître votre avis sur le sujet.

2. Quelles sont les mesures que vous avez déjà prises afin de protéger notre planète, respecter l'environnement et économiser les ressources de notre monde ?

3. Quelles mesures comptez-vous prendre dans l'avenir ?

Réponse reçue le 16 mars 2010 :

1. La problématique des réfugiés climatiques s'inscrit dans le débat plus large du lien entre changement climatique et sécurité internationale. Il est d'ores et déjà manifeste que ce débat est toujours plus présent dans les forums internationaux. Parmi les initiatives à mentionner, citons le débat sur la politique climatique & la sécurité au Conseil de Sécurité des Nations-Unies en avril 2007, la Conférence de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur les implications sécuritaires du changement climatique, ainsi que de nombreux processus européens (depuis le Document conjoint du Haut Représentant & de la Commission européenne de mars 2008 jusqu'aux Conclusions du Conseil sur le changement climatique et la sécurité (CCIS) de décembre 2009).

Je puis déjà annoncer à l'honorable membre qu'avec l'ensemble du gouvernement fédéral, je partage ses préoccupations quant à la problématique des réfugiés climatiques. Pour illustrer cet engagement de la Belgique, je vous renvoie au débat précité au Conseil de Sécurité des Nations-Unies, où la Belgique a clairement exprimé ses inquiétudes concernant cette problématique. A cette occasion, la Belgique a souligné que le changement climatique aggrave les différentes menaces pour la sécurité et, en particulier, entraîne une accélération des flux migratoires internes et externes. A l'époque, la Belgique a suggéré une intégration progressive du changement climatique dans la réflexion sur la prévention des conflits, ainsi qu'un accroissement des efforts des Nations-Unies en ce qui concerne l'alerte précoce, la prévention et la gestion de crises liées aux changements climatiques dans les pays les plus vulnérables, et enfin une aide à ces pays dans le développement de stratégies de réduction des risques.

En ce qui concerne le concept de "réfugiés environnementaux/ réfugiés climatiques", il est à souligner qu'il s'agit d'un terme à forte connotation méthodologique et très controversé, sur lequel de nombreuses divergences existent. La littérature scientifique à ce sujet est dès lors très prudente. Le rapport de l'UNFPA traitant de "Dynamique démographique & Changement climatique" déclare par exemple que le problème majeur du concept de réfugiés environnementaux/ climatiques est la thèse implicite qu'il existe un lien causal direct entre problématique environnementale – comme le changement climatique – et migration. Les motifs de migration étant toujours complexes et multiples, il serait trop simpliste d'attribuer les migrations à une cause unique. Le changement climatique est donc généralement considéré davantage comme un facteur intermédiaire, qui renforce les inégalités politiques / socio-économiques existantes, et qui de cette façon contribue éventuellement aux conflits. Ce lien indirect entre changement climatique et violence est évoqué aussi par Harald Welzer, qui affirme qu'en de nombreux cas, "le lien entre impacts climatiques & conflits environnementaux est indirect, et que le réchauffement climatique intensifie les inégalités mondiales…". Ce problème de définition concernant les réfugiés environnementaux et climatiques est un important obstacle au développement d'une politique internationale concernant cette problématique, et explique en partie pourquoi, à ce jour, il n'existe encore aucun statut juridique pour les réfugiés environnementaux.

2. En tant que ministre fédéral compétent, ma tâche est de contribuer à la conservation et à l'amélioration d'un environnement sain pour s'attaquer ainsi à la problématique précitée. D'une part, avec mes collègues du gouvernement fédéral, je prends diverses mesures visant à réduire la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre. D'autre part, nous assistons les pays en voie de développement dans le processus d'adaptation au changement climatique déjà en cours, via des projets dans le cadre de la coopération au développement.

D’importantes mesures visant à promouvoir le recours aux énergies renouvelables et les économies d’énergie ont ainsi été mises en œuvre par le gouvernement fédéral dans le cadre de sa politique climatique. Dans le domaine de la production énergétique, la promotion des éoliens off-shore (certificats verts, concessions domaniales) contribue à diminuer les émissions de gaz à effet de serre tout en réduisant notre dépendance aux énergies fossiles et en renforçant notre sécurité énergétique. Les mesures d’économies d’énergie visent quant à elles principalement le secteur des bâtiments (déductions fiscales et aides en faveur des investissements visant l’économie d’énergie, instauration du système EMAS dans les bâtiments publics, recours au tiers investisseur,…), ainsi que l’industrie. Diverses mesures prises dans le secteur de la mobilité et des transports (déductions fiscales en faveur des véhicules propres et électriques, amélioration de l’offre et gratuité des transports publics, défiscalisation des biocarburants,…) permettent aussi de limiter le gaspillage d’énergie.

La politique de produits (labels pour voitures, écolabels,…), l’aide à l’investissement auprès des ménages à bas revenus (via le Fonds de Réduction du Coût global de l'Énergie), les campagnes de sensibilisation en faveur des produits à faible consommation en énergie, une politique d’achats durables (bois certifié…) sont autant de mesures qui contribuent également à diminuer la consommation de ressources fossiles et à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

3. Les impacts dont les réfugiés climatiques sont les victimes sont pour une large part la conséquence des émissions de gaz à effet de serre des pays industrialisés. Les travaux du Groupe d'Experts Intergouvernnemental sur l'Évolution du Climat (GIEC) indiquent que ceux-ci devraient réduire leurs émissions de 80 à 95 % par rapport à 1990 à l’horizon 2050. Si ceci n’est pas encore traduit dans un instrument international juridiquement contraignant, c’est dans cette perspective que nous devons nous inscrire. Je vais donc déposer très prochainement un projet de loi sur la politique climatique qui permettra à l'État fédéral d’entamer une action planifiée et coordonnée afin d’atteindre des objectifs ambitieux à moyen (2020) et à long terme (2050). Cette action prendra la forme d’un plan climat fédéral comportant une série de mesures afin d’arriver, sur une période donnée, à un objectif précis.