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Question écrite n° 4-6400

de Christine Defraigne (MR) du 29 décembre 2009

à la vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, chargée de l'Intégration sociale

Médicaments - Contrefaçons - Nombre - Mesures

médicament
contrefaçon
trafic illicite

Chronologie

29/12/2009Envoi question (Fin du délai de réponse: 29/1/2010)
2/3/2010Réponse

Question n° 4-6400 du 29 décembre 2009 : (Question posée en français)

La Commission européenne a attiré l’attention des états membres sur la circulation des médicaments contrefaits. Selon elle, en seulement deux mois, l’Union européenne a saisi 34 millions de faux comprimés, lors de contrôles douaniers ciblés dans tous les pays membres.

Le vice-président de la Commission précise qu’il s’agit essentiellement d’antibiotiques, de traitements anticancéreux, de médicaments anti-malaria et anticholestérol, d’antalgiques et de faux viagra et que la plupart des médicaments saisis venait d’Inde.

Dans ce contexte j’aimerais poser ces questions :

Quelle politique et quelles mesures l’honorable ministre va-t-elle élaborer afin de contrer l’importation de médicaments de contrefaçon? Coopère-t-elle avec d’autres états membres de l’Union européenne? Comment se déroule cette coopération en la matière?

La Belgique est-elle fortement touchée par ce marché de contrefaçon des médicaments?

A combien chiffrerait-elle le nombre de médicaments contrefaits sur notre territoire?

Combien de personnes sont mortes à la suite de l’absorption de médicaments contrefaits?

De quels autres pays sont exportés les médicaments contrefaits se trouvant sur notre territoire?

Réponse reçue le 2 mars 2010 :

1) Il faut bien savoir ce que l’on entend par médicaments « contrefaits ». Un premier concept important est celui du cycle de vie d’un médicament régulier : les médicaments réguliers sont produits par une firme autorisée sous des normes de fabrication strictes et contrôlées, garantissant ainsi la qualité intrinsèque du médicament. Ce parcours donne la possibilité légale à la firme de produire des médicaments sous Droits de Propriété Intellectuelle (DPI, Droit des marques ou brevets) pour une période donnée, laquelle s’accompagne du choix de la présentation, de l’emballage et étiquetage spécifiques. Pendant la période sous brevet, la fabrication des médicaments concernés par d’autres firmes que la firme titulaire des DPI est interdite, sauf sous licence. Après la période sous brevet, d’autres producteurs ont le droit de fabriquer ce médicament, mais toujours sous l’obligation de demande et d’obtention d’autorisation par l’autorité compétente. Un deuxième concept important en rapport avec les médicaments contrefaits, est celui de la qualité intrinsèque du médicament et la falsification de celle-ci par l’absence, le sous-dosage ou surdosage des substances actives pharmaceutiques ou des excipients. Sur la base de ces descriptions, on distingue plusieurs catégories de médicaments « contrefaits » (liste non limitative) :

1) Les médicaments contrefait sensu stricto c.a.d. en infraction avec les Droits de Propriété Intellectuelle (Droit des marques ou brevets) d’une firme pharmaceutique. La qualité intrinsèque peut être satisfaisante mais n’est certainement pas garantie.

2) Des médicaments illégaux qui sont produits de façon illégale sans aucune garantie de qualité intrinsèque.

3) Le détournement de médicaments de la distribution régulière.

4) Le trafic de médicaments non-autorisés utilisés, par exemple, comme dopage dans le monde sportif.

À titre d'illustration, un rapport de TAXUD de la Commission européenne de 2008 concernant le respect des DPI aux frontières européennes externes fait, en effet, mention de 34 millions de médicaments contrefaits, dont 15 % seulement étaient considérés comme étant en infraction avec les DPI, et 25 millions de médicaments relevant des précurseurs de drogues, à savoir des tablettes d’éphédrine servant à la fabrication d’amphétamines illégales et destinées au Mexique.

Il ne sert donc à rien de considérer les médicaments contrefaits sensu stricto comme un phénomène qui doit être envisagé à part. C’est une approche globale de la criminalité pharmaceutique qu’il faut adopter.

2) et 3) Le HMA-WGEO (Head of Medecines Agencies Working Group Enforcement Officers), créé en 2004 et composé de 27 États membres, se penche sur le respect des règles et l’échange d’informations et s’est réuni déjà 12 fois. Cette plate-forme multidisciplinaire et multisectorielle composée de la police, des douanes et de l’inspection des médicaments constitue un réseau effectif qui aide à lutter contre la criminalité pharmaceutique au-delà des frontières, et qui prévoit également des formations en la matière. Le Conseil de l'Europe constitue une autre plate-forme de normalisation au sein de laquelle la Belgique est active, même au niveau global (PFIPC ou Permanent Forum on International Pharmaceutical Crime). La Belgique a également prêté sa collaboration à l’OMS. La Belgique joue surtout un rôle important au niveau du Networking et des SPOC (Single Points of Contact).

4) et 5) En ce qui concerne la Belgique, jusqu’à présent, aucun médicament contrefait n’a été détecté depuis 2005 dans la distribution régulière des médicaments.

En dehors de cette distribution régulière, les problèmes qui se posent ont principalement trait à la vente de médicaments illégaux sur Internet et à l’acquisition de substances hormonales au marché noir.

En Belgique, il faut par conséquent se concentrer sur la vente sur Internet et au marché noir. La cellule ‘hormones’ a étendu son terrain d’action à la criminalité pharmaceutique. La collaboration entre les douanes, la police, la justice et l’autorité compétente en matière de médicaments constitue la meilleure solution dans le cadre de la lutte contre l’importation illégale de médicaments. Une Unité Spéciale d’Enquête (USE) a été créée au sein de l’autorité belge compétente en matière de médicaments, l’Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé (AFMPS), laquelle a pour mission de lutter contre la criminalité pharmaceutique.

À l’heure actuelle, environ 3 000 paquets postaux, dont le contenu peut être très varié, sont saisis par an. Ils peuvent contenir des médicaments illégaux (pilules amaigrissantes, des médicaments à base de plantes contenant des substances illégales, etc.), des substances hormonales fabriquées de façon illégale et parfois contrefaites, et des produits stimulant l’érection faisant l’objet d’une infraction aux DPI.

Outre les paquets postaux susmentionnés interceptés par les employés de la poste et soumis à une enquête par l’AFMPS (USE) par le biais de la douane, quelques envois de taille importante de médicaments contrefaits en transit vers les pays africains et vers l’UK ont été détectés et interceptés par la douane et l’AFMPS ces dernières années. Environ 4 millions de doses (tablettes, capsules) comprenant des antibiotiques, des médicaments contre la malaria et des antidouleurs ont été saisies en collaboration avec l’industrie pharmaceutique. Environ 80 000 doses d’antipsychotiques, antithrombotiques et anti-androgènes ont été détectées par l’AFMPS en collaboration avec les autorités anglaises. Toutefois, ces médicaments s’étaient retrouvés dans des hôpitaux anglais.

6) Nous ne disposons pas de données pour la Belgique en ce qui concerne le nombre de décès causés par des médicaments contrefaits.

7) Les médicaments contrefaits vendus par l’Internet et en transit viennent principalement d’Inde et de Chine. La commande et la fourniture de médicaments contrefaits via internet peuvent être très complexes.