Version à imprimer bilingue Version à imprimer unilingue

Question écrite n° 4-4301

de Paul Wille (Open Vld) du 7 septembre 2009

au ministre des Affaires étrangères

Argentine - Mexique - Politique en matière de drogue - Détention de marijuana et de cocaïne pour usage personnel

Argentine
Mexique
stupéfiant
toxicomanie

Chronologie

7/9/2009Envoi question (Fin du délai de réponse: 8/10/2009)
8/10/2009Réponse

Question n° 4-4301 du 7 septembre 2009 : (Question posée en néerlandais)

Les Argentins peuvent désormais détenir de petites quantités de marijuana pour leur usage personnel. C'est ce qu'a décidé la Cour suprême de justice argentine le mardi 25 août 2009.

Selon les juges, il est prévu dans la Constitution argentine que “tout adulte peut décider librement de son mode de vie sans que l'État puisse intervenir”. Les actions privées ne sont punissables que “si elles constituent un danger réel ou portent préjudice aux droits ou aux biens d'autrui.”

Quelques jours auparavant, le Mexique avait décidé de légaliser la détention de petites quantités d'héroïne, de marijuana et de cocaïne. Selon les autorités mexicaines, la répression de l'usage personnel de drogue requiert une mobilisation policière trop importante, qui se fait au détriment de la lutte contre la criminalité organisée. L'Amérique latine est le berceau des drogues comme la cocaïne. Au Mexique notamment, des milliers de personnes meurent chaque année à la suite de faits de violence liés à la drogue.

Le contexte ayant été brièvement esquissé, je voudrais vous poser ces brèves questions :

1. Ces informations sont-elles exactes?

2. Dans la négative, nos ambassades ont-elles vérifié en quoi consiste la nouvelle politique de ces pays en matière de drogue?

3. Que pense le ministre de cette évolution?

Réponse reçue le 8 octobre 2009 :

Argentine

1. Le 25 août 2009, la Cour suprême argentine a, à l’unanimité de ses sept membres, absous cinq personnes qui avaient été arrêtées pour possession de trois cigarettes de marihuana chacune. La Cour a jugé qu’elles n’avaient pas consommé de la drogue de façon ostentatoire et que cette consommation n’affectait pas de tierces personnes. La Cour suprême considère que, dans ces circonstances, la possession de marihuana pour consommation individuelle n’est pas un délit.

Pour argumenter sa décision, la Cour suprême a considéré que le § 2 de l’article 14 de la loi 23.737 du code pénal est inconstitutionnel. Ce paragraphe stipule que la peine sera d’un mois à deux ans de prison quand, étant donné la faible quantité de drogue en possession de l’utilisateur, il apparaît de manière non équivoque que la possession de drogue est destinée à un usage personnel. Or, ce paragraphe serait en contradiction avec la Constitution, qui protège, selon la Cour, la consommation de stupéfiants dans la sphère privée. L’article 19 de la Constitution stipule en effet que « les actions privées des hommes qui n’offensent en aucune manière l’ordre et la morale publics, ni ne portent préjudice à un tiers, relèvent de Dieu, et ne sont pas soumises à l’autorité des magistrats ».

Si, en principe, le jugement de la Cour s’applique uniquement au cas susmentionné, il fera évidemment jurisprudence et les tribunaux de niveau inférieur devront en tenir compte.

Dans son jugement, la Cour suprême se garde bien de définir un seuil de quantité de drogue autorisée pour « usage personnel », et ne se prononce pas non plus sur la marche à suivre en cas de consommation d’autres drogues. Il revient maintenant au législateur d’adapter la loi 23.737 mise en cause par la Cour suprême.

2. Sans objet.

3. Je suis d’avis que la décision de la Cour suprême va dans le bon sens puisqu’il permettra de mobiliser les ressources de la police argentine vers une criminalité plus grave (criminalité organisée, narcotrafic,…). Elle permettra, en outre, de diminuer la population carcérale déjà très importante dans ce pays.

Mexique

1. La Loi contre le petit Commerce de Stupéfiants (Ley contra el narcomenudeo), que le Congrès avait adoptée fin avril, a été publiée au Journal Officiel mexicain (Diario Oficial de la Federación ) le 20 août 2009. Si toute vente de stupéfiants reste interdite au Mexique, la simple possession pour un « usage strictement personnel et immédiat » de divers produits stupéfiants n'est plus punissable. Il s'agit des produits suivants et des quantités maximales autorisées pour la consommation: marijuana (5 grammes); opium (2 grammes); héroïne (50 milligrammes); cocaïne (500 milligrammes); métamphétamines (40 milligrammes) et LSD (0,015 milligramme). Ces mesures font partie d'un ensemble de mesures prises dans le but d'alléger le travail de la police et de la justice dans le cadre de la consommation privée, et de mettre les moyens libérés à la disposition de la lutte contre la criminalité organisée et les cartels de la drogue.

Outre la dépénalisation de la détention de petites quantités de drogue réservée à un usage personnel, la loi aborde pour la première fois la consommation de drogue comme un problème qui ressort également de la santé (publique). Elle établit une nette distinction entre les consommateurs et les personnes dépendantes d'une part et les dealers d'autre part.

2. Les ambassades sont tenues de rapporter toutes les avancées dignes d'intérêt quelles qu'elles soient.

3. Que les consommateurs de drogue ne soient plus considérés, au Mexique également, comme des criminels mais comme des personnes qu’il faut aider, et que la dépendance soit assimilée à une maladie représente une avancée positive. La non-poursuite des consommateurs de drogue pour détention de quantités minimes de drogue destinée à un usage personnel s'inscrit dans cette vision. Le choix des produits et des quantités maximales autorisés pour la consommation est une responsabilité propre à chaque gouvernement.