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Question écrite n° 4-3176

de Margriet Hermans (Open Vld) du 13 mars 2009

à la vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique

Syndrome de fatigue chronique- Encéphalomyélite myalgique

physiologie du travail
maladie chronique
maladie du système nerveux
thérapeutique
soins de santé
Conseil supérieur de la santé
Institut national d'assurance maladie-invalidité
Centre fédéral d'expertise des soins de santé
centre médical
assurance maladie

Chronologie

13/3/2009Envoi question (Fin du délai de réponse: 16/4/2009)
18/6/2009Réponse

Question n° 4-3176 du 13 mars 2009 : (Question posée en néerlandais)

La fatigue chronique est une affection fréquemment rencontrée en médecine. Près de deux pour cent de la population en souffrirait. Chez la majorité des personnes atteintes, cette fatigue est due à des problèmes organiques, des affections psychiques (dépression, angoisses, troubles psychosomatiques, etc.) ou à une combinaison de facteurs psychologiques, sociaux et physiques. Le syndrome de fatigue chronique (SFC) n'est admis que chez les patients dont la fatigue chronique n'a pas de causes tangibles. On utilise de nos jours de plus en plus la dénomination EM/SFC. L'EM ou encéphalomyélite myalgique désigne littéralement l'inflammation de la moelle épinière et des muscles. L'utilisation d'une définition correcte du syndrome revêt une importance capitale dès lors que le diagnostic, le traitement et la fixation du degré d'invalidité en dépendent. Le diagnostic de l'EM/SFC ne peut être établi que par élimination d'autres maladies. Pour les affections dont la science ne cerne pas l'apparition et les causes avec certitude, dont les symptômes sont variables et peu spécifiques et pour lesquelles il n'existe aucun test diagnostique simple, il est préférable de recourir à la définition de cas. Il s'agit d'une description de l'affection basée sur le consensus. Les premières institutions à s'y être risquées sont les Centres for Disease Control (CDC) américains. Les critères, connus sous le nom de critères de Fukuda, sont les suivants :

- Au moins six mois de fatigue récurrente ou persistante pour laquelle on n'a constaté aucune explication d'ordre physique et qui est nouvelle, ne s'atténue guère avec le repos, n'est pas la conséquence d'un effort et limite sérieusement le fonctionnement de la personne.

- En combinaison avec au moins quatre des symptômes suivants, persistants ou récurrents à intervalles réguliers durant six mois et non présents avant l'apparition de la fatigue : maux de gorge, sensibilité des ganglions du cou et de l'aisselle, maux de tête, douleurs musculaires, douleurs articulaires, altération autorapportée de la mémoire et de la faculté de concentration, sommeil non réparateur et sentiment d'épuisement après un effort.

- Les critères d'exclusion sont les suivants : autre affection ou maladie expliquant (probablement) la fatigue, comme par exemple, une obésité avec un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 40, l'anorexie ou boulimie nerveuse, la démence et un grave surpoids.

En 2003, une équipe d'éminents scientifiques, travaillant principalement au Canada et aux États-Unis, a élaboré d'autres critères pour le diagnostic de l'EM/SFC. Ces critères canadiens sont les suivants :

- présence de : fatigue, douleurs, malaise après effort, troubles du sommeil.

- en outre, au moins deux symptômes cognitifs : troubles de la mémoire, de la concentration, confusion.

- un ou deux symptômes dans deux des catégories suivantes : plaintes immunologiques telles que réactions allergiques, ganglions sensibles, maux de gorge et intolérances alimentaires, troubles du système nerveux autonome tels que palpitations, syncope, troubles gastriques, ou plaintes neuroendocriniennes telles qu'instabilité thermostatique.

- les symptômes doivent se manifester la première fois lors d'une crise aiguë, persister au moins six mois et s'aggraver après un effort.

Il apparaît clairement que les critères de Fukuda considèrent la fatigue comme un critère obligatoire mais ne classent le malaise après l'effort que parmi les critères mineurs. Au contraire, la définition clinique canadienne prévoit très clairement que, pour satisfaire aux critères, le patient doit avoir une aggravation de ses symptômes après avoir fourni un effort. Il doit également être affecté par des troubles neurologiques, neurocognitifs, neuroendocriniens, dysautonomes et immunitaires. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) reconnaît elle aussi l'EM/SFC en tant qu'affection neurologique accompagnée d'anomalies immunologiques et endocrinologiques.

En Belgique, on utilise toutefois les critères de Fukuda des Centers For Disease Control américains. On accorde surtout de l'importance à la prise en compte des plaintes subjectives, ce qui ne permet pas de différencier suffisamment les patients atteints de l'EM/SFC de ceux qui souffrent simplement de fatigue chronique. Dans la pratique médicale belge, on considère ainsi l'EM/SFC comme une notion fourre-tout regroupant diverses affections (psychiques) associées à une fatigue chronique dont le patient se plaint. Comme les autorités belges refusent obstinément de reconnaître l'EM/SFC comme une affection physique, les patients ne bénéficient que d'un traitement psychosomatique consistant en une thérapie d'exercices graduelle et une thérapie cognitivocomportementale. C'est curieux puisque 4000 études scientifiques ont déjà démontré l'inutilité de cette approche et que la thérapie d'exercices graduelle est même considérée comme dangereuse. En 2006, l'Inami a dressé le bilan des résultats des centres de référence pour l'EM/SFC. Il en ressort que les résultats sont limités. L'aspect positif mis en évidence par l'étude est que la majorité des patients se plaignent moins souvent de fatigue. Aucune amélioration n'a toutefois été observée en ce qui concerne la reprise du travail, la capacité à l'effort et la qualité de vie. En décembre 2008, le Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE) et le Conseil supérieur de la santé (CSS) ont publié un rapport faisant le bilan du fonctionnement des centres d'expertise. Les résultats des traitements étaient décevants puisque l'on n'a pu trouver aucune preuve scientifique de l'intérêt de procéder au diagnostic et au traitement dans ces centres. Il apparaissait par ailleurs que les centres n'étaient pas parvenus à mettre en place une organisation des soins en collaboration avec les acteurs de première ligne, alors que cela faisait partie de leurs objectifs. La constatation la plus préoccupante est qu'à peine 40 pour cent des patients traités ont fait part d'une amélioration des symptômes mais d'une absence de guérison. Chez 35 pour cent des patients traités, on a même observé une dégradation de leur état à l'issue du traitement. La poursuite du financement de ce projet a donc été sérieusement remise en question.

Une deuxième lettre ouverte a été adressée à la ministre le 27 novembre 2008 à la suite des réponses qu'elle avait apportées à la première lettre ouverte. Ces lettres signalent les nombreux problèmes évoqués ci-dessus. Dans sa réponse, la ministre admet l'existence de ces problèmes et la nécessité de revoir la politique. Elle n'avait à l'époque toutefois pas encore pris de décision sur l'éventuelle réaffectation de moyens aux centres de référence pour l'EM/SFC. Elle confirme également qu'elle-même, le KCE et le CSS reconnaissent la composante biologique de l'EM/SFC et la souffrance qui accompagne cette maladie.

Je souhaite dès lors poser les questions suivantes:

1. Quelle a été la décision de la ministre concernant l'éventuel refinancement des centres de référence pour l'EM/SFC, lesquels ont fait l'objet de plusieurs évaluations négatives de la part d'organismes publics ?

2. Sur la base de quels critères la ministre a-t-elle pris cette décision ?

3. Dans quelle mesure tiendra-t-elle compte de l'EM/SFC dans sa politique actuelle et future ?

4. Comment explique-t-elle que d'autres pays, comme la Canada, la Norvège, l'Espagne et les États-Unis, ont adopté une approche biomédicale de l'EM/SFC et créent des centres biomédicaux où n'intervient aucun psychiatre ?

5.  Dans quelle mesure les pouvoirs publics belges soutiennent-ils la recherche sur les causes psychosociales de l'EM/SFC, d'une part, et sur les causes biomédicales de la maladie, d'autre part ?

6. Dans quelle mesure la politique actuelle se focalise-t-elle sur la multidisciplinarité et, par conséquent, sur les sous-groupes de patients présentant cette affection ?

7. Pourquoi la Belgique utilise-t-elle pour l'EM/SFC la classification ICD-9 alors que l'OMS utilise depuis des années déjà la classification ICD-10 ?

Réponse reçue le 18 juin 2009 :

En réponse à votre question, je peux vous renvoyer à la réponse donnée à la question n° 4-3131 portant sur le même sujet.