SÉNAT DE BELGIQUE
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Session 2020-2021
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18 novembre 2020
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SÉNAT Question écrite n° 7-845

de Rik Daems (Open Vld)

au vice-premier ministre et ministre de la Justice, chargé de la Mer du Nord
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Crise du coronavirus - Violence domestique - Violence à l'égard des femmes - Police - Aide aux victimes - Chiffres - Mesures (Covid-19)
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épidémie
violence domestique
aide aux victimes
statistique officielle
répartition géographique
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18/11/2020Envoi question
11/2/2021Réponse
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Aussi posée à : question écrite 7-846
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SÉNAT Question écrite n° 7-845 du 18 novembre 2020 : (Question posée en néerlandais)

La crise du coronavirus a entraîné une forte augmentation de la violence domestique dans le monde. Telle est la conclusion que des chercheurs australiens ont tirée de leur étude scientifique intitulée : «Family violence and COVID 19: Increased vulnerability and reduced options for support». L'insécurité au sein de la société, la régression en termes de soutien et de contrôle sociaux conduisent à une augmentation de la violence, en particulier lorsque le contexte familial est instable. Voici quelques-uns des constats établis dans le cadre de cette étude:

– en Australie, pendant le confinement, la criminalité générale a chuté de 40 % tandis que les appels pour des faits de violence domestique ont augmenté de 5 %. Google Australie a enregistré une augmentation de 75 % des recherches liées à l'obtention d'une aide pour violence domestique;

– à Wuhan, où la pandémie a débuté, les faits de violence domestique ont été trois fois plus nombreux en février 2020 que durant l'année précédente ;

– en France, les signalements pour faits de violence domestique ont augmenté dans une proportion comprise entre 32 et 36 %.

Les chercheurs concluent que le fait de vivre dans l'isolement, associé à des facteurs de stress psychique et économique et à la consommation d'alcool, peut conduire à des situations explosives. S'agissant de la Belgique, on ne dispose pas de chiffres fiables, mais au vu des données actuelles, il semble important de prendre des mesures de protection.

Ainsi, certains services de police locale prennent déjà contact de manière proactive, par l'intermédiaire de leur service d'aide aux victimes, avec les personnes ayant porté plainte auprès d'eux au cours des trois derniers mois pour des faits de violence domestique. Il est possible ainsi de suivre l'évolution de leur situation en quarantaine. Ces services prennent contact aussi avec les différentes associations de lutte contre la violence domestique sur le territoire afin de les avertir que les victimes ne doivent pas hésiter à s'adresser à la police.

Pourquoi une question à ce sujet? Parce que l'État belge est tenu de mettre en œuvre une politique intégrée, globale et coordonnée en matière de violence domestique et de violence à l'égard des femmes en vertu de la Convention d'Istanbul (Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique), ratifiée par la Belgique en 2016. Cela signifie que les services de police doivent assumer un rôle en termes d'accompagnement, d'enquête et de protection.

Quant au caractère transversal de la question : il s'agit en l'espèce d'une matière transversale partagée avec les Communautés, le rôle de celles-ci portant essentiellement sur l'aide aux personnes, dans le cadre de la politique de l'égalité des chances. Toutefois, l'aide aux victimes au sein des services de police et le traitement des plaintes sont une compétence fédérale (Justice).

Je souhaiterais dès lors poser les questions suivantes :

1) Combien de personnes ont-elles déposé plainte pour des faits de violence domestique depuis l'entrée en vigueur des mesures de confinement (le 18 mars 2020) ? S'agit-il d'une augmentation ou d'une diminution par rapport à la même période de 2019 ?

2) Quels sont les chiffres respectifs pour la Flandre, Bruxelles et la Wallonie ?

3) Combien de plaintes ont-elles fait l'objet d'un suivi de la police par l'intermédiaire des services d'aide aux victimes depuis le 18 mars 2020 ? S'agit-il d'une augmentation ou d'une diminution par rapport à la même période de 2019 ? Pouvez-vous donner des précisions à ce sujet ?

4) Comment ce problème est-il géré à l'étranger ? Y a-t-il eu une concertation avec l'Union européenne ou avec les pays voisins sur la façon d'aborder ce problème ? Si oui, quelle en a été l'issue ? Si non, pourquoi ?

5) Au niveau mondial, on observe une forte augmentation de la violence domestique et de la violence à l'égard des femmes. Comment comptez-vous procéder pour que ces chiffres baissent à nouveau ? Des mesures politiques ont-elles été prises en vue de pouvoir détecter ou combattre la violence de manière proactive ?

Réponse reçue le 11 février 2021 :

En ce qui concerne les trois premières questions concernant les plaintes, je vous renvoie à la réponse de ma collègue, la ministre de l’Intérieur, sous le numéro 7-846.

La quatrième question vise à connaître l’approche au niveau international. Je peux vous informer que plusieurs initiatives ont déjà été lancées en collaboration avec les autres États membres de l’Union européenne (UE) afin de lutter contre la violence intrafamiliale ou d’examiner cette problématique.

C’est ainsi que le groupe Vendôme a vu le jour. Il s’agit d’une plateforme de concertation réunissant les ministres de la Justice belge, néerlandais, luxembourgeois, français, espagnol, italien et allemand. Lors de sa réunion virtuelle du 14 septembre 2020, le groupe a souligné que les organisations axées sur la lutte contre la violence intrafamiliale devaient être vigilantes quant au risque d’une augmentation du nombre de cas de violence domestique. En effet, en raison du confinement imposé, les victimes doivent passer plus de temps avec leur agresseur et il est par conséquent difficile pour elles, voire impossible, de signaler l’agression. Ces initiatives devront également continuer d’être développées davantage après l’état d’urgence, afin d’offrir une meilleure protection aux victimes.

Au sein de l’UE, il peut être renvoyé à l’Agence européenne des droits fondamentaux. Il s’agit d’un centre d’expertise indépendant qui a pour objectif la promotion et la protection des droits de l’homme au sein de l’UE. L’Agence étudie le phénomène de la violence intrafamiliale et souligne que la pandémie prouve que davantage de mesures doivent être mises en place afin de lutter contre cette violence intrafamiliale.

Il existe également, au niveau européen, l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes. Ce dernier a déjà mené diverses recherches afin de déterminer l’influence de la Covid-19 sur la violence basée sur le genre et la violence à l’égard des femmes.

Enfin, il convient de mentionner également le Forum européen sur les droits de l’enfant. Celui-ci a consisté en une conférence de trois jours (du 29 septembre au 1er octobre 2020), composée de sessions virtuelles de haut niveau, d’ateliers interactifs et de différentes activités. Lors de cet événement, la violence intrafamiliale et la maltraitance d’enfants ont amplement été discutées, ainsi que les droits de l’enfant dans le cadre de la pandémie de la Covid-19.

Enfin, vous voulez savoir comment j’entends poursuivre la lutte contre la violence intrafamiliale. Je vous renvoie à la réponse que j’ai donnée à ce sujet au sein de la commission de la Justice de la Chambre des représentants du 2 décembre 2020 à la question orale no V55011120C de Nabil Boukili, dans laquelle je décris les mesures que je vais prendre dans le domaine de la justice pour soutenir les victimes de la violence intrafamiliale.

Je répète que la lutte contre la violence sexuelle et intrafamiliale est et restera une priorité absolue pour moi.