SÉNAT DE BELGIQUE
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Session 2012-2013
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19 juillet 2013
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SÉNAT Question écrite n° 5-9726

de Elke Sleurs (N-VA)

à la vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, chargée de Beliris et des Institutions culturelles fédérales
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l'avis du Conseil supérieur de la santé à propos de l'ichthyothérapie
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Conseil supérieur de la santé
profession paramédicale
maladie infectieuse
thérapeutique
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19/7/2013Envoi question
2/9/2013Réponse
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Requalification de : demande d'explications 5-3868
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SÉNAT Question écrite n° 5-9726 du 19 juillet 2013 : (Question posée en néerlandais)

La « pédicure par les poissons » ou ichtyothérapie est une méthode relativement nouvelle dans laquelle le pédicure classique est remplacé par des centaines de petits poissons qui dévorent les cellules mortes de l'épiderme des pieds. On est prié, durant 15 à 30 minutes, de se plonger les pieds dans un bassin d'eau chaude où nagent ces poissons. Ceux-ci se nourrissent de la kératine des cellules mortes présentes à la surface de la peau.

Le Conseil supérieur de la Santé a publié le 21 juin 2013 un avis défavorable et recommande aux autorités d'interdire l' ichthyothérapie. L'argumentation est la suivante : « Il n’existe à ce jour aucune preuve scientifique de l’efficacité thérapeutique de l’ichtyothérapie dans le traitement de maladies cutanées telles que le psoriasis et les dermatoses eczémateuses associées à une formation accrue de squames ». Le Conseil ajoute que la thérapie ne remplace en aucun cas les traitements conventionnels, et met en garde contre le risque d’infection qui, bien que vraisemblablement faible, n'est pas négligeable. La transmission d’un client à l’autre d’infections des pieds ne peut être exclue. L'avis défavorable résulte de la conjonction de toutes ces raisons.

Cette méthode est interdite dans certaines régions des États-Unis et au Canada. La « British Health Protection Agency » avait déjà averti que le vih et l'hépatite risquaient de se transmettre par l'ichtyothérapie.

Je souhaiterais poser à la ministre les questions suivantes :

1) Que pensez-vous de cette « thérapie » ?

2) Existe-t-il actuellement une forme quelconque de contrôle ?

3) Connaît-on des cas d'infection à la suite d'une ichtyothérapie ?

Réponse reçue le 2 septembre 2013 :

La « fish-pédicure » est le procédé où, le plus souvent, l’utilisateur met les pieds dans un réservoir d’eau (individuel ou commun), dans lequel des poissons vivants se nourrissent de la kératine de la peau. La durée est limitée à 15 à 30 minutes, afin d’éviter blessures ou saignements.

Cette activité s’est développée de manière assez importante ces dernières années en Europe. Comme il s’agit d’une activité non réglementée, le Conseil Supérieur de la Santé (CSS) n’a pu qu’apporter une estimation.

Le Conseil estime qu’une centaine de centres sont en activité dans notre pays. En France, l’Agence nationale de sécurité sanitaire mentionne un nombre estimé à plusieurs centaines.

Le rapport du Conseil Supérieur de la Santé souligne qu’il n’y a aucun motif scientifique justifiant un but thérapeutique de cette pratique.

Il ne peut donc s’agir que d’un procédé aux fins esthétiques ou de bien-être, ce qui est important pour évaluer les risques encourus par les utilisateurs, le personnel et le sort réservé aux animaux.

La probabilité d’infections resterait faible. Mais certaines peuvent néanmoins impliquer des risques majeurs. De plus, certaines procédures de désinfection sont rendues plus difficiles parce qu’il faut prendre en compte la survie des poissons.

Enfin, certaines maladies (l’eczéma, le psoriasis, le diabète, infections du pied, déficit immunitaire …) peuvent augmenter le risque pour le client lui-même ou constituer un risque pour d’autres clients.

Le CSS émet un avis défavorable au sujet de la création ou du maintien de tels centres en Belgique. Si la pratique ne devait pas être interdite, une réglementation très stricte s’impose. Le Conseil supérieur de la Santé belge énumère des mesures à prendre au cas où la pratique ne serait pas interdite.

Le choix entre interdiction totale et réglementation stricte se pose également à l’étranger. Plusieurs états des États-Unis et du Canada en ont interdit la pratique, d’autres pas. En France, on plaide pour un encadrement par une réglementation et un suivi adapté. On surveille l’information aux utilisateurs, la publicité et le risque d’exercice illégal de la médecine dans les centres qui prétendent faire le tri des clients en portant un diagnostic. Étant donné les risques du fish pédicure, l’absence de but thérapeutique et les effets cosmétiques limités (le CSS mentionne la recherche de sensations particulières) ; il est clair qu’on ne peut pas exclure d’avance une interdiction du procédé. De toute façon, une réglementation stricte s’imposera. En premier lieu, je suivrai la recommandation du CSS et je demanderai l’avis du Conseil du Bien-être des animaux. La protection des animaux doit aussi être prise en compte, même si les risques sanitaires sont sous contrôle.