SÉNAT DE BELGIQUE
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Session 2012-2013
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29 novembre 2012
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SÉNAT Question écrite n° 5-7463

de Bert Anciaux (sp.a)

au secrétaire d'État à l'Environnement, à l'Énergie et à la Mobilité, adjoint à la ministre de l'Intérieur et de l'Égalité des Chances, et secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, adjoint au premier ministre
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La condamnation des déclarations de la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (CREG)
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CREG
approvisionnement énergétique
distribution de l'électricité
énergie électrique
gaz naturel
prix de l'énergie
sécurité d'approvisionnement
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29/11/2012Envoi question
14/5/2013Réponse
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Requalification de : demande d'explications 5-2516
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SÉNAT Question écrite n° 5-7463 du 29 novembre 2012 : (Question posée en néerlandais)

Le secrétaire d'État a vivement condamné la CREG, le régulateur de l'énergie, dans la presse du 15 septembre notamment, accusant cet organisme de contrôle fédéral de mensonges. Alors que la CREG avance que notre pays risque d'être confronté à des black-outs énergétiques à la suite de toutes sortes de problèmes, le secrétaire d'État prend le contre-pied en affirmant que ce risque n'existe pas. Le secrétaire d'État avance en outre que la CREG n'a absolument rien à dire à propos de notre sécurité énergétique étant donné qu'elle n'est pas compétente en matière d'approvisionnement énergétique. Il affirme que le régulateur ne doit pas s'immiscer dans un débat pour lequel il ne dispose ni des instruments ni des connaissances requis. Le secrétaire d'État prend en outre ses distances par rapport à la position de la CREG concernant la période transitoire liée à une modification du mécanisme des prix. La CREG rejette cette période transitoire, bien que le gouvernement en ait d'ores et déjà décidé, suivant entre autres l'avis dans ce sens qu'avait formulé la même CREG voici quelques années. De surcroît, la CREG fait naître chez les citoyens des espoirs irréalistes en matière d'économies.

Le secrétaire d'État prend en outre ses distances par rapport au message de la CREG selon lequel le russe GAZPROM aurait reversé des millions d'euros aux fournisseurs d'énergie européens, notamment à Electrabel, une somme dont ne profiteraient cependant pas les clients. Ici aussi, le secrétaire d'État se montre très ferme : aucun contrat n'a été conclu entre GAZPROM et Electrabel. Cela n'est attesté par aucune preuve et on ne peut donc pas annoncer n'importe quoi.

Tout cela démontre qu'entre le secrétaire d'État et la CREG, il y a davantage qu'une crise de confiance. Les communiqués de presse indiquent une déstabilisation de leurs relations qui prend la dimension d'une guerre publique et qui contraste singulièrement avec la promesse de pacification faite par le secrétaire d'État au début de son mandat. Cet objectif semble totalement compromis.

Comment le secrétaire d'État explique-t-il l'évolution extrêmement négative de sa relation avec la CREG ? Qui est responsable de cette baisse de confiance et de cette rupture manifestement irréparable ? Comment se fait-il que ce conflit, dans toute son âcreté, se livre systématiquement par médias interposés ? De quelle manière le secrétaire d'État poursuivra­-t-il cette relation ? Reconnaît-il que pour le monde extérieur, il s'agit d'un conflit ridicule et en même temps pitoyable, mais qu'il suscite surtout des sentiments d'inquiétude ? Envisage-t-il des mesures draconiennes ou veut-il laisser s'enliser cette relation difficile ? Le secrétaire d'État peut-il assurer que ce conflit ouvert et manifestement irréparable n'aura pas des répercussions négatives sur la politique énergétique belge ?

Réponse reçue le 14 mai 2013 :

Je dois effectivement reconnaître que mes relations avec la CREG ne sont pas celles que j’avais espérées. Face aux défis immenses auxquels est confronté le marché de l’énergie belge et européen, que ce soit en matière de maîtrise des prix ou de sécurité d’approvisonnement, j’avais espéré pouvoir m’appuyer sur un régulateur objectif, impartial et, surtout, cohérent – que ce soit entre ses différentes directions ou entre ses différentes recommandations dans le temps. J’ai mis tout en place pour que ce soit le cas dès le début de mon mandat, en rencontrant à plusieurs reprises le Comité de direction de la CREG pour évoquer mes objectifs et le rôle important de leur institution. J’ai même été, symboliquement, le premier membre du gouvernement à me déplacer chez eux pour rencontrer l’ensemble du personnel. 

Au fil des mois, j’ai malheureusement dû déchanter et j’ai été confronté aux mêmes difficultés que mes prédécesseurs.  

La Commission de Régulation de l’Électricité et du Gaz (CREG) ne parvient pas à faire la synthèse au sein de son propre Comité de direction entre l’objectif de maîtrise des prix, d’une part, et la sécurité d’approvisionnement, d’autre part, ou autrement dit, entre sa direction des prix, d’une part, et sa direction technique, d’autre part. Ainsi la CREG ne joue pas le rôle de régulateur: ses recommandations ne prennent en compte que l’aspect prix,

  • sans tenir compte des spécificités des différents fournisseurs ;

  • sans mesurer le risque couru pour l’investissement et la sécurité d’approvisionnement ;

  • sans apprécier à sa juste valeur la présence sur le marché d’acteurs aux profils différents, qui créent un choix réel pour le consommateur et qui nous mènent progressivement vers un meilleur fonctionnement du marché. 

Ce fonctionnement du marché devrait profiter tant au consommateur qu’à l’investisseur, et en même temps garantir des prix compétitifs et une sécurité d’approvisionnement. Il est dommage que je doive chaque fois sortir de mon rôle de membre du gouvernement pour tenir ce rôle à la place de la CREG – je suis d’accord avec vous.   

Les collaborateurs de la CREG de l’avis unanime sont d’une grande qualité et leur travail n’est nullement remis en cause. Le comité de direction est en passe d‘être renouvelé. J’espère que le Selor, qui a été mandaté par le gouvernement pour mener à bien la procédure de sélection, sera parvenu à composer un comité de direction objectif, impartial et cohérent, pour reprendre les qualificatifs utilisés au début de ma réponse.