SÉNAT DE BELGIQUE
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Session 2010-2011
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22 février 2011
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SÉNAT Question écrite n° 5-1418

de Bert Anciaux (sp.a)

au vice-premier ministre et ministre des Finances et des Réformes institutionnelles
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Banque européenne d'investissement (BEI) - Fonctionnement - Composition - Contrôle
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Banque européenne d'investissement
organe décisionnel (UE)
intégration des questions d'égalité entre les hommes et les femmes
égalité homme-femme
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22/2/2011Envoi question
18/3/2011Réponse
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Aussi posée à : question écrite 5-1419
Aussi posée à : question écrite 5-1420
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SÉNAT Question écrite n° 5-1418 du 22 février 2011 : (Question posée en néerlandais)

La Banque européenne d'investissement (BEI) octroie des prêts pour des projets d'intérêt européen (comme des liaisons ferroviaires et routières, des aéroports ou des réglementations en faveur de l'environnement), en particulier aux régions les moins prospères, aux États candidats membres et aux pays en développement. La BEI accorde également des crédits à l'investissement aux petites entreprises.

On ne sait pas grand-chose sur le fonctionnement et la composition de cet organe de l'Union européenne. Le fonctionnement semble toutefois particulièrement pertinent. Outre un conseil d'administration, il existe certainement un secrétariat qui suit et traite tout, ainsi qu'un comité de direction. Il importe que les nominations aux fonctions dirigeantes s'effectuent de manière correcte et transparente.

Je souhaiterais obtenir une réponse aux questions suivantes:

1) Qui siège au nom de la Belgique dans la BEI ? Selon quelle procédure et en vertu de quels critères les membres de la BEI sont-ils ou ont-ils été désignés ?

2)  Le gouvernement belge est-il associé aux désignations qui interviennent au sein de la BEI ? Dans l'affirmative, en quelle qualité et avec quel impact ? Ces questions sont-elles discutées dans les différents conseils des ministres ?

3) Quels autres organes de gestion existe-t-il au sein de la BEI, comme un comité de direction, un conseil d'administration ou des commissions consultatives,... ? Combien de membres le comité de direction et/ou le conseil d'administration de la BEI compte-t-il ? Qui en fait partie ? Selon quelle procédure et en vertu de quels critères ses membres sont-ils désignés ? S'agit-il ici de fonctions sous mandat et pour quelle période les mandats sont-ils attribués ? Une répartition est-elle effectuée entre les différents États membres de l'Union européenne (UE) ? Fait-on (a-t-on fait) appel à un jury externe et dans l'affirmative, qui en fait (en a fait) partie ?

4)  En ce qui concerne les fonctions dirigeantes à la BEI, tient-on compte de la diversité de genre et de l'équilibre entre les genres dans les organes de gestion de la BEI ? Le ministre est-il disposé à donner la priorité à cette question et à défendre ce point auprès de ses collègues de l'UE ?

5) De quels moyens de fonctionnement la BEI disposait-elle chaque année au cours de la période 2006-2010 ? Combien d'investissements cette banque a-t-elle effectués chaque année au cours de la période 2006-2010 ? Comment la ministre évalue-t-elle et explique-t-elle l'évolution des moyens de fonctionnement et des investissements ? Le gouvernement peut-il intervenir directement dans ces dossiers d'investissement ? Une répartition est-elle effectuée entre les États membres de l'UE en ce qui concerne les investissement à octroyer ? Qui contrôle le fonctionnement de la BEI ? Quel est l'intérêt de la BEI pour notre pays ?

6) À combien s'élèvent les rémunérations relatives aux fonctions dirigeantes à la BEI ?

Réponse reçue le 18 mars 2011 :

L’honorable membre voudra bien trouver ci-après les éléments de réponse à sa question du 22 février 2011.

La plupart des réponses aux questions sur les sujets abordés aux points 3, 4 et 5 de même que les questions d’ordre général sur la gouvernance de la banque, peuvent être obtenues sur le site de la Banque européenne d'Investissement (BEI) http://www.eib.org dont le contenu atteste des sérieux efforts de transparence fournis au cours des dernières années,

Le capital de la BEI est détenu par les États membres de l’Union européenne (UE). Leur part dans le capital est fonction de leur poids économique dans l’UE. La Belgique détient 4,9 % du capital.

La BEI dispose d’un conseil des gouverneurs auquel chaque État membre désigne un représentant qui est le ministre des Finances, hormis quelque rares exceptions. Le gouverneur pour la Belgique est le ministre des Finances. Le gouverneur désigne un gouverneur suppléant ainsi qu’un administrateur et un administrateur suppléant. Depuis la création de la banque, l’administrateur général de la Trésorerie est désigné au poste de gouverneur suppléant pour la Belgique.

Le Président est élu pour six ans. La présidence de la BEI est assumée par M. Maystadt depuis 1999. Il effectue son second mandat à la satisfaction générale. Avant qu’il devienne le premier représentant d’un petit État membre à ce poste, celui-ci était occupé par des ressortissants de grands États. L’obtention de la présidence par un Belge a eu un impact sur la représentation de la Belgique au comité de direction et au conseil d’administration.

Comme dans toutes les organisations internationales, le conseil d’administration est constitué sur base de règles géopolitiques et économiques. Le conseil d’administration de la BEI compte 28 membres titulaires - 27 États membres et la Commission européenne - et 18 suppléants. Sa composition est détaillée sur le site internet de la banque. Le conseil est non résident et se réunit dix fois par an. Il peut tenir des réunions extraordinaires si les circonstances l’exigent. Les administrateurs sont nommés pour un mandat de cinq ans renouvelable. Ils ne reçoivent aucun salaire et les participants aux conseils reçoivent une indemnité de 600 euros par réunion. Les administrateurs suppléants sont moins nombreux que les titulaires pour éviter une assemblée trop nombreuse. Des règles internes régissent la répartition des sièges. Certains pays sont regroupés en circonscriptions au sein desquelles chaque État occupe à tour de rôle, en fonction d’un accord au sein du groupe, le poste d’administrateur et d’administrateur suppléant.

La Belgique dispose d’un administrateur et d’un suppléant mais, depuis l’élection de M. Maystadt à la présidence de la BEI, la Belgique ne dispose plus que du poste d’administrateur et elle récupérera un poste de suppléant dès que la présidence reviendra à un non-belge. En vertu d’un accord avec les Pays-Bas et le Luxembourg, le suppléant de l’administrateur pour la Belgique est un Néerlandais. L’administrateur actuel est M. Henin et son suppléant néerlandais M. De Korte.

Le comité de direction de la BEI est composé du Président et de huit vice-présidents désignés pour un mandat de six ans par les État membre selon un schéma de rotation préétabli entre eux qui tient compte de leur poids respectif selon les mêmes principes qui régissent la désignation des commissaires de l’Union européenne. La Belgique a obtenu pour la dernière fois un poste de vice-président de juillet 1988 à juin 1995. Chaque État membre sélectionne le candidat au poste de vice-président qu’il soumet au vote des gouverneurs. Il n’y a pas de panel ou de jury pour sélectionner les candidats.

L’Administration des questions financières internationales et européennes du Service public fédéral (SPF) Finances – Administration générale de la Trésorerie est chargée du suivi des institutions financières internationales dont la BEI depuis leur création ou depuis l’adhésion de la Belgique à ces institutions. Les représentants de la Belgique à leur conseil d’administration sont pour la plupart désignés parmi les membres de cette administration en raison de leur connaissance approfondie des dossiers et de leur expérience.

Des concertations régulières ont lieu entre les départements des Finances, des Affaires étrangères et de la Coopération au Développement. Par ailleurs, un représentant de l’Administration générale de la Trésorerie est détaché auprès de la représentation permanente de la Belgique auprès de l’UE. Étant donné que la BEI est chargée de la mise en œuvre des orientations politiques données par les plus hautes autorités des États membres et de l’Union européenne, les Affaires étrangères interviennent plus en amont que les Finances dans le processus de décision, avant que la BEI ne soit mandatée pour intervenir, tandis que les représentants des Finances contribuent à l’élaboration des positions belges. Les concertations concernent tant les modalités de mise en œuvre de ces orientations par la banque, que la préparation des réunions au sein de l’UE par un échange d’informations. Ainsi des concertations ont eu lieu en ce début mars pour la préparation d’une réunion au plus haut niveau de l’UE sur la réponse européenne aux événements d’Afrique du Nord et l’aide financière qu’il serait possible d’apporter aux nouvelles autorités nationales.

La diversité de genre fait l’objet de rapports réguliers au conseil d’administration et la BEI s’efforce de promouvoir ladite diversité depuis de nombreuses années. Elle a adopté une politique en ce sens. S’agissant des postes pour lesquels un candidat est désigné par un État membre, la BEI peut exprimer sa préférence pour une candidature féminine mais la désignation d’une candidate reste tributaire de la disponibilité de candidates féminines et de l’adéquation entre le profil du poste à pourvoir et celui de la candidate. Quant au personnel de la banque, sa mixité reste tributaire des expertises requises dans le cadre de ses divers métiers et de la disponibilité de candidates féminines. Ainsi, les compétences scientifiques et techniques sont prépondérantes dans les opérations de la banque et il faut le constater, ces compétences restent encore très majoritairement masculines, ainsi qu’en attestent les statistiques sur les études supérieures, ce qui contraint la banque à tenter d’obtenir un équilibre global en octroyant la priorité aux femmes dans certaines filières.

S’agissant du mandat de la BEI, comme expliqué ci-dessus, les grandes priorités sont définies par les Chefs d’État européens lors des différents sommets, les dernières en date étant la stratégie de Lisbonne et Europe 2020. La Commission élabore les grandes politiques de l’UE qui sont avalisées par les Chefs d’État et la BEI est invitée à contribuer à leur financement. L’autonomie de décision de la BEI est limitée aux modalités de ses interventions pour la mise en œuvre de ces priorités. L’influence de la Belgique est donc avant celle qu’elle peut avoir plus en amont au niveau de la Commission européenne et des sommets européens.

La Belgique obtient une part équitable des ressources de la banque. Les chiffres exacts sont disponibles sur le site internet de la BEI. La principale priorité de la BEI qui a présidé à sa création reste la cohésion économique et sociale de l’Union, ce qui implique que ses opérations doivent avant tout contribuer à aider les régions de l’UE sous la moyenne européenne en termes de niveau de revenu et de qualité de vie à converger vers cette moyenne. De telles régions existent aussi dans les pays les plus prospères de l’Union. La Belgique étant un pays « riche » au sein de l’UE, sa part dans les opérations de la banque est bien sûr inférieure à sa part du capital. Il n’y a pas d’attribution de ressources par pays, mais on constate que la part de chaque pays membre dans les financements de la banque varie chaque année tout en restant plus ou moins proportionnelle au poids économique de celui-ci dans l’UE.

La capacité d’engagement de la BEI dépend de ses fonds propres. Comme deux tiers de ses pays actionnaires sont notés AAA sur les marchés financiers et comme près de 90 % de ses opérations concernent les États membres de l’UE, elle est autorisée à effectuer des engagements à concurrence de 2,5 fois le montant de son capital et de ses réserves. Il est procédé à une augmentation de capital d’une part, lors d’un élargissement de l’UE, pour permettre l’adhésion de nouveaux États membres à la BEI et pour doter la banque des moyens nécessaires à opérer dans ces pays et, d’autre part, lorsque le plafond des engagements susmentionné est en passe d’être atteint et limite les engagements futurs de la BEI. La banque suit l’évolution de ses paramètres financiers et soumet des propositions au conseil d’administration. Dès qu’un consensus est atteint, les gouverneurs sont invités à voter sur un projet de résolution relatif à une augmentation de capital qui entrera en vigueur dès que la majorité de votes favorables aura été atteinte. Les États membres n’ont plus versé de partie à libérer sur leur souscription depuis de nombreuses années car, en raison de la bonne santé financière de la banque, cette partie a été couverte par un transfert des réserves.

La dernière augmentation de capital est entrée en vigueur en avril 2009 et le capital de la BEI a été porté de 165 à 233 milliards d'euros La banque peut désormais effectuer des engagements d’environ 60 milliards d'euros par an. En 2009, la BEI a effectué des engagements pour 79 milliards d'euros en raison d’un programme spécial de lutte contre la crise. Des statistiques détaillées sont disponibles sur le site internet de la banque.

Les données concernant les rémunérations du président et des vice-présidents de la BEI ne sont pas disponibles mais, sur base des effectifs et de la masse salariale, elles doivent être voisines de celles pratiquées à la Banque européenne pour la Reconstruction et le Développement où le salaire annuel du président s’élève à environ 350 000 euros et celui des vice-présidents à environ 275 000 euros par an.