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Question écrite n° 6-768

de Jean-Jacques De Gucht (Open Vld) du 16 novembre 2015

à la secrétaire d'État à la Lutte contre la pauvreté, à l'Égalité des chances, aux Personnes handicapées, et à la Politique scientifique, chargée des Grandes Villes, adjointe au Ministre des Finances

Arabie saoudite - Désignation à la tête du Conseil des droits de l'homme des Nations unies - Non-discrimination - Lesbigays - Conférence interministérielle Politique étrangère - Coordination et concertation avec les entités fédérées

Arabie saoudite
minorité sexuelle
discrimination fondée sur l'orientation sexuelle
institution spécialisée de l'ONU
Conseil des droits de l'homme ONU

Chronologie

16/11/2015Envoi question (Fin du délai de réponse: 17/12/2015)
17/12/2015Réponse

Aussi posée à : question écrite 6-767

Question n° 6-768 du 16 novembre 2015 : (Question posée en néerlandais)

L'Arabie saoudite fait campagne au sein des Nations unies (NU) pour la suppression des droits des homosexuels, lesbiennes, bisexuels et transgenre dans les objectifs de l'organisation. Selon les autorités saoudiennes, les droits des LBGT sont contraires à la loi islamique. Voici quelques semaines, les NU ont pourtant désigné l'ambassadeur saoudien à Genève comme président du Conseil des droits de l'homme de l'ONU.

Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel Al-Joubeir, mène l'opposition contre contre l'inscription des droits des LBGT parmi les objectifs globaux des NU. Il a déclaré: «Lorsqu'il est question de sexe dans le texte, cela s'entend entre un homme et une femme. Une famille se compose pour nous d'un couple marié, d'un homme et d'une femme».

Il souligne que l'Arabie saoudite a le droit de s'opposer à des points de l'ordre du jour qui «sont contraires à la loi islamique».

Le programme de Développement durable a énoncé une série d'objectifs ambitieux pour les 193 États membres des Nations unies. Ceux-ci portent sur la pauvreté, l'égalité et l'arrêt des changements climatiques. Les références à l'égalité des lesbigays ne figurent pas dans l'accord final.

Ces objectifs entendent garantir à chacun les droits humains et libertés fondamentales, sans discrimination fondée sur la race, l'origine ethnique, la couleur de la peau, le sexe, la langue, la religion, la culture, le statut migratoire, l'opinion politique ou autre, l'origine nationale ou sociale, la situation économique, la naissance, le handicap ou toute autre situation.

La charia, en vigueur en Arabie saoudite, interdit l'homosexualité. Celui qui entretient des relations homosexuelles encourt la peine de mort, la castration chimique ou des peines d'emprisonnement.

Dernièrement, les Nations unies ont été la cible de sévères critiques lorsque l'Arabie saoudite a obtenu un rôle clé en matière de droits de l'homme alors que ce pays viole les droits humains des femmes, des minorités et des dissidents. Faisal bin Hassan Trad, l'ambassadeur d'Arabie saoudite auprès des Nations unies, a été élu président d'un panel d'experts indépendants au Conseil des droits de l'homme des NU.

La présente question porte sur une matière transversale communautaire (égalité des chances). Je me réfère au décret du 10 juillet 2008 établissant un cadre pour la politique flamande d'égalité des chances et de traitement qui assure la mise en œuvre fonctionnelle et transversale de cette politique, et au décret portant création du Centre interfédéral de l'égalité des chances. La détermination des points de vue du gouvernement flamand et la défense de ceux-ci auprès des Nations unies - pour ce qui concerne l'égalité des chances - se font systématiquement en coordination avec le pouvoir fédéral.

Les autorités fédérées contribuent à forger l'opinion de la fédération dans ces matières qui relèvent de leurs compétences internes.

Concernant l'égalité des chances et la non-discrimination, il s'agit de dossiers dits «multilatéraux mixtes». La concertation intrafédérale sur les droits de l'homme (égalité des chances et principe de non-discrimination) se déroule surtout dans le cadre de la coordination ad hoc à l'occasion de la présentation d'un rapport international ou de la détermination d'un point de vue. On utilise à cette fin le mécanisme de coordination COORMULTI ou des coordinations ad hoc réalisées par d'autres services publics fédéraux.

La politique étrangère de la Belgique est coordonnée au sein de la Conférence interministérielle Politique étrangère où les différents niveaux de pouvoir sont représentés. Cet organe se réunit à nouveau depuis le 6 juillet 2015.

Je renvoie également à l'accord de gouvernement fédéral: «Le gouvernement s’efforcera particulièrement d’accorder la politique et les positions des gouvernements des différents niveaux de pouvoir concernés de notre pays».

Mes questions sont donc les suivantes.

1) Comment réagissez-vous à l'appel lancé aux Nations unies par l'Arabie saoudite, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, pour que les droits des LBGT ne figurent plus parmi les objectifs des NU? Pouvez-vous nous communiquer le point de vue officiel de notre pays et expliquer en détail comment et où ce point de vue a au préalable fait l'objet d'une concertation avec les entités fédérées et/ou au sein de la Conférence interministérielle Politique étrangère? Avant de communiquer le point de vue de notre pays aux Nations unies, avez-vous en outre consulté les entités fédérées et/ou inscrit ce point à l'ordre du jour de la Conférence interministérielle Politique étrangère? Si non, pour quelle raison?

2) Préalablement à la candidature de Faisal bin Hassan Trad à la tête du Conseil des droits de l'homme des NU, au vote et finalement à la désignation de celui-ci, vous êtes-vous concerté avec les entités fédérées, soit de manière informelle, soit en convoquant la Conférence interministérielle Politique étrangère - eu égard aux prises de positions antérieures de l'Arabie saoudite dans ce domaine? Si oui, quels étaient leurs points de vue? Vont-ils dans le même sens que le vôtre? Pouvez-vous préciser en détail comment ces positions se sont traduites dans le vote final de notre représentant aux Nations unies? Si non, pour quelle raison?

3) Êtes-vous prêt à inscrire désormais à l'ordre du jour de la Conférence interministérielle Politique étrangère l'attitude que devra adopter notre représentant lors du vote en vue de la désignation du président du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, eu égard à l'incidence que peut avoir cette désignation? Si oui, pouvez-vous détailler votre réponse? Si non, pouvez-vous également en expliquer les raisons?

4) Pouvez-vous indiquer si vous êtes disposé à étudier avec les entités fédérées, au sein de la Conférence interministérielle Politique étrangère, de quelle manière nous pourrons systématiquement défendre au mieux les droits des lesbigays dans les forums internationaux et dans les traités dès lors que ces droits sont contestés par certains? Si non, pour quelle raison? Si oui, pouvez-vous préciser le contenu et le calendrier des discussions?

Réponse reçue le 17 décembre 2015 :

Permettez-moi tout d’abord de vous remercier pour la question. Il est toujours agréable de reconnaître un partisan de la lutte internationale pour les droits des personnes LGBTI. De par ma fonction et ma conviction personnelle, je partage votre préoccupation. Tout comme pour les droits internationaux des femmes, je constate ici aussi une tendance à museler et réduire les droits de ce groupe-cible. C’est particulièrement gênant, puisque cela déplace le dialogue des pays progressistes en quête de progrès vers une tentative de maintien des acquis.

Je remarque que votre question vise principalement les compétences du ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders. Je puis vous communiquer que la Belgique ne pouvait pas intervenir dans la désignation de Monsieur Trad. Étant donné qu’il n’y avait pas de participation, il n’y avait aucune raison d’organiser une concertation fédérale ou interfédérale. En outre, la Belgique est un précurseur en matière de droits des LGBTI. Une concertation régulière avec les entités fédérées a déjà lieu en ce qui concerne les LGBTI, et ce via le mécanisme COORMULTI. Les services d’appui de mon collègue ministre Reynders réalisent un excellent travail en la matière. Au besoin, ils organisent également des réunions ad hoc sur des thèmes spécifiques. Ces réunions révèlent l’existence d’un large consensus sur les droits humains des personnes LGBTI, faisant de la Belgique un précurseur sur la scène internationale. L’interaction entre notre pays et les institutions partenaires européennes et internationales est vraiment bonne.

Je m’engage également fermement au niveau national pour une concertation continue avec les régions. Ce point sera entre autres abordé dans le cadre du nouveau plan d’action national de lutte contre la violence homophone et transphobe.