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Question écrite n° 5-7524

de Peter Van Rompuy (CD&V) du 10 décembre 2012

à la ministre de l'Emploi

Travailleurs - Écart salarial entre travailleurs âgés et jeunes travailleurs - Hay Group - Ancienneté

égalité de rémunération
égalité de traitement
travailleur âgé
population en âge de travailler

Chronologie

10/12/2012Envoi question
15/5/2013Réponse

Question n° 5-7524 du 10 décembre 2012 : (Question posée en néerlandais)

Les études annuelles internationales sur les salaires menées par Hay Group nous montrent dans quelle mesure les salaires belges sont liés à l'âge. Nous constatons qu'en Belgique, un employé âgé qui a une fonction d'exécution gagne 35 % de plus qu'un jeune employé qui a cette fonction. Cette différence est de 20 % en France, de 17 % aux Pays-Bas et en Allemagne et de 10 % en Suède. Pour un employé spécialisé, l'écart salarial est de 43 % en Belgique alors qu'il est de 11 % Suède. L'argument est que les travailleurs âgés sont plus productifs. C'est peut-être vrai, mais la différence de productivité se situera plutôt autour du pourcentage suédois que du pourcentage belge d'écart salarial.

Le système salarial belge, qui lie les échelles barémiques à l'ancienneté, explique cet écart. En comparaison avec d'autres pays (européens), la fixation des salaires en Belgique mène à un écart salarial structurel - et donc à des coûts salariaux - trop important sur la base de l'âge.

En Belgique, quasi 40 % des plus de 55 ans travaillent. Aux Pays-Bas et en Allemagne, il s'agit respectivement de 53 % et de 57 % ; en Suède, 70 % de cette catégorie de population travaillent encore. Le taux d'emploi des plus de 55 ans est le plus élevé dans ces pays où l'écart salarial entre jeunes travailleurs et travailleurs âgés est « le plus faible » pour une même fonction.

L'écart salarial constitue indéniablement une frein au taux d'emploi élevé espéré de la population active âgée en Belgique.

Pour ces raisons, j'aimerais poser les questions suivantes à la ministre.

1) Dans quelle mesure la ministre est-elle consciente du lien entre taux d'emploi des plus de 55 ans et écart salarial ?

2) Quelles initiatives le gouvernement pourrait-il prendre pour combler l'écart salarial entre jeunes travailleurs et travailleurs âgés ? Envisage-t-il de le faire ?

Réponse reçue le 15 mai 2013 :

  1. L’évolution salariale se caractérise, surtout pour les employés, par une forte augmentation proportionnelle à l’ancienneté. Combinée au vieillissement de notre population active, cela signifie que notre coût salarial augmentera au cours des prochaines années rien que par la composition de la population active. Ce phénomène affectera quasiment tous les secteurs.

    Les salaires à l’ancienneté peuvent avoir un impact sur le coût relatif des travailleurs âgés et ce dernier peut peser négativement sur le taux d’emploi de ceux-ci. Cette liaison est toutefois plus complexe et moins systématique que ce qu’elle pourrait paraître au premier abord. Si le salaire d’un travailleur âgé est justifié par sa plus forte productivité, il n’y a pas de raison de penser qu’un employeur aurait des raisons de s’en séparer au profit d’un travailleur plus jeune dont le salaire serait plus bas mais dont la productivité serait aussi plus basse. Ce n’est donc que dans l’hypothèse où le salaire plus élevé d’un travailleur âgé ne serait pas justifié qu’un problème se poserait. L’appréciation de la productivité d’un travailleur âgé n’est cependant pas purement mécanique, c’est d’abord l’affaire de l’employeur qui va prendre en considération une série d’aspects qui peuvent dépasser le pur raisonnement économique. Il est donc possible que le salaire « élevé » des travailleurs âgés puisse avoir un impact sur leur présence dans l’emploi mais cet élément est loin d’être systématique. Par ailleurs, les raisons pour lesquelles le taux d’emploi des travailleurs âgés est relativement bas en Belgique sont multiples et la hauteur de leurs salaires relatifs ne constitue jamais qu’un élément explicatif parmi d’autres. L’existence des dispositifs qui autorisent un retrait précoce du marché du travail, avant 65 ans, joue à cet égard un rôle particulièrement important. Ainsi, dans le passé, on a trop souvent considéré que le chômage avec complément d’entreprise (c’est la nouvelle dénomination des dispositifs de prépension) accordé aux travailleurs âgés constituait nécessairement un élément essentiel de la solution dans la gestion d’une restructuration d’entreprise. En outre, on sait aussi que les incitations, notamment financières, au retrait précoce du marché du travail sont généralement plus fortes pour les travailleurs qui sont les moins qualifiés ou qui disposent de compétences qui sont moins recherchées sur le marché du travail et qui ne peuvent en conséquence le plus souvent pas prétendre à des salaires élevés. Ceci a inévitablement un impact sur la composition de la population salariée en emploi des plus de 55 ans : ceux qui restent sont plus nombreux que ceux qui partent à pouvoir bénéficier de salaires plus élevés. Il faut donc voir l’écart salarial entre jeunes et âgés qui traduit la comparaison d’un salaire moyen des jeunes avec un salaire moyen des âgés plutôt comme le résultat d’une interaction entre un ensemble de facteurs que comme la cause à l’origine de la faiblesse du taux d’emploi des travailleurs âgés. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les réformes décidées par le gouvernement notamment en matière de pension ainsi que les réformes que j’ai promulguées dans le cadre de mes compétences couvrent un large ensemble de causes qui vont au-delà de la seule dimension coût du travail.

  2. Hormis les mesures prises visant à réduire encore le coût salarial des travailleurs âgés, je n’envisage pas de prendre de mesures visant à réduire directement l’écart salarial entre jeunes et âgés en tant que tel ; la négociation salariale relève en effet en premier chef des partenaires sociaux dans notre pays. Par contre, je peux vous confirmer que toutes les mesures qui sont prises par le gouvernement et qui peuvent contribuer à relever l’âge de sortie du marché du travail peuvent réduire cet écart salarial. En effet, toutes les dispositions qui peuvent contribuer au relèvement du taux d’emploi des travailleurs âgés vont aussi prolonger la vie active de travailleurs moins « compétitifs », et donc logiquement moins bien rémunérés, ce qui via un effet de composition inverse à celui décrit plus haut, entraînera un abaissement du salaire relatif (moyen) des travailleurs âgés.