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Question écrite n° 5-339

de Sabine de Bethune (CD&V) du 9 novembre 2010

au ministre de la Justice

Copropriété - Loi du 9 juillet 1971 réglementant la construction d'habitations et la vente d'habitations à construire ou en voie de construction (loi Breyne) - Garantie d'exécution

copropriété
industrie du bâtiment
garantie
réglementation de la construction
entrepreneur
logement

Chronologie

9/11/2010Envoi question
7/12/2011Dossier clôturé

Question n° 5-339 du 9 novembre 2010 : (Question posée en néerlandais)

J'ai été informée dernièrement de quelques plaintes relatives à la copropriété d'appartements.

La loi du 9 juillet 1971 réglementant la construction d'habitations et la vente d'habitations à construire ou en voie de construction (appelée la « loi Breyne ») règle les relations contractuelles entre les maîtres de l'ouvrage et les entrepreneurs de certains travaux. L'article 12 de cette loi prévoit un système de cautionnement visant à garantir le parfait achèvement des travaux par le vendeur/l'entrepreneur. Cet article établit une distinction entre l'entrepreneur agréé et d'autres personnes non agréées.

Pour l'entrepreneur agréé, la loi du 9 juillet 1971 (et l'arrêté d'exécution) prévoit la constitution d'un cautionnement à hauteur de 5% de la valeur des travaux auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) (cf. Art. 3 de l'arrêté royal du 21 octobre 1971 portant exécution de la loi du 9 juillet 1971 réglementant la construction

d'habitations et la vente d'habitations à construire ou en voie de construction).

La réception s'effectue en deux phases : la réception provisoire et la réception définitive. Entre ces deux phases, il s'écoule au minimum un an (Cf. Art. 9 de la loi du 9 juillet 1971 réglementant la construction d'habitations et la vente d'habitations à construire ou en voie de construction). Le cautionnement est libéré par moitiés, la première à la réception provisoire et la seconde à la réception définitive (Cf. Art. 3 de l'arrêté royal du 21 octobre 1971 portant exécution de la loi du 9 juillet 1971 réglementant la construction d'habitations et la vente d'habitations à construire ou en voie de construction). L'acheteur/le maître de l'ouvrage bénéficie ainsi de garanties suffisantes que l'entrepreneur achèvera les travaux. En pratique, il s'avère toutefois que le maître de l'ouvrage n'est pas suffisamment protégé par ce cautionnement de 5% en cas de faillite de l'entrepreneur agréé.

Pour les autres personnes qui n'ont pas la qualité d'entrepreneur agréé (par exemple un promoteur immobilier), la loi du 9 juillet 1971 (et l'arrêté d'exécution) impose un cautionnement par un établissement de crédit ou une caisse de cautionnement. L'engagement expire néanmoins à la réception provisoire du bâtiment et non à la réception définitive (Cf. Art. 4, in fine, de l'arrêté royal du 21 octobre 1971 portant exécution de la loi du 9 juillet 1971 réglementant la construction d'habitations et la vente d'habitations à construire ou en voie de construction).

La réception provisoire du bâtiment sert à constater l'achèvement des travaux et à consigner les éventuels vices et remarques dans un procès-verbal. La réception provisoire prévoit généralement une période d'essai et un délai permettant à l'entrepreneur de remédier aux vices constatés.

À cet égard, le problème suivant se pose : différents vices peuvent encore être constatés au moment de la réception provisoire. Étant donné que l'engagement de la caution (établissement de crédit ou caisse de cautionnement) expire à la réception provisoire, le maître de l'ouvrage dispose de peu de moyens pour contraindre le promoteur immobilier à achever les travaux conformément aux remarques consignées dans le procès-verbal. Sa seule possibilité est d'intenter un procès, mais cette solution est peu efficace et peu recommandable étant donné la durée et le coût d'une action en justice.

Le nœud du problème réside dans la formulation de l'article 4, in fine, de l'arrêté royal du 21 octobre 1971 portant exécution de la loi du 9 juillet 1971 réglementant la construction d'habitations et la vente d'habitations à construire ou en voie de construction (Moniteur belge du 4 novembre 1971) dont le dernier alinéa stipule que « L'engagement de la caution prend fin à la réception provisoire des travaux ».

Pour garantir une meilleure protection de l'acheteur/du maître de l'ouvrage, on pourrait prévoir que l'engagement de la caution ne prend fin qu'à la réception définitive des travaux. L'acheteur/le maître de l'ouvrage disposera ainsi d'une garantie effective à l'égard de la caution au cas où le vendeur/l'entrepreneur ne respecterait pas son engagement de parfait achèvement du bâtiment. Afin de limiter le coût de ce cautionnement, on pourrait n'imposer à l'entrepreneur qu'une garantie de remboursement jusqu'à la réception provisoire. Ce cautionnement implique que l'établissement de crédit ou la caisse de cautionnement se porte caution solidaire avec l'entrepreneur pour le remboursement des montants déjà payés par le maître de l'ouvrage en cas de résolution du contrat par la faute de l'entrepreneur. Pour la période comprise entre la réception provisoire et la réception définitive, on pourrait prévoir une garantie d'achèvement. Ce cautionnement implique que l'établissement de crédit ou la caisse de cautionnement et l'entrepreneur se portent caution solidaire pour le coût de l'achèvement du bâtiment au cas où l'entrepreneur ne respecterait pas ses engagements en la matière.

C'est cette vision que défend explicitement la doctrine : « Le législateur ferait mieux d'opter, comme indiqué ci-avant, pour un système mixte dans lequel l'entrepreneur donnerait une garantie de remboursement pour la première partie des travaux et une garantie d'achèvement pour la deuxième partie. » (Cf. M. BOES, « De notariële verkoopakte in verband met de wetgeving op de ruimtelijke ordening en met de wet van 9 juli 1971 tot regeling van de woningbouw en de verkoop van te bouwen of in aanbouw zijnde woningen », T. Not. 1973, 202 ; M. DEVROEY, De Wet Breyne, 2000, 151, n° 65, et S. MAES, « Wet Breyne : knelpunten bij de toepassing », NJW, n° 175, 30 janvier 2008, p. 67).

On pourrait en outre prévoir que les entrepreneurs tant agréés que non agréés devront constituer un cautionnement auprès d'un établissement de crédit ou d'une caisse de cautionnement. Ce faisant, on met un terme à une forme de concurrence déloyale entre les entrepreneurs agréés et non agréés. Cette discrimination ne trouve aucune justification objective (Cf. H. UYTTERSPROT, « De wet Breyne : zekerheidsstelling en achterpoorten », TVV 2006, 787, n° 8 et suivants, et S. MAES, « Wet Breyne : knelpunten bij de toepassing », NJW, n° 175, 30 janvier 2008, p. 66). En outre, l'entrepreneur agréé pourra utiliser, pour l'exercice de sa profession, le montant de la garantie de 5 % immobilisé sur un compte de la CDC, ce qui ne pourra que profiter à notre économie.

La Bouwunie a constitué en son sein une « caisse de cautionnement ». Tant les petits que les grands entrepreneurs de travaux publics ou privés peuvent y faire appel pour conclure un cautionnement. Ce dernier est offert en échange d'une cotisation unique de 75 euros. Ce montant est remboursé ou imputé sur une nouvelle demande dès que la caution est libérée par le maître de l'ouvrage. L'entrepreneur devient un associé de la caisse de cautionnement au prorata d'une part de 25 euros par tranche de 2500 euros de caution. L'assemblée générale des actionnaires fixe chaque année le dividende attribué aux actionnaires. Une rétribution de seulement 1% du montant des cautions ouvertes est réclamée à l'entrepreneur. Ce montant représente le coût final pour l'entrepreneur (Voir site web de la Bouwunie : http://www.bouwunie.be/viewobj.jsp?article=50663). Le grand avantage de cette caisse de cautionnement est que les demandes de cautionnement sont traitées avec une grande simplicité administrative.

C'est pourquoi je souhaiterais que le ministre réponde aux questions suivantes.

1. Que pense le ministre de la proposition visant à scinder la garantie offerte au maître de l'ouvrage en une garantie d'exécution et une garantie d'achèvement des travaux ?

2. Que pense-t-il de l'harmonisation de l'obligation de garantie pour les entrepreneurs agréés et les entrepreneurs non agréés ?

3. Est-il disposé à prendre lui-même une initiative en ce sens ou a soutenir une initiative parlementaire ?