4-1620/2

4-1620/2

Sénat de Belgique

SESSION DE 2009-2010

16 MARS 2010


Projet de loi modifiant la loi organique du 18 juillet 1991 du contrôle des services de police et de renseignements et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE L'INTÉRIEUR ET DES AFFAIRES ADMINISTRATIVES PAR

MME SOMERS


I. INTRODUCTION

Le projet de loi à l'examen, qui relève de la procédure bicamérale obligatoire, a été déposé initialement à la Chambre des représentants en tant que proposition de loi de M. François-Xavier de Donnéa et consorts (doc. Chambre, nº 52-2171/1).

Il a été adopté à l'unanimité par la Chambre des représentants le 28 janvier 2010 eta été transmis au Sénat le lendemain.

La commission l'a examiné au cours de ses réunions des 9 et 16 mars 2010.

II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE LA MINISTRE DE L'INTÉRIEUR, MME ANNEMIE TURTELBOOM

Le projet de loi à l'examen est issu d'une proposition de loi qui a été déposée à la Chambre par M. de Donnéa et consorts et qui a bénéficié d'un large soutien (elle a été cosignée par les groupes Sp.a et Ecolo-Groen). Le texte qui vous est soumis est la proposition amendée par les auteurs, telle qu'elle a été adoptée à l'unanimité en commission de l'Intérieur de la Chambre.

Le projet poursuit un triple objectif:

1. Premièrement, il vise à améliorer l'organisation et le fonctionnement internes des Comités P et R ainsi que de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace et ce, en ancrant un certain nombre de principes de bonne organisation et de bon fonctionnement dans la loi du 18 juillet 1991.

Ainsi, la proposition entend garantir l'indépendance et la neutralité du Comité P en réduisant la présence au sein de celui-ci de personnes détachées des services de police. Elle prévoit en outre d'insérer dans la loi un nouvel article disposant que les membres du personnel des services de police ne peuvent pas exercer de mandat politique et doivent s'abstenir en toutes circonstances de manifester publiquement leurs opinions politiques. Par ailleurs, la proposition vise aussi à formaliser et renforcer le rôle du greffier en tant que chef du personnel administratif.

Tous ces dispositions devraient assurer une meilleure cohésion au sein de chacun des Comités et la conformité à certaines exigences internationales en termes d'indépendance et de neutralité.

2. Le projet vise également à permettre aux Comités permanents d'assurer dans les meilleures conditions la continuité de leur fonctionnement lors du départ anticipé d'un membre effectif et ce, en portant à deux le nombre de membres suppléants nommés pour chacun des membres effectifs.

3. S'inspirant du mandat des conseillers à la Cour des comptes, le présent projet vise à supprimer la limitation à deux fois de la possibilité de renouveler le mandat des membres effectifs des Comités permanents et à porter la durée de ce mandat à six ans.

La ministre déclare ne voir aucune objection à ce projet et ne pouvoir que se réjouir d'une proposition visant à améliorer l'organisation et le fonctionnement internes des Comités P et R ainsi que de l'OCAM. Elle pourrait très bien admettre, par exemple, que l'on organise un recrutement statutaire propre afin de limiter les détachements de membres du personnel des services de police.

Elle précise toutefois qu'elle laisse aux sénateurs le soin de décider, dans leur grande sagesse, s'ils veulent ou non se rallier aux auteurs du projet en approuvant ce texte.

III. AUDITION DE M. BART VAN LIJSEBETH, PRÉSIDENT DU COMITÉ PERMANENT DE CONTRÔLE DES SERVICES DE POLICE, ET DE M. GUY RAPAILLE, PRÉSIDENT DU COMITÉ PERMANENT DE CONTRÔLE DES SERVICES DE RENSEIGNEMENTS ET DE SÉCURITÉ

M. Van Lijsebeth souscrit pleinement à l'exposé de la ministre. Le projet de loi a fait l'objet d'amples discussions au sein de la commission de suivi du Comité P à la Chambre. Elle prévoit un certain nombre d'interventions techniques en vue d'améliorer le fonctionnement interne des Comités P et R.

Ces modifications ont été mises au point en concertation avec le Comité R et les modifications proposées ont été approuvées par les deux comités.

M. Rapaille expose que le projet contient deux volets. Une part concerne le fonctionnement interne des comités. La modification proposée correspond avec la pratique actuelle du Comité R. L'amélioration du fonctionnement vise surtout à assurer la continuité des fonctions. Il pense que le texte à l'examen correspond à cet objet.

IV. DISCUSSION GÉNÉRALE

Le président attire l'attention des membres sur une note du service d'Évaluation de la législation dans laquelle celui-ci formule plusieurs remarques techniques au sujet du projet à l'examen (voir annexe 1).

MM. Rapaille et Van Lijsebeth ont réagi à cette note dans une réponse écrite (voir annexe 2).

En ce qui concerne l'article 3 du projet, MM. Van Lijsebeth et Rapaille indiquent que la remarque relative à la différence entre le terme français « remplaçant » et le terme néerlandais « opvolger » est justifiée, mais que cette erreur apparaît plusieurs fois dans la loi organique du 18 juillet 1991.

C'est pourquoi la commission décide de ne pas tenir compte de la remarque afin d'éviter de devoir rectifier l'erreur dans tous les articles de la loi de base.

Une autre remarque du service d'Évaluation de la législation que MM. Van Lijsebeth et Rapaille jugent pertinente est celle selon laquelle la réglementation relative à l'exercice d'un mandat politique par le personnel administratif du Comité permanent P n'a pas sa place dans un article qui concerne exclusivement le personnel du Service d'enquêtes.

M. Daras précise que cet article règle les droits politiques du personnel du Comité P. Vu la prudence dont il faut faire preuve en cette matière, il s'impose d'adapter le projet sur ce point.

Étant donné que la modification du texte impliquerait son renvoi à la Chambre, la commission conclut à la nécessité de prendre une nouvelle initiative législative afin de rectifier l'erreur en question.

On pourrait peut-être donner suite aux remarques du service d'Évaluation de la législation relatives à la répartition des tâches entre les greffiers et les chefs des Services d'enquêtes respectifs des Comités P et R en apportant une correction technique aux articles 12 et 15 du projet. La commission propose de soumettre ces corrections techniques pour approbation à la Chambre.

Le 16 mars 2010, la Chambre a marqué son accord sur les corrections techniques proposées (voir doc. Sénat, nº 4-1620/3).

V. DISCUSSION DES ARTICLES ET VOTES

Article 1er

Cet article est adopté à l'unanimité des 12 membres présents.

Articles 2 à 5

Ces articles sont adoptés par 10 voix et 2 abstentions.

Article 6

Cet article est adopté par 9 voix et 3 abstentions.

Articles 7 à 15

Ces articles sont adoptés par 10 voix et 2 abstentions.

L'ensemble des articles envoyés à la commission est adopté par 10 voix et 2 abstentions.

Confiance a été faite à la rapporteuse pour la rédaction du présent rapport.

La rapporteuse, Le président,
Ann SOMERS. Philippe MOUREAUX.

ANNEXES

Annexe 1

Avis (1)

Des corrections de texte ont été transmises au secrétariat de la commission.

Article 3

Dans l'article 6, alinéa 1er, proposé, il est question de « opvolger » dans le texte néerlandais et de « remplaçant » dans le texte français.

Le texte français doit être adapté: il s'agit non pas d'un remplaçant mais d'un successeur.

Article 6

1) L'intention est manifestement de mettre les membres du Service d'enquêtes P sur le même pied que les membres des services de police en ce qui concerne l'engagement politique. Cette mise sur pied d'égalité n'est toutefois pas complète: non seulement les membres des services de police doivent s'abstenir de manifester publiquement leurs opinions politiques et ne peuvent pas se porter candidat à un mandat politique, mais ils ne peuvent en outre pas se livrer publiquement à des activités politiques (article 127, alinéa 2, de la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux).

Cette dernière interdiction n'est pas imposée aux membres du Service d'enquêtes P. Cette différence par rapport au régime applicable aux membres des services de police est-elle voulue ? Ou faut-il partir du principe que toute personne qui se livre publiquement à des activités politiques manifeste publiquement, par définition, ses opinions politiques ?

2) Les règles relatives à l'engagement politique des membres du personnel administratif n'ont pas leur place dans l'article 20 de la loi du 18 juillet 1991, qui concerne exclusivement les membres du Service d'enquêtes P.

3) Eu égard à sa formulation générale, le texte proposé peut de surcroît donner l'impression que les règles valent pour tous les membres du personnel administratif alors que l'intention est sans doute de ne les rendre applicables qu'au seul personnel administratif du Service d'enquêtes P.

Articles 12 et 15

Le projet de loi vise à régler l'autorité hiérarchique du greffier de chaque Comité permanent, du directeur-général du Service d'enquêtes P et du chef du Service d'enquêtes R. Toutefois, la répartition de compétences entre ces personnes n'est pas claire.

a) Le directeur-général du Service d'enquêtes P dirige ce service et y répartit les tâches, sous l'autorité, la direction et la surveillance collegiales du Comité permanent P (article 18 de la loi du 18 juillet 1991).

b) Le chef du Service d'enquêtes R dirige ce service et y répartit les tâches, sous l'autorité, la direction et la surveillance collegiales du Comité permanent R (article 42 de la loi du 18 juillet 1991).

c) Le greffier assure la direction et la gestion des membres du personnel administratif et répartit les tâches entre eux, sous l'autorité et la surveillance collégiales du Comité permanent concerné (article 58, nouvel alinéa 2).

Question: N'y a-t-il pas de chevauchement entre, d'une part, la répartition de compétences par le directeur-général ou le chef et, d'autre part, celle effectuée par les greffiers ?

Question: Le directeur-général et le chef agissent sous l'autorité, la direction et la surveillance collegiales du Comité permanent concerné. Les greffiers agissent uniquement sous l'autorité et la surveillance du Comité permanent concerné. En quoi consiste concrètement cette différence ?

d) Le directeur-général du Service d'enquêtes P et le chef du Service d'enquêtes R ont autorité sur les membres du personnel administratif qui lui sont assignés par le Comité Permanent concerné (article 58, nouvel alinéa 3).

Question: qui est « lui » ? Le directeur-général (et le chef) ou le service ?

e) Le greffier a autorité sur les membres du personnel du Service d'enquêtes P ou R, qui lui sont assignés par le Comité permanent concerné (article 58, nouvel alinéa 4).

Question: qui est « lui » ? Le greffier ou le service ?

Question: Qui sont « les membres du personnel » ? Apparemment il ne s'agit pas des membres du personnel administratif, puisqu'ils sont déjà concernés par l'article 58, nouvel alinéa 3. Ou faut-il considérer par contre qu'il s'agit bien de membres du personnel administratif, dont quelques-uns sont assignés au directeur-général (ou le chef) et d'autres au greffier ? Mais pourquoi alors ne pas utiliser la même notion de « membres du personnel administratif » ? Ou s'agit-il des « membres » des Services d'enquêtes P et R ?

f) Le greffier assure la direction et la gestion du personnel administratif (article 62, nouvel alinéa premier).

Observation: il s'agit d'une règle qui est déjà énoncée à l'article 58, nouvel alinéa 2, et qui est dès lors superflue.

Annexe 2

Concerne: projet de loi modifiant la loi organique du 18 juillet 1991 du contrôle des services de police et de renseignements et de l'organe de coordination pour l'analyse de la menace.

Monsieur le Président,

À la suite de la réunion de la commission de l'Interieur du Sénat du 9 mars dernier, nous avons l'honneur de vous faire parvenir ci-joint une note concernant l'avis no 26 émis par les services du Sénat le 4 mars 2010.

Une copie de cette note sera transmise par courriel à monsieur le secrétaire de la Commission de l'Intérieur et Affaires administratives.

Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l'assurance de ma haute considération.

Pour le Comité permanent P, Pour le Comité permanent R,
Bart Van Lijsebeth, Guy Rapaille,
Président Président

Note à l'attention de Monsieur le président Van Lijsebeth concernant le projet de loi modifiant la loi organique du 18 juillet 1991 du contrôle des services de police et de renseignements et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace (doc. Sénat, 4-1620/1).

I. Concernant l'article 3 du projet (article 6, alinéa 1er de la loi):

Le terme « remplaçant » utilisé dans le projet de loi est le terme utilisé dans la loi actuelle (articles 6 et 30 de la loi). Il ne semble pas utile de changer une terminologie qui se trouve dans la loi depuis 1991 et qui n'a jamais posé de problème; tout changement de terminologie risquant en effet de donner lieu à de nouvelles interprétations. Si toutefois le terme « remplaçant » était remplacé par « successeur » dans la version française du texte, il conviendrait, par souci de cohérence, d'en faire de même à l'article 8 du projet (article 30, alinéa 1er de la loi) en ce qui concerne le Comité permanent R.

II. Concernant l'article 6 du projet (article 20, nouvel alinéa 6 de la loi):

Il s'avère que le texte inséré entre les alinéas 5 et 6 de l'article 20 de la loi n'a pas été discuté en concertation avec les Comités permanents P et R, contrairement à l'ensemble du projet.

Les 2 dernières phrases portent exclusivement sur les membres du personnel administratif du Comité permanent P. L'observation du service juridique du Sénat que les règles relatives à l'engagement politique des membres du personnel administratif n'ont pas leur place dans l'article 20 de la loi du 18 juillet 1991, qui concerne exclusivement les membres du Service d'enquêtes P, est donc judicieuse.

III. Concernant les articles 12 et 15 du projet (articles 58 et 62 de la loi organique):

En ce qui concerne l'éventuel chevauchement entre la répartition des compétences par le directeur général ou le chef du Service d'enquêtes et celle effectuée par les greffiers, il convient de distinguer clairement les Services d'enquêtes P et R, d'une part, et les Services administratifs des Comités permanents P et R, d'autre part.

Les Services administratifs des Comités permanents P et R sont composés du personnel administratif soumis au Statut du personnel administratif des Comités permanents de contrôle des services de police et de renseignements, tel que publié au Moniteur belge du 3 septembre 2002. Le Service d'enquêtes P est composé du directeur général, des directeurs généraux adjoints et de commissaires auditeurs. Les membres du Service d'enquêtes P sont soumis au Statut du directeur général et des membres du Service d'enquêtes du Comité permanent de contrôle des services de police, tel que publié au Moniteur belge du 28 février 2007.

La direction, la gestion et la répartition des tâches des Services administratifs des Comités permanents P et R sont assurées par les greffiers respectifs, sous l'autorité et la surveillance collégiales du Comité permanent concerné. La direction, la gestion et la répartition des tâches des Services d'enquêtes P et R sont assurées respectivement par le directeur général (assisté des directeurs généraux adjoints) et le chef du Service d'enquêtes, sous l'autorité, la « direction » et la surveillance collégiales du Comité permanent concerné. Le terme « direction » du Comité permanent concerné apparaît uniquement en ce qui concerne la direction, la gestion et la répartition des tâches des Services d'enquêtes P et R parce que ceux-ci assument des missions opérationnelles au sens de l'article 1er de la loi alors que les Services administratifs n'assument que des fonctions de soutien au Comité permanent concerné.

À l'article 58, nouvel alinéa 4 de la loi — article 12 du projet), il convient de lire que « Le greffier a autorité sur les membres du Service d'enquêtes P ou R, selon le cas, [...] » et non « sur les membres du personnel du Service d'enquêtes P ou R, selon le cas, [...] ».

À l'article 58, nouveaux alinéas 3 et 4 de la loi (article 12 du projet), la formulation « qui les lui assigne » vise respectivement le directeur général/chef du Service d'enquêtes (nouvel alinéa 3) et le greffier (nouvel alinéa 4).

À l'article 15 du projet (article 62 de la loi), l'observation formulée par le service juridique du Sénat que la règle selon laquelle le greffier assure la direction et la gestion du personnel administratif est déjà énoncée à l'article 58, nouvel alinéa 2 de la loi est judicieuse. Il convient donc de supprimer cette règle, tout en précisant que cette disposition s'applique sans préjudice de l'article 58:

« Sans préjudice de l'article 58, le greffier assure, sous l'autorité et la surveillance collégiales du Comité permanent concerné, notamment:

— la gestion de l'infrastructure et du matériel du Comité;

— ... »

« Onverminderd artikel 58 staat de griffier onder het collegiaal gezag en toezicht van het betrokken Vast Comité onder meer in voor:

— het beheer van de infrastructuur en van het materiaal van het Comité;

— ... »

Bruxelles, le 12 mars 2010.


(1) Des corrections de texte ont ‰t‰ transmises au secr‰tariat de la commission.