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1er AVRIL 2009
La crise financière mondiale qui frappe de plein fouet de grandes institutions bancaires, qui les a fait chavirer, a révélé combien le système financier s'était déconnecté de la réalité, se complaisait dans l'autorégulation, et se concentrait sur une recherche à très court terme de profits exorbitants et désincarnés de l'économie réelle. L'État a dû intervenir massivement pour sauver du naufrage de grandes banques: il s'agissait de protéger à la fois les épargnants, les travailleurs du secteur bancaire et l'ensemble des acteurs de l'économie réelle.
Parfois pris dans la tourmente spéculative sans même savoir qu'ils en faisaient partie, parfois persuadés qu'ils avaient fait des placements de bons de père de famille, des milliers de consommateurs paient aujourd'hui le prix du comportement dangereux de certains acteurs du système bancaire.
Il convient dès lors de réagir. De réagir vite et par tous les moyens pour donner à tous les citoyens les outils pour décoder et se prémunir des dangers qui les guettent lorsqu'ils mettent, sans en avoir pesé toutes les conséquences, le doigt dans l'engrenage du crédit facile.
On constate aujourd'hui qu'en raison de l'organisation institutionnelle de notre pays, les compétences qui touchent directement le consommateur de services financiers sont éclatées entre différents niveaux de pouvoir.
Le risque est dès lors grand, en présence d'un défaut d'une coordination de tous ces acteurs, de voir les actions entreprises manquer leurs objectifs. Il est donc souhaitable que les actions en matière de sensibilisation du consommateur tant des pouvoirs publics que du monde associatif soient coordonnées.
Par ailleurs, il importe de rappeler que les mesures de prévention, de sensibilisation et de coordination n'exonèrent en rien les banques et organismes prêteurs de leurs obligations et responsabilités d'information des consommateurs.
Christiane VIENNE Joëlle KAPOMPOLÉ. |
Le Sénat,
A. Vu la nécessité et l'urgence de poser le débat de façon sereine et constructive afin de définir des pistes d'action efficaces et concertées avec les nombreux interlocuteurs concernés;
B. Vu la crise financière qui fait rage et dont l'ampleur pour les citoyens est à ce jour difficilement appréciables mais pèsera lourdement sur le pouvoir d'achat de certains, voire dans leurs conditions de survie et de pensions;
C. Vu la nécessité de coordonner les actions de sensibilisation au niveau national, en respectant les compétences respectives de l'État fédéral et des entités fédérées;
D. Considérant l'accord de gouvernement du 18 mars 2008, tel que confirmé par la déclaration gouvernementale du 21 décembre 2008 qui prévoit qu'il « conviendra également de poursuivre la lutte contre le phénomène du surendettement par une approche globale tant à l'égard des preneurs de crédit que des préteurs, en veillant notamment à renforcer les instruments de prévention »,
E. Considérant que la conjoncture économique et la grave crise financière actuelles nécessitent de prendre des mesures en matière de pouvoir d'achat et de protection des consommateurs;
F. Considérant que l'apprentissage de la valeur de l'argent s'effectue dès l'enfance;
G. Considérant que la majorité des enfants et adolescents reçoivent régulièrement de leurs parents de l'argent de poche et/ou perçoivent occasionnellement une rémunération grâce à un travail d'étudiant;
H. Considérant que les enfants et adolescents peuvent parfois avoir des difficultés dans leur rapport à l'argent;
I. Considérant que les jeunes constituent un public cible privilégié des banques et des établissements de crédits et que la bancarisation est plus précoce aujourd'hui que par le passé;
J. Considérant l'étude intitulée « Le crédit et les jeunes » d'octobre 2001 et concluant notamment que « les jeunes n'apprennent pas pour la plupart comment ils doivent gérer l'argent ou ce que revêt précisément le crédit. », que les jeunes peuvent rencontrer des problèmes « parce qu'ils ne sont pas suffisamment préparés à assumer leur indépendance financière » et que « La relation à l'argent et sa place dans notre économie méritent d'être abordées sous l'angle éducatif dès le plus jeune âge » (1) ;
K. Considérant l'augmentation constante du nombre de dossiers traités par les services de médiation de dettes agréés en Région wallonne, bruxelloise et flamande;
L. Considérant que l'apprentissage de la gestion d'un budget constitue un pilier important d'une politique de prévention du surendettement;
M. Considérant l'importance de mener une politique cohérente au service des citoyens en matière de risques liés au crédit et à l'endettement;
N. Considérant que le Sénat assurera le suivi de ses demandes au gouvernement en se donnant la possibilité d'organiser le débat en son sein.
Demande au gouvernement:
1. de prendre contact avec les gouvernements des entités fédérées afin de développer une politique coordonnée de sensibilisation des consommateurs aux dangers du crédit facile;
2. d'organiser une table ronde rassemblant les acteurs associatifs concernés et le monde de l'éducation pour envisager les pistes de travail communes pour promouvoir efficacement les actions et outils d'éducation existants ou à créer, qui visent notamment la sensibilisation à la gestion d'un budget.
11 février 2009.
Christiane VIENNE Joëlle KAPOMPOLÉ. |
(1) Étude réalisée par l'Observatoire du crédit et de l'endettement et commandée par M. Johan Vande Lanotte, alors vce-premier ministre et ministre du Budget, de l'Intégration et de l'Économie sociale, et M. Charles Picqué, alors ministre de l'Économie et de la Recherche scientifique.