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Sénat de Belgique

SESSION DE 1996-1997

26 MARS 1997


Projet de loi contenant des mesures en vue de résorber l'arriéré judiciaire dans les cours d'appel


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE LA JUSTICE PAR MM. BOURGEOIS ET DESMEDT


SOMMAIRE


  1. Exposé introductif du ministre de la Justice
    1. Définition du problème
    2. Chiffres concernant l'arriéré judiciaire en matière civile
      1. Données statistiques
      2. Commentaire
    3. Portée de la loi en projet
    4. Lignes directives du projet de loi
      1. La résorption de l'arriéré existant
      2. L'installation d'un magistrat coordinateur et l'obligation pour les assemblées générales d'établir un plan pluriannuel
      3. Présidence des cours d'assises
      4. Recours formé contre les décisions du tribunal de commerce
    5. Incidence budgétaire des mesures proposées
    6. Conclusion
  2. Discussion générale
    1. Questions et observations des commissaires
    2. Réponses du ministre de la Justice et répliques des membres
      1. La nomination des conseillers suppléants
      2. La définition de l'arriéré judiciaire
      3. La durée des chambres supplémentaires
      4. Le magistrat-coordinateur et la composition des chambres supplémentaires
      5. L'imposition d'une obligation de résultat
      6. L'indemnité allouée aux conseillers suppléants
      7. Le remplacement d'un conseiller effectif par un conseiller suppléant
      8. Les greffiers
      9. Les vacances judiciaires
  3. Discussion des articles et votes
    1. Article 1er
    2. Article 2
      1. Discussion
      2. Votes
    3. Article 3
      1. Discussion
      2. Votes
    4. Article 4
      1. Méthode
      2. Chambres temporaires ou chambres supplémentaires
      3. Composition et présidence des chambres supplémentaires
        1. Discussion
        2. Votes
      4. Durée d'existence des chambres supplémentaires
        1. Discussion
        2. Votes
      5. Compétence des chambres supplémentaires
        1. Discussion
        2. Votes
    5. Article 4bis (nouveau) (art. 5 du texte adopté)
      1. Discussion
      2. Votes
    6. Article 5 (art. 6 du texte adopté)
      1. Discussion
      2. Votes
    7. Article 6 (art. 7 du texte adopté)
      1. Discussion
      2. Votes
    8. Article 7 (art. 8 du texte adopté)
      1. Discussion
      2. Votes
    9. Article 8 (art. 9 du texte adopté)
    10. Article 8bis (nouveau)
    11. Article 9 (art. 10 du texte adopté)
      1. Paragraphe 1er , 1º
        1. Discussion
        2. Votes
      2. Paragraphe 1er , 2º
        1. Discussion
        2. Vote
      3. Paragraphe 1er , 3º
        1. Discussion
        2. Vote
      4. Paragraphe 1er , 4º (nouveau)
        1. Discussion
        2. Vote
      5. Paragraphe 1er , 5º (nouveau)
      6. Paragraphe 1er , deuxième alinéa (nouveau)
        1. Discussion
        2. Vote
      7. Paragraphe 2
      8. Observations finales et vote sur l'article 9
    12. Article 10 (art. 11 du texte adopté)
    13. Article 11 (art. 12 du texte adopté)
    14. Article 11bis
    15. Article 12 (art. 13 du texte adopté)
    16. Article 13 (art. 14 du texte adopté)
    17. Article 14 (art. 15 du texte adopté)
    18. Article 15 (art. 16 du texte adopté)
    19. Article 16 (art. 17 du texte adopté)
    20. Article 17 (art. 18 du texte adopté)
    21. Article 18 (art. 19 du texte adopté)
    22. Article 19 (art. 20 du texte adopté)
      1. Discussion
      2. Votes
    23. Article 19bis
    24. Article 20 (art. 21 du texte adopté)
      1. Discussion
      2. Votes
    25. Article 21 (art. 22 du texte adopté)
    26. Article 22 (art. 23 du texte adopté)
      1. Discussion
      2. Vote
    27. Article 23 (art. 24 du texte adopté)
      1. Discussion
      2. Vote
    28. Article 24 (art. 25 du texte adopté)
  4. Vote sur l'ensemble
  5. Texte adopté par la commission de la Justice
  6. Annexes
    1. Chiffres communiqués par le premier président de la Cour d'appel de Gand au ministre de la Justice dans sa lettre du 12 mars 1997
    2. Note de management
    3. Nature des indemnités des conseillers suppléants aux cours d'appel

La Commission de la Justice a examiné le présent projet de loi lors de ses réunions des 13 décembre 1996, 15 et 28 janvier, 4, 18 et 19 février, 19 et 26 mars 1997.

I. EXPOSÉ INTRODUCTIF DU MINISTRE DE LA JUSTICE

A. Définition du problème

Le décalage entre, d'une part, le nombre de cas dans lequel il est fait appel aux différentes juridictions et, d'autre part, le nombre de jugements prononcés par celles-ci ne cesse de s'agrandir. L'appareil judiciaire se voit par conséquent confronté de plus en plus au spectre de l'arriéré judiciaire.

La situation est sans aucun doute la plus problématique au niveau des cours d'appel.

D'anciennes statistiques révèlent qu'en 1993, le nombre de dossiers en attente de jugement était déjà supérieur à 100 000, ce qui représente un volume de travail de pratiquement six années.

Depuis lors, l'informatisation des greffes des cours d'appel s'est poursuivie et de nouvelles données sont disponibles. Celles-ci sont cependant peu encourageantes.

En effet, il ressort d'enquêtes récentes que l'arriéré accumulé au niveau des affaires civiles ne se résorbe pas, bien au contraire.

Notre mission est dès lors double. D'une part, résorber l'arriéré existant et, d'autre part, éviter la constitution d'un nouvel arriéré.

B. Chiffres concernant l'arriéré judiciaire en matière civile

1. Données statistiques

Anvers
­
Antwerpen
Bruxelles
­
Brussel
Gand
­
Gent
Mons
­
Bergen
Liège
­
Luik
1.a) Nombre d'affaires pendantes. ­ Het aantal hangende zaken :
­ 1er septembre 1996/1 september 1996 17 611 25 040 43 281 3 526 12 256
­ 31 décembre 1996/31 december 1996 16 517 21 763 43 925 (1 ) 4 339 8 512
1.b) Nombre d'affaires nouvelles inscrites au rôle général. ­ Het aantal nieuwe zaken op de algemene rol geplaatst :
­ 1er semestre 1996/1e semester 1996 2 932 2 946 2 243 852 1 432
­ 2e semestre 1996/2e semester 1996 2 281 2 747 1 923 796 1 207
1.c) Nombre d'affaires clôturées. ­ Het aantal beeindigde zaken :
­ 1er semestre 1996/1e semester 1996 2 630 2 564 1 628 840 1 346
­ 2e semestre 1996/2e semester 1996 1 572 1 438 1 202 423 706
2. Nombre d'affaires omises d'office. ­ Het aantal zaken die ambtshalve zijn weggelaten :
­ 1er semestre 1996/1e semester 1996 0 0 0 0 0
­ 2e semestre 1996/2e semester 1996 954 1 107 ­ (1 ) 1 141 3 718
3. Nombre d'audiences. ­ Het aantal zittingen :
­ 1er semestre 1996/1e semester 1996 942 1 142 560 355 629
­ 2e semestre 1996/2e semester 1996 624 756 397 245 420
4.a) Nombre de jugements interlocutoires. ­ Het aantal tussenarresten :
­ 1er semestre 1996/1e semester 1996 345 382 278 188 262
­ 2e semestre 1996/2e semester 1996 200 333 251 102 176
4.b) Nombre de jugements définitifs. ­ Het aantal eindarresten :
­ 1er semestre 1996/1e semester 1996 2 536 2 436 1 578 739 1 350
­ 2e semestre 1996/2e semester 1996 1 525 1 385 1 160 407 706
5.a) Nombre de procès-verbaux. ­ Het aantal processen-verbaal :
­ 1er semestre 1996/1e semester 1996 50 ­ 70 27 30
­ 2e semestre 1996/2e semester 1996 21 0 197 20 89
5.b) Nombre de dispositions. ­ Het aantal beschikkingen :
­ 1er semestre 1996/1e semester 1996 865 644 599 300 460
­ 2e semestre 1996/2e semester 1996 704 462 545 221 349
6.a) Nombre d'affaires fixées à une date postérieure au 1er septembre 1998. ­ Het aantal vastgestelde zaken waarvan de rechtsdag ligt na 1 september 1998 777 1 308 352 31 68
7.a) Délai (en jours) qui s'est écoulé en moyenne entre l'introduction d'une affaire et la première fixation de celle-ci, pour les affaires fixées entre le 1er janvier 1996 et le 30 juin 1996. ­ De gemiddelde doorlooptijd (in dagen) tussen de inleiding van een zaak en de eerste vaststelling van een zaak, voor zaken vastgesteld tussen 1 januari 1996 en 30 juni 1996 175 161 201 ­ 218
7.b) Délai (en jours) qui s'est écoulé en moyenne entre la dernière fixation (?) d'une affaire et le jugement définitif pour les affaires terminées entre le 1er janvier 1996 et le 30 juin 1996. ­ De gemiddelde doorlooptijd (in dagen) tussen de laatste rechtsdag (?) van een zaak en het einde van een zaak, voor zaken beëindigd, tussen 1 januari 1996 en 30 juni 1996 50 67 44 50 44

(1 ) Il convient de signaler que la reprise d'« anciennes » données informatisées dans le système informatique actuel du greffe a engendré l'intégration, dans la banque de données, de nombreuses affaires « anciennes » sous un statut erroné, ce qui falsifie le chiffre relatif au nombre d'affaires pendantes. Lors de la lecture du rapport le 26 mars 1997, soit après que la Commission de la Justice eut achevé la discussion du projet de loi, le ministre a transmis à la commission une note du premier président de la Cour d'appel de Gand, dans laquelle figurent de nouveaux chiffres concernant les affaires pendantes dans cette cour (cf. la note nº 1 en annexe).

2. Commentaire

Ces chiffres sont très clairs. L'afflux des affaires dépasse largement le nombre d'affaires clôturées.

Les données relatives au nombre d'affaires pendantes doivent toutefois être nuancées, car elles incluent vraisemblablement des affaires qui, par suite d'un arrangement à l'amiable, ne seront pas clôturées par un arrêt. En outre, en dépit du fait que la loi du 11 juillet 1994 relative aux tribunaux de police soit entrée en vigueur le 1er janvier 1995, il n'est pas exclu que les cours d'appel soient encore saisies d'un certain nombre d'appels de jugements des tribunaux correctionnels. Cette source d'affaires devrait toutefois se tarir à terme.

Malgré cette rectification, force est de conclure, à l'analyse des chiffres susvisés, que l'on n'a pas endigué l'arriéré judiciaire. Si l'on veut sauver la réputation de la justice, il est donc nécessaire de prendre des mesures radicales.

C. Portée de la loi en projet

La loi en projet contient une série de mesures qui visent à résorber l'arriéré judiciaire dans les cours d'appel. La mesure la plus visible est celle qui consiste à installer des chambres supplémentaires temporaires dans lesquelles siégeront principalement des conseillers suppléants.

Il va sans dire qu'il s'agit là d'une mesure à caractère exceptionnel. Mais l'arriéré judiciaire des cours d'appel a pris une ampleur telle qu'il sape la confiance du citoyen dans l'État de droit. Par conséquent, il faut intervernir d'urgence.

La réforme proposée n'est cependant pas une opération isolée; elle s'inscrit dans un vaste mouvement de renouveau qui n'est pas limitée au droit pénal sensu stricto , mais qui s'étend également à l'organisation judiciaire et aux services de police.

La modernisation de l'appareil judiciaire, notamment, suivra trois lignes de force.

Il faut d'abord s'attaquer à la politique de recherche et de poursuite des infractions. Le projet de loi instituant le collège des procureurs généraux et créant la fonction de magistrat fédéral, adopté respectivement par le Sénat et la Chambre des représentants les 20 décembre 1996 et 20 février 1997 (1), ainsi que le débat sur la réforme des services de police, s'inscrivent dans ce cadre.

Il y a aussi la problématique de la politique pénitentiaire. Ici, les points à discuter sont, entre autres, les tribunaux d'application des peines, la modification de la loi du 31 mai 1888 établissant la libération conditionnelle dans le système pénal (« loi dite Lejeune ») et les peines alternatives.

Enfin, il y a lieu d'améliorer l'organisation des cours et des tribunaux.

S'agissant de ce dernier objectif, le ministre de la Justice a organisé à la fin du mois de février 1996 une table ronde avec les acteurs de la Justice, à savoir les magistrats, les avocats, les greffiers, les secrétaires et les huissiers de justice, en vue d'identifier les problèmes et de voir comment on pourrait les résoudre.

Il s'agit en outre d'assurer une bonne coordination entre tous les maillons de l'appareil judiciaire afin d'optimaliser le déroulement du procès et d'éviter les grippages. Parmi les aspects à aborder, on peut citer, notamment, la gestion des tribunaux, le recrutement et la formation des magistrats, l'infrastructure, les télécommunications et les conditions de travail.

Cette opération de renouveau ne peut réussir qu'à la condition de résorber l'arriéré judiciaire. On ne pourra pas restaurer la confiance perdue de la population dans la justice tant que les justiciables n'auront pas la certitude que leur cause sera traitée dans un délai raisonnable.

Il y a déjà eu, dans le passé, plusieurs tentatives destinées à décharger les cours et tribunaux. L'élargissement des compétences pénales et civiles des tribunaux de police en matière d'accidents de la circulation en est l'exemple le plus récent. Le tribunal correctionnel étant seul compétent depuis le 1er janvier 1995, pour connaître des appels en matière d'accidents de la circulation, les cours d'appel ne sont plus submergées des litiges de roulage.

Ces initiatives permettaient d'espérer que l'on parviendrait à résorber d'un seul coup l'arrieré qui s'est accumulé dans les cours d'appel.

Il n'en a malheureusement rien été.

Les statistiques susmentionnées montrent que l'arriéré en matière civile ne se résorbe pas; au contraire. La cote d'alerte est dépassée.

D. Lignes directives du projet de loi

Dès son entrée en fonctions, le Gouvernement a considéré la résorption de l'arriéré judiciaire comme prioritaire.

Ainsi, la déclaration gouvernementale prévoit sous le point VI.2, « Modernisation et responsabilisation de la justice », que des mesures doivent être développées dans ce domaine. Cet objectif a été repris dans la note de politique générale pour 1996 et a ensuite été précisé dans la déclaration d'intention commune signée par les acteurs de la justice le 29 février 1996.

Le présent projet de loi est le résultat des travaux du groupe directeur central instauré dans le cadre de cette déclaration d'intention commune et contient plusieurs mesures en vue de résorber l'arriéré judiciaire dans les cours d'appel.

Les mesures proposées se répartissent en quatre parties et peuvent être brièvement résumées comme suit :

1. La résorption de l'arriéré existant

En l'absence des moyens budgétaires indispensables à l'extension du cadre des effectifs, il a été décidé de faire appel à des conseillers suppléants.

Ces conseillers seront notamment appelés à siéger dans des chambres supplémentaires temporaires.

Ces chambres seront initialement constituées pour une durée de trois ans, à définir par arrêté royal.

Ces chambres seront chargées de traiter exclusivement les causes dont on peut considérer qu'elles répondent à la notion d'arriéré.

Il s'agit des causes fixées à une date postérieure de plus d'un an à la date d'entrée en vigueur de la loi ainsi que des causes qui, au moment de cette entrée en vigueur, ont déjà fait l'objet d'une demande de fixation sans toutefois que celle-ci soit intervenue.

Dans son avis, le Conseil d'État estime que la nomination à vie des conseillers suppléants est compatible avec la création de chambres supplémentaires pour une durée limitée.

En effet, le projet prévoit non seulement qu'ils siégeront pendant une durée de trois années dans les chambres supplémentaires, mais également qu'à l'issue de cette période, ils continueront à exercer leurs fonctions en remplacement de magistrats empêchés.

Trois catégories de conseillers suppléants sont prévues : les magistrats admis à la retraite, les avocats qui ont vingt années d'expérience au barreau et les juges suppléants.

Il est prévu que les chambres supplémentaires se composent toujours de trois conseillers, dont au moins deux conseillers suppléants.

2. L'installation d'un magistrat coordinateur et l'obligation pour les assemblées générales d'établir un plan pluriannuel

Ce deuxième paquet de mesures correspond au souhait d'améliorer le management des cours et des tribunaux.

Ainsi, il est prévu que le Roi désigne, parmi les conseillers de chaque cour d'appel, un magistrat coordinateur pour une période de trois ans.

Ce magistrat travaille sous l'autorité et la direction du premier président et sera chargé de l'organisation du travail.

De plus, il doit établir un rapport annuel concernant l'application des mesures prises pour la résorption de l'arriéré judiciaire.

L'instauration de la fonction du magistrat coordinateur s'accompagne d'une extension limitée du cadre professionnel et permanent des cours d'appel avec six conseillers.

Dans le même esprit, les assemblées générales des cours d'appel sont investies d'une plus grande responsabilité.

L'établissement d'un plan pluriannuel obligera les conseillers concernés à examiner le fonctionnement de la cour.

Ils pourront ainsi formuler eux-mêmes des propositions constructives pouvant contribuer à la résorption de l'arriéré au sein de leur ressort.

3. Présidence des cours d'assises

Le projet prévoit que des membres des cours d'appel admis à la retraite pourront dorénavant siéger également comme président d'une cour d'assises.

Les conseillers pourront être ainsi dessaisis de cette lourde charge et poursuivre leurs activités ordinaires.

4. Enfin, il est prévu que les recours formés contre les décisions rendues par le tribunal de commerce sont attribués à une chambre à conseiller unique.

Bien que contestée par certains, cette dernière proposition s'inscrit dans la ligne de la loi du 19 juillet 1985. À l'époque, cette loi a également contribué dans une mesure très importante à une extension considérable de la procédure des chambres uniques au niveau des cours d'appel sans que cela ait porté atteinte à la qualité, comme on aurait pu le craindre.

Face à l'arriéré actuel, cet ensemble de mesures peut constituer une première amorce fondamentale en vue de la résorption de celui-ci.

ll ne faut cependant pas perdre de vue que ce projet vise en premier lieu à redresser à très brève échéance une situation qui s'est dégradée au fil des années. Il va de soi que ceci doit s'inscrire dans le cadre d'un ensemble de solutions proposées en vue d'éliminer définitivement les facteurs qui sont à l'origine de l'arriéré lui-même.

E. Incidence budgétaire des mesures proposées

1. L'extension des cadres des cours d'appel par adjonction de six conseillers effectifs supplémentaires coûtera 18 millions de francs.

2. La réglementation concernant l'indemnité à accorder aux conseillers suppléants sera fixée par arrêté royal. Les conseillers auraient droit à 1 500 francs par heure d'audience.

L'on nommerait quelque 148 conseillers suppléants, dans une proportion d'environ 30 conseillers par cour d'appel. En moyenne, ils siégeraient un jour par semaine.

Le ministre est conscient du fait que la réglementation proposée en ce qui concerne les indemnités peut soulever des critiques. Comme les conseillers suppléants ne seront pas indemnisés pour les services qu'ils rendent en dehors des heures d'audience, il se pourrait fort bien qu'ils aient tendance à tenir des audiences très longues.

Le montant de l'indemnité en question est estimé à 360 000 francs bruts par personne sur une base annuelle, soit à 53 millions de francs par an au total.

F. Conclusion

Comme les mesures prévues par le projet de loi à l'examen devraient, idéalement, entrer en vigueur le 1er septembre 1997, le ministre insiste pour que le projet soit examiné sans délai, de manière à ce que l'on puisse engager la procédure de nomination au plus tôt. Les dispositions existantes, qui doivent être respectées pour qu'une nomination à un poste de conseiller effectif à la cour d'appel soit possible, restent bien entendu applicables telles quelles pour ce qui est des conseillers suppléants.

Cependant la procédure de nomination de ces derniers, prendra beaucoup de temps. Il faut publier les vacances, attendre que les candidatures aient été déposées, mener à son terme la procédure de consultation, etc. Il n'est pas certain, dès lors, que la date précitée puisse être respectée.

La grande question reste bien sûr celle de savoir si les conseillers suppléants créeront, comme on l'espère, la dynamique requise pour pouvoir résorber l'arriéré judiciaire. Les choses dépendront en grande partie de la mesure dans laquelle les avocats en première instance se montreront enclins à s'intégrer dans le nouveau système. Les signaux qui nous parviennent de cette direction sont essentiellement positifs, bien que l'Ordre national ait réagi de façon d'abord hésitante et que des discussions internes aient eu lieu à l'intérieur de certains barreaux. Les avocats se rendent cependant de plus en plus compte que, dans les circonstances actuelles, il y a lieu de réunir toutes les forces pour arriver à résoudre le problème de l'arriéré judiciaire.

II. DISCUSSION GÉNÉRALE

A. Questions et observations des commissaires

Une membre se réjouit de l'introduction de techniques de management dans le monde judiciaire. Dans une démocratie, le pouvoir judiciaire ne peut maintenir sa position que si les cours et tribunaux réussisent à rendre la justice dans un délai raisonnable.

À cet égard, l'on peut comparer la justice à une entreprise multinationale qui contrôle l'action de cinq filiales, en l'espèce les cours d'appel.

Les cinq cours d'appel devraient pouvoir obtenir des résultats relativement similaires. Or, les résultats de la Cour d'appel de Gand sont nettement moins bons que ceux des quatre autres cours d'appel. À quoi cette différence est-elle due ?

Tant que les causes du manque de compétitivité ou de productivité en question n'auront pas été supprimées, la nomination à ladite cour d'un conseiller effectif supplémentaire (article 11) ne pourra pas arranger grand-chose et les justiciables des provinces de Flandre orientale et de Flandre occidentale continueront à être discriminés par rapport aux autres citoyens belges.

L'intervenante trouve gênant que des magistrats de la cour d'appel, qui sont nommés à vie, soient en quelque sorte récompensés, grâce à la nomination de conseillers suppléants, pour avoir contribué à la naissance et au développement de l'arriéré judiciaire.

Il faut savoir que, selon la théorie de l'organisation, si l'on tolère ceux qui ne remplissent pas leur tâche comme il se doit, l'on décourage ceux qui s'en acquittent. Cela engendre un effet de boule de neige qui finit par les amener eux aussi à baisser les bras.

À première vue, les mesures proposées par le ministre semblent être acceptables. L'on ne pourra toutefois les mettre en application que lorsque l'on aura réussi à faire la clarté sur les causes de l'important arriéré judiciaire de la Cour d'appel de Gand. Il ne faut pas que, de par leur statut, les juges puissent être récompensés pour leur manque de productivité éventuel. Il y a lieu de remettre au pas ceux qui dépassent les bornes, si nécessaire.


Une autre intervenante aimerait savoir si les mesures proposées sont fondées sur un plan général de management.

L'on va nommer six conseillers effectifs et 148 conseillers suppléants. Ces nombres ont-il été arrêtés en fonction des budgets disponibles ou sur la base d'un examen de productivité ?

L'on peut se demander, en deuxième lieu, quel impact les nominations auront sur l'arriéré judiciaire. Quels sont les objectifs que l'on poursuit ? L'arriéré judiciaire devra-t-il être résorbé dans trois ans ? Comment fera-t-on pour vérifier si cette condition a été remplie ?


Un autre membre estime qu'à première vue, les mesures proposées sont positives. Il espère dès lors qu'elles pourront aider à résorber l'arriéré judiciaire.

Ce qui frappe en premier lieu, c'est que les membres des cours d'appel admis à la retraite pourront siéger comme président d'une cour d'assises (article 7). On constate actuellement que l'absence temporaire du conseiller qui assume la présidence d'une cour d'assises perturbe le fonctionnement de la chambre de la cour d'appel dont il fait partie.

Bien qu'opposé en principe à la formule de la cour d'assises, l'intervenant pense que cette mesure ne restera pas sans conséquence.

En deuxième lieu, il revient sur l'exposé introductif du ministre, dans lequel celui-ci a déclaré que différentes initiatives avaient déjà été prises dans le passé pour lutter contre l'arriéré judiciaire.

Il est dommage que l'on ne dispose pas de données précises sur les effets de toutes ces réformes.

On a cité comme exemple le plus récent le tribunal de police, qui a été reconverti en tribunal de roulage.

Selon certains conseillers, l'extension des pouvoirs du tribunal de police en matière d'accidents de la circulation n'a toutefois pas influé sur le volume du travail des cours d'appel.

De telles affirmations étonnent quand on sait qu'il a été prouvé statistiquement qu'à la suite de cette extension de compétences, le volume de travail des tribunaux de police s'est considérablement accru.

Une autre initiative a été l'instauration, le 1er janvier 1993, du conseiller unique. À l'époque, cette réforme a été présentée comme la solution à tous les problèmes.

Ici non plus, nous ne disposons pas de données nous permettant de vérifier si les espoirs sont devenus réalité et si la productivité par juge a augmenté.

Il est vrai que le nombre d'affaires a augmenté, mais cela n'explique pas, en soi, l'importance de l'arriéré judiciaire, ni d'ailleurs les différences considérables qui existent entre les diverses cours d'appel. Les causes en sont-elles conjoncturelles et/ou structurelles ? Si elles sont structurelles, il faudra trouver des solutions structurelles.

On en a déjà cité deux. Il y en a encore eu d'autres. Ainsi le nombre des conseillers a-t-il déjà été augmenté deux fois.

La méconnaissance des effets des anciennes mesures légales met en évidence une fois de plus la nécessité d'une évaluation permanente de la loi.

Il y a là un rôle à jouer pour les chefs de corps et le magistrat-coordinateur, qui devraient passer eux-mêmes au crible le fonctionnement de leur cour et déterminer où se situent les points névralgiques.

Le premier président devrait donc agir en manager et exercer la direction effective de sa cour. Quand on connaît l'ambiance qui règne dans certaines cours, il faut bien dire que cela exige un changement de mentalité au sein de celles-ci.

L'intervenant aimerait ensuite obtenir des précisions concernant la double tâche du magistrat-coordinateur, qui est chargé d'organiser le travail et de rédiger et publier un rapport annuel d'activité (article 2).

À propos de sa première tâche, on peut se demander si le magistrat-coordinateur ne risque pas d'entrer en conflit avec le premier président, qui est actuellement responsable de la coordination des travaux, de la répartition des affaires, etc.

À propos de la deuxième tâche, on peut se demander si le rapport d'activité ne fait pas double emploi avec le rapport annuel que l'assemblée générale doit faire concernant les affaires pendantes (article 19).

Il serait souhaitable que le magistrat-coordinateur aussi bien que l'assemblée générale examinent de quelle façon on pourrait améliorer le fonctionnement de la cour et résorber l'arriéré judiciaire.

Enfin, l'intervenant aimerait savoir de quels moyens le magistrat-coordinateur disposera à l'encontre des membres de la cour d'appel qui entraveraient l'exercice des ses tâches.


Un autre membre se rallie aux propos du préopinant. Il énumère ensuite un certain nombre d'autres points nécessitant des éclaircissements.

1. Dans un climat où toute procédure de nomination ne se déroulant pas sur la base de critères objectifs est cataloguée comme politique, la façon dont les 148 conseillers suppléants seront nommés ne manquera pas de susciter des interrogations même s'il n'a pas été question d'ingérence des partis politiques.

2. Un autre problème concerne le statut des conseillers suppléants. Contrairement aux juges suppléants du tribunal de première instance, ils ne pourront plus, en tant que tels, être nommés juges effectifs. Cette mesure semble se justifier pour écarter tout soupçon d'ingérence des partis politiques.

Mais pour la logique, c'est un autre problème. Un conseiller suppléant qui, pendant trois ans, aura siégé dans une chambre supplémentaire de la cour d'appel ne sera pas susceptible d'être nommé juge effectif, alors qu'un avocat nommé juge suppléant au tribunal de première instance avant 1993, mais qui n'avait jamais siégé à ce tribunal, sera, lui, susceptible de l'être.

Bien que l'intervenant ne soit pas partisan de permettre au conseiller suppléant d'obtenir une nomination définitive, tout cela ressemble bien à de la fiction.

Mais le problème fondamental, c'est que les médias risquent de dénoncer le projet de loi à l'examen comme ouvrant toute grande la porte de la magistrature à des conseillers nommés politiquement.

3. L'indemnité à laquelle auront droit les conseillers suppléants, soit 1 500 francs par heure d'audience, pourrait bien soulever des protestations de la part des juges suppléants aux tribunaux de première instance et des juges de paix suppléants, qui, conformément à l'article 379 du Code judiciaire, ne reçoivent une indemnité que s'ils remplissent régulièrement durant un mois au moins les fonctions de magistrat effectif.

Ne risque-t-on pas de voir ces derniers porter la réglementation applicable aux conseillers suppléants devant la Cour d'arbitrage pour cause de violation du principe d'égalité ?

4. Étant donné que, du fait de la création des chambres supplémentaires, il y aura davantage d'arrêts rendus ­ on doit en tout cas s'y attendre ­, on peut se demander s'il y aura suffisamment de greffiers pour assister ces chambres. Chaque chambre supplémentaire disposera-t-elle de son propre greffier ? Le ministre envisage-t-il une extension du cadre des greffiers ?

5. Un des éléments considérés comme étant à l'origine de l'arriéré judiciaire sont les vacances judiciaires. Celles-ci ont acquis, aux yeux de beaucoup une trop grande importance.

L'idée des vacances judiciaires, telles qu'elles sont conçues pratiquement aujourd'hui, est-elle bien conforme au principe de la continuité du service public ?

L'intervenant ne plaide pas pour leur suppression mais il estime qu'il faut les organiser différemment, par exemple en intégrant les conseillers suppléants dans les chambres des vacations.

En conclusion, l'intervenant souligne que, par ses observations, il n'entend nullement minimiser les éléments positifs du projet de loi.


Un autre intervenant déclare que l'arriéré judiciaire pose un sérieux problème dans le fonctionnement de la justice en tant que prestataire de service.

La première intervenante a formulé, à cet égard, des observations très pertinentes.

Avant de proposer des solutions, l'orateur estime opportun de cerner le phénomène de l'arriéré judiciaire avec un maximum de précision. À ce propos, les chiffres avancés par le ministre sont significatifs, mais suscitent en même temps de nombreuses questions.

1. Ainsi, en ce qui concerne la rubrique des affaires pendantes, a-t-on des chiffres très divergents pour les cinq ressorts, et la Cour d'appel de Gand se distingue négativement. La question est de savoir si, dans toutes ces affaires, les parties attendent bien effectivement un traitement définitif de leur cause.

L'intervenant fait un parallèle avec la situation d'un avocat qui doit encore établir un état d'honoraires pour certains dossiers, mais reporte sans cesse cette formalité parce qu'il a reçu une provision suffisante.

2. À supposer qu'aucune affaire nouvelle n'y soit plus introduite à partir du 1er janvier 1997, il faudrait environ 15 ans à la Cour d'appel de Gand pour liquider l'ensemble des dossiers qui y sont actuellement pendants. Pour les Cours d'appel d'Anvers et de Bruxelles, ce délai serait respectivement de 4 et 5 ans.

3. Le nombre des audiences est un autre critère de mesure de l'activité d'une cour d'appel.

Ici aussi, le contraste est flagrant, pour 1996, entre la Cour d'appel de Gand (957), d'une part, et celles d'Anvers (1 566) et de Bruxelles (1 898), d'autre part. Or, le nombre des conseillers attachés à ces juridictions ne diffère pas dans la même mesure, surtout en ce qui concerne Gand et Anvers.

4. Le membre trouve anormal qu'au cours de la période du 1er janvier au 30 juin 1996, aucune cour d'appel n'ait rayé d'office une cause du rôle. L'article 730 du Code judiciaire permet de rayer d'office toutes les causes qui sont inscrites au rôle depuis plus de trois ans et dont les débats n'ont pas été ouverts ou n'ont plus été continués depuis plus de trois ans, à moins qu'une demande de maintien au rôle général ait été adressée.

Une enquête sommaire auprès des barreaux montrerait qu'il y a toujours des affaires qui sont définitivement réglées dès après l'intentement de l'appel.

5. Il serait en outre utile d'examiner le phénomène de l'arriéré judiciaire aux différents niveaux. Ainsi faudrait-il vérifier dans le ressort de la Cour d'appel de Gand, par exemple, si l'arriéré judiciaire des tribunaux de première instance a pris des proportions semblables. Si tel n'était pas le cas, il ne suffirait pas de nommer quelques conseillers supplémentaires pour résoudre le problème ! Il faudrait d'abord, bon gré mal gré, améliorer l'efficience du travail des conseillers effectifs.

Il ne sert à rien de prendre toutes sortes de mesures ­ comme la nomination d'un magistrat-coordinateur ­ sans avoir posé au préalable un diagnostic exact de l'arriéré judiciaire et élaboré un traitement capable d'attaquer le mal à la racine.

6. Enfin, l'intervenant aimerait savoir si l'on ne dispose pas de chiffres sur l'arriéré des cours du travail et de la Cour de cassation. Le ministre recourra-t-il, le cas échéant, à la méthode prévue dans le projet de loi ?

Au vu de ce qui précède, l'intervenant formule quatre objections à l'encontre du projet de loi à l'examen.

a) Jusqu'ici, les ministres de la Justice successifs ont toujours estimé devoir résoudre le problème de l'arriéré judiciaire en nommant de nouveaux conseillers. Ces mesures n'ont cependant pas eu d'effet durable.

Le présent projet de loi recourt une nouvelle fois à cette méthode, à cette différence près que les conseillers suppléants seront moins bien rémunérés.

L'intervenant fait remarquer que, si un chef d'entreprise adoptait la même politique parce que son personnel régulier ne veut ou ne peut pas fournir un travail suffisant, il ne tarderait pas à être arrêté pour occupation de travailleurs au noir.

Pourtant, on ne se demande pas s'il n'y a pas quelque chose qui cloche dans le système.

Il est incontestable que beaucoup de magistrats s'acquittent de leur tâche sans ménager leurs efforts. Ce n'est malheureusement pas vrai pour tous. Le laxisme n'est pas sanctionné : la rémunération est identique pour tous, quelle que soit l'ardeur au travail.

N'y a-t-il pas d'autres sanctions possibles ?

Si, par exemple, lors de la désignation des présidents de chambre. Pourtant, force est de constater ici également que l'on choisit aussi bien des conseillers méritants que des conseillers moins travailleurs.

Selon l'intervenant, faire appel à des volontaires mal rémunérés dans une entreprise malade ­ la justice ­ n'est qu'un palliatif qui n'améliorera pas fondamentalement les choses.

Avant d'accroître le nombre de conseillers, il faut commencer par déterminer pour chaque cour d'appel la charge de travail par magistrat. On pourra alors vérifier quels sont les magistrats et quelles sont les chambres qui atteignent ou n'atteignent pas la norme.

L'augmentation du nombre de conseillers promet d'être un feu de paille comparable à celui des extensions de cadre antérieures.

De plus, cette mesure reviendrait en fait à récompenser les magistrats qui ne se sont pas attaqué résolument à l'augmentation de l'arriéré judiciaire.

b) Une autre objection fondamentale suscitée par le projet concerne la confusion des fonctions. À une époque où la justice essuie le feu des critiques et où nombre de justiciables considèrent invariablement un verdict défavorable comme la preuve ultime de sa corruption, la participation d'avocats à l'exercice du pouvoir judiciaire ne fera qu'attiser ce sentiment de méfiance à l'égard de la justice.

Les avocats sont préparés à défendre les intérêts de leurs clients, et non pour trancher des litiges.

L'impression subsistera toujours que des avocats ne peuvent faire preuve de l'indépendance requise pour exercer une fonction judiciaire. Une telle inversion des rôles va à l'encontre de l'adage de la Cour européenne des droits de l'homme selon lequel « Justice must not only be done, it must also be seen to be done ».

Si ce projet aboutit, un justiciable pourra comparaître en première instance devant un avocat-juge suppléant ­ ce qui ne manquera pas d'éveiller déjà sa méfiance ­, et ensuite, en appel, devant une chambre supplémentaire composée de conseillers suppléants. Son espoir de voir sa cause examinée de manière impartiale et indépendante risque ainsi d'être sérieusement déçu.

c) Les catégories professionnelles entrant en ligne de compte pour la désignation comme conseiller suppléant ­ ou plutôt celles qui n'entrent pas en ligne de compte (par exemple, les professeurs de droit à la retraite) ­ sont un autre point faible du projet (art. 9). N'y a-t-il pas là une violation du principe d'égalité susceptible d'un recours devant la Cour d'arbitrage ?

En outre, deux des trois catégories entrant en ligne de compte pour la nomination en tant que conseiller suppléant n'auront ni l'expérience requise ni le temps voulu pour résorber l'arriéré en trois ans.

d) Une quatrième objection concerne la possibilité de voir un jugement du tribunal du commerce, rendu par trois juges, examiné en appel par un conseiller siégeant seul (art. 5). Une telle procédure met à rude épreuve la confiance du justiciable dans la justice. Le risque de voir ce conseiller jugeant seul suspecté de partialité, fût-ce à tort, n'est pas négligeable.

L'intervenant craint que, même si les chambres auxiliaires parviennent à grignoter quelque peu l'arriéré judiciaire, celui-ci ne reprenne bientôt sa marche en avant.

Il demande donc instamment au ministre de renoncer à la nomination de conseillers suppléants, car cela ne servirait les intérêts ni de la magistrature, ni du justiciable, ni du monde politique.

Ces conseillers auront en effet une étiquette politique. Le fait que certains d'entre eux cumuleront des fonctions au sein de la magistrature et en dehors de celle-ci ébranlera la confiance des citoyens envers la classe politique.


Un autre membre estime qu'il faut faire la distinction entre l'arriéré réel et l'arriéré fictif.

À cet égard, il renvoie à l'article 730 du Code judiciaire, inséré par la loi du 25 novembre 1993 et prévoyant l'omission du rôle d'affaires inscrites au rôle depuis trois ans et dont les débats n'ont pas été ouverts ou n'ont pas été continués depuis plus de trois ans, à moins que les parties demandent le maintien.

Initialement, le projet prévoyait que ces affaires seraient radiées du rôle. Vu qu'un trop grand nombre de parties semblaient ignorer de la procédure, la Commission de la Justice du Sénat a estimé que la radiation constituait une mesure trop radicale préjudiciant trop d'intéressés. Dès lors, elle a préféré que ces affaires soient omises du rôle plutôt qu'être radiées.

L'intervenant souhaite savoir si l'on dispose de statistiques permettant d'apprécier l'effet de cette mesure.

En ce qui concerne la lenteur des magistrats à rendre justice, l'intervenant rappelle l'adage de La Bruyère : « Le devoir des juges est de rendre la justice; leur métier, de la différer. Quelques-uns savent leur devoir, et font leur métier. »


Une autre membre s'interroge elle aussi sur les causes de l'arriéré judiciaire.

Elle partage également le point de vue selon lequel les vacances judiciaires ne peuvent être maintenues dans leur forme actuelle. Ne pouvait-on pas les raccourcir afin de résorber l'arriéré judiciaire ?

Enfin, elle se demande dans quelle mesure la tendance que l'on a dans notre société à interjeter systématiquement appel des décisions judiciaires ne risque pas de réduire à néant les efforts entrepris pour combattre l'arriéré judiciaire. A-t-on étudié la question ?


Selon un autre membre, les interventions précédentes font apparaître clairement que l'arriéré judiciaire était un mal ancien.

Chaque fois que la sonnette d'alarme retentit, on organise un débat parlementaire, mais on ne dispose toujours pas des instruments et des chiffres nécessaires pour mesurer avec précision l'ampleur du phénomène.

On ne peut toutefois réduire le problème à de simples chiffres; il faut également en rechercher les causes sous-jacentes.

1.En ce qui concerne le premier aspect, on a décidé lors des extensions de cadre précédentes de tenir compte de la production, c'est-à-dire du nombre de jugements ou d'arrêts prononcés par un magistrat.

Une telle méthode d'évaluation est critiquable, parce que certains juges qualifient de jugement ou d'arrêt, toute décision prise par eux, comme par exemple celle de remettre ou de rouvrir les débats. Dans ces conditions, les chiffres ne reflètent pas la réalité.

Aussi l'intervenant aimerait-il savoir is les statistiques fournies par le ministre ont été suffisamment épurées. Par exemple, lorsque les parties prennent un arrangement à l'amiable, souvent l'affaire n'est pas rayée du rôle parce qu'il faut d'abord pour cela un arrêt de radiation. On peut difficilement considérer ce genre d'affaires comme de l'arriéré.

Comme indiqué ci-dessus, on a tenté d'épurer l'arriéré au moyen de l'article 730 du Code judiciaire.

L'expérience montre que des affaires ont été rayées du rôle, mais aucune recherche n'a été effectuée à propos des ces dans lesquels les parties ont demandé que leur affaire soit maintenue au rôle.

Beaucoup d'avocats qui ont reçu une lettre du premier président d'une cour d'appel demandant si leurs « dossiers dormants » pouvaient être retirés du rôle se sont contentés d'en demander le maintien, sans vérifier s'il était possible ou non de clore le dossier.

Il n'est donc pas correct de montrer du doigt la seule magistrature. Le barreau ne peut être complètement disculpé.

L'article 730 du Code judiciaire n'est toutefois qu'un des nombreux moyens mis en oeuvre ­ apparemment en vain ­ ces dernières années pour renverser la tendance.

2. Jusqu'à présent, le courage a manqué pour faire réaliser un audit externe qui analyserait le fonctionnement de la justice et le phénomène de l'arriéré judiciaire.

À cette occasion, il conviendrait de prendre en compte tous les facteurs, comme par exemple le fait que la justice est mal logée ou se trouve à l'étroit, avec la conséquence qu'il n'est pas possible d'augmenter le nombre des audiences, ou encore le fait que, par suite de l'informatisation, le personnel du greffe est davantage disponible, etc.

Vu l'expérience passée, il serait naïf de croire que la nomination d'un certain nombre de conseillers suppléants permettra de résoudre le problème de l'arriéré judiciaire.

D'où la nécessité d'une « radioscopie » externe du phénomène.

Les critiques adressées actuellement à l'appareil judiciaire concernent principalement le secteur pénal, où l'arriéré n'est pas tellement important. Le problème de l'arriéré se situe essentiellement au niveau de la procédure civile.

Le ressentiment que de nombreuses personnes éprouvent par rapport au cheminement judiciaire de litiges qui ont trait à leur vie de tous les jours pourrait fort bien déclencher une deuxième vague de protestations.

Les gens comprennent que toute l'attention se porte pour l'instant sur le problème du droit pénal sensu lato, mais ils n'admettent plus que les procès relatifs à leur loyer, à leur pension alimentaire, à leur divorce, etc., traînent en longueur des années durant.

Aussi ne suffit-il pas de prendre des mesures structurelles; il faut provoquer un changement de mentalité chez les acteurs de la justice.

En ce qui concerne la création d'un corps de conseillers suppléants, l'intervenant rappelle que les plus hauts magistrats se sont opposés à un système qui les ferait siéger avec des conseillers suppléants dans des chambres supplémentaires.

On peut se demander comment se passera la collaboration entre ces deux catégories de magistrats. La disposition selon laquelle les chambres supplémentaires sont composées d'au moins deux conseillers suppléants (art. 4) est déjà interprétée par les conseillers effectifs comme leur conférant la présidence de celles-ci.

De plus, il est à craindre que le conseiller effectif-président ne charge les deux conseillers suppléants de la préparation de toutes les affaires et ne s'arroge pour sa part une fonction de supervision.

Une autre question est celle de savoir quand les chambres supplémentaires siégeront. Si c'est l'après-midi, les conseillers suppléants qui ont d'autres occupations professionnelles ne seront pas toujours disponibles.

De plus, ils ne seront que modérément rétribués pour leurs services. Encore que leur indemnité de 1 500 francs par heure d'audience soit assez élevée par rapport aux 250 ou 300 francs par audience alloués aux magistrats, avocats et autres personnes qui siègent dans les nombreuses commissions travaillant pour la justice. Le danger de voir l'insatisfaction de ceux-ci déclencher un effet domino n'a rien d'illusoire.

L'intervenant craint que les conseillers suppléants ne soient contraints de bouleverser leur horaire de travail pour s'acquitter pendant trois ans d'un devoir civique.

Il ne peut marquer son accord sur le projet de loi à l'examen qu'à une seule condition.

La nomination des conseillers suppléants doit être assortie d'une obligation de résultat, de manière à pouvoir prouver que la mesure proposée a été suivie d'effet. Les conseillers effectifs et les conseillers suppléants seront ainsi placés devant leurs responsabilités.

En outre, on doit constater que les juges de paix parviennent, eux, avec l'aide des juges de paix suppléants, à faire face au flux des affaires et à résorber un arriéré éventuel.

Les cours d'appel devraient être capables d'en faire autant. L'intervenant insiste dès lors pour que l'on prévoie une obligation de résultats.

Enfin, l'intervenant déclare qu'il s'est toujours opposé à l'expédient consistant à relever systématiquement le plafond du dernier ressort pour endiguer le flot des procédures d'appel.

C'est oublier plutôt vite que ces montants, 50 000 francs pour les demandes soumises au juge de paix et 75 000 francs pour celles soumises au tribunal de première instance et au tribunal de commerce (article 617 du Code judiciaire), représentent pour de nombreuses personnes deux mois de revenus. Il est regrettable que les personnes disposant de tels revenus ne puissent pas aller en appel contre un jugement statuant sur une demande dont le montant se situe en dessous des seuils précités.

Il y a donc lieu d'instaurer d'urgence ce que l'on appelle en droit anglo-saxon le « leave to appeal ».

Il faudrait mettre en place un système empêchant que l'on interjette appel pour faire traîner une affaire en longueur ou pour faire pression sur la partie adverse. Certaines entreprises adoptent cette tactique pour s'assurer une meilleure base de négociations vis-à-vis de la partie adverse qui a obtenu un jugement favorable en première instance. Si elle parvient a ses fins, l'entreprise renonce alors à poursuivre la procédure.

Le « leave to appeal » permet d'éviter ce genre de pratiques.

Actuellement, on doit déjà demander l'avis d'un avocat à la Cour de cassation sur la recevabilité et le bien-fondé d'un éventuel pourvoi. Pourquoi ne généraliserait-on pas ce système, mutatis mutandis, au niveau des cours d'appel ?


Un autre membre fait sienne la critique émise par les intervenants précédents selon laquelle le projet de loi à l'examen entend résoudre le problème de l'arriéré judiciaire sans s'attacher à en connaître les causes.

Pour illustrer l'ampleur prise par l'arriéré judiciaire, il se réfère à la situation de la Cour d'appel de Bruxelles, où les parties se voient fixer des audiences en l'an 2000. À la Cour d'appel de Liège, le greffe répond qu'il est vain d'insister pour obtenir une fixation et qu'il vaut mieux patienter quelques années.

Un tel retard, qui se rencontre peu ou prou dans toutes les cours d'appel, équivaut en réalité à un déni de justice.

On peut se demander si les mesures contenues dans le projet de loi contribueront à résorber l'arriéré judiciaire.

L'intervenant estime que le fait de recourir à des conseillers suppléants est une solution de facilité. Une formule consistant à faire trancher les affaires en degré d'appel par des juges non professionnels n'est pas tenable à terme.

Tout d'abord, les chambres supplémentaires ont un caractère provisoire. En vertu de l'article 106bis du Code judiciaire proposé, elles sont créées pour une durée limitée, qui est fixée par le Roi (article 4).

Le membre s'étonne que cette durée ne soit pas fixée par la loi, mais par le Roi.

Ensuite se pose le problème des conseillers suppléants qui siégeront effectivement dans ces chambres supplémentaires pendant la durée fixée par le Roi.

Le membre n'est pas partisan d'une solution dans laquelle les affaires sont traitées en degré d'appel par des juges non professionnels. Qui peut garantir que la durée de trois ans proposée par le ministre ne sera pas prolongée et que les chambres supplémentaires ne deviendront pas permanentes ?

L'intervenant estime par conséquent que la méthode préconisée dans le projet n'est pas adéquate pour atteindre l'objectif que l'on s'est fixé.

En outre, le projet prévoit une série de dispositions qu'il estime inopportunes.

Premièrement, il est inacceptable que les chambres supplémentaires se composent exclusivement de conseillers suppléants. Il annonce qu'il déposera un amendement visant à faire présider ces chambres par un conseiller effectif. Une telle composition garantirait la qualité et l'unité de la jurisprudence.

Deuxièmement, le membre émet de sérieuses réserves concernant l'article 120, premier alinéa, proposé du Code judiciaire, en vertu duquel les membres de la cour d'appel admis à la retraite, qui n'ont pas encore atteint l'âge de 70 ans, peuvent présider la cour d'assises (article 7).

Cet article néglige assez allégrement le fait que les procès d'assises sont très lourds, qu'ils durent longtemps et qu'ils requièrent une connaissance approfondie du dossier. Le président doit faire preuve d'une vigilance constante et mener le procès à bon port. Certains magistrats s'en tirent très bien, d'autres non.

L'intervenant voit mal comment des magistrats admis à la retraite, qui ne peuvent plus trancher des litiges civils ou correctionnels, seraient encore en état, entre 67 et 70 ans, de diriger de manière satisfaisante un procès d'assises.

Il est facile de répondre à l'argument du ministre selon lequel une chambre ordinaire de la cour d'appel est désorganisée lorsqu'un de ses membres doit siéger à la cour d'assises. Pourquoi ne pourrait-on pas remédier à l'absence provisoire d'un juge effectif dans la chambre en question en y faisant siéger un conseiller suppléant ?

Troisièmement, l'intervenant ne comprend pas pourquoi la nomination des conseillers suppléants devrait suivre la procédure pesante prévue à l'article 151 de la Constitution, qui dispose que les conseillers sont nommés par le Roi sur deux listes doubles, présentées l'une par la cour d'appel concernée et l'autre par le conseil provincial.

Il préfère une procédure souple, dans laquelle les conseillers suppléants sont nommés par le Roi sur l'avis du premier président de la cour d'appel et du bâtonnier.

Indépendamment de son opposition au présent projet de loi, l'intervenant estime qu'il faudrait au moins le corriger sur les trois points en question.


Un autre intervenant constate que le projet de loi à l'examen est contesté sous divers angles. Les critiques sont politiques, mais aussi inspirées par des objections d'ordre pratique et social.

L'intervenant estime que le projet n'est acceptable que comme mesure transitoire valable pour une période de trois ans, éventuellement renouvelable, pour autant qu'il s'accompagne de remèdes structurels.

L'un d'eux pourrait consister à supprimer la cour d'assises. De plus en plus de voix s'élèvent d'ailleurs en faveur de cette suppression, au-delà des frontières des partis.

Le membre partage l'opinion selon laquelle la chambre d'une cour d'appel est décapitée lorsqu'un de ses conseillers doit présider une cour d'assises.

L'attribution de cette présidence à un magistrat admis à la retraite et ayant de 67 à 70 ans suscite à juste titre un grand scepticisme.

Si, dans des procès d'assises, des magistrats retraités commettaient trop souvent une bévue et que ceci se traduisait par des pourvois en cassation, les médias ne manqueraient pas d'en tenir le ministre pour responsable.

D'autre part, il faudra réexaminer le problème de la carrière plane des magistrats.

Il convient de revaloriser le statut des magistrats des juridictions de première instance pour éviter qu'ils ne briguent une promotion à la cour d'appel pour des raisons purement financières. La qualité de la jurisprudence en serait améliorée, ce qui, par voie de conséquence, freinerait le flot des recours.

Troisièmement, il faut faire avancer le débat sur l'exécution par provision des jugements civils. Il s'agit de trouver le moyen d'empêcher que l'on utilise l'appel comme manoeuvre dilatoire ou pour faire pression. L'on évite ainsi que les affaires ne traînent en longueur pour des raisons qui n'en sont pas.

Quatrièmement, il faudrait imposer aux conseillers suppléants une obligation de résultat, qui consisterait à résorber l'arriéré judiciaire dans un certain délai. Pourquoi ne pourrait-on pas également imposer une telle obligation aux conseillers effectifs ?

Selon l'intervenant, l'argument selon lequel un quota nuirait à la qualité des jugements n'est pas tout à fait pertinent. Comme les diverses cours d'appel sont confrontées grosso modo aux mêmes types de problèmes, on pourrait s'attendre à ce qu'elles traitent proportionnellement à peu près le même nombre d'affaires. Ce n'est pas le cas. Les différences de rendement entre les différentes cours d'appel sont disproportionnées. Il faut donc s'efforcer d'objectiver le rendement escompté des diverses cours d'appel. Il s'agit de fixer une norme à laquelle chaque cour d'appel devra tendre. À un nombre d'affaires nouvelles égal devrait donc correspondre un nombre d'affaires jugées égal.

Cinquièmement, il faudrait examiner si, par analogie avec le « leave to appeal » anglo-saxon, on pourrait soumettre l'appel à un seuil procédural.

L'intervenant émet toutefois une réserve par rapport à la proposition de transposer au niveau de la cour d'appel le système d'avis préalable au pourvoi en cassation. De tels avis coûtent cher et rendraient l'accès à la justice trop difficile pour les justiciables peu fortunés. Du point de vue social, l'on ne peut trop relever le seuil à franchir pour pouvoir interjeter appel.

Enfin, l'intervenant s'arrête un instant à l'article 109ter proposé du Code judiciaire, aux termes duquel les chambres supplémentaires s'occuperont uniquement des causes qui se situent dans le cadre de l'arriéré judiciaire (article 6).

L'intervenant estime qu'il y aura ainsi une discrimination entre les appels pendants, qui seront examinés par les chambres supplémentaires, et les nouveaux appels, qui le seront par les chambres ordinaires.

Il estime qu'il convient de répartir l'ensemble des affaires entre l'ensemble des chambres ordinaires et des chambres supplémentaires.


Un autre membre fait remarquer que le projet de loi à l'examen soulève bien des questions.

La première concerne la déclaration que le ministre a faite dans le cadre de son exposé introductif, selon laquelle la Commission nationale des magistrats a été consultée, en sa qualité de membre du groupe directeur central, au sujet du projet et a même donné un avis favorable.

L'intervenant aimerait savoir si l'on s'est également concerté avec d'autres organisations qui ne sont pas nécessairement liées aux structures existantes, comme l'association syndicale des magistrats, ou avec les chefs de corps des cours d'appel.

Ces derniers ont vivement critiqué les intentions du ministre à l'annonce du dépôt du projet à l'examen. Le ministre a-t-il encore eu des contacts avec eux depuis ?

Quant au fond, l'intervenant souhaite attirer l'attention sur trois points, à savoir le statut des conseillers suppléants (1), le rôle des magistrats retraités (2) et l'examen par un conseiller unique des appels de jugements du tribunal de commerce (3).

1. L'intervenant continue à avoir des doutes à propos de la constitutionnalité du projet, en particulier en ce qui concerne le du statut des conseillers suppléants.

Ce sont surtout les articles 146 (interdiction de créer des commissions ou des tribunaux extraordinaires, sous quelque dénomination que ce soit), 151 (concernant la procédure de nomination) et 152 (« les juges sont nommés à vie ») de la Constitution qui soulèvent des problèmes.

L'intervenant estime que le ministre n'a toujours pas donné de réponse satisfaisante à la question de savoir si son projet ne viole pas ou, du moins, ne tourne pas lesdites dispositions constitutionnelles.

La deuxième question qui se pose, selon l'intervenant, vient de ce que le projet va ­ comme il le pense ­ carrément à l'encontre de « l'accord de la Saint-Nicolas » et des discussions qui ont lieu actuellement dans le cadre des « Assises pour une nouvelle démocratie ».

Alors que l'accord de la Saint-Nicolas plaide pour une meilleure formation des magistrats, la loi en projet permettra de nommer des conseillers suppléants qui n'auront reçu aucune formation de magistrat. L'on est forcé d'admettre que le projet mine les objectifs de spécialisation et de meilleure formation des magistrats qui ont été définis par le Gouvernement, ce qui ne signifie pas nécessairement que l'on ait des doutes pour ce qui est de la qualité desdits juristes.

Comme les partis politiques sont tous à la recherche, maintenant, d'une nouvelle culture politique et, en particulier, qu'ils font grand cas de la dépolitisation de la magistrature, le projet vient à contre-courant.

Il faudra continuer à passer par les conseils provinciaux pour nommer les conseillers suppléants. Tant que l'article 151 de la Constitution n'aura pas été modifié, la nomination de ces conseillers sera considérée comme relevant de manoeuvres politiques. Aussi peut-on deviner quelle sera la réaction de l'opinion publique à un train de nominations de 148 conseillers.

La troisième question vient de ce que les avocats qui seront nommés conseiller suppléant pourront être confrontés à un conflit d'intérêts.

Comment des avocats qui envisagent le droit sous l'angle de la défense de leur client arriveront-ils à se mettre régulièrement dans la peau d'un juge pendant trois ans ou plus ? Les justiciables se retrouveront face à des juristes qui seront juge ou avocat selon le jour. Pareille métamorphose sème la confusion dans le public, alors que nous sommes arrivés à un point où la justice a un grand besoin de transparence.

Il peut arriver que des avocats qui plaident pour de grandes compagnies d'assurance siègent comme conseiller suppléant dans des procès que des assurés ont intentés contre leur assureur.

Ces conseillers pourront-ils résister à la tentation de s'éloigner de la jurisprudence établie ? Ne vont-ils pas accorder une place prépondérante aux points de vue des assureurs dans le cadre de leur jurisprudence ?

La question du respect du secret professionnel pose un autre problème.

Enfin, l'indemnité qui serait accordée aux conseillers suppléants, au prorata de 1 500 francs l'heure d'audience, ne garantit nullement que les candidats qui seront attirés par la fonction seront les meilleurs.

Les avocats qui se contenteront de cette indemnité peu élevée seront-ils les meilleurs candidats ? Si oui, consacreront-ils suffisamment de temps à la préparation des dossiers ou auront-ils plutôt tendance à considérer le titre de conseiller suppléant comme une carte de visite ?

2. L'intervenant partage l'inquiétude formulée par plusieurs membres en ce qui concerne la disposition qui permet à des magistrats retraités de présider des procès d'assises.

Peut-on s'imaginer quelle serait la réaction de l'opinion publique, dans l'hypothèse où Dutroux et Nihoul seraient renvoyés devant la Cour d'assises, si les débats y étaient conduits par un magistrat retraité de 69 ans ?

Une telle situation ne pourrait-elle pas affecter l'image d'une justice performante, proche de la population ?

L'intervenant souligne qu'il n'entend aucunement, par cette remarque, mettre en doute les qualités des magistrats retraités. Certains d'entre eux sont d'ailleurs bien plus dynamiques que beaucoup de leurs jeunes collègues.

3. Le fait d'attribuer l'examen d'appels de décisions du tribunal de commerce à un juge unique porte atteinte au système du double ressort.

En effet, la compétence de la juridiction d'appel et le caractère collégial de ce système en assurent la solidité.

Or, le projet porte atteinte à ces deux caractéristiques.

L'intervenant souligne que, dans plusieurs cours, et notamment à Liège, il n'y a aucun conseiller qui a siégé dans un tribunal de commerce.

Une situation dans laquelle un conseiller unique doit prononcer en appel dans des matières commerciales n'apporte donc rien de positif au niveau de la jurisprudence.

Un dernier intervenant demande pourquoi l'on a fixé à trois ans la période dans laquelle les chambres supplémentaires doivent résorber l'arriéré. Ce délai n'est-il pas trop court (cf. l'arriéré de la Cour d'appel de Gand) ?

B. Réponses du ministre de la Justice et répliques des membres

Plusieurs commissaires se sont montrés plutôt réservés à l'égard de la loi en projet, estimant qu'il s'agissait d'une mesure isolée qui ne changerait rien aux causes de l'arriéré judiciaire.

Le ministre souligne qu'il ne faut pas considérer ce projet comme une mesure isolée qui permettra de résorber l'arriéré judiciaire dans un délai relativement court.

Il a déjà signalé, dans son exposé introductif, que la réforme proposée ne pouvait réussir qu'à la condition d'être intégrée dans un cadre plus large.

Le ministre aborde ensuite certains points qu'il souhaite approfondir.

1. La nomination des conseillers suppléants

Le ministre déclare que, peu de temps après son entrée en fonctions, il s'est entretenu de la problématique de l'arriéré judiciaire avec M. Krings, procureur général émérite près la Cour de cassation.

M. Krings avait suggéré plusieurs pistes pour résorber cet arriéré. Seule celle prévoyant de créer des chambres supplémentaires temporaires s'est révélée praticable et a donc inspiré le présent projet de loi.

Le ministre admet que l'on puisse présenter la nomination de 148 conseillers suppléants comme un train de nominations politiques.

C'est la raison pour laquelle on avait initialement prévu une procédure spécifique permettant, après avoir recueilli les avis nécessaires, de nommer rapidement les conseillers en question.

On a objecté que cette manière de faire aboutirait à créer une catégorie distincte de juges. Il ne restait dès lors plus d'autre choix que d'appliquer la procédure définie à l'article 151 de la Constitution, même si celle-ci est aujourd'hui violemment contestée.

C'est précisément pour cette raison que le Gouvernement a déposé, à la Chambre des représentants, une proposition de révision de cet article de la Constitution (doc. Chambre, 1996-1997, nº 740/1).

Si la Chambre et le Sénat parviennent à mener à bien rapidement l'examen de cette proposition, les conseillers suppléants pourront être nommés, comme les magistrats effectifs, suivant la nouvelle procédure objectivée.

Le ministre est toutefois convaincu que, s'il faut nommer les conseillers suppléants suivant la procédure en vigueur, il doit être possible de réaliser en une opération unique un choix responsable en se basant sur les présentations des conseils provinciaux et des assemblées générales des cours d'appels.

À condition de combiner cette procédure avec des avis des chefs de corps et des bâtonniers, la nomination des conseillers suppléants pourrait se faire d'une manière correcte et objective. On démontrerait ainsi qu'il ne s'agit pas d'un train de nominations dans lequel chaque parti politique traditionnel aurait son quota réservé.

L'intervenant n'ignore pas qu'en raison de l'intervention des conseils provinciaux, on reprochera aux nominations d'avoir une coloration politique. Il faudra donc veiller à informer correctement le monde extérieur sur la procédure suivie.

Un membre estime qu'il serait très dangereux de soumettre la candidature des 148 conseillers en cause aux conseils provinciaux; il doute que cette solution soit bien accueillie, que ce soit par les professionnels ou par l'opinion publique.

Le ministre répète que, pour parer à d'éventuelles critiques de constitutionnalité, on a opté pour la procédure définie à l'article 151 de la Constitution, en espérant que cet article serait modifié le plus rapidement possible.

Le ministre expose ensuite les lignes de force de la proposition de révision de l'article 151 de la Constitution.

Le système proposé vise à garantir la qualité et l'objectivité des nominations. Simultanément, l'on insiste sur les responsabilités qui seront données aux chefs de corps.

L'un des points essentiels de la réforme est que tous les magistrats de première instance et d'appel feront à l'avenir l'objet d'une évaluation permanente par le chef de corps.

La périodicité de l'évaluation doit encore être fixée. Les résultats de cette évaluation auront des conséquences sur le plan du statut des intéressés. Une absence de rendement pourra entraîner des conséquences financières.

L'évaluation permanente ira de pair avec les avis des autorités judiciaires et des tiers, comme le bâtonnier, qui seront rendus au moment de la nomination ou de la promotion.

De plus, un profil sera établi pour les mandats de chefs de corps.

Tous ces éléments seront rassemblés par le ministère de la Justice et seront transmis au comité de nomination et de promotion, ce qui permettra de rendre leur sélection plus objective.

Par ailleurs, les mandats pour les chefs de corps deviendront temporaires. Leur renouvellement dépendra entre autres d'un rapport d'activités, qui sera soumis au comité précité, indiquant leur travail accompli.

Le Conseil supérieur de la Justice aura son rôle à jouer en la matière. Il ne s'agira pas seulement d'une plate-forme, où l'on échange des réflexions, mais aussi d'un lieu où l'on débattra du contrôle interne et externe à exercer.

Dans ce but, le Conseil supérieur recevra communication de plusieurs informations, comme des données statistiques (par exemple celles du service de la politique criminelle qui sortira prochainement les chiffres des condamnations par ressort).

De plus, des propositions sont faites, entre autres par la magistrature, pour rendre le système disciplinaire plus efficace.

En ce qui concerne l'entrée en vigueur de la loi en projet, un membre constate que le ministre se réserve le droit de fixer le moment où les chambres nouvelles composées de conseillers suppléants entreront en activité.

Ne serait-il pas préférable de lier également la nomination des conseillers suppléants à la loi d'exécution de l'article 151, d'autant plus que les conseils provinciaux refusent actuellement de faire des propositions ?

Il ne faut pas négliger le risque que la Cour de cassation fasse état d'une multiplication des pourvois, liée à la qualité déficiente des décisions rendues par les chambres supplémentaires composées de conseillers suppléants.

Le ministre se demande s'il n'est pas préférable d'inscrire le nouveau système dans le cadre de la législation actuelle.

On pourrait par exemple, en accord avec les premiers présidents des cours d'appel, et avec les présidents des conseils provinciaux, communiquer aux comités d'avis les listes de candidats, en vue d'un avis informel sur chaque candidat.

En ce qui concerne le système disciplinaire et le privilège de juridiction des magistrats, le ministre répond que ces règles s'appliquent aux conseillers suppléants, comme l'ensemble des autres règles générales applicables aux magistrats.

2. La définition de l'arriéré judiciaire

Le projet de loi part du principe que les chambres supplémentaires ne traiteront que les affaires répondant à la définition légale de l'arriéré judiciaire.

Il s'agira, conformément à l'article 109ter , premier alinéa, du Code judiciaire, proposé, des affaires pour lesquelles une fixation a été accordée pour une date éloignée de plus d'un an de la date de mise en vigueur dudit article ou pour lesquelles aucune fixation n'a été accordée alors qu'elle a été demandée (article 6).

La loi en projet isole donc un groupe d'affaires et exclut toute possibilité d'en ajouter d'autres. Les chambres supplémentaires de chaque cour d'appel sauront exactement combien d'affaires elles auront à traiter. Et le magistrat-coordinateur ainsi que les conseillers suppléants pourront ainsi évaluer aisément le résultat de leur travail.

D'autre part, les parties ne seront pas contraintes d'accepter que leur affaire soit traitée par une chambre supplémentaire. Si elles souhaitent comparaître devant une chambre ordinaire composée de trois conseillers ou d'un conseiller unique, elles pourront, en vertu de l'article 109ter , alinéa 2, adresser une demande dans ce sens au premier président. Mais, dans ce cas, elles choisiront la voie d'une justice plus lente.

3. La durée des chambres supplémentaires

Le ministre confirme que les chambres supplémentaires ne siégeront que pendant trois ans. En optant pour une extinction après trois ans, le ministre entend souligner le caractère symbolique de la mesure proposée. Ce faisant, il espère placer les chambres supplémentaires et les conseillers suppléants, qui sont nommés à vie, devant le défi de mener à bien une mission spéciale dans un délai déterminé.

Les conseillers suppléants sont donc nommés à vie, mais les chambres supplémentaires ne sont installées que pour une période de trois ans.

Un membre demande, compte tenu du fait que les chambres supplémentaires pourraient, non pas être créées pour une durée prédéterminée de trois ans, mais voir leur existence prolongée de façon indéterminée par le Roi, si ces chambres ne risquent pas d'apparaître comme inconstitutionnelles et illégales.

En effet, on créerait ainsi une catégorie de magistrats qui exerceraient leurs fonctions comme n'importe quel magistrat, mais sans répondre aux conditions, notamment de nomination, requises pour la magistrature.

L'intervenant suivant souhaite savoir s'il est exact que l'existence des chambres supplémentaires ne pourra être prolongée, au terme de la période de trois ans, que par une disposition légale, c'est-à-dire après que le Parlement aura été informé sur l'évolution de la situation et aura reçu communication de nouvelles données chiffrées.

Le ministre déclare qu'il n'est pas partisan de la fixation d'un délai de trois ans dans la loi; il lui paraît préférable de prévoir un système plus souple, bien que le projet originel ait prévu un tel délai, ce qui avait d'ailleurs suscité des remarques de la part du Conseil d'État. La durée des chambres supplémentaires sera dès lors fixée par arrêté royal.

Il accepte cependant le principe selon lequel la prorogation ne se fera qu'après une évaluation du fonctionnement des chambres supplémentaires, au terme d'une période de trois ans, évaluation à laquelle le Parlement serait associé.

Il lui paraît cependant excessif d'exiger que ce prolongement soit déterminé par une loi.

4. Le magistrat-coordinateur et la composition des chambres supplémentaires

Le rôle du magistrat-coordinateur sera essentiel.

Beaucoup de problèmes devront être rencontrés : de quelle façon les conseillers suppléants seront-ils répartis entre différentes chambres, comment répartir ce qui est considéré comme l'arriéré entre les conseillers suppléants et selon quels critères, quand ces affaires seront-elles fixées, les chambres seront-elles exclusivement composées de conseillers suppléants, ou comporteront-elles aussi un magistrat professionnel, etc. ?

Sur ce dernier point, les idées ont évolué : alors qu'au départ, les premiers présidents des cours d'appel étaient très opposés à des chambres composées exclusivement de conseillers suppléants, plusieurs d'entre eux arrivent aujourd'hui à la conclusion que cette formule est sans doute la meilleure.

C'est pourquoi il est préférable de laisser aux magistrats-coordinateurs et aux premiers présidents une certaine liberté d'organiser les choses de la façon qu'ils jugent la meilleure.

La question se pose de savoir si les chambres composées de trois conseillers suppléants ne seront pas considérées comme des chambres « de second ordre ».

Le ministre estime que, si cette tentation n'est pas exclue, le système proposé doit cependant permettre de regrouper, par chambre, les conseillers suppléants spécialisés dans une matière déterminée (ex : le droit des faillites, le droit fiscal, ...).

Personnellement, le ministre donne la préférence à des chambres composées de façon homogène, car il craint des discordances, au sein d'une même chambre, entre les conseillers suppléants et le magistrat professionnel, en raison notamment du fait que ce dernier aura tendance à continuer à travailler comme par le passé.

Il faudra veiller à ce que les conseillers suppléants puissent travailler dans des matières qui leur sont bien connues, et à ce qu'ils soient saisis de dossiers qui ne relèvent pas de leur arrondissement, afin d'éviter des conflits d'intérêts.

Le projet à l'examen est, comme il a déjà été souligné, davantage un projet volontariste qu'un projet structurel, ce qui ne signifie pas que le ministre soit indifférent aux problèmes structurels existant dans le monde judiciaire.

Le projet ne constitue que l'un des volets de l'ensemble des réformes actuellement en préparation.

Un membre demande si le magistrat-coordinateur exerce cette fonction pour toute la pratique des cours, ou uniquement pour les chambres supplémentaires.

Le ministre répond qu'au début, le magistrat-coordinateur était conçu comme une institution temporaire, liée au travail d'apurement de l'arriéré et aux chambres supplémentaires créées à cet effet. En définitive, son mandat sera plus général. Il aura non seulement pour tâche de suivre le fonctionnement des chambres supplémentaires, mais aussi, si le système fonctionne bien, d'exercer un contrôle sur la totalité des activités d'organisation de la cour d'appel.

On pourrait aussi, dans l'avenir, envisager d'étendre sa compétence de contrôle aux tribunaux de première instance.

Le précédent intervenant rappelle à cet égard que le ministre évoque depuis longtemps la nécessité d'introduire des experts en gestion dans les tribunaux.

Le ministre renvoie à l'article 2 du projet, qui décrit la mission du magistrat-coordinateur en termes généraux. Cette disposition doit être lue conjointement avec l'article 10, qui concerne la nomination de ce magistrat, et qui exige une formation spécialisée en matière de management.

Le précédent intervenant observe que l'acquisition d'une telle formation prendra un certain temps.

Le ministre répond que certains magistrats ont déjà suivi une formation spécialisée en la matière. La formation permanente prévoit en effet des cours de management, auxquels les magistrats peuvent s'inscrire.

Le précédent intervenant souligne l'importance de la réforme projetée qui doit être examinée avec le plus grand soin. Il s'agit du premier mécanisme institutionnel qui casse la structure traditionnelle de la justice.

Le ministre rappelle que, d'après le projet, c'est le Roi qui désigne, parmi les conseillers présentés par l'assemblée générale, un magistrat-coordinateur pour une période de trois ans.

Un autre membre interroge le ministre sur le rapport d'activités, qui constitue l'une des obligations à remplir par le magistrat-coordinateur.

Aucune disposition ne précise de quelle manière ce rapport doit être réalisé.

Celui-ci peut être conçu de bien des manières différentes : on peut énumérer une série d'affaires traitées, ou orienter le rapport de façon à permettre de vérifier si l'on arrive à résorber l'arriéré judiciaire. Le texte de la loi ne devrait-il pas être plus précis à cet égard ?

Un autre intervenant rappelle qu'il existe à l'heure actuelle un coordinateur « volontaire » à la Cour d'appel de Bruxelles. Cette expérience paraît positive. Il semble donc possible de reconnaître à chacun une sphère d'activités spécifiques. Le ministre a-t-il reçu un rapport à ce sujet ? Est-il informé au sujet du travail accompli par ce magistrat ?

Le ministre répond par l'affirmative (voir la note nº 2 en annexe).

Le même membre partage également l'avis d'un préopinant quant à la nécessité de décrire de façon plus précise le contenu du rapport annuel d'activités du magistrat-coordinateur, et de relier ce rapport au contenu de l'article 4 du projet, en prévoyant qu'il sera soumis au Parlement.

L'article 4 pourrait fixer en principe à trois ans la durée de l'existence des chambres supplémentaires, cette durée étant, le cas échéant, prolongée, au vu du rapport d'activités.

Le ministre répond que l'on s'est inspiré du texte prévu dans le projet sur le Conseil d'État, où l'on a prévu d'instituer un gestionnaire administratif, dont la fonction est similaire à celle du magistrat-coordinateur. Le ministre ajoute qu'il est disposé à apporter, dans le rapport ou dans le projet, les précisions demandées.

L'intervenant suivant fait observer que le coordinateur prévu au Conseil d'État n'est pas un magistrat, mais dispose d'un statut sui generis. Le membre se demande en outre s'il ne faudrait pas préciser davantage les relations entre le magistrat-coordinateur et le premier président de la cour d'appel. L'intervenant a en effet le sentiment que beaucoup de tâches dévolues au second seront désormais assumées par le premier, ce qui risque de susciter des conflits.

Le ministre répond que les réformes projetées nécessitent effectivement un effort particulier d'organisation. Par ailleurs, et sauf en ce qui concerne les chambres supplémentaires, les responsabilités des chefs de corps s'accroîtront. L'équilibre entre les responsabilités des premiers présidents et celles des procureurs généraux doit être rétabli.

Dans la perspective de l'existence d'un Conseil supérieur de la justice, les premiers présidents devront être consultés plus souvent et de façon plus directe, au lieu de l'être par l'intermédiaire des procureurs généraux.

À la question de savoir si, dans la conception du ministre, le magistrat-coordinateur travaille en permanence, ce dernier répond que c'est possible, mais que le projet prévoit que le magistrat-coordinateur peut, en dehors de ses tâches ordinaires, siéger selon son rang dans les chambres de la cour (art. 10).

Le précédent intervenant demande en outre si le magistrat-coordinateur peut agir comme une sorte d'ombudsman, auquel on peut s'adresser pour signaler tel ou tel dysfonctionnement. Sa tâche devra en tout cas être définie avec précision.

Un autre membre demande s'il existe une concertation entre le ministre et les premiers présidents des cours d'appel, parallèlement à celle qui a lieu avec les procureurs généraux dans le cadre du Collège des procureurs généraux. L'intervenant estime qu'une telle concertation est nécessaire et répond à une attente de la population, en vue de permettre aux responsables politiques d'avoir connaissance de la situation sur le terrain et de prendre des mesures générales pour porter remède à d'éventuels dysfonctionnements.

Quant au fait que les responsabilités du premier président de la cour d'appel doivent s'accroître dans le futur, l'intervenant souligne qu'en matière civile, ce sont les parties qui sont maîtres du procès.

Il n'estime dès lors pas opportun que le président puisse contraindre les parties à conclure dans un délai déterminé, d'autant plus que celles-ci disposent l'une à l'égard de l'autre d'une telle possibilité en vertu du Code judiciaire.

Le problème se pose plutôt lorsqu'après avoir pris des conclusions et des conclusions additionnelles, les parties demandent une date de fixation pour plaider, et qu'on leur propose une date parfois éloignée de plusieurs années.

Le ministre déclare qu'il se concerte régulièrement avec les premiers présidents de cours d'appel, mais que cette façon de travailler heurte parfois certaines traditions existantes.

Ainsi, le ministre a voulu adresser aux juges de paix une lettre générale à propos de l'application de la loi sur les malades mentaux.

La mise au point et l'envoi de cette lettre ont suscité de nombreuses difficultés, notamment parce qu'il a fallu suivre un circuit compliqué passant par les procureurs généraux et les premiers présidents.

Lors de la mise en oeuvre des réformes en cours, il faudra prévoir plus d'autonomie et de souplesse par rapport aux parquets généraux et aux premiers présidents. Ces derniers devront en outre être davantage responsabilisés.

5. L'imposition d'une obligation de résultat

L'intention est d'imposer aux chambres supplémentaires une obligation de résultat. À cet égard, la question est de savoir quel objectif assigner et comment contrôler les prestations des chambres supplémentaires.

Les chiffres de l'arriéré judiciaire existant ont pu être obtenus grâce au nouveau matériel et au nouveau logiciel informatiques installés dans les cours d'appel.

Désormais, il sera possible d'obtenir à tout moment un aperçu de l'évolution de l'arriéré dans chaque cour d'appel. Sur la base de ces données, on sera mieux à même d'évaluer l'effet des mesures législatives proposées.

Jusqu'à présent, le ministère de la Justice devait souvent tabler sur des chiffres généraux.

Dans la déclaration d'intention à laquelle les acteurs de la Justice ont souscrit le 29 février 1996, on a utilisé par exemple des chiffres annuels.

En moins de dix ans, le nombre d'affaires introduites a augmenté de 5 000 unités; le nombre d'arrêts a également augmenté, mais, en même temps, l'arriéré judiciaire a continué à croître.

Le ministre confirme que l'on ne pourra pas continuer à répondre à cette augmentation en nommant de plus en plus de magistrats. Il faut placer le débat dans une perspective plus large, car le nombre d'affaires ne cesse de croître.

En 1985, 13 800 affaires ont été introduites et en 1993, 18 983. Au cours de cette période, le nombre des jugements est passé de 9 500 à 17 500. Le nombre des affaires pendantes est passé de 61 400 à 102 000.

C'est cette explosion qui est à la base d'une série de mesures législatives adoptées précédemment pour résorber l'arriéré.

Le ministre signale que les statistiques qu'il a intégrées dans son exposé introductif portent exclusivement sur les affaires civiles.

Il s'agit là d'une mise au point importante, car il faut interpréter ces chiffres en corrélation avec ceux des affaires pénales. Ainsi n'est-il peut-être pas exclu qu'il y ait, à la Cour d'appel de Gand, davantage de chambres répressives, ce qui se répercuterait alors sur le traitement des affaires civiles. Il serait intéressant de vérifier si l'arriéré civil est inversement proportionnel à l'arriéré pénal. Force est de constater en tout cas que les chambres civiles siègent trop peu dans cette cour. Il y a donc un problème structurel.

Le ministre est d'accord avec l'idée de fixer pour chaque cour d'appel un point zéro auquel on se référerait à l'avenir pour mesurer l'évolution de l'arriéré.

Pour les cours du travail, on ne dispose pas encore de chiffres précis, en raison de l'informatisation plus tardive.

Pour suivre l'application des mesures proposées, l'on a opté, dans le projet, pour une double forme de contrôle interne.

Tout d'abord, l'article 101, alinéa 3, proposé, du Code judiciaire crée la fonction de magistrat-coordinateur. Ce dernier est chargé de rédiger annuellement un rapport d'activité et de tenir à jour les statistiques (article 2).

Ensuite, l'assemblée générale de la cour d'appel devra formuler, en application de l'article 342bis proposé du Code judiciaire, les mesures qui peuvent contribuer à résorber l'arriéré judiciaire au niveau de l'administration de la justice dans son ressort (article 19).

Une membre souhaite obtenir quelques informations complémentaires afin de pouvoir apprécier l'efficacité des mesures proposées. Elle aimerait tout d'abord savoir si le système informatique installé constitue un seul et même système pour les cinq cours d'appel, utilisant des données standardisées, ou si chaque cour aura un système distinct.

Le ministre répond que les cinq cours d'appel utilisent le même système informatique, les mêmes programmes et le même type de données.

La précédente intervenante indique que sa question était liée à celle de la qualification spécifique requise des magistrats-coordinateurs.

Si ceux-ci disposent de programmes de gestion standardisés, permettant d'aboutir à une organisation uniforme des cours et tribunaux, ils auront moins besoin d'une formation d'informaticien.

Par contre, s'ils ne disposent pas de tels programmes, un minimum de connaissances en informatique serait nécessaire, ne fût-ce que pour leur permettre de transmettre les données utiles aux informaticiens en vue de la programmation.

Par ailleurs, l'intervenante se demande si un système sera prévu pour éviter les retards liés au fait que les avocats se renvoient la balle, chacun rendant l'autre responsable du fait que le dossier n'avance pas.

Disposera-t-on à cet égard d'informations, auxquelles le justiciable pourra avoir accès ?

Le ministre répond qu'il importe que le justiciable puisse savoir à tout moment quand son affaire sera fixée. Il est normal qu'il ait accès à son propre dossier, mais non, bien évidemment, à l'ensemble de toutes les données disponibles.

La précédente intervenante estime essentiel qu'à moyen terme, l'on puisse démontrer au citoyen que des changements fondamentaux ont eu lieu en matière d'administration de la justice.

Le ministre déclare que, dans le cadre du dialogue avec les acteurs de la justice, un débat a lieu sur une série de modifications à apporter au Code judiciaire.

Plus fondamentalement, deux systèmes ­ très délicats, il est vrai ­ sont à l'étude pour s'efforcer de porter remède à l'attitude de certaines parties, qui démontrent une certaine passivité, un défaut d'organisation, et/ou un manque de communication avec les autres acteurs de la justice.

L'un concerne l'abus du droit de la procédure, que le magistrat pourra opposer à une partie.

La deuxième piste est celle d'une chambre de filtrage, tant en première instance qu'en appel.

Comme toujours, le bon usage de tels procédés dépendra de la qualité du magistrat qui y a recours.

Un autre membre se réfère aux statistiques fournies par le ministre, et observe que certaines situations paraissent incompréhensibles. Ainsi, la Cour d'appel de Mons dispose d'un effectif deux fois moins important que celle d'Anvers, mais son rendement représente le tiers de celui de cette dernière cour, en termes non seulement de nombre d'audiences, mais aussi de décisions prononcées.

On ne peut donc conclure qu'un magistrat équivaut à un nombre X de décisions prononcées.

Le ministre observe que l'on pourrait compléter les statistiques fournies par un ratio relatif au nombre de décisions rendues par conseiller.

6. L'indemnité allouée aux conseillers suppléants

Le ministre estime que la question de savoir si une indemnité de 1 500 francs par heure d'audience suffit, n'est pas primordiale.

Ce montant n'est pas inscrit dans la loi. En vertu des articles 379ter , § 2, et 379quater du Code judiciaire tels qu'ils sont proposés, le ministre de la Justice détermine le montant de l'indemnité (articles 20 et 21).

On avait toujours tablé jusqu'ici sur un montant de 1 500 francs par heure d'audience. Annuellement, un conseiller suppléant gagnerait de 300 000 à 360 000 francs brut.

Le ministre estime toutefois que les candidats à la fonction de conseiller suppléant ne se laisseront pas guider par des considérations financières. Il s'agit plutôt de personnes qui, parvenues en fin de carrière ou au sommet de celle-ci, souhaitent mettre leur expérience de magistrat ou d'avocat à nouveau au service de la justice. L'indemnité ne joue donc pas pour eux un rôle déterminant.

On a reproché au régime d'indemnité proposé d'être discriminatoire à l'égard des juges suppléants.

Les conseillers suppléants sont en principe payés à l'heure d'audience lorsqu'ils siègent dans les chambres supplémentaires. S'ils siègent en remplacement d'un conseiller empêché ou lorsque l'effectif est insuffisant, ils bénéficient d'une indemnité mensuelle en vertu de l'article 379 du Code judiciaire, à la condition toutefois d'exercer régulièrement durant un mois au moins, la fonction de conseiller effectif. Sinon, comme les juges suppléants, ils ne perçoivent aucune indemnité.

On fait donc une distinction entre les prestations exceptionnelles temporaires effectuées dans les chambres supplémentaires et les cas où des magistrats suppléants siègent traditionnellement en première instance comme en appel. Dans ce sens, il n'y a donc aucune discrimination.

Un membre observe que, d'après l'article 379ter , § 2, en projet, les modalités de l'indemnité à laquelle peut prétendre le conseiller suppléant appelé à siéger dans une chambre supplémentaire sont fixées par le ministre de la Justice.

Est-ce en raison du statut spécifique de ce conseiller suppléant que l'indemnité peut être fixée par arrêté ?

En effet, lorsqu'il s'agit d'un magistrat siégeant à temps plein, la rémunération doit être fixée par une loi.

Quant au § 1er de l'article 379ter en projet, il renvoie explicitement à l'article 379 du Code judiciaire.

En ce qui concerne la nature de l'indemnité due au conseiller suppléant visé à l'article 379ter , § 2, le ministre déclare qu'il s'agit plutôt d'un défraiement que d'une rémunération à proprement parler. Il plaide, là encore, pour une solution souple.

7. Le remplacement d'un conseiller effectif par un conseiller suppléant

Un membre signale que les conseillers suppléants peuvent combiner la possibilité de remplacer, en vertu de l'article 16, des conseillers empêchés et celle de siéger dans une chambre supplémentaire.

Ceci ne serait possible, semble-t-il, qu'au terme de la période de trois ans.

Le ministre répond que le terme de la période de trois ans ne touche que la possibilité de siéger dans une chambre supplémentaire.

Le précédent intervenant exprime des réserves quant à cette possibilité; le cumul de ces deux activités risque d'avoir une incidence sur la qualité du travail fourni et de donner lieu à des abus.

Le ministre souligne qu'en la matière, le magistrat-coordinateur et le premier président auront un rôle à jouer, mais un frein naturel jouera probablement, car un tel cumul ne sera sans doute pas aisé dans la pratique.

8. Les greffiers

Une quinzaine de greffiers seront détachés, dans les chambres supplémentaires; on libérera donc environ trois greffiers par cour d'appel, pour assister les chambres supplémentaires. L'on pourvoira aux places ainsi libérées en engageant du personnel contractuel.

9. Les vacances judiciaires

Le ministre ne voit aucune objection à débattre ultérieurement de cette question. Mais il n'y a pas lieu de le faire dans le cadre du présent projet.

III. DISCUSSION DES ARTICLES ET VOTES

1. Article premier

Article 77 de la Constitution

Cet article ne suscite aucune observation. Il est adopté à l'unanimité des 10 membres présents.

2. Article 2

Article 101, troisième alinéa, du Code judiciaire (nouveau)

Cet article précise les fonctions du magistrat coordinateur.

a) Discussion

Plusieurs amendements sont déposés à cet article :

1. Mmes Delcourt-Pêtre et de Bethune déposent un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-490/2, amendement nº 3) :

À l'alinéa nouveau proposé à cet article, insérer, après les mots « d'un rapport d'activité », la phrase suivante :

« Ce rapport d'activité doit notamment analyser de manière comparative l'effet des mesures prises en vue de résorber l'arriéré judiciaire. »

Mme Delcourt-Pêtre rappelle qu'un rapport d'activité peut être établi de bien des façons différentes. C'est pourquoi l'amendement propose de prévoir à tout le moins dans la loi que le rapport doit notamment contenir l'analyse de l'effet des mesures prises pour résorber l'arriéré judiciaire.

Le ministre demande quelle est la portée exacte des termes « de manière comparative ».

La préopinante répond qu'il s'agit de déterminer l'évolution de l'arriéré d'une année à l'autre, et d'un ressort de cour d'appel à l'autre, et d'en faire une analyse conceptuelle.

Elle précise que son amendement n'est pas limitatif : le rapport doit à tout le moins contenir l'analyse en question, mais il ne doit pas se limiter à ce seul élément.

Le ministre n'est pas opposé au principe défendu par l'amendement. Il rappelle que l'avant-projet prévoyait une disposition similaire.

Il exprime cependant des réticences par rapport au terme « comparative », car il estime qu'il n'appartient pas au magistrat coordinateur de faire l'analyse de la situation dans les autres ressorts.

Quant à l'idée d'une comparaison d'une année à l'autre, elle découle logiquement de l'analyse de l'effet des mesures prises.

À la suite de cet échange de vues, Mme Delcourt-Pêtre dépose le sous-amendement nº 10 tendant à supprimer les mots « de manière comparative » (doc. Sénat, nº 1-490/2).

2. M. Lallemand et consorts déposent l'amendement nº 4 (doc. Sénat, nº 1-490/2) :

« L'article 2 est remplacé comme suit :

« Art. 2. ­ Dans l'article 101 du Code judiciaire, modifié par la loi du 19 juillet 1985, les alinéas suivants sont insérés entre les alinéas 2 et 3 :

« Il y a dans chaque cour d'appel un magistrat coordinateur chargé notamment, sous l'autorité et la direction du premier président, de l'organisation du travail et de la rédaction et de la publication annuelles d'un rapport d'activité.

Le rapport du magistrat coordinateur est communiqué à l'assemblée générale et au ministre de la Justice, qui le transmet aux Chambres législatives. »

MM. Coveliers et Goris déposent à l'amendement de M. Lallemand et consorts le sous-amendement nº 7 (doc. Sénat, nº 1-490/2) :

« À l'article 2 proposé, supprimer les mots « et la direction .»

Justification

Les mots « sous l'autorité » paraissent suffisants. Il se pourrait, au cas où l'on ajouterait les mots « et la direction », que le coordinateur ne soit pas beaucoup plus qu'un secrétaire du premier président.

Le ministre se rallie à ces deux amendements. Il se demande toutefois s'il n'est pas superflu de prévoir dans la loi la communication du rapport à l'assemblée générale. Le magistrat coordinateur est membre de celle-ci. En outre, l'assemblée générale devra nécessairement se baser sur ce rapport pour définir la politique à suivre.

Un membre souligne qu'il importe de changer les mentalités : actuellement, des assemblées générales sont déjà prévues, mais elles sont de pure forme.

Il est essentiel que l'assemblée générale puisse consacrer un réel débat à l'examen du rapport d'activité, et qu'elle ne se contente pas d'une réunion formelle.

L'intervenant suivant renvoie à l'article 19 du projet, et suggère qu'un ajout soit apporté en ce sens à cet article.

Sous le bénéfice de cette observation, M. Lallemand dépose un sous-amendement tendant à supprimer, dans le dernier alinéa de l'article 2 proposé à l'amendement nº 4, les mots « à l'assemblée générale et » (doc. Sénat, nº 1-490/2, amendement nº 8).

À propos des termes « l'organisation du travail » , contenus au 2e alinéa de l'article 2 proposé à l'amendement nº 4, un membre demande quel est leur lien avec l'article 109, du Code judiciaire, selon lequel « les affaires sont distribuées par le premier président conformément au règlement de la cour. Lorsqu'il s'élève des difficultés sur la distribution des affaires entre les chambres d'une même cour d'appel, l'article 88, § 2, est applicable ».

Le ministre répond que le travail préparatoire et le suivi visés par les termes « organisation du travail » et assurés par le magistrat coordinateur, sont complémentaires à la distribution des affaires par le premier président.

Un autre membre estime que l'article 109 précité s'applique plutôt aux contestations relatives, par exemple, à la question de savoir si une affaire est de la compétence du juge des saisies ou du juge ordinaire. Ce sont du reste les parties qui peuvent soulever cet incident.

L'article 109 ne concerne pas l'attribution d'une affaire à telle ou telle chambre d'une même juridiction.

La question d'un précédent intervenant porte plutôt sur le conflit qui pourrait surgir, dans ce dernier cas, entre le magistrat coordinateur et le premier président.

Le ministre renvoie à l'article 6 du projet qui, il est vrai, concerne l'attribution aux chambres supplémentaires de certaines affaires considérées de façon générale.

Le premier président ne pourrait donc pas décider que les affaires en question seront dévolues à une chambre ordinaire.

Pour le surplus, le ministre admet qu'un conflit n'est pas exclu dans le cas décrit ci-dessus.

b) Votes

L'amendement nº 3 de Mmes Delcourt-Pêtre et de Bethune et l'amendement nº 4 de M. Lallemand et consorts, ainsi que les trois sous-amendements nºs 7, 8 et 10 qui y ont été déposés, de même que l'article 2 ainsi amendé, sont adoptés à l'unanimité des 10 membres présents.

3. Article 3

Article 102 du Code judiciaire (nouveau)

Cet article a trait aux conseillers suppléants.

a) Discussion

À cet article, MM. Desmedt et Foret déposent un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1 - 490/2, amendement nº 2) :

« Au § 1er de l'article 102 proposé, entre le 1 er alinéa et le 2e alinéa, insérer un alinéa nouveau, rédigé comme suit :

« Les conseillers suppléants sont nommés par le Roi après avis du premier président et du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau du siège de la cour. »

Justification

Il n'apparaît pas opportun d'imposer aux conseiller suppléants la lourde procédure prévue par l'article 151 de la Constitution.

L'un des auteurs rappelle que la procédure de l'article 151 de la Constitution prévoit, en l'état actuel des choses, un vote de la cour d'appel et du conseil provincial.

Un membre observe qu'un problème de constitutionnalité risque de se poser.

Il renvoie à cet égard à l'avis du Conseil d'État, sur la question de l'inamovibilité des conseillers suppléants, d'où il résulte que l'article 151 doit être interprété restrictivement, que l'on ne peut déroger par une loi au système prévu par la Constitution, et qu'il ne saurait y avoir deux sortes de magistrats à la cour d'appel.

Le projet initial ayant donné lieu à cet avis contenait une disposition requérant, pour la nomination en tant que président du tribunal de première instance, du tribunal du travail et du tribunal de commerce, un avis du comité d'avis visé à l'actuel article 259ter du Code judiciaire.

Le Conseil d'État estima cette disposition incompatible avec celle de l'article 151 de la Constitution, le constituant ayant énuméré de façon limitative les formalités préalables à de telles nominations.

La question est de savoir ce qu'il faut entendre par le terme « formalités » , et dans quelle mesure il peut être distingué de celui de « conditions » comme le soutient un autre membre.

Dans le projet précité, l'avis préalable à la nomination était bel et bien considéré par le Conseil d'État comme une « formalité » .

Dès lors, on pourrait, en ce qui concerne le projet à l'examen, envisager d'attendre que la Constitution ait été modifiée, mais, si elle ne l'est pas, la situation sera bloquée.

La question est aussi de savoir si l'on peut prévoir, en sus du texte constitutionnel, une garantie supplémentaire, dont l'objectivation des candidatures découlerait de façon quasi automatique.

Un autre intervenant serait enclin à opter pour la solution d'attente évoquée par le préopinant, mais il est conscient de ce que ce système n'est pas pratique, car il paralyserait les efforts du ministre pour tenter de porter remède à l'arriéré judiciaire.

Il est par ailleurs exact qu'un problème constitutionnel se pose.

Cependant, il doit être possible, à l'article 9, de spécifier de façon plus précise les conditions objectives requises pour être nommé conseiller suppléant, en y ajoutant par exemple un avis favorable du collège de recrutement.

L'objection d'inconstitutionnalité à l'encontre d'une telle solution ne paraît pas fondée, puisque le projet requiert vingt ans de barreau, condition qui n'est pas davantage prévue pour les conseillers d'appel.

La procédure serait alors la suivante : les candidatures sont introduites auprès du ministre, qui les transmet pour avis au collège de recrutement. Ce n'est que lorsque les candidatures répondent aux conditions formelles de l'article 9 qu'elles peuvent être transmises aux cours d'appel et aux conseils provinciaux.

Le même intervenant propose aussi de prévoir un ordre de classement des candidats.

Le ministre souligne que tant dans les avis recueillis récemment, que dans des avis antérieurs, il a été précisé que les conseillers suppléants devaient être soumis aux mêmes règles que les conseillers effectifs. C'est pourquoi le texte initial du projet qui prévoyait un mode de désignation différent, n'a pas été retenu.

Pour le surplus, il se déclare d'accord sur une modification du texte, si celle-ci va dans le sens d'une plus grande objectivité, et pour autant, bien entendu, qu'elle soit compatible avec la Constitution.

Le ministre s'engage en tout cas, à titre personnel, à ne pas procéder aux nominations en question sans veiller, d'une façon ou d'une autre, à garantir une sélection objective.

En ce qui concerne un ordre de classement à établir parmi les candidats, le ministre fait observer qu'il ne faudrait pas qu'un tel système décourage des avocats chevronnés de se porter candidats.

Le précédent intervenant réplique que peu d'avocats rempliront la condition d'ancienneté de vingt ans, et qu'en outre, celle-ci ne constitue pas un élément de sélection objectif.

Un membre observe que rien n'interdirait, lors de la révision de l'article 151 de la Constitution, de prévoir une disposition particulière pour les magistrats suppléants.

b) Votes

L'amendement nº 2 de MM. Desmedt et Foret est rejeté par 7 voix et 1 abstention.

L'article 3 est adopté par 7 voix et 3 abstentions.

4. Article 4

Article 106bis du Code judiciaire (nouveau)

Cet article concerne la création de chambres supplémentaires pour une durée limitée fixée par le Roi.

a) Méthode

Un membre demande pourquoi la disposition proposée à l'article 4 est insérée sous un article 106bis nouveau, alors que les articles 106 et 107 s'appliquent aussi aux cours du travail, et que, d'autre part, l'intitulé de la loi en projet ne figurera pas dans le Code judiciaire.

N'aurait-il dès lors pas mieux valu insérer la disposition proposée, qui ne concerne que les cours d'appel, après l'article 107 du Code judiciaire ?

Le ministre répond que les articles 106 et suivants du Code judiciaire contiennent des dispositions communes aux cours d'appel et aux cours du travail.

L'article 106 traite du règlement particulier de la cour d'appel et de la cour du travail.

L'article 106bis ne concernerait que les chambres supplémentaires de la cour d'appel.

L'article 107 concerne à nouveau la cour d'appel et la cour du travail, mais traite des chambres temporaires.

Quant à l'article 108, il ne vise que la cour d'appel, et règle le cas très spécifique des affaires renvoyées après cassation.

C'est sur la suggestion du Conseil d'État que la disposition proposée à l'article 4 est insérée dans le Code judiciaire sous un article 106bis nouveau.

Si l'on plaçait cette disposition après l'article 107, le lien avec le règlement particulier visé à l'article 106 disparaîtrait.

L'intervenant précédent déclare que, dans ce cas, il faut préciser à l'alinéa 1er de l'article 106bis proposé que l'on vise spécifiquement la cour d'appel. Celle-ci est visée à l'alinéa 3, mais ce dernier ne concerne que la question du règlement.

Le ministre répond qu'il résulte du contexte qu'il ne peut s'agir que de la cour d'appel.

b) Chambres temporaires ou supplémentaires

Un membre demande s'il ne serait pas préférable d'utiliser le terme « chambres temporaires » plutôt que le terme « chambres supplémentaires ». Le premier indique clairement la nature des nouvelles chambres et le but poursuivi. Le second donne à penser que les chambres ont un caractère définitif et permanent alors qu'en dernière analyse, elles sont temporaires.

Le ministre rétorque que l'on a utilisé le terme « chambres temporaires » dans l'avant-projet de loi (article 7).

Comme le Conseil d'État a objecté que faire siéger des juges nommés à vie dans des chambres temporaires était contraire à la Constitution, le Gouvernement a décidé d'utiliser le terme « chambres supplémentaires » qui avait été proposé par le Conseil (doc. Sénat, nº 1-490/1, p. 25).

c) Composition et présidence des chambres supplémentaires

1. Discussion

MM. Foret et Desmedt déposent un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-490/2, amendement nº 1) :

« Remplacer le 4e alinéa de l'article 106bis proposé par ce qui suit :

« Ces chambres sont composées d'un conseiller effectif et de deux conseillers suppléants. »

Justification

Il n'apparaît pas raisonnable de constituer des chambres de la cour d'appel avec trois conseillers suppléants.

La présence d'un magistrat effectif apparaît comme indispensable pour assurer la qualité des arrêts et l'unité de la jurisprudence.

L'un des auteurs de l'amendement souligne que celui-ci ne modifie pas sensiblement l'économie du projet, mais garantit un minimum de sécurité juridique et d'unité de la jurisprudence.

Un membre observe qu'il faut éviter de donner l'impression que les chambres en question sont composées exclusivement d'avocats, ce qui peut, en certaines matières, créer un problème sérieux et multiplier les recours en dessaisissement pour cause de suspicion légitime.

Les avocats peuvent en effet être mêlés à des affaires similaires à celles qu'ils traitent en tant que conseillers suppléants, et où ils ont intérêt à voir prévaloir telle thèse juridique plutôt que telle autre.

Il s'agit là de l'une des objections majeures à l'encontre de la réforme, réforme que l'intervenant soutiendra par ailleurs, en raison de la réponse qu'elle apporte à une nécessité politique importante.

L'image d'impartialité et d'indépendance de la justice, dont ces chambres font partie, doit cependant être préservée.

L'intervenant se demande si l'on ne devrait pas prévoir que de telles chambres comporteront au moins un conseiller effectif ou un ancien magistrat, ou encore un professeur d'université.

Cela permettrait de répondre, au moins pour partie, aux objections qui justifient l'amendement précité.

L'un des auteurs de celui-ci observe qu'il faut éviter de faire de ces chambres des chambres d'arbitrage. Dans la solution proposée, on érige en règle un procédé aujourd'hui occasionnel de suppléance, qui, dans le système actuel, ne se substitue pas à l'ordre judiciaire.

Le ministre rappelle qu'initialement, il avait défendu la thèse selon laquelle les chambres devaient être exclusivement composées de conseillers suppléants.

Les milieux intéressés s'y sont d'abord opposés, estimant qu'un magistrat effectif devait assumer la présidence, puis ils se sont finalement arrêtés à l'idée qu'il était préférable de conserver une certaine flexibilité en la matière, et de laisser au premier président le soin de composer la chambre en fonction des circonstances.

Le ministre renvoie également à l'exposé des motifs, qui précise (p. 3) : « Ainsi, il est stipulé que les chambres seront composées d'au moins deux conseillers suppléants et seront complétées, en faisant appel, dans la mesure du possible, à des magistrats effectifs ou à des magistrats admis à la retraite. »

Un membre fait observer qu'en imposant un minimum de deux conseillers suppléants, le projet réduit la flexibilité que prône le ministre.

Celui-ci répond qu'il veut éviter que les magistrats effectifs soient placés systématiquement dans les chambres supplémentaires, alors qu'ils ont leur propre travail à accomplir dans les chambres « classiques ».

Le ministre ajoute qu'il est favorable au recours à des magistrats émérits, même s'il ne lui paraît pas certain que cette solution permettrait d'atteindre le rendement souhaité.

Un membre exprime sa préférence pour un système où la loi prévoirait expressément le recours préférentiel à un magistrat effectif pour assurer la présidence des chambres supplémentaires, ou, à défaut, à un magistrat admis à la retraite (cf. l'article 207bis, § 1er , 3º). Le premier président de la cour d'appel devrait constater par décision motivée que la désignation opérée se justifie par la nature des travaux ou par les possibilités du moment.

La décision pourrait avoir un effet limité dans le temps, et être sujette à révision.

Le même intervenant demande qu'il soit précisé clairement que les termes « chambres supplémentaires » supposent que l'on ne touche pas aux chambres actuelles existant en vertu du règlement des cours, auquel il n'est pas dérogé.

En ce qui concerne la question de la composition des chambres supplémentaires, un membre propose de faire appel à des avocats qui ont quitté le barreau, et qui, de ce fait, ne tombent pas sous les objections suscitées par les avocats en exercice. Ces anciens avocats pourraient même présider une chambre supplémentaire.

Un autre membre peut s'accorder sur cette suggestion, pour autant que les avocats en question n'exercent pas en même temps d'autres fonctions, comme celles de chef d'entreprise, par exemple.

Le ministre se demande si des avocats qui ont quitté le barreau auront encore la pratique nécessaire pour siéger comme conseiller suppléant. En ce qui concerne les professeurs d'université, il n'a pas d'objection.

Le préopinant intervenant souligne que ce sera au ministre à sélectionner les personnes adéquates.

Le ministre propose de limiter cette possibilité aux avocats qui quittent le barreau pour siéger comme conseiller suppléant.

On pourrait ajouter à l'article 9 que la condition de vingt années de barreau ou de dix ans d'activité comme juge suppléant doit être remplie au moment de la nomination.

MM. Desmedt et Foret déposent un amendement subsidiaire (nº 19) à leur amendement nº 1 (doc. Sénat, nºs 1-490/2 et 4) :

« Remplacer le 4e alinéa de l'article 106bis proposé par ce qui suit :

« Ces chambres sont composées de deux conseillers suppléants et d'un conseiller effectif, ou à défaut de ce dernier, d'un conseiller suppléant visé à l'article 207bis, § 1er , 3º, ou 207bis, § 2. »

Justification

Le présent amendement vise à garantir à tout le moins la présence d'un magistrat dans les chambres supplémentaires, quitte à ce que ce magistrat soit à la retraite.

Comme l'ont fait apparaître les débats en commission, il n'est pas souhaitable que des chambres de la cour d'appel soient composées uniquement d'avocats ­ conseillers suppléants : le risque de conflit d'intérêts est énorme. Nous estimons que la présence d'un magistrat professionnel permettra d'accroître la crédibilité et l'impartialité de ces chambres supplémentaires.

Le Gouvernement présente l'amendement nº 20 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Remplacer le quatrième alinéa de l'article 106bis proposé, par la disposition suivante :

« Les chambres supplémentaires sont composées d'au moins deux conseillers suppléants. Dans la mesure du possible, au moins un magistrat effectif ou un magistrat admis à la retraite siégera dans chaque chambre. »

Justification

Dans un souci d'organisation efficace des travaux, le premier président dispose d'une certaine flexibilité pour la composition des chambres supplémentaires. Puisque ces chambres peuvent également être composées de conseillers suppléants sans aucune expérience professionnelle préalable au sein de la magistrature, il convient, dans la mesure du possible, de faire siéger dans chacune de ces chambres supplémentaires au moins un conseiller suppléant-magistrat admis à la retraite ou un conseiller ordinaire.

Au sujet de ce dernier amendement, les auteurs des amendements nºs 1 et 19 font remarquer que l'expression « dans la mesure du possible » utilisée dans l'amendement du Gouvernement n'a pas sa place dans un texte de loi. Le premier président peut aisément invoquer un prétendu manque de magistrats effectifs pour désiger exclusivement des conseillers suppléants dans les chambres supplémentaires.

Si on lit cet amendement en corrélation avec l'amendement nº 22 que le Gouvernement a déposé à l'article 9 (doc. Sénat, nº 1-490/5) et qui prévoit que des juristes qui ont exercé, pendant au moins vingt années, une fonction académique ou scientifique en droit peuvent également entrer en ligne de compte pour une nomination de conseiller suppléant, on ne peut que constater que les chambres supplémentaires joueront le rôle de chambres d'arbitrage.

En effet, les jugements rendus par des magistrats professionnels seront évalués en deuxième instance par des arbitres, pour autant, évidemment, qu'il se trouve des candidats disposés à remplir une telle tâche moyennant une indemnité aussi faible.

Ces membres maintiennent donc leurs amendements car, selon eux, il est inacceptable que des conseillers suppléants, dont certains n'ont aucune expérience judiciaire, puissent statuer à eux seuls en appel.

Le ministre fait valoir que l'amendement nº 20 du Gouvernement vise à donner un maximum de latitude au premier président dans la composition des chambres supplémentaires.

Les intervenants précédents estiment que la justification du ministre ne répond pas du tout à leurs objections.

MM. Lallemand et Erdman déposent l'amendement nº 23 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« L'article 4 est remplacé comme suit :

« Art. 4. ­ Un article 106bis, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :

« Art. 106bis. ­ § 1er . Pour une durée limitée fixée par le Sénat et la Chambre des représentants sur proposition du Roi, des chambres supplémentaires peuvent être créées pour résorber l'arriéré judiciaire.

Un règlement particulier est fixé pour ces chambres suivant la procédure déterminée à l'article 106, alinéa 1er .

Le règlement détermine le nombre de chambres supplémentaires de la cour d'appel.

Les affaires sont distribuées par le premier président conformément au règlement.

§ 2. Les chambres supplémentaires sont composées d'au moins deux conseillers suppléants.

Elles sont présidées par un conseiller effectif ou, à défaut, par un conseiller suppléant qui n'est pas avocat en exercice.

En cas de nécessité, le premier président peut déroger à l'alinéa 2, après avoir pris l'avis du procureur général et des bâtonniers de son ressort. »

Les auteurs de cet amendement partagent l'avis des préopinants selon lequel les chambres supplémentaires ne peuvent pas devenir des chambres d'arbitrage. Ces chambres ont une mission juridictionnelle et ne peuvent, dès lors, éveiller par leur composition aucun soupçon de confusion d'intérêts. C'est pourquoi ils proposent qu'un avocat en exercice ne puisse pas présider une chambre supplémentaire.

Les auteurs de l'amendement sont sensibles à l'argument du Gouvernement selon lequel il ne sera pas toujours aisé d'attribuer la présidence de ces chambres à un conseiller effectif.

On peut résoudre le problème en laissant une certaine marge de manoeuvre au premier président, étant entendu qu'en cas de besoin, il devra motiver expressément sa décision de composer les chambres supplémentaires uniquement de conseillers suppléants.

Les intervenants estiment qu'il faut faire les choix suivants :

1. Les chambres supplémentaires peuvent-elles, oui ou non, être composées exclusivement de conseillers suppléants ?

2. Qui exercera la présidence : un conseiller effectif ou un conseiller suppléant ?

3. Si l'on choisit de faire présider les chambres supplémentaires par un conseiller effectif, la question est de savoir si l'on pourra déroger au principe, en cas de besoin, et, dans l'affirmative, s'il n'y a pas lieu de limiter la dérogation dans le temps.

Un membre observe que les trois options sont claires.

Le Gouvernement propose que les chambres supplémentaires soient composées d'au moins deux conseillers suppléants. Dans la mesure du possible, chaque chambre comptera au moins un conseiller effectif ou un magistrat admis à la retraite (cf. l'amendement nº 20).

Ensuite, il y a la proposition de MM. Lallemand et Erdman, qui va dans le même sens, mais qui est plus stricte en ce qui concerne la présidence. Les chambres supplémentaires sont présidées par un conseiller effectif ou, à défaut, par un conseiller suppléant qui n'est pas avocat en exercice. En cas de nécessité, la dérogation est possible (cf. l'amendement nº 23).

Enfin, il y a l'amendement nº 1 de MM. Foret et Desmedt, qui prévoit que les chambres supplémentaires doivent être composées d'un conseiller effectif et de deux conseillers suppléants. Leur amendement subsidiaire nº 19 rejoint l'amendement nº 23.

Concernant ce dernier amendement, l'intervenant estime que le justiciable qui interjette appel doit pouvoir revendiquer l'égalité devant la loi.

Sous cet angle, il lui semble dangereux que le procureur général et le bâtonnier puissent émettre un avis sur la question de savoir si, en cas de besoin, une chambre supplémentaire peut être composée exclusivement de conseillers suppléants.

Il lui semble sage, sur ce point, de trancher clairement. La seule manière de le faire est de prévoir que les chambres supplémentaires compteront au moins un conseiller effectif. On garantira ainsi la qualité comme l'unité de la jurisprudence. Cette option est par ailleurs plus défendable vis-à-vis de l'opinion publique.

Le ministre déclare que l'on peut sortir de la difficulté en prévoyant dans la loi un ordre donnant successivement la préférence au conseiller effectif, puis au conseiller admis à la retraite, et enfin, au conseiller suppléant, étant entendu qu'en se basant sur la nature des affaires à attribuer, le magistrat-coordinateur déterminera la composition des chambres supplémentaires.

Un autre intervenant soutient la proposition du ministre, notamment parce qu'elle allège la mission du magistrat-coordinateur, celui-ci disposant alors d'un ordre de préférences pour constituer les chambres supplémentaires.

Il continue néanmoins à plaider pour qu'au moins un conseiller effectif siège dans chaque chambre supplémentaire. Pour la désignation des deux autres membres, on peut suivre l'ordre proposé par le ministre.

Un préopinant observe qu'idéalement, cette formule mérite de l'emporter. Le problème est qu'avec l'effectif actuel, l'arriéré judiciaire continue de croître et risque à long terme de sonner le glas de la justice.

Malheureusement, on n'a que trop peu de moyens pour une extension de cadre.

D'autres solutions, comme celle consistant à faire siéger comme conseillers suppléants des juges venant des tribunaux de première instance, ne sont pas réalisables non plus.

L'intervenant ne cache pas que la meilleure solution serait que les chambres ordinaires des cours d'appel résorbent l'arriéré judiciaire. Seulement, le carcan budgétaire contraint le Gouvernement à opter pour la solution de fortune qu'est la création de chambres supplémentaires.

Le Gouvernement présente l'amendement nº 29 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Compléter et modifier respectivement le premier et le quatrième alinéa de l'article 106bis proposé comme suit :

« Cette durée peut uniquement être prorogée par le Roi s'il ressort des rapports du magistrat-coordinateur, visés à l'article 101, quatrième alinéa, que cela s'avère absolument indispensable. »

« Les chambres supplémentaires sont composées d'au moins deux conseillers suppléants. Dans la mesure du possible, au moins un conseiller effectif ou un conseiller à la retraite comme visé à l'article 207bis, § 1er , 3º, ou § 2, siégera dans chaque chambre et en assumera, le cas échéant, la présidence. »

Justification

À l'occasion de la discussion en commission, le Gouvernement a confirmé que les deux chambres supplémentaires étaient en principe créées à titre de mesure exceptionnelle pour résorber l'ensemble de l'arriéré judiciaire dans le délai fixé par le Roi. La prorogation de ce délai peut dès lors uniquement être envisagée lorsque le Roi en démontre l'absolue nécessité sur la base des rapports annuels du magistrat-coordinateur, lesquels seront communiqués à l'assemblée générale, au ministre de la Justice et aux Chambres législatives (cf., l'article 2 du projet). Tel peut être le cas, par exemple, lorsqu'il s'est avéré impossible, au terme du délai fixé, de résorber la totalité de l'arriéré et ce, en dépit d'un engagement maximal de la part des chambres supplémentaires.

Par contre, il ne s'avère pas opportun de préciser explicitement au premier alinéa, comme proposé par certains membres de la commission, quelle sera la durée d'existence des chambres supplémentaires, d'autant plus que les récentes données statistiques indiquent que l'arriéré varie entre les différentes cours d'appel.

En outre, le Gouvernement souligne la nécessité de laisser au premier président une certaine flexibilité au niveau de la composition des chambres supplémentaires et ce, dans un souci d'organisation efficace des travaux. En effet, ces chambres peuvent également être composées de conseillers suppléants sans expérience professionnelle préalable dans la magistrature. Il est dès lors prévu, à cet égard, que le premier président fait siéger dans chaque chambre supplémentaire au moins un conseiller ordinaire ou un magistrat-conseiller suppléant à la retraite, mais uniquement lorsque cela est jugé possible. Pour ce faire, il faut effectivement pouvoir disposer d'un nombre suffisant de conseillers (émérites) et éviter de mettre en péril le fonctionnement des chambres ordinaires. C'est la raison pour laquelle il faut rejeter l'obligation de faire appel aux conseillers susvisés, car ceci pourrait impliquer que le premier président doive retirer ses conseillers des chambres ordinaires, ce qui pourrait engendrer une totale désorganisation.

En outre, il est du devoir du magistrat coordinateur de garantir l'impartialité et l'aptitude requises au niveau de la composition des chambres supplémentaires.

En ce qui concerne la présidence des chambres supplémentaires, le seul but de l'amendement du Gouvernement est de permettre, si un conseiller effectif siège dans une telle chambre, de lui confier la présidence.

Peut-être pourrait-on, sur ce point, reprendre la formule de l'amendement de MM. Lallemand et Erdman (nº 23), en maintenant toutefois les mots « dans la mesure du possible ».

Par contre, on ne retiendrait pas le dernier alinéa de cet amendement.

L'amendement nº 20 du Gouvernement est en tout cas retiré.

Un membre demande ce qu'il en est de la condition d'âge qui serait requise pour les avocats. Tel qu'il est formulé, le texte proposé permet à une personne de 63 ou 64 ans n'exerçant plus d'activité au barreau d'être désignée comme président d'une chambre supplémentaire.

L'intervenant suivant rappelle que le but est d'exclure les avocats en exercice. Pour le surplus, il appartient au premier président d'apprécier ce qui convient le mieux. L'intervenant renvoie à ce propos au § 2 de l'amendement nº 23 qu'il a déposé à l'article 4 avec M. Erdman, et dont la formulation paraît plus précise.

En ce qui concerne l'amendement nº 23 de MM. Lallemand et Erdman, le ministre déclare qu'il faut faire une distinction entre le problème de la composition des chambres supplémentaires, d'une part, et celui de leur présidence, d'autre part.

Aux termes de cet amendement, un avocat en exercice ne peut pas, en principe, être président d'une chambre supplémentaire.

Le ministre déclare que la procédure prévue par l'amendement nº 23, qui habilite le premier président à désigner malgré tout, en cas de nécessité, un avocat en exercice comme président après avoir pris l'avis du procureur général et des bâtonniers de son ressort, est assez lourde. À son avis, cette tâche incombe par excellence au magistrat-coordinateur, car celui-ci est responsable de l'organisation des travaux et évalue les résultats que les conseillers suppléants enregistrent dans la résorption de l'arriéré judiciaire.

L'un des auteurs de l'amendement nº 23 fait valoir que si un avocat en exercice peut assumer la présidence d'une chambre supplémentaire à la Cour de cassation où il tient régulièrement ses plaidoiries, cela engendrera une certaine confusion parmi les justiciables à propos de son indépendance et de son impartialité. Leur confiance dans la justice s'en trouvera ainsi ébranlée. Si l'expérience et la qualité des conseillers suppléants est mise en doute, la réforme proposée sera vouée à l'échec. Il ne faut pas perdre de vue que les chambres supplémentaires sont appelées à résorber en l'espace de trois ans un contentieux d'environ 100 000 affaires. Cela implique que ces chambres supplémentaires aient, durant ce laps de temps, un caractère quasi permanent.

Le ministre peut comprendre ce point de vue. C'est précisément pour cette raison que l'amendement nº 29 du Gouvernement dispose que « dans la mesure du possible », au moins un conseiller effectif ou un conseiller à la retraite siégera dans chaque chambre supplémentaire. M. Delvoie, président de la Cour d'appel de Bruxelles et chargé d'une mission officieuse de management, suit d'ailleurs la voie tracée par le ministre (cf. la note nº 2 en annexe).

Si un conseiller effectif doit siéger dans chaque chambre supplémentaire, cela désorganisera le fonctionnement des chambres ordinaires. Une condition aussi stricte risque d'hypothéquer d'emblée les effets positifs que l'on peut escompter de la réforme.

Le préopinant réplique que si l'on suit cette conception, il se peut parfaitement qu'une chambre supplémentaire soit composée de trois avocats en exercice.

Selon le ministre, il n'existe aucun argument déterminant permettant d'exclure la possibilité qu'un avocat en exercice soit président d'une chambre supplémentaire lorsqu'il y a trois conseillers suppléants.

L'intervenant dit vouloir s'inspirer de deux lignes de force pour opérer la réforme proposée.

Premièrement, il vise à doter les chambres d'une organisation et d'une composition souples en confiant celles-ci aux premier président et magistrat-coordinateur intéressés qui, à cet effet, peuvent faire appel à des avocats ayant une expérience de vingt ans de barreau et à des professeurs d'université (cf. la discussion de l'article 9).

Deuxièmement, un conseiller effectif est nommé magistrat-coordinateur. Il organise le fonctionnement des chambres supplémentaires et se charge du suivi de leurs travaux. Il examinera, par exemple, les modalités d'organisation de ces chambres ­ notamment quant à la rédaction des arrêts et transférer éventuellement des conseillers suppléants à une autre chambre supplémentaire.

Selon un membre, l'exemple qui prévoit une chambre supplémentaire composée de trois conseillers suppléants qui sont des avocats en exercice illustre à suffisance le caractère néfaste de la réforme proposée. Ces chambres doivent plutôt être considérées comme des chambres d'arbitrage.

Du reste, l'intervenant n'est pas convaincu que suffisamment d'avocats se présenteront en vue d'être nommés conseillers suppléants. C'est pourquoi il s'oppose formellement à cette réforme dont il prévoit qu'elle ne parviendra pas à résorber l'arriéré judiciaire.

Le ministre souligne que les chambres supplémentaires ne seront constituées de trois conseillers suppléants-avocats en exercice qu'en cas de nécessité.

Le préopinant réplique que le critère de la nécessité ne sera jamais justifié objectivement. Le premier président aura sans doute recours à la formule type « compte tenu de l'impossibilité de disposer de conseillers effectifs et vu l'urgence ».

Le ministre déclare que l'amendement nº 29 du Gouvernement vise à éviter que les chambres ordinaires ne soient déréglées en permanence dans leur fonctionnement parce qu'elles doivent se passer d'un conseiller effectif appelé à siéger dans une chambre supplémentaire.

Si l'on nomme suffisamment de magistrats à la retraite comme conseillers suppléants, aucun problème ne se posera en ce qui concerne la présidence.

L'un des auteurs de l'amendement nº 23 fait observer qu'aux termes de celui-ci, à défaut de conseiller effectif, tant un magistrat à la retraite qu'un professeur (cf. la discussion de l'article 9) peuvent assumer la présidence d'une chambre supplémentaire.

Un autre membre souscrit à la critique relative à la possibilité qu'une chambre supplémentaire soit composée de trois conseillers suppléants qui seraient inscrits au tableau de l'Ordre des avocats.

Certes, le ministre a déclaré, dans sa réplique, que les chambres supplémentaires devaient être composées, en principe, de deux conseillers suppléants au moins. En cas d'urgence, l'on pourrait cependant déroger à la règle et faire siéger trois conseillers suppléants.

Le ministre oublie cependant que, dans les circonstances actuelles, l'état d'urgence est chronique. En d'autres termes, comme l'arriéré judiciaire a atteint une ampleur importante, l'état d'urgence qui permet de justifier qu'une chambre supplémentaire soit composée de trois conseillers suppléants sera non pas l'exception, mais la règle.

L'intervenant craint dès lors que les conflits d'intérêts ne soient inévitables. Certains avocats plaideront, dans le ressort de la cour d'appel, tantôt devant les tribunaux de degré inférieur, tantôt devant les chambres ordinaires ou les chambres supplémentaires de ladite cour.

C'est pourquoi il souscrit pleinement à l'amendement nº 23 qui tend à prévoir, à l'article 106bis , § 2, deuxième alinéa (nouveau), que les chambres supplémentaires sont présidées par un conseiller effectif ou, à défaut, par un conseiller suppléant qui n'est pas avocat en exercice et qui peut être, par exemple, un magistrat à la retraite ou un professeur d'université.

L'un des auteurs de l'amendement nº 23 souligne que la composition des chambres supplémentaires est une question délicate. Que vaudrait encore le principe de l'indépendance de la justice, si l'on devait constater qu'un conseiller suppléant connaît d'un pourvoi en appel relatif à une affaire ou à un point de droit à propos de laquelle ou duquel il a déjà plaidé devant une autre juridiction ?

Un membre réplique que, selon l'article 828 du Code judiciaire, l'avocat ne peut pas siéger comme conseiller suppléant dans ce dernier cas. L'article susvisé a une large portée. C'est ainsi qu'un avocat qui aura déposé, pour le compte d'une société d'assurances, des conclusions sur l'interprétation de la législation relative aux assurances, ne pourra pas connaître d'une question similaire en qualité de conseiller suppléant.

Pour éviter les risques de conflits d'intérêts au sens de l'article 828 du Code judiciaire, l'on devra demander aux avocats qui plaident systématiquement devant le Conseil d'État de siéger comme conseiller suppléant dans les matières civiles. Les avocats qui sont spécialisés dans une branche du droit auront en effet à faire face en permanence à des conflits d'intérêts au sens de l'article 828.

L'intervenant précédent déclare que l'application de l'article susvisé a des conséquences très étendues. Les avocats défendent fréquemment les affaires les plus divergentes et adoptent dans celles-ci des positions variables. Il estime que l'on ne peut pas dresser pour chaque avocat l'inventaire des affaires dont il ne peut pas connaître en tant que conseiller suppléant.

L'intervenant précédent attire l'attention des commissaires sur le fait, qu'en tant que membre de la Commission européenne des droits de l'homme, il ne pouvait pas connaître d'une affaire dans laquelle il pouvait avoir un intérêt, ce qui pouvait être le cas, par exemple, lorsqu'il avait à défendre une interprétation donnée de la C.E.D.H., en tant qu'avocat.

Le même membre est également d'avis que l'opération proposé ne pourra réussir que si l'on nomme un nombre suffisamment important de conseillers suppléants qualifiés. En prévoyant un statut financier intéressant, l'on pourra sensiblement augmenter l'attrait de la fonction de conseiller suppléant. Il faudra à tout le moins rémunérer de manière adéquate les conseillers suppléants qui exerceront les fonctions de président d'une chambre supplémentaire eu égard aux responsabilités plus grande, qu'ils auront à assumer en conséquence.

L'on pourra ainsi inciter des avocats qui sont en train de terminer leur pratique ou des professeurs qui approchent de l'âge de la retraite, à mettre fin plus rapidement à leur carrière et à accepter d'exercer à temps plein ou presque une fonction de conseiller suppléant. En devenant conseillers suppléants, lesdits avocats et professeurs ­ c'est vrai davantage pour ce qui est des avocats ­ prennent leurs distances par rapport à leur ancien milieu professionnel, ce qui réduit le risque de conflits d'intérêts.

Sous cet angle-là,une rémunération de 1 500 francs l'heure d'audience n'est pas suffisante.

Le ministre répond que le montant de 1 500 francs sert plutôt de point de départ et que des adaptations sont encore possibles.

Il est cependant d'accord sur la conception suivant laquelle il faut prévoir un statut financier intéressant, en tout cas pour les présidents (cf. la discussion des articles 20 et 21).

En ce qui concerne l'article 106bis , § 2, deuxième alinéa, dont l'insertion est proposée par l'amendement nº 23, un membre signale que les mots « conseiller suppléant qui n'est pas avocat en exercice » n'ont aucun sens. L'intéressé est avocat, ou alors il ne l'est pas.

Le ministre déclare qu'un avocat qui est nommé conseiller suppléant peut démissionner de ses fonctions d'avocat après sa nomination.

Deux membres signalent au ministre que certains magistrats des cours d'appel ont demandé que l'on n'affecte pas de conseillers effectifs aux chambres supplémentaires. Les magistrats craignent que les conseillers professionnels se voient obligés de rédiger les arrêts et aient, dès lors, la plus grande part du travail à effectuer, alors que les conseillers suppléants feront simplement office d'assesseurs.

Cette déclaration est accueillie avec étonnement. Dans le passé, les magistrats effectifs ont toujours été opposés à l'engagement de conseillers suppléants. Aujourd'hui, ils s'opposent à ce que l'on affecte un conseiller effectif aux chambres supplémentaires. Le ministre s'est rangé à leur avis, de peur de perturber le fonctionnement des chambres ordinaires.

Face à l'énormité de l'arriéré, l'on peut se demander si toutes les chambres ordinaires fonctionnent de manière satisfaisante.

Ne doit-on pas déduire de tout ce qui précède qu'il serait beaucoup plus simple de faire en sorte que toutes les chambres composées de trois conseillers comptent un conseiller effectif, qui assume les fonctions de président, et deux conseillers suppléants ?

Le ministre fait observer, que la proposition s'écarte du principe des chambres supplémentaires. Il estime qu'en répartissant les conseillers suppléants entre les chambres ordinaires et les chambres supplémentaires, l'on créera une situation irréversible. Il estime par ailleurs que la qualité de la jurisprudence en souffrira et que cette solution ne permettra pas de résorber l'arriéré judiciaire.

C'est pourquoi il est partisan de l'option retenue dans le cadre du projet de loi, qui est d'isoler l'ensemble des affaires qui font partie de l'arriéré judiciaire. L'avantage de ce régime, c'est que le magistrat coordinateur peut suivre beaucoup plus facilement l'évolution des résultats des chambres supplémentaires et adapter leur organisation de telle manière qu'elles puissent remplir leur objectif. Les chambres ordinaires resteront chargées du traitement des nouvelles affaires.

Un membre fait remarquer que si les chambres supplémentaires devaient connaître également des affaires pénales, la Cour de cassation serait submergée de pourvois. En effet, les avocats pénalistes se méfieront des arrêts des chambres supplémentaires composées exclusivement de conseillers suppléants et seront vite enclins à se pourvoir en cassation.

Dans le même ordre d'idées, un autre membre déclare ne pouvoir accepter que trois conseillers suppléants formant une chambre supplémentaire statuent en appel sur une affaire pénale.

Le ministre réplique que cet argument n'a pas tellement de poids dans la mesure où il n'existe pratiquement aucun arriéré en matière répressive. L'arriéré judiciaire est ainsi défini qu'aucune affaire pénale ne sera distribuée aux chambres supplémentaires, sauf pour ce qui est du règlement des intérêts civils.

En ce qui concerne la composition des chambres supplémentaires, le ministre souhaite rejoindre, dans la mesure du possible, les préoccupations des membres qui, dans l'intérêt de la confiance que doit inspirer la justice, insistent pour qu'un conseiller effectif au moins siège dans les chambres supplémentaires. Il souhaite toutefois éviter que les conseillers effectifs ne doivent systématiquement assumer la présidence de ces chambres. Bien que cette possibilité ne soit pas exclue, il doit être fait appel, autant que possible, à des magistrats émérites et à des magistrats suppléants qui ne sont pas (ou plus) avocats.

À propos de l'amendement nº 23, un membre aimerait savoir si l'on ne pourrait pas résoudre les problèmes susvisés en supprimant le troisième alinéa de l'article 106bis, § 2, proposé.

Le ministre se prononce en faveur de la dérogation prévue dans cette disposition.

Un autre membre se demande si cette disposition n'ouvre pas la boîte de Pandore.

Au vu de la discussion qui précède, le Gouvernement présente un sous-amendement nº 39 à l'amendement nº 23 (doc. Sénat, nºs 1-490/5 et 7) :

« Apporter les modifications suivantes au § 2 proposé :

« A. Remplacer le deuxième alinéa par la disposition suivante :

« La présidence ne peut être assumée par un conseiller suppléant qui est avocat en exercice. »

« B. Supprimer le troisième alinéa. »

Ce texte signifie qu'une chambre supplémentaire pourra être présidée par un conseiller effectif ou par un conseiller suppléant, à condition que ce dernier ne soit pas avocat en exercice.

Dans le sous-amendement nº 39 du Gouvernement, un membre propose de remplacer les mots « qui est avocat en exercice » par la formule juridiquement plus adéquate : « qui est inscrit au tableau de l'Ordre des avocats ».

Le ministre souligne que les mots « avocats en exercice » indiquent qu'un ancien avocat ou un avocat honoraire peut assumer la présidence d'une chambre supplémentaire.

Plusieurs membres s'accordent à dire que la terminologie du Code judiciaire est préférable. Il n'y aurait aucun doute sur le fait qu'un avocat retraité, qui n'est plus en activité mais dont le nom figure toujours au tableau et qui est lié à une association en qualité de partenaire, ne peut exercer la présidence d'une chambre supplémentaire.

MM. Erdman et Lallemand déposent un sous-amendement nº 42 à leur leur amendement nº 23 (doc. Sénat, nºs 1-490/5 et 7) :

« L'alinéa 2 du § 2 de l'article 106bis est remplacé comme suit :

« Elles ne peuvent être présidées par un avocat inscrit au tableau de l'Ordre. »

2. Votes

L'amendement nº 1 et l'amendement subsidiaire nº 19 de MM. Foret et Desmedt sont rejetés par 6 voix contre 2 et 2 abstentions.

L'amendement nº 20 du Gouvernement est retiré.

L'amendement nº 23 de MM. Lallemand et Erdman, dans la mesure où il concerne l'article 106bis, § 2, premier alinéa, proposé, est adopté par 7 voix contre 1 et 2 abstentions.

L'amendement nº 23, dans la mesure où il se rapporte à l'article 106bis, § 2, deuxième et troisième alinéas, proposé, ainsi que les sous-amendements nº 39 B du Gouvernement et 42 de MM. Erdman et Lallemand, sont adoptés par 7 voix contre 1 et 2 abstentions.

Le sous-amendement nº 39 A du Gouvernement est retiré.

L'amendement nº 29 du Gouvernement, dans la mesure où il tend à modifier l'article 106bis, quatrième alinéa, proposé, est également retiré.

d) Durée d'existence des chambres supplémentaires

1. Discussion

Un membre fait observer qu'en vertu de l'article 106bis , premier alinéa, il appartient au Roi de déterminer la durée d'existence des chambres supplémentaires.

Le membre souhaiterait voir lier à cette disposition une forme d'obligation de résultat. Si le Roi prolonge cette durée d'existence, il faudrait que la motivation de l'arrêté royal fasse état du résultat du fonctionnement des chambres en question.

Le ministre réplique que cela est quelque peu paradoxal. En effet, si le résultat est atteint, aucune prolongation ne sera nécessaire. Si elle est nécessaire, c'est que, par hypothèse, le travail à accomplir n'est pas achevé.

Le précédent intervenant réplique qu'il ne s'agit pas d'établir une résorption totale de l'arriéré, mais de démontrer l'utilité des chambres supplémentaires, en évaluant l'ampleur du travail accompli.

Le ministre déclare qu'il n'est pas opposé à cette idée, dont la formulation exacte doit cependant encore être précisée.

MM. Lallemand et Erdman ont proposé, dans leur amendement nº 23, que, « pour une durée limitée fixée par le Sénat et la Chambre des représentants sur proposition du Roi, des chambres supplémentaires puissent être créées pour résorber l'arriéré judiciaire » (doc. Sénat, nº 1-490/5).

Le ministre s'oppose à cette proposition.

Il estime, avec tout le respect dû à ces assemblées, que ce serait aller beaucoup trop loin que de permettre à la Chambre et au Sénat d'intervenir dans la durée des chambres supplémentaires des cours d'appel. Il s'agit avant tout d'une question relevant des compétences du pouvoir exécutif. Aussi plaide-t-il pour que l'on adopte l'amendement nº 29 du gouvernement, suivant lequel la durée des chambres supplémentaires « peut uniquement être prorogée par le Roi s'il ressort des rapports du magistrat-coordinateur, visés à l'article 101, quatrième alinéa, que cela s'avère absolument indispensable ».

La décision n'est donc pas prise de manière arbitraire; elle doit pouvoir être évaluée à l'aune d'un critère précis. Elle devra par conséquent être motivée.

Un membre émet, toutefois, quelques réserves au sujet de ce dernier amendement. Il juge inacceptable que le Roi puisse prolonger la durée des chambres supplémentaires sans que les chambres fédérales soient informées en détail des résultats obtenus. Cela suppose avant tout un rapport circonstancié permettant à la Chambre et au Sénat de vérifier si les chambres supplémentaires ont rempli leur obligation de résultat.

Le ministre souligne qu'en vertu de l'article 101, troisième alinéa, du Code judiciaire, proposé, le magistrat-coordinateur est tenu de rédiger un rapport d'activité annuel.

Conformément à l'amendement nº 3 (adopté) de Mmes Delcourt-Pêtre et de Bethune (article 2), ce rapport d'activité devra notamment analyser l'effet des mesures prises en vue de résorber l'arriéré judiciaire.

En outre, suite à l'adoption de l'amendement nº 4 de M. Lallemand et consorts (article 2), le ministre de la Justice sera tenu de transmettre les rapports des magistrats-coordinateurs aux chambres législatives. Celles-ci pourront vérifier, à l'aide de ces rapports, dans quelle mesure les chambres supplémentaires seront parvenues ou non à résorber l'arriéré judiciaire.

Le ministre confirme l'engagement qu'il a pris de n'envisager une prolongation de la formule des chambres supplémentaires que si elle a donné des résultats. Il s'oppose toutefois à ce que cet engagement soit explicité dans la loi.

Un des auteurs de l'amendement nº 23 soutient que le ministre de la Justice pourra alors décider une prolongation, par voie d'arrêté royal, sans en référer aucunement au Parlement fédéral. Il y a certes la promesse du ministre actuel et le principe de la continuité de la politique, mais rien ne garantit qu'à l'avenir un autre ministre de la Justice n'estimera pas ne pas être lié par l'engagement de son prédécesseur.

C'est pourquoi l'intervenant propose que le ministre rende compte du fonctionnement des chambres supplémentaires au Parlement fédéral trois ans après leur installation.

Le ministre n'y voit pas d'objection.

Selon un autre membre, il serait préférable de préciser dans la loi même que les chambres supplémentaires sont créées pour une période de trois ans, avec possibilité de prolonger ce délai après que le ministre de la Justice aura fait rapport à la Chambre des représentants et au Sénat.

L'intervenant suivant se rallie à cette suggestion. La loi devant refléter les intentions du ministre, il faudrait prévoir que les chambres supplémentaires sont créées pour une période de trois ans prenant cours à la date de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.

S'il s'avère que l'arriéré judiciaire n'est pas résorbée à l'issue de ce délai, la mesure pourra être prorogée.

Le ministre fait remarquer que la mention explicite d'un délai de trois ans soulève des objections constitutionnelles.

Dans son avis, le Conseil d'État a déclaré ce qui suit : « selon l'article 109ter, troisième alinéa, en projet, les conseillers suppléants « ne tiennent audience que pendant une période de trois ans ». Selon l'exposé des motifs, ils sont nommés à vie. Toujours selon l'exposé des motifs, « malgré cette nomination à vie, il est prévu que les conseillers suppléants ne siégeront que pendant trois ans ».

Ainsi conçus, le texte en projet et l'exposé des motifs sont contraires au principe constitutionnel d'irrévocabilité des juges » (Avis du Conseil d'État, doc. Sénat, nº 1-490/1, p. 25).

On peut parer à l'argument selon lequel on ne pourrait décider d'une prolongation qu'une fois le Parlement fédéral informé des prestations des chambres supplémentaires en soulignant que les magistrats-coordinateurs auraient l'obligation de publier annuellement leur rapport d'activité. Cela permettrait au Parlement de savoir, pour chaque année, dans quelle mesure les chambres supplémentaires seraient parvenues à résorber l'arriéré judiciaire.

L'obligation de publier un rapport est un moyen d'inciter les chambres supplémentaires à faire preuve de dynamisme.

Selon un autre membre, on pourrait lever l'objection constitutionnelle en soumettant l'installation des chambres supplémentaires à un délai. En effet, l'organisation des cours d'appel doit être réglée par un arrêté royal.

Les conseillers suppléants seraient donc nommés à vie, alors que les chambres supplémentaires ne siégeraient que pendant une période de trois ans.

Un autre intervenant demande s'il faudrait que la Chambre et le Sénat approuvent, après avoir pris connaissance des rapports d'activité, une éventuelle proposition de prolongation, ou si le Roi pourrait décider d'une prolongation, à moins que la Chambre et le Sénat ne s'y opposent ?

L'intervenant précédent déclare que l'obligation de publier un rapport doit permettre de contrôler l'efficacité des chambres supplémentaires.

Il estime que le pouvoir législatif ne peut pas obliger le pouvoir exécutif, par la voie légale, à demander l'autorisation préalable des chambres législatives pour pouvoir prendre un arrêté royal.

C'est pourquoi il plaide pour l'obligation de publier un rapport en temps utile, laquelle n'emporte pas que les chambres fédérales doivent consentir à la prolongation. Si le pouvoir exécutif décide d'une prolongation contre l'avis des chambres, on se trouvera devant un fait politique dont les conséquences s'inscriront dans la tradition politique que nous connaissons.

Une autre solution serait de prévoir, non pas par la voie d'un arrêté royal, mais par la voie légale que les chambres supplémentaires seront créées pour trois ans. Au cas où une prolongation semblerait être opportune, on devrait alors modifier la loi. L'inconvénient d'une telle solution viendrait évidemment de la nécessité de suivre la procédure législative, qui est une procédure lourde.

Le ministre estime qu'il ne faut pas retenir cette dernière suggestion, parce qu'elle entraîne, comme le membre l'a signalé lui-même, la nécessité de suivre une procédure beaucoup trop compliquée.

Il existe un large consensus, au sein de la commission, en faveur de la proposition de créer les chambres supplémentaires pour un délai de trois ans. Si elle était retenue, le Roi ne pourrait décider de proroger ce délai qu'après avoir présenté aux chambres fédérales, au plus tard trois mois avant l'échéance du délai de trois ans, un rapport leur permettant d'évaluer l'efficacité desdites chambres.

Si celle-ci s'avère insuffisante et que le Gouvernement préconise néanmoins la prolongation de la mesure, elles pourront voter une résolution l'incitant à ne pas poursuivre l'expérience.

Un membre estime que dans ces conditions, le contrôle des chambres fédérales est très formel. Selon lui, l'obligation de déposer un rapport sans que les chambres puissent mettre leur veto à une proposition de prolongation, n'a pas grande consistance.

Un autre intervenant fait observer que l'obligation de déposer un rapport trois mois au moins avant l'échéance du délai de trois ans constitue une garantie contre une prolongation par trop arbitraire. Elle offre aux deux Chambres la possibilité de réfléchir à l'opportunité de la prolongation sans devoir conclure le débat par un vote ou sans que l'appréciation finale soit juridiquement contraignante pour le Roi.

Selon l'intervenant, il faut craindre des divergences de vues importantes, si l'on choisit cette dernière voie.

De manière à permettre quand même une forme de contrôle parlementaire sur la prolongation éventuelle des chambres supplémentaires, M. Goris dépose l'amendement nº 24 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Remplacer cet article par ce qui suit :

« Art. 4. ­ Il est inséré dans le même Code un article 106bis, rédigé comme suit :

« Art. 106bis. ­ Pour une durée de trois ans, des chambres supplémentaires sont créées pour résorber l'arriéré judiciaire. Cette durée ne peut être prolongée qu'après présentation par le Roi, en temps utile, d'un rapport au Sénat et à la Chambre des représentants. »

Un membre fait remarquer que l'amendement ne fixe pas de durée pour la prolongation. Il s'oppose formellement à une formule permettant au Roi de prolonger indéfiniment l'existence des chambres supplémentaires.

Le ministre répète qu'il n'est pas partisan de définir la durée des chambres supplémentaires dans le texte de loi.

D'une part, on se situe dans un code général. Si on fixe une durée, il faudra indiquer clairement quand celle-ci commence à courir.

En outre, la formule proposée par le Gouvernement reprend une suggestion du Conseil d'Etat.

Enfin, une certaine flexibilité doit être assurée, compte tenu notamment des différences entre ressorts qui apparaissent dans les statistiques.

En ce qui concerne l'amendement nº 29 du Gouvernement, un membre observe que, contrairement à ce qu'il avait suggéré, il n'est pas fait mention d'une obligation de résultat.

L'intervenant souhaite en effet une référence claire aux résultats obtenus par les chambres supplémentaires.

Le ministre répond que cette référence figure expressément dans l'amendement nº 3, adopté, de Mmes Delcourt-Pêtre et de Bethune (l'article 2), qui vise à l'analyse, dans le rapport d'activités, de l'effet des mesures prises en vue de résorber l'arriéré judiciaire (doc. Sénat, nº 1-490/2).

L'un des auteurs de l'amendement nº 23 part du point de vue que, lorsque la question de la prolongation éventuelle de l'existence des chambres supplémentaires viendra à l'ordre du jour, les Chambres fédérales devront tenir un débat à ce sujet. Pour lui, le débat concernant les rapports des magistrats-coordinateurs se situe à un autre niveau.

Il se déclare disposé à modifier son amendement, en prévoyant que le Roi décidera de la prorogation après que la Chambre et le Sénat auront délibéré de la nécessité de celle-ci avec le ministre de la Justice.

Le ministre se demande s'il faut l'inscrire explicitement dans la loi. Selon lui, il appartiendra aux Chambres elles-mêmes de dire si elles souhaitent discuter ou non les rapports des magistrats-coordinateurs.

Un autre membre approuve le point de vue du ministre. Quand les Chambres auront reçu les rapports, il leur appartiendra de veiller à les examiner. Par ailleurs, vu sa responsabilité politique, le ministre ne fera pas promulguer d'arrêté royal prolongeant l'existence des chambres supplémentaires sans connaître la réaction du Parlement à ce sujet.

Du reste, il n'est pas sûr que la nécessité de prolonger l'existence de ces chambres se fera sentir de la même manière dans toutes les cours d'appel.

Le ministre reconnaît qu'à cet égard des différences ne sont pas à exclure.

Selon un préopinant, un débat préalable à la Chambre et au Sénat est indispensable, parce que le présent projet crée, pour l'ensemble des affaires qui relèvent de l'arriéré judiciaire, une procédure qui déroge au droit commun. Une discussion parlementaire garantit que l'existence des chambres, qui sont en principe provisoires, ne sera pas systématiquement prolongée.

Un autre intervenant estime que l'article 342bis du Code judiciaire, proposé à l'article 19, peut fournir une issue. Aux termes de celui-ci, l'assemblée générale de la cour d'appel doit rédiger un rapport sur les affaires pendantes et la mesure dans laquelle les mesures décrites dans le plan pluriannuel ont contribué à résorber l'arriéré judiciaire dans le ressort. Le procureur général remet ce rapport au ministre de la Justice qui le communique, quant à lui, au Conseil des ministres et aux présidents des Chambres législatives.

L'intervenant demande si cela implique nécessairement que le rapport doit être examiné par les commissions de la Justice de la Chambre et du Sénat.

Le président répond par l'affirmative.

À la suite de cet échange de vues, le ministre présente le sous-amendement nº 38 à l'amendement nº 29 du Gouvernement (doc. Sénat, nº 1-490/7) :

« Apporter les modifications suivantes au premier alinéa proposé :

A. Supprimer, dans le texte néerlandais, les mots van deze kamers ».

B. Remplacer les mots « s'il ressort des rapports... absolument indispensable » par les mots « si cela s'avère absolument indispensable et après que les Chambres législatives ont délibéré des rapports du magistrat-coordinateur, visés à l'article 101, quatrième alinéa ».

Les auteurs de l'amendement nº 23 approuvent cette modification et retirent leur amendement, dans la mesure où il concerne le premier alinéa de l'article 106bis , § 1er , proposé.

Concernant le texte français du premier alinéa de l'article 106bis, § 1er , tel que proposé par les amendement nºs 29 et 38, on propose la formulation suivante : « Si cela s'avère indispensable, cette durée peut être prorogée par le Roi, après que les Chambres législatives ont délibéré des rapports du magistrat coordinateur, visés à l'article 101, quatrième alinéa. »

Le ministre souligne que, d'après le texte néerlandais, l'absolue nécessité de prolonger l'existence des chambres est appréciée en dernier ressort par le Roi. Il faut maintenir la nuance en question dans le texte français.

On pourrait rédiger le texte français de la manière suivante : « Cette durée ne peut être prorogée par le Roi que si cette prorogation s'avère indispensable et après que les chambres législatives ont délibéré des rapports du magistrat coordinateur, visés à l'article 101, quatrième alinéa. »

Selon le président, il faut considérer l'organisation des délibérations des chambres législatives comme une condition purement formelle. Il appartiendra au Roi de décider, sur la base de l'évaluation faite par les Chambres législatives, s'il y a lieu de prolonger ou non l'existence des chambres supplémentaires. Le Roi doit donc recueillir l'avis des Chambres législatives, lesquelles peuvent éventuellement adopter une motion. C'est le Roi, et non pas le Parlement, qui répond en dernière instance à la question de savoir si la condition de la nécessité absolue est remplie ou non.

Le ministre propose de rédiger l'article 106bis , deuxième alinéa, comme suit : « Après délibération des chambres législatives sur les rapports du magistrat coordinateur, visés à l'article 101, quatrième alinéa, la durée peut être prorogée par le Roi si cette prorogation s'avère indispensable. »

On souligne que le magistrat coordinateur aura déjà rédigé trois rapports annuels au moment de la délibération.

La commission approuve la proposition du ministre.

2. Votes

L'amendement nº 23 de MM. Lallemand et Erdman est retiré par ses auteurs dans la mesure où il concerne l'article 106bis , § 1er , premier alinéa.

L'amendement nº 24 de M. Goris est rejeté par 7 voix contre 1 et 1 abstention.

L'amendement nº 29 du Gouvernement est adopté par 8 voix contre 2 dans la mesure où il concerne l'article 106bis , premier alinéa.

Le sous-amendement nº 38 du Gouvernement est adopté, en ce qui concerne le littera A, à l'unanimité des 10 membres présents et par 8 voix contre 2 en ce qui concerne le littera B.

e) Compétence des chambres supplémentaires

1. Discussion

MM. Erdman et consorts déposent le sous-amendement nº 40 à l'amendement nº 23 (doc. Sénat, nº 1-490/7) :

« À l'article 106bis, § 1er , deuxième alinéa, insérer, entre les mots « ces chambres » et le mot « suivant, » les mots « qui siègent exclusivement en matière civile et commerciale. »

Les affaires pénales, ainsi que les affaires fiscales et disciplinaires n'entrent donc pas dans la compétence des chambres supplémentaires.

À la demande du ministre, on confirme que le traitement des intérêts civils peut être dissocié de celui de l'affaire pénale proprement dite. On peut donc dissocier les deux à la cour d'appel.

Néanmoins, il ne peut approuver que l'on exclue les affaires fiscales, parce que c'est précisément dans ces dernières qu'un arriéré important s'est développé. Selon lui, l'argument selon lequel la cour d'appel connaît en première instance de l'appel contre les décisions du directeur régional ne pèse pas d'un poids suffisant par rapport aux dommages provoqués par l'arriéré dans les affaires fiscales ainsi que financières et économiques. Il faut remédier à ce problème d'urgence, avec l'aide d'universitaires et de fiscalistes. Il va de soi que dans le traitement de ces affaires, il faut veiller attentivement à éviter les conflits d'intérêts.

Sur la base de ce qui précède, M. Vandenberghe et consorts déposent le sous-amendement nº 41 à l'amendement nº 40 (doc. Sénat, nºs 1-490/5 et7) :

« Remplacer les mots « en matière civile et commerciale » par les mots « en matière civile, fiscale et commerciale. »

Pour défendre l'extension de la compétence des chambres supplémentaires aux affaires fiscales, le ministre souligne que l'on prépare un projet de loi qui transférera l'ensemble du contentieux fiscal au pouvoir judiciaire, in casu , aux tribunaux de première instance et aux cours d'appel. Dès lors, dans un temps plus ou moins rapproché, les cours d'appel ne décideront plus en première instance, mais en appel.

On se heurtera alors également à l'objection de l'opposition d'intérêts. En effet, si l'on veut traduire cette réforme dans les faits, il faudra recruter des fiscalistes venant, par exemple, du barreau et de l'administration des impôts pour faire face à cette extension de compétence.

Dès lors, le ministre estime qu'il serait plus que judicieux qu'au moment de l'entrée en vigueur de la réforme de la procédure fiscale, les chambres supplémentaires résorbent à un rythme accéléré l'arriéré judiciaire des cours d'appel en la matière.

Un membre émet des objections concernant le sous-amendement nº 41 parce que, selon lui, rares sont les avocats spécialisés en droit fiscal qui entrent en considération pour une nomination en tant que conseiller suppléant. Dans un monde aussi petit, le risque de conflits d'intérêts n'est pas négligeable. Des avocats qui plaident l'un contre l'autre se retrouveront, parfois l'un dans la position d'avocat et l'autre dans celle de conseiller suppléant, ou tous deux dans celle de conseiller suppléant. L'intervenant estime qu'une telle situation n'est pas saine.

Le ministre répond qu'il faut briser ce cercle en revoyant la procédure fiscale de fond en comble. Cet aspect fait partie de la réforme annoncée ci-dessus.

Le manque de juristes-fiscalistes qui a été signalé par l'intervenant précédent n'est pas un fait nouveau, mais un vieux mal qui touche maintenant aussi les cours d'appel, ce qui a pour conséquence que de nombreux délits économico-financiers ne sont pas traités convenablement.

L'intervenant est convaincu que la nomination de juristes-fiscalistes aux fonctions de conseiller suppléant peut permettre de résorber rapidement l'arriéré en matière fiscale, sans que l'on ait à sacrifier les principes déontologiques.

Une approche dynamique des choses permettra de ramener le problème de l'arriéré à ses véritables dimensions. Il estime, notamment, que bien des affaires seront rayées du rôle. On incitera l'Administration fiscale, que certains accusent d'inertie, à contribuer activement au règlement rapide des litiges pendants.

Un membre demande si les vacances par ressort seront réparties suivant les spécialités en matière civile, d'une part, en matière fiscale, d'autre part, et en matière commerciale enfin.

Le cas échéant, l'instance qui doit émettre un avis sur le candidat, c'est-à-dire, la cour d'appel ou le collège de recrutement des magistrats, devra tenir compte de la spécialisation exigée pour la fonction déclarée vacante. Si l'on doit pourvoir, par exemple, à une série de places de conseillers suppléants spécialisés en droit fiscal, on pourra écarter d'emblée une série de candidatures en raison de l'existence d'une opposition d'intérêts trop grande.

Le ministre répond que le projet de loi ne prévoit pas une telle répartition.

La question sera toutefois résolue bientôt par l'application des procédures de nomination et de promotion que l'on est en train d'élaborer dans le cadre de la révision de l'article 151 de la Constitution. L'un des aspects que l'on examinera certainement en la matière concerne l'instauration de l'obligation d'utiliser des profils pour les vacances de chef de corps, profils qui seraient par exemple élaborés par le Conseil supérieur de la Justice.

L'intervenant estime que la mission visée incombe au pouvoir exécutif et qu'il n'y a pas lieu de préciser les choses dans le cadre du projet à l'examen.

Le ministre revient à la question de l'intervenant précédent, en confirmant que l'on pourrait d'ores et déjà travailler avec des profils. L'idéal serait de désigner d'abord les magistrats coordinateurs que l'on chargerait d'abord d'analyser l'arriéré judiciaire en fonction de la nature des affaires et de déterminer, ensuite, sur la base de la typologie à la quelle ils seraient parvenus, quel doit être le profil des conseillers suppléants, pour qu'ils puissent contribuer à résorber l'arriéré. Les candidats devraient alors être selectionnés sur la base de ce profil.

Pour ce qui est du texte français du troisième alinéa de l'article 106bis , § 1er , on propose la formulation suivante : « Suivant la procédure déterminée à l'article 106, premier alinéa, un règlement particulier est fixé pour ces chambres, qui siègent exclusivement en matière civile, fiscale et commerciale ».

En effet, la procédure prévue à l'article 106 concerne la fixation par le Roi d'un règlement particulier pour la cour d'appel et la cour du travail.

La commission approuve cette procédure.

Parallèlement à l'amendement nº 30 du Gouvernement, qui prévoit l'insertion d'un article 4bis (nouveau) (doc. Sénat, nº 1-490/5), M. Bourgeois dépose un sous-amendement nº 45 à l'amendement nº 23 de MM. Lallemand et Erdman, qui vise à prévoir également, à l'article 106bis , § 1er , dernier alinéa, proposé, que les affaires sont distribuées par le premier président en concertation avec le magistrat-coordinateur et conformément au règlement (doc. Senat, nºs 1-490/5 et 7).

Le ministre déclare que ce sous-amendement, ainsi que l'article 106, § 1er , dernier alinéa, tel que proposé par l'amendement nº 23 de MM. Lallemand et Erdman, sont superflus.

En effet, dans son amendement nº 30, le Gouvernement a proposé de prévoir que les affaires sont distribuées par le premier président en concertation avec le magistrat coordinateur et conformément au règlement (article 4bis ).

Comme la prescription en question vaut tant pour les chambres ordinaires que pour les chambres supplémentaires, il est inutile de prévoir semblable disposition à l'article 106bis , qui ne concerne que les chambres supplémentaires.

Sur quoi, MM. Lallemand et Erdman, de même que M. Bourgeois, retirent leurs amendements nºs 23 et 45 sur ce point.

2. Votes

L'amendement nº 23 de MM. Lallemand et Erdman, en ce qu'il insère un article 106bis , § 1er , deuxième et troisème alinéas, est adopté par 8 voix contre 2.

L'amendement nº 40 de M. Erdman et consorts est adopté par 8 voix et 2 abstentions.

Le sous-amendement nº 41 de M. Vandenberghe et consorts est adopté par 9 voix contre 2.

L'article 106bis , dernier alinéa, proposé, est supprimé.

L'article 4 ainsi amendé est adopté par 6 voix contre 2 et 1 abstention.

5. Article 4bis (nouveau) (art. 5 du texte adopté)

Article 109, alinéa premier, du Code judiciaire

a) Discussion

M. Erdman dépose l'amendement nº 12 (doc. Sénat, nº 1-490/3) :

« Insérer un article 4bis nouveau, libellé comme suit : « Art. 4bis. ­ L'article 109, alinéa 1er , du même Code est remplacé comme suit :

« Sans préjudice des compétences du magistrat coordinateur, les affaires sont distribuées par le premier président conformément au règlement de la cour. »

Le but du texte proposé est d'éviter que, dans la distribution des affaires, le premier président ne porte atteinte aux compétences du magistrat coordinateur. On prévient ainsi tout malentendu quant à leur rôle respectif.

Le ministre ne voit pas d'objection à apposer à ce texte. En pratique, il n'y aura probablement pas de problèmes, mais il souhaite que dans le cas contraire, la loi contienne le principe directeur permettant de régler un différend entre le premier président et la magistrat-coordinateur.

Un membre estime que l'on ne fait pas suffisamment la distinction entre les compétences du magistrat-coordinateur et celles du premier président.

Il souhaiterait plus de clarté à cet égard. Il croit par exemple pouvoir déduire des textes que les compétences du magistrat-coordinateur peuvent varier selon la cour d'appel. Chaque cour doit-elle fixer les compétences dudit magistrat ?

Le magistrat-coordinateur peut-il annuler ou infléchir les décisions prises par le premier président concernant la distribution des affaires et la désignation des conseillers suppléants ? Lequel de ces deux magistrats aura la prépondérance en la matière ?

L'auteur de l'amendement nº 12 déclare que sa proposition vise à clarifier les choses. En vertu de l'article 101, troisième alinéa (nouveau), proposé, du Code judiciaire, le magistrat-coordinateur est chargé notamment de l'organisation du travail (article 2).

Il peut par exemple décider que les chambres ordinaires doivent traiter un certain nombre d'affaires. Le premier président pourrait, en revanche, confier certaines affaires aux chambres supplémentaires.

Le critère qui distingue leurs compétences est que le magistrat-coordinateur élabore les directives générales concernant l'organisation du travail, tandis que le premier président s'occupe de l'attribution spécifique des affaires.

Si l'on ne modifie pas l'article 109, on crée une situation conflictuelle, puisque le premier président pourrait déduire de sa compétence exclusive en matière de distribution des affaires qu'il est également responsable de toute l'organisation des travaux, comme c'est le cas actuellement.

Comme c'est désormais le magistrat-coordinateur qui est chargé de cette dernière tâche, il faut que cette compétence soit reconnue dans le cadre de la distribution spécifique des affaires individuelles par le premier président. C'est donc le magistrat-coordinateur qui définit le schéma de travail général, et notamment les directives en matière d'organisation des travaux, sans préjudice de la compétence du premier président en ce qui concerne l'attribution des affaires individuelles.

Le préopinant observe qu'en vertu de l'article 101 (nouveau), troisième alinéa, in fine , proposé, le magistrat coordinateur exécute son travail sous l'autorité et la direction du premier président. Ce dernier ne peut par contre, distribuer les affaires que sous réserve de ce qui a été prévu par le magistrat-coordinateur dans l'organisation des travaux.

Dans une telle construction, la question est de savoir qui contrôle qui.

Selon l'intervenant, les compétences des deux magistrats ne sont pas suffisamment délimitées. Aussi l'article précité est-il de nature à susciter des conflits, un risque que l'amendement déposé ne neutralise pas complètement.

L'auteur de l'amendement nº 12 déclare que le texte qu'il propose lève toute ambiguïté. Une fois que les principes généraux de l'organisation ont été arrêtés par le magistrat-coordinateur des travaux sous l'autorité et la direction du premier président, il faut éviter qu'ensuite, le premier président ne vide ce cadre général de sa substance lors de la distribution des affaires, sans quoi il donnerait implicitement l'impression de vouloir revenir sur son accord.

L'amendement vise à éviter que, lors de la distribution des affaires, le premier président ne s'écarte du cadre que le magistrat-coordinateur a défini pour les travaux sous l'autorité et la direction du premier président.

Le Gouvernement dépose également un amendement tendant à insérer un article 4bis (amendement nº 30).

Il est rédigé comme suit (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Insérer un article 4bis (nouveau), rédigé comme suit :

« Art. 4bis. ­ À l'article 109, premier alinéa, du même Code, les mots « en concertation avec le magistrat-coordinateur et » sont insérés entre les mots « président » et « conformément. »

Justification

Le texte ainsi complété permet de définir plus clairement la relation entre le premier président et le magistrat-coordinateur au niveau de la répartition des affaires. La spécificité de la fonction du coordinateur a pour effet que celui-ci doit être associé à la répartition des affaires sans que soit porté préjudice à la responsabilité finale du premier président.

Le Gouvernement estime utile de prévoir explicitement que la distribution des affaires a lieu en concertation avec le magistrat-coordinateur, même si la décision finale est prise sous la responsabilité et l'autorité du premier président.

b) Votes

M. Erdman retire son amendement nº 12.

L'amendement nº 30 du Gouvernement est adopté par 8 voix et 1 abstention et devient ainsi l'article 5 (nouveau).

6. Article 5 (article 6 du texte adopté)

Article 109bis, § 2, du Code judiciaire

Cet article concerne l'attribution de l'appel des décisions rendues par le tribunal de commerce à des chambres ne comprenant qu'un conseiller.

a) Discussion

MM. Foret et Desmedt déposent l'amendement principal nº 13 et l'amendement subsidiaire nº 14 (doc. Sénat, nº 1-490/3) :

1. Amendement principal :

« Supprimer cet article. »

Justification

La suppression des trois conseillers pour les appels des décisions du tribunal de commerce est regrettable et ne tient pas compte de la concertation réelle qui existe en première instance entre un magistrat professionnel et deux magistrats consulaires, partenaires de justice à part entière dans des affaires où la liberté d'appréciation du tribunal est souvent très large. D'ailleurs, la réforme du concordat ne fera qu'accroître cette tendance. Or, les enjeux financiers et sociaux sont souvent importants.

Peut-on imaginer, dans une projection purement hypothétique, qu'un appel concernant la faillite des Forges de Clabecq puisse être traité par un seul conseiller alors que l'emploi de 1 800 travailleurs est en jeu ?

2. Amendement subsidiaire :

« Compléter l'article 109bis, § 2, alinéa 1er , 1ºbis, proposé, comme suit :

« pour autant que le conseiller ait exercé pendant au moins trois ans la fonction de juge au tribunal de commerce. »

Justification

Cet amendement est moins radical que notre amendement principal. Il vise à garantir que le conseiller unique qui aura à traiter d'un appel d'une affaire de commerce ait une expérience suffisante dans ce domaine car dans certaines cours d'appel, on constate qu'aucun membre n'est issu du tribunal de commerce (par exemple la cour d'appel de Liège). La suppression de la collégialité doit donc être contrebalancée par une expérience accrue dans ce domaine.

Le ministre déclare que, si l'on a opté pour le conseiller unique en matière commerciale, c'est parce que l'on souhaite résorber l'arriéré le plus rapidement possible.

Les parties peuvent d'ailleurs toujours, en vertu de l'article 109bis , § 2, deuxième et troisième alinéas, demander que l'affaire soit attribuée à une chambre composée de trois conseillers.

À propos de l'observation selon laquelle peu de conseillers seraient issus du tribunal de commerce, il répond que plusieurs conseillers et présidents de chambre du ressort d'Anvers ont siégé au tribunal de commerce. Ce n'est cependant pas le cas de toutes les cours. Ainsi la Cour d'appel de Liège ne compte-t-elle aucun conseiller ayant exercé pendant au moins trois ans la fonction de juge au tribunal de commerce.

Le magistrat coordinateur devrait par conséquent veiller à ce que, dans toute la mesure du possible, les conseillers uniques siégeant en matière commerciale aient de l'expérience en la matière.

Certes, ce n'est là qu'une réponse partielle aux réflexions contenues dans la justification de l'amendement nº 14.

Sur le fond, le ministre demeure partisan de la proposition permettant en principe aux chambres à conseiller unique de statuer sur l'appel des décisions rendues par le tribunal de commerce, sans préjudice du droit des parties de demander le renvoi de leur affaire devant une chambre composée de trois conseillers.

On pourrait éventuellement atténuer cette règle en habilitant le premier président à attribuer les affaires complexes à une chambre composée de trois conseillers.

En ce qui concerne l'exigence selon laquelle le conseiller unique devrait avoir une certaine expérience en matière commerciale, le ministre fait remarquer qu'alors, cette condition doit s'appliquer à toutes les autres matières du droit.

Les cours d'appel traitent par exemple aussi des affaires purement fiscales. Or, aucun conseiller n'a jamais été confronté à de telles affaires en première instance, puisqu'à ce niveau, les litiges fiscaux relèvent de la compétence du directeur régional des contributions.

Tout conseiller sera donc confronté à des questions de droit qu'il n'a pas eu à traiter en première instance. Il lui faudra par conséquent approfondir la matière pour pouvoir instruire un recours en connaissance de cause.

Si tous les conseillers ne devaient traiter que des affaires relevant de leur sphère d'intérêt, l'arriéré judiciaire ne serait pas prêt d'être résorbé.

C'est pourquoi il est préférable que les magistrats promus aux fonctions de conseiller à la cour d'appel reçoivent une formation spécialisée dans la branche du droit dont ils auront à connaître dans la chambre à laquelle ils seront affectés. Il appartiendra au premier président d'en décider.

Un membre soulève deux problèmes.

En premier lieu, le règlement particulier de la cour d'appel déterminera à quelles chambres les recours formés contre les jugements du tribunal de commerce doivent être attribués.

Comme les parties connaissent la composition de ces chambres, il n'est pas exclu que leurs avocats optent pour l'une ou l'autre chambre en fonction des conseillers qui y siègent.

En deuxième lieu, à l'heure actuelle, tous les recours pendants contre les jugements du tribunal de commerce ont été confiés à des chambres à trois conseillers.

L'intervenant estime que la modification à apporter à la loi ne peut remettre en cause cette situation.

Il souhaite donc que le ministre confirme qu'en ce qui concerne le recours des jugements du tribunal de commerce, le régime du conseiller unique ne s'appliquera qu'aux appels interjetés après l'entrée en vigueur de la loi en projet.

Un autre membre fait valoir que le nouveau système n'aura pas ou guère d'effet si toutes les parties font usage de la possibilité qui leur est offerte par la loi de demander le renvoi de leur affaire devant une chambre à trois conseillers. Ce qui démontre que le régime proposé n'est pas souhaitable.

Par ailleurs, il conteste également le parallèle fait par le ministre entre les affaires fiscales, d'une part, et les affaires civiles et pénales, d'autre part.

Ce faisant, il oublie que la grande majorité des conseillers sont issus du tribunal de première instance et ont donc une expérience suffisante en matière civile et en matière répressive.

On ne peut en dire autant des quelques conseillers issus du tribunal de commerce. Ce tribunal a du reste été créé précisément pour trancher des litiges complexes relatifs au droit commercial et économique.

À suivre le raisonnement du ministre, on n'avait aucune raison de créer les tribunaux et les cours du travail. On aurait tout aussi bien pu dire que tous les juges devraient également pouvoir connaître des litiges en matière de droit du travail et de sécurité sociale.

Il s'oppose dès lors au régime défini à l'article 5 et plaide pour que l'on adopte au moins l'amendement subsidiaire nº 14. Comme le tribunal de commerce à des compétences parfois très spécialisées (articles 573 et 574 du Code judiciaire), il estime que le conseiller unique qui connaît d'appels de décisions d'un tribunal de commerce doit absolument avoir exercé pendant au moins trois ans, les fonctions de juge auprès de ce tribunal, sinon, on risque d'être confronté à des situations dans lesquelles des conseillers uniques n'ayant aucune expérience dans la matière en question auraient à examiner en deuxième instance une décision collégiale de trois juges du tribunal de commerce.

Un membre déclare que, selon la philosophie du préopinant il serait uniquement possible, du point de vue strictement juridique, de disposer ­ mais cela reviendrait à mettre les choses sens dessus dessous ­ que le recours doit être introduit devant une chambre composée de trois conseillers, après quoi l'examen de celui-ci doit être attribué à un conseiller unique ayant une expérience de trois ans auprès du tribunal de commerce. L'inverse serait impossible, parce qu'il est des cours d'appel, comme celle de Liège, où aucun juge ne satisfait à ce critère.

L'intervenant craint que cela ne soit difficile à appliquer dans la pratique.

Le ministre prévient qu'au cas où seuls les conseillers disposant d'une expérience de trois ans au tribunal de commerce pourraient connaître des appels des jugements rendus par ce tribunal, la procédure risquerait de devenir inapplicable. Il pourrait en résulter, en théorie, une situation dans laquelle un conseiller en appel pourrait se voir attribuer une affaire dont il aurait déjà eu à connaître en première instance. Il va de soi qu'une telle procédure serait contraire au principe de l'administration indépendante et impartiale du droit.

Il s'agit donc d'élaborer un système qui ne risque pas de s'enrayer.

L'intervenant précédent signale que l'argumentation développée par les auteurs des amendements nºs 13 et 14 concerne des matières très spécialisées, mais que se passe-t-il en ce qui concerne les litiges relatifs à des factures commerciales ?

L'appel d'un jugement du tribunal de police relatif à un accident de la circulation ayant entraîné mort d'homme est examiné devant le tribunal de première instance, alors que l'appel d'une décision du tribunal de commerce concernant une facture d'une valeur de 105 000 francs est porté devant la cour d'appel. Cette situation est quelque peu absurde.

Un autre membre répète qu'en donnant aux parties la possibilité de demander le renvoi de leur cause devant une chambre composée de trois conseillers, on répond de manière satisfaisante aux critiques formulées contre le système du conseiller unique en matière commerciale.

Mais, même ainsi, les parties n'auraient pas la garantie que la chambre à laquelle leur affaire serait confiée comprendrait un conseiller qui aurait occupé les fonctions de juge auprès du tribunal de commerce.

Un autre intervenant note que l'on néglige, dans le présent débat, l'apport des magistrats consulaires qui siègent au tribunal de commerce. Cette constatation vaut également, mutatis mutandis, pour ce qui est des tribunaux du travail.

Il se pourrait qu'en cas d'appel, les avis de ces magistrats ne soient plus pris en considération.

L'intervenant estime qu'il serait dangereux de confier le règlement de certains litiges, par exemple les litiges relatifs à des faillites qui auraient des conséquences économiques et sociales graves pour ce qui est de l'emploi, à un conseiller unique. Il n'est pas certain que ce dernier tiendrait compte, au moment de mettre en balance les intérêts en cause, des considérants qui auraient été formulés en première instance, grâce à l'apport des magistrats consulaires.

À son avis, confier des litiges qui sont susceptibles d'avoir un impact grave sur le plan économique et social à un conseiller unique nuirait à l'image que l'on se fait de la justice et à la crédibilité de la cour d'appel.

On souligne que le système dans lequel le conseiller unique connaît des appels de décisions du tribunal de commerce a une portée générale et qu'il n'est pas applicable seulement en ce qui concerne les affaires relevant de la définition de l'arriéré judiciaire au sens de l'article 109ter proposé du Code judiciaire.

Pour les appels des jugements du tribunal de commerce, il faudra donc choisir entre une chambre composée de trois conseillers et le système du conseiller unique avec possibilité, pour les parties, de demander le renvoi de leur affaire devant une chambre composée de trois conseillers, conformément aux dispositions de l'article 109bis , § 2, deuxième et troisième alinéas, du Code judiciaire.

Un autre membre entrevoit une troisième solution. Pourquoi ne pourrait-on pas désigner des magistrats consulaires au niveau de la cour d'appel ?

On objecte à l'encontre d'une telle procédure que, si elle pourrait être intéressante du point de vue budgétaire, elle aurait malheureusement aussi pour effet de rendre moins souples les modalités de constitution des chambres.

b) Votes

L'amendement nº 13 de MM. Foret et Desmedt est rejeté par 8 voix contre 1.

Leur amendement subsidiaire nº 14 est rejeté par un vote identique.

L'article 5 est adopté en tant qu'article 6 par 6 voix contre 2 et 1 abstention.

7. Article 6 (art. 7 du texte adopté)

Article 109ter du Code judiciaire (nouveau)

L'article proposé détermine quelles sont les causes qui relèvent de l'arriéré judiciaire et qui seront attribuées aux chambres supplémentaires.

a) Discussion

Un commissaire aimerait savoir si toute demande de fixation est concernée ou s'il faut faire une distinction selon que la demande est fondée contradictoirement ou unilatéralement, sur les articles 747, § 2, 750 ou 751 du Code judiciaire.

Le ministre répond que l'on ne fait aucune distinction (cf. l'exposé des motifs, doc. Sénat, 1996-1997, nº 490/1, pp. 3 et 4).

Le préopinant déduit de l'article proposé qu'à la date de l'entrée en vigueur de la loi, on réalisera un instantané de toutes les causes qui seront attribuées aux chambres supplémentaires à titre d'arriéré judiciaire.

Cela signifie qu'une demande de fixation qui sera faite un jour après cette date fera que la cause sera instruite par une chambre ordinaire de la cour d'appel.

En théorie, il est donc possible qu'une partie demandant, par exemple, devant la Cour d'appel de Gand, la fixation de sa cause le lendemain de l'entrée en vigueur de la loi se voie attribuer une fixation en l'an 2001, alors qu'une autre partie qui aurait demandé une fixation la veille de l'entrée en vigueur de la loi verrait soudain sa cause examinée à court terme, à titre d'arriéré judiciaire, par une chambre supplémentaire.

Toutes les parties qui ne veulent pas que l'examen de leur appel traîne en longueur ont donc intérêt à encore demander une fixation avant l'entrée en vigueur de la loi, afin de faire trancher leur cause dans les trois ans par les chambres supplémentaires.

Le ministre souligne que le projet de loi en discussion vise à résorber l'arriéré judiciaire actuel, c'est-à-dire celui qui existera au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. L'arriéré futur, qui apparaîtra après cette entrée en vigueur, n'est pas visé. On pourra éventuellement examiner, lors de l'évaluation de la demande de prolongation de la période pour laquelle les chambres supplémentaires auront été constituées, comment l'arriéré judiciaire aura évolué. Les chambres ordinaires des cours d'appel seront-elles parvenues à régler dans un délai raisonnable le flux des nouvelles causes ?

Si on ne se borne pas à leur confier la résorption de l'arriéré judiciaire actuel, mais qu'on les charge en outre d'examiner des nouvelles causes dans l'espoir de maîtriser ainsi le flux croissant des recours, les chambres supplémentaires prendront un caractère permanent.

D'après un membre, il serait utile d'analyser l'arriéré judiciaire des cours d'appel et d'en faire un inventaire de causalité.

Il est convaincu que l'on recensera de nombreuses affaires qui ont été résolues par les circonstances ou de par leur nature et qui pourront être rayées du rôle.

Les affaires restantes pourraient alors être groupées par thème, en vue de leur attribution aux chambres supplémentaires.

Selon le ministre, l'article 730, § 2, du Code judiciaire permet de faire une distinction entre l'arriéré judiciaire fictif et l'arriéré réel.

En vertu de cette disposition, les causes qui sont inscrites au rôle depuis plus de trois ans et dont les débats n'ont pas été ouverts ou n'ont plus été continués depuis plus de trois ans sont omises d'office du rôle, à moins que leur maintien ne soit demandé.

Les cours d'appel ont ainsi un moyen simple de résorber l'arriéré fictif et de ne plus devoir attribuer aux chambres supplémentaires que les seules causes pouvant être qualifiées d'arriéré effectif.

Les statistiques relatives à la seconde moitié de l'année 1996 montreront dans quelle mesure l'article 730, § 2, du Code judiciaire a contribué à résorber l'arriéré judiciaire fictif.

Un commissaire aimerait savoir si le deuxième alinéa de l'article 109ter proposé n'est pas contraire à l'article 109bis.

Ce dernier article énumère les différentes catégories d'appels qui sont attribuées aux chambres ne comprenant qu'un conseiller.

En vertu de l'article 109ter, deuxième alinéa, les causes qui, conformément au premier alinéa, sont considérées comme arriéré judiciaire sont attribuées à une chambre ordinaire composée de trois conseillers ou d'un conseiller pour autant que la demande en soit faite par une partie au plus tard un mois après la notification de la date de plaidoirie pour la chambre supplémentaire sans autres formalités qu'une demande écrite adressée au premier président.

L'intervenant en déduit que les causes sont attribuées à une chambre supplémentaire composée de trois conseillers sauf si une partie demande le renvoi à une chambre ordinaire composée de trois conseillers. À ses yeux, cette règle ne peut toutefois préjudicier au prescrit de l'article 109bis.

Selon un autre membre, l'article 109ter, deuxième alinéa, implique qu'une partie dont la cause a été attribuée à une chambre supplémentaire peut encore demander malgré tout le renvoi devant une chambre ordinaire à trois conseillers ou une chambre à conseiller unique. Elle n'a pas besoin pour cela de l'accord de la partie adverse. Il suffit qu'une des parties réagisse et demande le renvoi à une chambre ordinaire pour faire traîner la procédure.

Le préopinant déclare que le texte français est quelque peu équivoque. Il propose donc de modifier l'article 109ter, deuxième alinéa, comme suit : « Les causes sont attribuées à une chambre composée de trois conseillers ou d'un conseiller. La demande en est faite ... ».

Un commissaire tient à souligner l'effet pervers de la réglementation proposée.

Un appel est attribué à un conseiller unique. Les parties ne demandent pas le renvoi à une chambre composée de trois conseillers. À supposer que cette cause se voie accorder une fixation éloignée de plus d'un an de la date d'entrée en vigueur de la loi en projet, elle sera attribuée à une chambre supplémentaire. Une partie peut toutefois demander le renvoi devant une chambre ordinaire à trois conseillers sur la base de l'article 109ter, deuxième alinéa.

D'après l'intervenant, cette disposition recèle un moyen de contourner la règle du conseiller unique.

C'est pourquoi, d'après lui, une partie ne devrait pouvoir demander le renvoi que devant une chambre ordinaire à conseiller unique, sauf si la cause avait déjà été fixée précédemment devant une chambre à trois conseillers ou si le renvoi devant une chambre à trois conseillers avait été demandé. Dans ce cas, la partie concernée pourrait, en vertu de l'article 109ter, deuxième alinéa, prétendre faire examiner sa cause par une chambre ordinaire à trois conseillers.

Le texte devrait donc être amendé dans ce sens.

Le ministre confirme que les parties renvoyées d'office devant les chambres supplémentaires composées de trois conseillers ont encore la possibilité, en vertu de l'article 109ter, deuxième alinéa, de comparaître devant les chambres ordinaires, étant entendu que le droit commun applicable en matière de composition des chambres ordinaires ­ à savoir l'article 109bis ­ ne peut être contourné, par exemple en demandant le renvoi devant une chambre ordinaire à trois conseillers pour un appel qui est normalement traité par un conseiller unique.

Cela signifie que la partie concernée qui fait une telle demande comparaît, devant une chambre ordinaire à trois conseillers, à moins qu'il ne s'agisse d'une matière qui, en vertu de l'article 109bis, doit être soumise à une chambre composée d'un seul conseiller.

Une partie dont l'appel a été attribué à une chambre supplémentaire composée de trois conseillers ne peut donc pas s'en prévaloir pour faire examiner sa cause par une chambre ordinaire composée d'un ou de trois conseillers si cette demande implique la violation du prescrit de l'article 109bis.

À la lumière de cette remarque, l'un des intervenants précédents propose de modifier l'article 109ter , deuxième aliné, comme suit :

« Les causes sont attribuées à une chambre ordinaire composée de trois conseillers, à moins qu'en application de l'article 109bis, la compétence d'une chambre composée d'un conseiller unique ne soit prescrite. La demande y afférente doit être faite au plus tard un mois après la notification de la fixation pour la chambre supplémentaire sans autres formalités qu'une demande écrite adressée au premier président (...). »

Il n'existe ainsi aucun malentendu quant au fait que l'attribution des causes aux chambres ordinaires doit respecter les règles prévues à l'article 109bis du Code judiciaire.

Le Gouvernement dépose un amendement à l'article 6 (amendement nº 31), tendant à expliciter l'application de l'article 109bis du Code judiciaire, lorsqu'une affaire fixée devant une chambre supplémentaire revient, à la demande d'une partie, devant une chambre ordinaire à un ou trois conseillers (doc. Sénat, nº 1-490/5).

Cet amendement est libellé comme suit :

« Remplacer la première phrase du deuxième alinéa de l'article 109ter proposé par la disposition suivante :

« Par application de l'article 109bis, les causes sont attribuées à une chambre ordinaire composée de trois conseillers ou d'un conseiller pour autant que la demande en soit faite au plus tard un mois après la notification de la fixation pour la chambre supplémentaire sans autres formalités qu'une demande écrite adressée au premier président. »

Justification

Cet amendement vise à apporter une précision au texte. Lorsqu'une partie en fait la demande écrite au premier président au plus tard un mois après la notification de la fixation pour une chambre supplémentaire, la cause est (à nouveau) attribuée à une chambre ordinaire composée d'un ou de trois conseillers, conformément au prescrit de l'article 109bis du Code judiciaire.

M. Erdman dépose l'amendement nº 49 (doc. Sénat, nº 1-490/8) :

« Remplacer le deuxième alinéa de l'article 109ter proposé par ce qui suit :

« Les causes sont attribuées à une chambre ordinaire composée de trois conseillers ou d'un conseiller pour autant que la demande en soit faite par toutes les parties au plus tard un mois après la notification de la fixation pour la chambre supplémentaire sans autres formalités qu'une demande écrite commune adressée au premier président. Cette notification a lieu au plus tard dans un délai de six mois après l'entrée en vigueur du présent article. »

Justification

Il est déjà prévu actuellement que toutes les causes pour lesquelles soit une fixation a été accordée pour une date éloignée de plus d'un an de la date de mise en vigueur de la loi, soit aucune fixation n'a encore été accordée alors qu'elle a été demandée seront, en principe, jugées par les chambres instituées par la loi en projet.

L'article 109ter, deuxième alinéa, proposé laisse aux parties la possibilité de faire examiner leur cause par les chambres déjà existantes composées d'un ou de trois conseillers « effectifs », à la condition que l'article 109bis du Code judiciaire soit respecté. À cet effet, une des parties devra adresser une demande écrite de renvoi au premier président dans le mois de la notification de la fixation.

Afin d'éviter qu'une des parties ne recoure à cette possibilité de renvoi devant une chambre existante dans le but d'obtenir un nouveau report de l'examen de la cause, il convient que la demande en question émane des deux parties. Seule une demande commune, en effet, sert l'intérêt de toutes les parties.

L'auteur déclare que cet amendement vise à éviter que les parties qui désirent empêcher un règlement de leur cause par une chambre supplémentaire ne demandent systématiquement le renvoi devant une chambre ordinaire.

Si l'on adopte sans le modifier l'article 109ter , deuxième alinéa, proposé, on procure à la partie récalcitrante le moyen idéal de faire traîner la procédure en longueur.

Étant donné qu'une partie non négligeable de l'arriéré des cours d'appel est constitué de causes dans lesquelles une des parties a intérêt à faire traîner la procédure, le projet de loi en discussion risque d'être un coup d'épée dans l'eau si une partie peut, à elle seule, demander le renvoi de la cause devant une chambre ordinaire.

En outre, pareille procédure alourdira sensiblement le volume de travail du greffe.

Il faut bien se représenter le déroulement de la procédure.

En vertu de l'article 109ter, premier alinéa, proposé, les causes qui sont actuellement attribuées à une chambre ordinaire seront renvoyées devant une chambre supplémentaire. Le greffe en avertira les parties intéressées. Si une partie demande le renvoi devant une chambre ordinaire, le greffe devra aviser les parties de la nouvelle fixation.

Deux remarques s'imposent en l'espèce.

­ Comme le renvoi de leur cause devant une chambre ordinaire fera perdre aux parties l'avantage de leur fixation initiale, elles devront demander une nouvelle fixation, ce qui entraînera une nouvelle perte de temps.

­ On peut déduire du texte proposé, tel qu'il a été modifié par l'amendement nº 31 du Gouvernement, que les parties dont la cause a été renvoyée devant une chambre ordinaire n'ont plus le choix entre une chambre composée d'un conseiller et une chambre composée de trois conseillers.

Lorsqu'une cause est renvoyée devant une chambre ordinaire composée d'un conseiller en vertu de l'article 1099bis, tant l'appelant que l'intimé sont libres de faire attribuer la cause à une chambre composée de trois conseillers. Si cette cause, conformément à l'article 109ter, premier alinéa, proposé, est renvoyée devant une chambre supplémentaire composée de trois conseillers, une partie qui demanderait le renvoi devant une chambre ordinaire ne pourrait plus choisir entre une chambre à un conseiller et une chambre à trois conseillers. Selon le texte et l'amendement nº 31 du Gouvernement, ce serait alors un conseiller siégeant seul dans une chambre ordinaire qui se prononcerait.

C'est là une construction diabolique, qui récompense la partie récalcitrante.

Il est possible de contrecarrer à un tel abus de différentes façons :

­ toutes les parties sont averties que, sauf opposition de leur part, les causes visées à l'article 109ter seront soumises aux chambres supplémentaires;

­ toutes les parties doivent donner préalablement leur accord pour un renvoi devant une chambre supplémentaire;

­ les causes visées à l'article 109ter sont automatiquement renvoyées devant les chambres supplémentaires, à moins que, comme le propose l'amendement nº 49, les parties ne demandent conjointement le renvoi de leur cause devant une chambre ordinaire.

Le ministre se dit partisan de cette dernière formule. Il souligne que dans l'évaluation de la procédure prévue par le projet de loi, deux facteurs doivent être mis dans la balance. D'une part, il y a le risque d'abus de procédure lorsqu'une partie peut demander seul le renvoi d'une cause devant une chambre ordinaire. D'autre part, cette possibilité de choix accordée à chacune des parties compense le caractère exceptionnel de la réglementation, et plus particulièrement la composition spécifique des chambres supplémentaires.

L'amendement nº 49 de M. Erdman constitue un frein à d'éventuels abus de procédure, du fait qu'une partie peut faire obstacle à des manoeuvres dilatoires de la partie adverse qui demande le renvoi devant la chambre ordinaire en refusant de cosigner la requête y afférente. Si aucune demande commune n'est introduite dans le mois qui suit la notification de la fixation devant la chambre supplémentaire, celle-ci reste compétente.

On fait observer qu'en matière civile, fiscale et commerciale, le parquet n'est pas partie au procès.

En ce qui concerne le problème du renvoi d'une cause devant une chambre ordinaire à un conseiller ou à trois conseillers, le ministre déclare que l'objectif est que la cause soit renvoyée devant une chambre ordinaire composée du même nombre de conseillers que celle devant laquelle elle avait été fixée en dernier lieu. Si une affaire était initialement fixée à la demande d'une partie devant une chambre ordinaire composée de trois conseillers, elle est de nouveau renvoyée devant une chambre ordinaire dont la composition est identique. Il ne doit donc pas s'agir de la même chambre composée des trois mêmes conseillers.

L'auteur de l'amendement marque son accord.

Cette formule garantit la souplesse dans l'organisation des travaux et la répartition des causes.

Sur la base de ce qui précède, le Gouvernement dépose le sous-amendement nº 50 à l'amendement nº 49 (doc. Sénat nº 1-4990/8) :

« Remplacer les mots « de trois conseillers ou d'un conseiller » par les mots « du même nombre de conseillers que la chambre saisie initialement. »

b) Votes

Le Gouvernement retire son amendement nº 31.

L'amendement nº 49 de M. Erdman et le sous-amendement nº 50 du Gouvernement sont adoptés par 5 voix contre 2 et 1 abstention.

L'article 6 ainsi amendé est adopté en tant qu'article 7, par 5 voix contre 2 et 1 abstention.

8. Article 7 (art. 8 du texte adopté)

Article 120, alinéa 1er , du Code judiciaire

Cet article confère aux membres de la cour d'appel admis à la retraite en raison de leur âge la possibilité de présider une cour d'assises.

a) Discussion

MM. Foret et Desmedt déposent l'amendement nº 15 (doc. Sénat, nº 1-490/3) :

« Supprimer cet article. »

Justification

Il y a une contradiction flagrante entre le fait de considérer que ces conseillers sont trop âgés pour siéger dans une chambre ordinaire de cour d'appel, où les débats se déroulent généralement dans un climat serein et peu passionné, et la disposition projetée qui considère que ces mêmes personnes sont aptes à siéger dans des procédures beaucoup plus passionnées, stressantes et éprouvantes.

Vu la lourdeur des procédures d'assises, il est d'ailleurs probable que cette mesure aura peu de succès, à l'instar d'ailleurs du système actuel qui permet déjà aux magistrats retraités d'exercer des fonctions de conseiller suppléant mais qui s'est révélé être un échec.

Les auteurs de l'amendement se réfèrent à la critique qu'ils ont formulée, lors de la discussion générale, à l'égard de la disposition projetée.

Une contre-proposition consisterait à prévoir le remplacement, en chambre ordinaire, du conseiller effectif appelé à présider la cour d'assises par un conseiller suppléant.

Le ministre déclare que l'article doit son existence à un premier président de la cour d'appel qui y voyait un bon moyen d'endiguer l'inflation de l'arriéré judiciaire.

La plupart des cours d'appel sont confrontées à un nombre croissant d'affaires qui relèvent des assises.

À l'heure actuelle, la Cour d'appel d'Anvers, par exemple, doit constamment libérer deux présidents de chambre ou conseillers pour leur permettre de siéger à la cour d'assises.

Le premier président près la Cour d'appel de Bruxelles a fait savoir que certaines chambres ordinaires ont suspendu temporairement leurs activités en raison, d'une part, de la pénurie de magistrats et, d'autre part, de la réquisition perpétuelle de deux conseillers pour siéger à la cour d'assises.

Une enquête menée par les premiers présidents dans leur propre ressort révèle que nombre de membres des cours d'appel admis à la retraite sont candidats à la présidence de la cour d'assises.

Ces magistrats présentent l'avantage de pouvoir se consacrer pleinement aux affaires d'assises sans plus avoir les préoccupations afférentes à la fonction de conseiller à la cour d'appel.

Cette formule remporte par conséquent les suffrages du ministre. Les magistrats admis à la retraite ne sont d'ailleurs pas réquisitionnés; l'initiative leur appartient. Celle-ci constitue une première indication sur le fait qu'ils se considèrent eux-mêmes en mesure de bien diriger de tels procès éprouvants.

Un membre est convaincu que la désignation d'un vaillant septuagénaire à la présidence de la cour d'assises pour juger l'affaire Dutroux se heurterait à l'opposition de l'opinion publique.

Le reflet de la société joue par ailleurs un rôle important pour la situation et le jugement d'une affaire d'assises. Sauf respect dû aux membres des cours d'appel admis à la retraite, l'orateur estime que les magistrats d'un âge avancé n'ont souvent plus de lien avec l'esprit actuel du temps, qui est sans commune mesure avec celui qui régnait trente ans plus tôt, par exemple.

C'est surtout dans les procès d'assises, médiatisés à outrance, que se fait sentir l'absolue nécessité que le président ne perde pas de vue, dans la direction des débats, ce qui se vit dans la société actuelle. C'est la raison pour laquelle l'intervenant se rallie à la proposition de confier la présidence de la cour d'assises exclusivement à des conseillers effectifs.

Un autre intervenant relève que l'âge n'est pas en soi un critère pour considérer notamment les magistrats admis à la retraite comme n'étant plus aptes à l'exécution de missions délicates. La jeunesse d'esprit et la vigilance d'une personne âgée relèvent davantage de sa personnalité que de son âge. Il se peut ainsi que certains soient épuisés à cinquante ans, alors que d'autres fassent toujours preuve d'une grande vitalité à septante ans.

Il se réfère aux plus hautes juridictions du pays pour lesquelles la limite d'âge est fixée à septante ans. Le fonctionnement de ces juridictions, qui doivent se prononcer sur les questions les plus complexes, comme la responsabilité pénale des ministres, ne s'en trouve pas entravé pour autant.

Un autre membre acquiesce. Il ne tient pas à sous-estimer les arguments avancés à l'encontre de la désignation de magistrats admis à la retraite, mais force lui est de constater qu'à l'époque actuelle, on ignore assez facilement l'interdiction de discrimination en raison de l'âge.

Pour étayer la thèse selon laquelle l'âge obligatoire de la retraite est quelque peu relatif, il cite en exemple la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg, où la limite d'âge des juges est fixée à septante-cinq ans. Personne ne soutiendra avec sérieux que ces juges ne sont pas en mesure de remplir correctement leur tâche.

Il attire en outre l'attention sur le fait que le Gouvernement prend une mesure d'urgence pour pallier une situation alarmante. La question est de savoir si, dans ces circonstances, on ne peut faire appel à des magistrats admis à la retraite qui se considèrent eux-mêmes comme aptes à assumer la présidence d'une cour d'assises durant une ou deux années de plus.

L'intervenant n'y voit aucune objection. Il n'y a en effet pas d'obligation pour ces magistrats. Par ailleurs, il suppose que le premier président de la cour d'appel exercera un contrôle implicite pour vérifier si le candidat dispose bien de l'expérience suffisante.

Enchaînant sur ce point, le ministre déclare que, sans vouloir préjuger de la décision d'un premier président, il ne peut imaginer que ce dernier accepte avec légèreté la candidature d'un magistrat admis à la retraite qui, au cours de sa carrière, n'a eu à traiter que des affaires fiscales et financières. Le premier président n'aurait d'ailleurs qu'un intérêt limité à prendre une telle candidature en considération.

Il a, par ailleurs, également du mal à imaginer qu'un magistrat admis à la retraite, n'ayant aucune expérience des affaires pénales, se sente appelé à la présidence d'une cour d'assises. À l'heure actuelle déjà, beaucoup de conseillers qui ne traitent que des causes civiles ou commerciales frémissent à l'idée de devoir juger des affaires pénales pendant les vacances judiciaires.

Le ministre précise que le magistrat admis à la retraite qui préside une cour d'assises mène les débats sans être soumis à une quelconque forme de contrôle (cf. l'article 268 du Code d'instruction criminelle). Le magistrat en question perçoit, pour ce faire, l'indemnité visée à l'article 379quater que l'article 21 du projet propose d'insérer dans le Code judiciaire. Cette indemnité sera limitée afin d'éviter que le plafond de cumul en vigueur pour la pension de retraite ne soit dépassé dans le cas du magistrat considéré.

Un des auteurs de l'amendement nº 15 visant à supprimer l'article en discussion déclare n'être nullement convaincu par les arguments en faveur de la possibilité conférée à des membres des cours d'appel admis à la retraite de présider une cour d'assises.

Premièrement, il lui semble par trop surréaliste que la mesure projetée à l'article 7 soit adoptée sur simple suggestion d'un premier président d'une cour d'appel, alors que les réserves émises par l'Union des magistrats des cours d'appel sur le renvoi, devant un conseiller siégeant seul, des appels des décisions du tribunal de commerce ne sont pas entendues.

Deuxièmement, l'argument concernant la limite d'âge fixée pour les plus hautes juridictions nationales et internationales est peu cohérent, car il existe précisément une tendance inverse, visant à abaisser l'âge de la retraite. Il n'y a pas si longtemps, la limite d'âge pour les magistrats de la Cour de cassation était fixée à 75 ans. Aujourd'hui, les sénateurs Coveliers et Leduc, entre autres, proposent de l'abaisser à 65 ans (doc. Senat, 1996-1997, nr. 1-443/1).

Troisièmement, on peut difficilement comparer le climat parfois émotionnel d'une cour d'assises, dont le président joue un rôle capital dans la directive des débats, et l'atmosphère majestueuse et feutrée qui règne dans les plus hautes juridictions, où s'applique le principe de la décision collégiale. Ainsi, la Cour de cassation statue-t-elle chambres réunies ­ onze membres au moins doivent être présents ­ sur les accusations portées contre les ministres (article 131 du Code judiciaire).

L'intervenant espère avoir ainsi suffisamment démontré que la proposition visant à confier la présidence d'une cour d'assises à un membre d'un cour d'appel admis à la retraite n'est pas une bonne initiative.

Si la proposition devait malgré tout être adoptée, il conviendrait à tout le moins de préciser dans le texte de la loi que les candidats doivent avoir acquis, au cours de leur carrière active, une expérience professionnelle suffisante en matière de direction de procès d'assises.

Un membre déclare qu'il ne votera pas l'article 7 projeté, même si la précision qui vient d'être formulée y était apportée. Il allègue le principe selon lequel tous les magistrats doivent être assujettis à un âge identique de la retraite, à savoir 65 ans. Il ne peut dès lors en aucun cas être question de faire appel à des magistrats admis à la retraite pour exercer certaines fonctions judiciaires.

Au moment où davantage de moyens vont être affectés à la justice, il faut oeuvrer au rajeunissement de la magistrature. L'adoption d'un âge de la retraite identique pour tous les magistrats à 65 ans constituerait le premier pas dans cette voie et indiquerait à la population que la modernisation de la justice est en cours.

Un autre intervenant attire l'attention sur le fait que la disposition proposée revêt un caractère provisoire et exceptionnel. Elle fait partie d'un ensemble de mesures d'urgence, visant à résorber l'arriéré judiciaire. Si la logique du régime proposé est mise à mal par le rejet de certains éléments, toute la réforme risque d'échouer.

Un des auteurs de l'amendement nº 15 réplique que la proposition visant à octroyer aux magistrats admis à la retraite la possibilité de présider une cour d'assises ne constitue pas une mesure exceptionnelle d'une validité limitée à trois ans. Cette disposition revêt un caractère permanent.

L'intervenant précédent observe que l'esprit de la disposition projetée est provisoire. Elle ne sera appliquée que dans le cadre des autres mesures dont l'objectif est de résorber l'arriéré judiciaire, tel que défini, conformément à l'article 109ter proposé du Code judiciaire, au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Son application est par conséquent parallèle aux mesures temporaires contenues dans le projet de loi. S'il s'avérait, dans l'avenir, qu'il n'y a aucune résorption de l'arriéré judiciaire, le législateur devrait prendre de nouvelles mesures.

Le ministre souscrit aux propos du précédent orateur. Il rappelle une fois encore la ratio legis de l'article 7. Donner à des membres des cours d'appel admis à la retraite en raison de leur âge la possibilité de présider une cour d'assises permet, d'une part, d'alléger le travail des chambres ordinaires des cours d'appel et, d'autre part, de libérer des conseillers effectifs pour leur permettre, à leur tour, de siéger à nouveau dans des chambres ordinaires et, éventuellement, dans des chambres supplémentaires.

Il ne faut pas mésestimer l'importance de cette mesure. La présidence d'une cour d'assises ne se limite pas, tant s'en faut, à diriger les débats. Le président doit tout d'abord étudier le dossier avant que les audiences ne commencent. Après le procès, il doit encore remplir un certain nombre de fonctions.

Si le premier président pouvait faire appel à des magistrats admis à la retraite, ne fût-ce que pour certaines causes, les conseillers effectifs qui se verraient ainsi libérés pourraient vaquer pleinement à leurs fonctions.

Aussi petite que puisse être la contribution de cette mesure à la résorption de l'arriéré judiciaire, elle ne peut, aux dires du ministre, être négligée.

À la question de savoir pourquoi seuls les membres des cours d'appel admis à la retraite en raison de leur âge sont susceptibles d'exercer la présidence d'une cour d'assises, et non, par exemple, les magistrats admis à la retraite anticipée, le ministre répond que, conformément à la proposition de la magistrature, seuls seront pris en considération les magistrats qui ont été admis récemment à la retraite en raison de leur âge, possèdent une expérience suffisante du passé récent et restent compétents pour assumer cette présidence.

b) Votes

L'amendement nº 15 de MM. Foret et Desmedt est rejeté par 7 voix contre 1 et 1 abstention.

L'article 7 est adopté en tant qu'article 8 par 6 voix contre 2 et 1 abstention.

9. Article 8 (art. 9 du texte adopté)

Article 120, deuxième alinéa, du Code judiciaire

Le présent article confère aux membres des cours d'appel admis à la retraite en raison de leur âge la possibilité de présider une cour d'assises.

M. Desmedt dépose l'amendement nº 25 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Supprimer cet article. »

Justification

Notre justification est identique à celle de notre amendement nº 15 relatif à l'article 7 (doc. nº 1-490/3).

Pour la discussion, on se reportera à l'article 7.

L'amendement nº 25 de M. Desmedt est rejeté par 7 voix contre 1 et 1 abstention.

L'article 8 est adopté en tant qu'article 9 par 6 voix contre 2 et 1 abstention.

10. Article 8bis (nouveau)

Article 163, deuxième alinéa, du Code judiciaire

MM. Goris et Coveliers déposent l'amendement nº 5 (doc. Sénat, nº 1-490/2) :

« Insérer un article 8bis (nouveau), rédigé comme suit :

« Art. 8bis. ­ À l'article 163, deuxième alinéa, du même Code, insérer entre les mots « de greffiers » et « et de commis-greffiers », les mots « dont un greffier-informaticien. »

L'instauration de la fonction de greffier-informaticien garantit l'informatisation rapide et efficace des greffes des cours d'appel.

Le ministre n'a en soi aucune objection à l'égard de cet amendement.

Il fait toutefois remarquer qu'un projet est actuellement en préparation visant à créer, par ressort, une cellule d'aide à l'informatisation pour l'ensemble des juridictions. Ces cellules seraient composées de membres du greffe répondant à un profil bien établi, proche de celui proposé par les auteurs de l'amendement nº 6 (doc. Sénat, nº 1-490/2).

L'informatisation se déroule actuellement par greffe, dont un membre a reçu une formation spécifique. Un tel système n'est cependant pas tenable à terme parce que trop de personnes sont concernées. Dès lors, les cellules précitées ne seront créés qu'une fois l'informatisation terminée.

Quant à l'amendement, il convient par conséquent de se demander s'il est opportun de régler partiellement l'informatisation des cours d'appel dans le présent projet, dès lors qu'une proposition visant à introduire l'informatique en tant que spécialisation pour l'ensemble des juridictions est en cours de préparation.

L'amendement nº 5 de MM. Goris et Coveliers est rejeté par 7 voix et 2 abstentions.

11. Article 9 (art. 10 du texte adopté)

Article 207bis du Code judiciaire (nouveau)

Cet article énumère les conditions de nomination des conseillers suppléants.

1. Paragraphe 1er , 1º

a) Discussion

MM. Foret et Desmedt déposent l'amendement nº 16 (doc. Sénat, nº 1-490/3) :

« Remplacer l'article 207bis, § 1er , 1º, proposé par la disposition suivante :

« 1º soit avoir, pendant au moins 20 ans, suivi le barreau et être inscrit au tableau de l'Ordre des avocats au jour de la nomination. »

Justification

Conformément à l'avis du Conseil d'État (p. 27), cette modification vise à mettre le texte proposé en concordance avec l'exposé des motifs du présent projet. En effet, la condition selon laquelle le conseiller suppléant doit être inscrit au tableau de l'Ordre des avocats au moment de sa nomination ne figure pas explicitement dans le texte.

Nous utilisons l'expression « avoir suivi le barreau » qui figurait dans l'avant-projet du Gouvernement et qui figure d'ailleurs aux articles 187 et suivants du Code judiciaire. Cette expression permet de prendre en compte les années pendant lesquelles l'avocat était stagiaire et n'était pas encore inscrit au tableau de l'Ordre des avocats.

Un membre exprime certaines réserves à propos de cet amendement. Il estime que des juristes qui ont mis fin, un ou deux ans avant l'entrée en vigueur de la présente loi, à une carrière de vingt ans au barreau pour, par exemple, accepter un poste de professeur ordinaire dans une faculté de droit, pourraient encore très bien entrer en ligne de compte pour une nomination aux fonctions de conseiller suppléant. Ces candidats pourraient même présider une chambre supplémentaire ­ ce qu'ils ne peuvent pas faire actuellement ­ puisqu'ils n'ont plus à intervenir en tant qu'avocat dans certaines affaires et qu'ils ne pourraient dès lors pas être accusés de partialité, en cas de conflit d'intérêts.

L'intervenant demande dès lors que l'on assouplisse les conditions définies à l'article 207bis , § 1er , 1º, du Code judiciaire, en autorisant la candidature des juristes qui ont exercé au barreau pendant vingt ans, mais qui l'avaient quitté depuis peu pour exercer une autre activité juridique, au moment où ils auraient pu être nommés.

À propos de la justification de l'amendement nº 16, le ministre déclare qu'il n'y a aucune contradiction entre l'article 207bis , § 1er , 1º, proposé, du Code judiciaire, selon lequel « le candidat doit suivre le barreau pendant au moins vingt ans » et le passage suivant de l'exposé des motifs : cette période au barreau « ne doit pas être ininterrompue, mais il est requis de suivre le barreau au moment de la nomination » (p. 8).

Conformément à l'article 10 de l'avant-projet de loi soumis au Conseil d'État, le candidat doit avoir suivi pendant au moins vingt années le barreau.

Le Conseil d'État a fait observer qu'ainsi formulé, l'article en question ne tient pas compte de la condition selon laquelle les avocats doivent être inscrits au tableau de l'Ordre des avocats au moment de leur nomination aux fonctions de conseiller suppléant (cf. avis du Conseil d'État, doc. Sénat, nº 1-490/1, p. 27).

Pour tenir compte de cette observation, le Gouvernement a rédigé la disposition proposée au présent (« suivre le barreau »). Rien n'empêche toutefois les avocats de se faire omettre du tableau après avoir rempli la condition selon laquelle ils doivent y être inscrits au moment de leur nomination, et de continuer à siéger en tant que conseiller suppléant.

Pour rendre les choses plus claires, le Gouvernement dépose l'amendement nº 21 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Compléter l'article 207bis, § 1er , premier alinéa, tel que proposé, par les termes suivants :

« remplir, au moment de la nomination, une des conditions suivantes : »

Justification

Il s'agit d'apporter une précision au texte. Il n'est pas exigé que ces activités, qui valent condition de nomination, soient encore exercées après la nomination comme conseiller suppléant.

M. Raes dépose l'amendement nº 28 (doc. Sénat, nº 1-490/5). Cet amendement est libellé comme suit :

« Au § 1er de l'article 207bis proposé, remplacer le 1º par ce qui suit :

« 1º soit suivre le barreau au moins pendant vingt ans et avoir réussi une épreuve d'aptitude de conseiller suppléant à la cour d'appel, dont les modalités sont fixées par le Roi; »

Justification

Le critère des vingt ans pendant lesquels il faut avoir suivi le barreau n'implique pas toujours une expérience de vingt ans au barreau, car les avocats peuvent cumuler leur profession avec une autre, par exemple celle de représentant du peuple, et avoir payé leur cotisation à l'Ordre des avocats pendant tout ce temps sans avoir vu un palais de justice de l'intérieur. En effet, il suffit de payer la cotisation à l'ordre pour rester inscrit au barreau.

Le seul critère permettant de juger de l'aptitude d'un avocat est de lui faire passer une épreuve d'aptitude. Les modalités de celle-ci sont fixées par le Roi, étant entendu ­ cela va de soi ­ qu'elles ne doivent pas être aussi sévères que les modalités de l'épreuve d'aptitude que doivent subir les magistrats effectifs.

Cette épreuve d'aptitude n'est pas exigée des autres catégories de personnes susceptibles d'être nommées aux fonctions de conseiller suppléant à la cour d'appel, parce que l'on peut supposer qu'elles ont acquis une expérience suffisante.

Consulté à ce sujet, le Conseil d'État a fait observer que cet amendement n'appelle pas d'observations (doc. Sénat, nº 1-490/6).

Un membre remarque que le ministre conserve le pouvoir et la responsabilité d'apprécier l'aptitude du candidat, et ce dans toutes les catégories.

En ce qui concerne plus spécialement les avocats, l'intervenant souligne qu'il est pratiquement impossible, à l'heure actuelle, d'être inscrit au barreau sans le pratiquer, et que, par ailleurs, les cotisations sont fort élevées.

b) Votes

L'amendement nº 21 du Gouvernement est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.

L'amendement nº 28 de M. Raes est rejeté par 6 voix et 1 abstention.

La commission décide par 7 voix et 1 abstention de prévoir, au 1º, que le candidat doit avoir suivi le barreau au moins pendant vingt ans. Il ne doit donc pas nécessairement être avocat au moment de sa nomination.

À la suite de cette modification, MM. Foret et Desmedt retirent leur amendement nº 16.

2. Paragraphe 1, 2º

a) Discussion

Un membre fait observer que le texte du 2º de l'article 207bis proposé est trop large.

Selon ce texte, un juge suppléant siégeant depuis dix ans au moins dans un tribunal du travail, un tribunal de commerce, une justice de paix ou un tribunal de police peut, curieusement, être nommé conseiller suppléant à la cour d'appel, alors qu'en dix ans, il peut parfaitement n'avoir siégé que de façon très sporadique et que, d'autre part, les qualifications d'un magistrat suppléant ne sont plus prises en considération pour la nomination en tant que magistrat effectif.

L'intervenant préférerait que la nomination soit limitée aux juges suppléants au tribunal de première instance et au tribunal de commerce.

En outre, le texte ne prévoit pas de condition supplémentaire, telle que le fait d'être membre du barreau.

Une autre membre rappelle l'existence d'un problème spécifique dans le ressort de la Cour d'appel de Gand. L'intervenante s'inquiète à cet égard de la possibilité, prévue par l'article 207bis , § 1er , 2º, de nommer comme conseiller suppléant les juges suppléants au tribunal du travail.

Elle renvoie aux observations formulées lors de la discussion du rapport Jadot sur le contrôle de la législation sociale, dont il résulte que l'on recourt de plus en plus souvent au classement sans suite, notamment dans le ressort de Gand (voir la question parlementaire posée à ce sujet). Le fait de recourir à des juges suppléants au tribunal du travail pour porter remède à l'arriéré, et de prévoir que ceux-ci seront rémunérés, ne risque-t-il pas d'avoir des effets néfastes au niveau des juridictions du travail ?

L'intervenante demande dès lors si, outre la solution générale proposée par le projet, un rapport spécifique sera établi sur la situation du ressort de Gand.

Le ministre répond qu'un rapport spécifique sera établi pour chaque ressort des cours d'appel, et que la comparaison de ces différents rapports fera apparaître quelles cours d'appel travaillent de la façon la plus efficace. On peut espérer créer ainsi entre les cours d'appel un esprit positif de concurrence.

Quant aux juges des tribunaux du travail appelés à siéger dans les chambres supplémentaires, il ne s'agit, bien entendu, que des juges suppléants, dont les titres et mérites seront appréciés pour déterminer s'ils seront à même de remplir adéquatement cette fonction.

Quant à un « classement sans suite », il n'est pas applicable dans la matière considérée. Du reste, il s'agit d'affaires fixées, qui doivent être traitées, sauf application de l'article 730 du Code judiciaire.

L'intervenant suivant observe que c'est le parquet qui prend la décision de classer sans suite. On pourrait évidemment imaginer qu'une politique de classement sans suite lui soit suggérée par les magistrats du siège.

Il serait, comme un autre membre, plutôt partisan de restreindre la portée de l'article 207bis , § 1er , 2º.

On pourrait par ailleurs prévoir une mesure similaire au niveau des cours du travail. Le même membre souhaiterait que l'on indique la spécificité de chacun des deux rapports visés à l'article 2 et à l'article 19 du projet.

Le ministre renvoie à cet égard à l'amendement nº 11 de MM. Lallemand et Erdman à l'article 19, qui prévoit que l'assemblée générale de la cour d'appel se base sur le rapport du magistrat-coordinateur pour déterminer les mesures à prendre en vue de résorber l'arriéré judiciaire dans son ressort.

M. Vandenberghe dépose l'amendement nº 34 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« À l'article 207bis proposé, § 1er :

A. Au 2º, supprimer les mots « un tribunal du travail » et les mots « une justice de paix ou un tribunal de police ».

B. Au même 2º, faire précéder les mots « un tribunal de commerce » par le mot « ou ».

C. a) Supprimer le 3º.

b) Subsidiairement : remplacer le 3º comme suit :

« soit être un magistrat admis à la retraite d'un tribunal de première instance ou d'un tribunal de commerce. »

L'auteur souligne que l'on va vers de plus en plus de spécialisation. Dans les juridictions du travail, par exemple, certains magistrats sont spécialisés en matière de pensions, d'autres en matière d'assurance-maladie, et ils ne sont pas « interchangeables ».

Dès lors, il vaut mieux ne pas insérer les juges suppléants de ces juridictions dans les chambres supplémentaires des cours d'appel, dans des matières qui ne sont pas les leurs. En outre, il faut éviter d'avoir recours à des magistrats d'un niveau hiérarchique trop éloigné de celui des conseillers effectifs.

Enfin, on risque de se trouver dans une situation où des candidats, bien que remplissant formellement les conditions requises, ne seront pas nommés.

Le ministre déclare que, lors de la rédaction du projet, le Gouvernement avait également songé à limiter les conditions fixées au § 1er , 2º, de l'article 207bis proposé.

Ensuite, il est revenu sur sa position, en vue de permettre à un maximum de personnes d'entrer en ligne de compte.

En outre, il existe au niveau des justices de paix, des tribunaux de police et des tribunaux du travail des magistrats suppléants très compétents, qu'il serait dommage d'exclure par principe.

Enfin, ces magistrats, en raison des matières qu'ils traitent habituellement, présentent moins de risques de devoir être récusés.

L'intervenant précédent évoque l'exemple d'un juge de police admis à la retraite, qui a, en son temps, posé sa candidature pour être nommé à la cour d'appel.

Le fait de lui permettre d'accéder à une chambre supplémentaire de la cour d'appel va lui octroyer une reconnaissance qualitative qui lui avait été refusée précédemment.

Le même intervenant fait observer que celui qui satisfait aux conditions fixées au § 1er , 2º, de l'article 207bis , satisfera vraisemblablement à celle du 1º du même paragraphe.

b) Votes

Comme on a la garantie, grâce aux procédures d'avis, que seuls des candidats compétents seront nommés, il est assez inutile de réduire le champ de recrutement. M. Vandenberghe retire, dès lors, les points A et B de son amendement nº 34.

Le 2º du § 1er est adopté à l'unanimité des 8 membres présents.

3. Paragraphe 1er , 3º

a) Discussion

Un membre s'interroge sur la ratio legis du 3º de l'article 9, alors qu'une disposition permet déjà, à l'heure actuelle, d'avoir recours aux membres des cours d'appel admis à la retraite, ce qui devrait suffire.

Le ministre rappelle, à propos de la distinction opérée au 3º en ce qui concerne les magistrats admis à la retraite, qu'actuellement, la désignation de magistrats admis à la retraite comme suppléants n'est permise que dans le rang occupé avant l'admission à la retraite, faute de quoi il y aurait violation de l'article 151 de la Constitution.

C'est pourquoi il est prévu que les magistrats admis à la retraite visés au § 1er , 3º, doivent être nommés conformément à l'article 151 de la Constitution.

Un autre membre suppose que les « membres des cours d'appel admis à la retraite » sont exclus par l'article 207bis , § 1er , 3º, parce qu'ils restent régis par l'article 383, § 2, du Code judiciaire.

Leurs fonctions sont-elles identiques à celles des autres magistrats suppléants ?

D'autre part, est-il exact qu'ils ne sont pas soumis aux formalités de nomination des autres conseillers suppléants ?

Un membre répond que cela est exact et qu'en outre, ils sont nommés directement par le premier président, et non par le Roi.

M. Vandenberghe a déposé un amendement nº 34, dont le point C est rédigé comme suit :

« C. a) Supprimer le 3º. »

« b) Subsidiairement : remplacer le 3º comme suit :

« soit être un magistrat admis à la retraite d'un tribunal de première instance ou d'un tribunal de commerce. »

b) Votes

À la suite de la discussion du § 1er , 2º, M. Vandenberghe retire son amendement nº 34 C.

L'on propose de remplacer les mots « des membres des cours d'appel admis à la retraite » par les mots « des membres des cours d'appel visés au § 2 ». L'exception prévue au § 1er , 3º, est nécessaire parce que la procédure de nomination de la catégorie de conseillers suppléants visée au § 1er est différente de la procédure de nomination de la catégorie visée au § 2.

Le 3º ainsi modifié est adopté par 7 voix et 1 abstention.

4. Paragraphe 1er , 4º (nouveau)

a) Discussion

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 17 (doc. Sénat, nº 1-490/3) :

« Compléter le § 1er de l'article 207bis proposé par la disposition suivante :

« 4º soit être professeur d'université et avoir enseigné la science du droit pendant vingt ans au moins à une faculté de droit. »

Justification

L'ajout de cette catégorie de personnes qui viennent en ordre utile pour une nomination à la fonction de conseiller suppléant est nécessaire en vue de disposer d'une réserve de recrutement aussi large que possible.

Un membre demande s'il ne vaudrait pas mieux remplacer les termes « science du droit » par le terme « droit », qui est plus strict. Le texte actuel permet à des professeurs de philosophie du droit n'ayant aucune expérience pratique dans une branche déterminée du droit, de poser leur candidature à la fonction de conseiller suppléant.

L'auteur de l'amendement souscrit à ce point de vue.

Un autre membre en déduit que les professeurs chargés des cours de sociologie dans les facultés de droit n'entrent pas en ligne de compte pour une nomination aux fonctions de conseiller suppléant. Certaines matières se situent pourtant au croisement du droit et d'une autre discipline. Quelle sera la situation des professeurs de droit romain et de théorie du droit ?

L'auteur de l'amendement déclare que le professeur de théorie du droit n'entre en tout cas pas en ligne de compte, parce qu'il n'enseigne pas le droit au sens strict du terme. L'on peut aussi se demander si un professeur de droit administratif ou de droit international a l'expérience requise pour siéger comme conseiller suppléant dans une cour d'appel.

Le ministre de la Justice devra évaluer la candidature de ces professeurs dans le cadre de la procédure de nomination. L'on peut se demander, par exemple, si les publications d'un professeur de droit romain permettent de dire qu'il a une connaissance approfondie du droit civil en vigueur ou non.

Enfin, l'auteur de l'amendement signale que, si l'on a estimé que le professeur doit avoir enseigné le droit pendant vingt ans, c'est parce que, selon l'article 207bis , § 1er , 1º, proposé du Code judiciaire, les avocats doivent avoir suivi le barreau pendant vingt ans. Les mêmes conditions doivent valoir pour les deux catégories de juristes.

Le ministre souscrit aux propos de l'auteur de l'amendement.

Mme Delcourt-Pêtre dépose l'amendement nº 18 (doc. Sénat, nº 1-490/4) :

« Compléter le paragraphe 1er de l'article 207bis proposé par un 4º, rédigé comme suit :

« 4º soit un professeur d'université ayant une expérience professionnelle au barreau d'au moins cinq années. »

Justification

Il est apparu de manière assez claire lors de la discussion en commission qu'il était utile, pour ne pas dire nécessaire, de permettre à des professeurs d'université d'être candidats au poste de conseiller suppléant. Deux arguments principaux ont été mis en avant, à savoir leur compétence et l'éventuel manque de candidatures.

L'auteur du présent amendement ne peut que se rallier à ce raisonnement; par contre, elle constate que dans le projet on a voulu réserver l'accès à des personnes ayant une expérience professionnelle au barreau ou dans la magistrature. En effet, les candidats avocats devront avoir vingt années d'ancienneté au barreau et les candidats magistrats devront, soit avoir une expérience de dix années comme juge suppléant, soit avoir été admis à la retraite.

Ceci est par ailleurs tout à fait adéquat car il est évident que pour rendre une bonne justice ­ la seule qui pourrait aider à résoudre l'important arriéré judiciaire ­ il faut que les conseillers suppléants manient avec facilité les règles du Code judiciaire, les us et coutumes des cours où ils seront appelés à siéger et les règles déontologiques qui lient les avocats. On ne résoudra l'arriéré que par un travail en synergie avec tous ces acteurs du monde judiciaire.

Il faut donc éviter que des professeurs d'université sans aucune pratique professionnelle du monde judiciaire soient appelés à trancher des questions juridiques parfois épineuses « en dernier ressort ». On peut d'ailleurs penser que certains d'entre eux, et surtout ceux qui n'ont aucune expérience de ce monde professionnel particulier, seront tentés de rendre des décisions qui s'écarteront du courant jurisprudentiel existant afin de privilégier les thèses parfois purement théoriques qu'ils défendent à leur chaire professorale.

Dans ces conditions et pour préserver leur apport tout en maintenant la cohésion de notre système judiciaire, l'auteur de l'amendement propose que ne puissent être candidat au poste de conseiller suppléant que les professeurs d'université disposant d'une expérience professionnelle au barreau d'au moins cinq années.

Un membre fait remarquer que, selon cet amendement, un professeur extraordinaire comptant cinq années d'expérience professionnelle au barreau peut être nommé conseiller suppléant, alors qu'un avocat qui n'exerce aucune charge professorale doit avoir suivi le barreau pendant vingt ans.

L'intervenant estime que l'amendement abaisse considérablement le seuil d'accès en question et provoque ainsi un déséquilibre pour ce qui est des diverses conditions de nomination.

L'auteur de l'amendement nº 18 se dit prête à l'adapter, en prévoyant, par exemple, qu'un professeur doit avoir enseigné le droit à une faculté de droit pendant dix ans et avoir suivi le barreau pendant dix ans.

Elle estime qu'il est indispensable que les professeurs, dont les connaissances théoriques ne font pas le moindre doute, doivent avoir une expérience pratique suffisante. À cet égard, le barreau est la meilleure école.

Un autre membre estime que la solution idéale serait d'exiger des professeurs qu'ils aient également suivi le barreau pendant vingt ans. Elle présenterait toutefois le désavantage de réduire encore davantage le nombre de candidats potentiels figurant dans la réserve.

Un autre intervenant signale qu'il arrive souvent que le Bundesverfassungsgericht admette en son sein un professeur qui fait autorité dans une branche du droit et qui a longtemps enseigné la matière en question à une université. L'on considère qu'il connaît toutes les questions juridiques ou, du moins, qu'il sait y répondre de façon juridiquement correcte. L'aspect formel de la jurisprudence et, en particulier, la rédaction de conclusions et d'arrêts, n'auront très vite plus aucun secret pour ces juristes, qui sont, après tout, les auteurs de maintes publications juridiques.

La réponse qui est donnée à la question de savoir si les professeurs de droit suivent tous le barreau en même temps est négative. Aux universités d'Anvers et de Liège, par exemple, le cumul d'une carrière académique et d'une activité professionnelle en tant qu'avocat est exceptionnelle, alors qu'il est encouragé aux universités de Bruxelles et de Louvain.

Le fait que les professeurs ne sont pas avocats ne signifie toutefois pas qu'ils n'ont aucune expérience pratique. Beaucoup d'entre eux donnent des avis, réalisent des études ou du travail préparatoire, ou interviennent en tant qu'arbitre.

Pour ce qui est de l'amendement nº 18 de Mme Delcourt-Pêtre, un autre membre fait observer qu'avoir une expérience au barreau ne constitue pas une condition indispensable pour être nommé à une fonction judiciaire. Si tel était le cas, un fonctionnaire qui occupe un poste de conseiller juridique dans un organisme de sécurité sociale ne pourrait pas être nommé magistrat dans un tribunal du travail.

L'intervenant estime que la condition ne se justifie pas. Un professeur d'université qui enseigne le droit depuis au moins vingt ans a, outre ses connaissances théoriques, une pratique suffisante pour exercer la fonction de conseiller suppléant. Il estime excessif qu'un candidat doive, outre sa chaire, compter cinq ans d'expérience au barreau.

De plus, une expérience au barreau n'est pas requise pour ceux qui veulent entrer dans la magistrature en présentant l'examen d'aptitude professionnelle, mais bien pour ceux qui souhaitent participer au concours d'admission au stage judiciaire.

Sur cette base, Mme Delcourt-Pêtre retire son amendement nº 18.

Un intervenant précédent fait remarquer qu'un doctorat en droit et/ou une activité professionnelle au barreau ne garantissent pas que l'intéressé sera un bon juge. Il n'y a pas de solution toute faite en la matière. Un bon juge est une personne qui parvient à combiner une connaissance juridique de base et une personnalité équilibrée avec un bagage intellectuel étendu et une large capacité d'appréciation.

Dès lors, il est préférable d'être relativement exigeant concernant les conditions que doivent remplir les candidats à la fonction de conseiller suppléant. Le ministre de la Justice a la lourde responsabilité de sélectionner les candidats qui répondent à ces conditions.

Le ministre attire l'attention sur le fait que, lors de la préparation du présent projet de loi, l'intention était de donner, aux juristes ayant les connaissances et la pratique nécessaires, la possibilité de siéger en tant que conseiller suppléant dans une chambre supplémentaire. Cela suppose un minimum d'ancienneté dans une fonction juridique. Pour les avocats, ce minimum a été fixé à vingt ans. Il semble donc raisonnable d'imposer le même critère d'ancienneté aux candidats qui peuvent se prévaloir d'une carrière académique ou scientifique.

Un membre estime que les juristes qui, après dix ans de barreau, ont suivi une carrière académique d'au moins dix ans en tant que professeur ordinaire de droit, sont des candidats valables et que, dès lors, ils doivent entrer en considération pour la fonction de conseiller suppléant. Il rappelle que plusieurs universités obligent leurs professeurs à opter pour une carrière exclusivement académique. Ils passent donc plus ou moins par la force des choses du barreau à l'université. Il serait illogique que ces personnes ne puissent pas postuler à une fonction de conseiller suppléant.

Le ministre n'émet aucune objection.

Néanmoins, il estime que l'on a tendance à demander de plus en plus aux professeurs d'université d'avoir un maximum de pratique.

À la suite de cette discussion, il dépose l'amendement nº 22 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Compléter l'article 207bis, § 1er , proposé par un 4º, rédigé comme suit :

« 4º soit, avoir exercé, pendant au moins vingt années, une fonction académique ou scientifique en droit. »

Justification

Il convient d'élargir au maximum le groupe de recrutement des candidats qualifiés à la fonction de conseiller suppléant.

L'objection émise contre l'utilisation que fait l'amendement nº 17 du terme « science du droit » vaut également pour le présent amendement. Le but n'est pas que des philosophes, des historiens ou des sociologues du droit entrent en considération pour une nomination à la fonction de conseiller suppléant.

Le ministre pense pouvoir conclure qu'il n'y a pas d'objection fondamentale concernant l'amendement nº 22, pour autant que l'on complète l'article 270bis , § 1er , proposé, par un 5º, qui prévoie une combinaison entre une carrière au barreau et une charge de professeur de droit à l'université.

Un membre constate que la notion de « fonction scientifique en droit » est empruntée à différents articles du Code judiciaire qui énumèrent les conditions de nomination à une fonction dans la magistrature (cf. les articles 188 et 189).

Selon lui, cette notion ne peut pas être tout simplement transposée à la procédure de sélection des conseillers suppléants. Comme il a été dit, « l'exercice d'une fonction académique ou scientifique en droit » constitue, dans les articles précédents, l'une des conditions à remplir pour être nommé définitivement dans la magistrature, les candidats devant au préalable réussir l'examen d'aptitude professionnelle.

Pour les conseillers suppléants, la procédure de sélection est moins stricte. C'est pourquoi il demande que l'on restreigne les conditions de nomination à « l'exercice d'une fonction académique ». Les termes « fonction scientifique en droit » devraient donc être supprimés.

MM. Vandenberghe et Bourgeois déposent un sous-amendement nº 44 à l'amendement nº 22 du Gouvernement (doc. Sénat, nº 1-490/7) :

« Compléter le 4º proposé par les mots « dans une faculté de droit. »

Les auteurs souhaitent éviter ainsi qu'un licencié ou docteur en droit qui donne un cours d'introduction au droit dans une école supérieure puisse être mis sur le même pied qu'un professeur qui enseigne dans une faculté de droit.

Le ministre rappelle que le texte de son amendement s'inspire de l'article 192 du Code judiciaire. L'inconvénient de la formulation en question est que les professeurs qui ont une licence en droit et qui enseignent des matières telles que la sociologie du droit ou la philosophie du droit dans une faculté de droit, mais qui n'ont aucune expérience juridique, peuvent également entrer en considération pour une nomination à la fonction de conseiller suppléant.

L'amendement nº 17 de M. Vandenberghe offre davantage de garanties à cet égard.

b) Vote

L'amendement nº 17 de M. Vandenberghe et consorts est adopté par 8 voix contre 1, étant entendu que les mots « la science du droit » sont remplacés par les mots « le droit ».

Mme Delcourt-Pêtre et le Gouvernement retirent leurs amendements nºs 18 et 22. Par conséquent, le sous-amendement nº 44 de MM. Vandenberghe et Bourgeois perd sa raison d'être.

5. Paragraphe 1er , 5º (nouveau)

Le Gouvernement dépose l'amendement nº 32 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Compléter l'article 207bis, § 1er , proposé comme suit :

« 5º soit avoir cumulé ou exercé successivement au moins pendant vingt ans les activités visées aux points 1º et 4º. »

Justification

Il convient d'élargir au maximum le cercle des candidats qualifiés pour une fonction de conseiller suppléant. Vu leur expertise, les personnes qui ont, pendant vingt ans, été actives aussi bien en qualité de professeur d'université qu'au barreau, entrent également en ligne de compte.

Cet amendement s'inspire de la même philosophie que celui déposé par M. Vandenberghe. Il est adopté par 7 voix contre 1.

6. Paragraphe 1er , deuxième alinéa (nouveau)

a) Discussion

MM. Erdman et Lallemand avaient déposé un amendement nº 26 (doc. Sénat, 1-490/5) :

« Le § 1er de l'article 207bis en projet est complété comme suit :

« En outre, le candidat doit bénéficier d'un avis favorable du Collège de recrutement des magistrats. »

En remplacement de cet amendement, ils déposent l'amendement nº 27 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Le § 1er de l'article 207bis en projet est complété comme suit :

« En outre, le candidat doit bénéficier d'un avis favorable du Collège de recrutement des magistrats, qui se prononce sur son aptitude à siéger comme conseiller suppléant. »

Justification

On insiste aujourd'hui sur la nécessaire objectivation des nominations dans la magistrature. La nomination des magistrats suppléants doit également faire l'objet de mesures en ce sens.

C'est pourquoi nous proposons de compléter les conditions de nomination des conseillers suppléants dans les cours d'appel par un avis favorable du Collège de recrutement des magistrats.

Le Collège intervient déjà, par le biais de l'examen d'aptitude professionnelle ou du concours d'accès au stage, dans la nomination des magistrats effectifs.

Il semble tout indiqué pour remplir une mission similaire pour les magistrats suppléants.

Il ne s'agit évidemment pas de créer une procédure de nomination distincte pour les magistrats effectifs et pour les magistrats suppléants, mais d'imposer une condition de nomination supplémentaire propre aux suppléants, sans laquelle leur candidature ne serait pas recevable. Pour le surplus, il faut d'ailleurs constater que les conditions de nomination des conseillers effectifs dans les cours d'appel sont déjà différentes des conditions projetées par le Gouvernement pour la nomination des conseillers suppléants.

Dès lors que toutes les conditions sont remplies, la procédure de nomination sera, elle, identique pour les deux catégories de magistrats.

Les auteurs soulignent que l'avis du collège de recrutement n'est pas contraignant et que, selon eux, il n'implique aucune violation de l'article 151 de la Constitution.

Au demeurant, le Conseil d'État l'a confirmé dans son avis concernant l'amendement nº 27 (doc. Sénat, nº 1-490/6).

Les auteurs attendent du Gouvernement qu'il veille à ce que la nomination des conseillers suppléants se fasse sur des bases objectives, ou soit rattachée à la procédure prévue à l'article 151, qui doit encore être modifié, ainsi qu'aux lois d'exécution, qui doivent encore être adoptées.

Ils estiment inacceptable que l'on procède à la nomination de 148 conseillers suppléants sans suivre une procédure de sélection objective.

Selon un autre membre, on pourrait résoudre le problème par des dispositions précisant l'article 151 de la Constitution. Ainsi la cour d'appel pourrait-elle émettre un avis, dans lequel elle se prononcerait sur la recevabilité des candidatures. Si quinze candidats se présentent, par exemple, la cour décidera dans son avis quels seront ceux qui accéderont aux stades ultérieurs de la procédure de sélection.

Cette présélection aurait pour effet d'écarter les candidats qui ont fait l'objet d'un avis négatif et d'éviter qu'ils puissent encore être présentés par le conseil provincial.

Une autre solution serait, si les candidats sont présentés par le conseil provincial, qu'ils sachent que la cour soumettra leur présentation à une sélection sévère.

Selon lui, une telle procédure est compatible avec la Constitution, étant donné que la compétence de la cour d'appel est fixée dans les limites de l'article 151.

Le ministre déclare que l'on ne peut instaurer l'obligation d'émettre un avis, prévue par l'amendement nº 27, que pour autant que l'on investisse le Collège de recrutement des magistrats du pouvoir d'émettre cet avis. Or, dans l'état actuel de la législation, le collège est activement chargé, premièrement, de l'organisation du concours d'admission au stage judiciaire et de l'examen d'aptitude professionnelle et, deuxièmement, de la formation des stagiaires judiciaires et des magistrats.

Il lui semble dès lors préférable de n'examiner un élargissement éventuel des compétences du collège de recrutement qu'à l'occasion de la révision de l'article 151 de la Constitution (cf. la proposition du Gouvernement relative à la révision de l'article 151 de la Constitution, doc. Chambre 1996-1997, nº 740/1). En effet, aux termes de cette proposition, les nouvelles procédures de nomination et de promotion seront fixées ultérieurement par la loi.

Le ministre se demande d'ailleurs pourquoi les comités d'avis visés à l'article 259ter du Code judiciaire ne pourraient pas être associés à la procédure de nomination des conseillers suppléants, étant donné qu'ils ont acquis une routine et une expertise en la matière.

L'un des auteurs souligne que l'amendement vise à éviter le reproche selon lequel la nomination des conseillers suppléants se ferait sur la base de critères politiques. En associant le collège de recrutement à la procédure, on confère à ces nominations une légitimation objective.

L'argument selon lequel il faudrait modifier l'article 259bis du Code judiciaire pour élargir les compétences du collège de recrutement n'est pas tout à fait pertinent, selon lui, parce que l'article 207bis , § 1er , deuxième alinéa, proposé par l'amendement doit être lu en corrélation avec l'article susmentionné. Les compétences énumérées aux deux articles sont donc cumulatives.

La raison pour laquelle on préfère le Collège de recrutement des magistrats aux comités d'avis tient à la composition de ces comités. L'intervenant estime que, si une cour d'appel émet elle-même un avis sur les candidats à la fonction de conseiller suppléant à cette même cour, il n'y a pas évaluation extérieure et objective.

Le ministre estime que ce n'est pas logique, vu la diversité de la composition et des missions des comités d'avis. L'objectivité des nominations est du reste garantie par l'amendement nº 33 du Gouvernement, en vertu duquel les titres et mérites des candidats doivent être explicitement indiqués dans la présentation (doc. Sénat, nº 1-490/5). Selon lui, l'amendement nº 27 de MM. Lallemand et Erdman va à l'encontre de la répartition des compétences entre le collège de recrutement, d'une part, et les comités d'avis, d'autre part.

Un membre aimerait savoir à quel moment de la procédure le collège de recrutement devrait émettre son avis. Il suppose que cet avis doit précéder la présentation.

Il juge exclu que des candidats présentés par la cour d'appel et le conseil provincial soient éliminés ultérieurement par un avis négatif du collège de recrutement.

Cela signifie que c'est en réalité ce collège qui est chargé de sélectionner les candidats et qu'il peut même se substituer à la cour.

Les auteurs de l'amendement répliquent que les comités d'avis ont en principe déjà cette possibilité actuellement. Pour le reste, il va de soi que l'avis du collège de recrutement doit précéder la présentation.

On avait postulé au départ que la nomination des conseillers suppléants se ferait suivant les procédures à élaborer dans le cadre de la révision de l'article 151 de la Constitution.

Comme il apparaît que l'on ne pourra pas clôturer rapidement la discussion relative à cette révision, et vu l'urgence du projet de loi à l'examen, les membres de la commission ont convenu que l'on procéderait aux nominations conformément à l'article 151 actuel de la Constitution. Pour éviter que la nomination des 148 conseillers suppléants ne soit dépeinte comme une manoeuvre politicienne, les auteurs ont souhaité objectiver la procédure en prévoyant l'intervention d'une instance extérieure et indépendante, à savoir le Collège de recrutement des magistrats.

Les auteurs ne vont pas jusqu'à faire passer un concours aux candidats, mais ils posent comme condition que le collège de recrutement émette sur les candidats un avis favorable, qui sera ensuite confirmé ou non par la cour d'appel lors de la présentation.

Tout cela n'empêche pas que, si les procédures de nomination sont modifiées par suite de la révision de l'article 151 de la Constitution, il faudra en tenir compte pour la nomination des conseillers suppléants (cf. exposé des motifs, doc. Sénat, nº 1-490/1, pp. 2 et 3).

Le ministre n'a aucune objection contre le principe qui sous-tend l'amendement nº 27. On doit absolument éviter que la nomination de 148 conseillers suppléants soit cataloguée comme une manoeuvre politique. Aussi faut-il que les candidats les plus valables soient retenus. Sa seule réserve concerne l'instance appelée à émettre un avis préalable.

Eu égard au fait que les compétences du collège de recrutement et des comités d'avis ont une finalité différente et qu'elles sont définies de manière précise, il préfère que ce soient les comités d'avis qui évaluent au préalable les candidats à la fonction de conseiller suppléant. Actuellement, le collège de recrutement, qui se compose d'un jury néerlandophone et d'un jury francophone, n'est en rien associé à la nomination individuelle des magistrats.

Le ministre confirme que la discussion relative à la modification de la procédure de présentation prévue à l'article 151 est en cours. Dans cette optique, il ne lui semble pas opportun, dans le cadre du présent projet de loi, de confier une nouvelle compétence au Collège de recrutement des magistrats ou aux comités d'avis, alors qu'il n'est pas certain qu'ils conserveront leur forme actuelle.

L'intervenant craint qu'une telle modification ne compromette la révision des procédures de nomination et de promotion.

Un membre fait observer que les conseillers suppléants ne doivent pas être lauréats d'examens organisés par le collège de recrutement. Cet élément peut nuire à leur crédibilité car, en appel, ils connaîtront de jugements rendus par des juges qui, pour accéder à la magistrature, auront bel et bien suivi le parcours imposé par la loi. Les justiciables pourraient s'étonner d'apprendre que des juristes ne remplissant pas les conditions pour être nommés aux fonctions de juge de paix et de juge de police siègent comme conseillers dans une cour d'appel.

Les auteurs de l'amendement nº 27 font valoir que, par leur proposition, ils souhaitent donner aux chambres supplémentaires un fondement qui, dans la mesure du possible, les préserve de la critique selon laquelle les conseillers suppléants auraient été nommés sur la base de critères politiques.

Pour un autre membre, l'amendement nº 27 est révélateur de la méfiance que le projet inspire à la majorité gouvernementale. Il estime que si l'on accepte le principe des conseillers suppléants, leur nomination doit se faire suivant l'article 151 de la Constitution.

Si l'on devait, comme le propose l'amendement en question, alourdir cette procédure en imposant une obligation d'avis par le Collège de recrutement des magistrats, la nomination des conseillers suppléants prendrait des années.

Pour sortir de l'impasse, le ministre propose de charger les comités d'avis d'évaluer l'expérience professionnelle requise des candidats, étant entendu que la composition des comités serait adaptée en fonction de la catégorie à laquelle appartient le candidat conseiller suppléant.

Ainsi par exemple, pour les professeurs, l'avis serait émis par le doyen de la faculté à laquelle le candidat est attaché; pour un magistrat admis à la retraite, il serait rendu par le premier président ou le président de la juridiction où l'intéressé était nommé.

Un des auteurs de l'amendement nº 27 se réjouit de ce que le ministre souscrive au principe de compléter les conditions de nomination formelles relatives à l'expérience de la procédure par un élément objectif.

L'intervenant comprend l'argument selon lequel il n'entre pas dans les tâches spécifiques du collège de recrutement de donner un avis sur des candidats qui ambitionnent une nomination dans la magistrature. Si l'on a proposé de le charger malgré tout de cette mission dans le cadre du présent projet, c'est parce que le collège a la réputation de faire preuve de rigueur et d'objectivité dans le cadre du concours de recrutement pour le stage judiciaire et de l'examen d'aptitude professionnelle.

L'alternative d'une composition variable des comités d'avis, proposée par le ministre, ne manquera pas de poser des problèmes d'ordre pratique.

Pour l'intervenant, il serait peu judicieux de restructurer les comités d'avis dans le sens souhaité par le ministre en attendant la révision de l'article 151 de la Constitution.

Un autre membre émet cependant quelques doutes quant à l'opportunité d'un avis à rendre par le collège de recrutement. Il ne lui paraît pas souhaitable que des avocats ayant vingt ans d'expérience au barreau, ou des magistrats suppléants ou admis à la retraite, qui ambitionnent une deuxième carrière comme conseiller suppléant, soient soumis à une nouvelle procédure d'avis devant le collège de recrutement.

Il va de soi que des avis seront recueillis sur les candidats, mais la question est de savoir si cela doit se faire formellement par l'intermédiaire du collège de recrutement.

Le préopinant fait remarquer qu'aux termes du projet, il n'est pas nécessaire de recueillir des avis.

L'obligation d'avis n'est pourtant pas un luxe inutile. Une expérience de vingt ans au barreau ne garantit pas en soi qu'un avocat est apte à assumer les fonctions de conseiller suppléant.

Enfin ­ et on ne saurait assez le souligner ­, dans le climat actuel où l'on réclame la dépolitisation de la magistrature, l'avis du collège de recrutement apporterait la preuve que la nomination des 148 conseillers suppléants n'obéit pas à des considérations politiciennes, puisqu'une instance indépendante et respectée, le collège de recrutement, évaluera objectivement tous les candidats sur la base de critères identiques.

Cette obligation d'avis ferait office de régime transitoire en attendant la révision de l'article 151 de la Constitution.

Une membre déclare partager les réserves du ministre vis-à-vis de l'amendement nº 27 de MM. Erdman et Lallemand. Elle craint que l'intervention du collège de recrutement n'alourdisse inutilement la procédure et ne contribue à décourager les candidats potentiels plutôt qu'à les attirer. Vu l'ampleur de l'arriéré judiciaire, ce ne serait pas souhaitable.

L'intervenante dit comprendre que l'on veuille objectiver suffisamment la nomination des conseillers suppléants. Mais les conditions de nomination lui paraissent déjà suffisamment sévères pour garantir une juridiction de qualité et impartiale de la part des chambres supplémentaires. Le fait d'exiger que le collège de recrutement donne un avis sur leur aptitude à exercer les fonctions de conseiller suppléant pourrait bien être considéré par les professeurs et les avocats comme un signe de méfiance à leur égard. C'est comme si les intéressés devaient apporter une fois encore la preuve de leur compétence et de leur expérience.

Un des auteurs de l'amendement nº 27 répond qu'il est nécessaire de faire intervenir au moins un élément objectif dans la procédure de nomination. Il justifie son propos par les considérations suivantes.

1. Si l'on ne retient qu'une condition de diplôme, tous les candidats sauront pertinemment qu'ils ne seront présentés que s'ils vont plaider leur cause auprès de tous les conseillers de la cour d'appel. On perdrait ainsi toute garantie d'objectivité.

2. Conformément à l'article 207bis , § 1er , 2º, proposé, du Code judiciaire, les juges suppléants dans un tribunal du travail, une justice de paix ou un tribunal de police peuvent être nommés conseillers suppléants à la cour d'appel.

L'intervenant sait par expérience que certains juges suppléants ont la compétence requise pour exercer les fonctions de conseiller suppléant. Mais pour d'autres, il a de sérieux doutes. Et il en va de même pour les avocats possédant vingt ans d'expérience au barreau.

Si l'on se contente d'un critère formel, on risque de voir présenter des candidats qui n'ont pas les aptitudes requises pour siéger dans les chambres supplémentaires. L'avis d'une instance extérieure comme le Collège de recrutement des magistrats permettrait d'éviter ces faux pas.

L'autre auteur de l'amendement ajoute que le projet à l'examen instaure un régime d'exception dans le but de remédier à une situation exceptionnelle, à savoir l'arriéré judiciaire. Il s'agit de trouver un équilibre entre, d'une part, la nécessité de constituer le plus rapidement possible les chambres supplémentaires en vue de résorber l'arriéré judiciaire et, d'autre part, l'exigence d'objectiver la nomination des conseillers suppléants. Il ne faut pas perdre de vue que l'on va désigner aux fonctions de conseiller suppléant des juristes qui ne remplissent pas les conditions de droit commun pour être nommés magistrats effectifs. Une certaine prudence s'impose donc.

À la suite de cet échange de vues, le ministre propose de faire demander par son administration un certain nombre d'avis écrits qui seraient éventuellement transmis aux organes chargés des présentations énumérés à l'article 151 de la Constitution. Les avis demandés peuvent différer selon la catégorie professionnelle à laquelle appartient le candidat.

Ces avis pourraient par exemple être demandés aux personnes suivantes :

1º pour les candidats visés au § 1er , 1º :

­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;

­ du président du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;

­ du procureur du Roi du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;

­ du procureur général près la cour d'appel où le conseiller suppléant sera nommé;

2º pour les candidats visés au § 1er , 2º :

­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat est inscrit au tableau;

­ du président du tribunal où le candidat est nommé juge suppléant;

­ du président du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est inscrit au tableau;

­ du procureur du Roi du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est inscrit au tableau;

­ du procureur général près la cour d'appel où le conseiller suppléant sera nommé;

3º pour les candidats visés au § 1er , 3º :

­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat a exercé sa fonction en dernier lieu;

­ du président du tribunal où le candidat a exercé sa fonction en dernier lieu;

­ du procureur du Roi du tribunal où le candidat a exercé sa fonction en dernier lieu;

­ du procureur général près la cour d'appel où le conseiller suppléant sera nommé;

4º pour les candidats visés au § 1er , 4º :

­ du doyen de la faculté à laquelle le professeur est attaché;

­ du procureur général près la cour d'appel où le conseiller suppléant sera nommé;

­ du doyen de l'ordre national des avocats;

5º pour les candidats visés au § 1er , 5º :

­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;

­ du doyen de la faculté à laquelle le professeur est ou était attaché;

­ du président du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau.

­ du procureur du Roi du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;

­ du procureur général près la cour d'appel où le conseiller suppléant sera nommé.

La procédure décrite ci-dessus présente un double avantage.

Tout d'abord, elle est souple, puisqu'elle ne nécessite pas de réunir un comité. Le ministre de la Justice demande à certaines personnes énumérées dans la loi d'émettre un avis écrit sur un candidat dans un délai déterminé. Le dossier des candidats est ensuite transmis aux instances qui doivent motiver leurs présentations sur la base des avis fournis. Les présentations doivent, en effet, indiquer les titres et les mérites des candidats (cf. amendement nº 33 du Gouvernement tendant à insérer un article 19bis, doc. Sénat, nº 1-490/5).

En second lieu, la procédure n'hypothèque en rien les options envisagées par le Gouvernement pour les nouvelles procédures de nomination et de promotion dans la magistrature. Si la proposition est adoptée, la procédure d'avis applicable à la nomination des conseillers suppléants sera selon toute vraisemblance celle qui sera appliquée à l'avenir à toutes les nominations de magistrats.

Pour ce qui est du choix des personnes appelées à rendre un avis, le ministre fait remarquer que l'on a tenu compte, dans une certaine mesure, de la composition du collège de recrutement et des comités d'avis.

Un membre se demande s'il y a lieu d'inclure le procureur général dans cette énumération puisque celui-ci est déjà tenu, en vertu d'une circulaire, de donner un avis.

Un autre intervenant note que la proposition ne précise pas que l'avis écrit doit être communiqué au candidat. Ce dernier doit cependant avoir la possibilité d'y répondre.

Le ministre répond que cette possibilité peut être inscrite dans la proposition.

Selon le préopinant, il faut se demander avant tout si l'avis du collège de recrutement n'a pas davantage de poids que, par exemple, celui d'un bâtonnier ou d'un procureur général. Le premier avis fait en effet l'objet d'un débat, et offre une garantie d'objectivité plus grande qu'un avis individuel, qui risque de revêtir plutôt un caractère formel et de ne pas être de nature à étayer une présentation quant au fond.

Un membre ne cache pas qu'il est opposé au projet de loi.

Ce projet a une longue histoire. Annoncé par le ministre à l'automne 1995, il n'a été déposé que le 4 décembre 1996. La commission en a entamé l'examen le 13 décembre 1996.

D'après lui, le fait que le Gouvernement vienne maintenant avec une nouvelle proposition concernant la procédure d'avis montre qu'il ne sait pas bien dans quelle direction aller.

L'intervenant est convaincu que l'on ne trouvera pas assez de candidats pour exercer la fonction financièrement peu attrayante de conseiller suppléant.

En plus, les rares candidats qui se présenteront devront encore passer par une procédure d'avis, à l'issue de laquelle ils devront être présentés par les instances prévues à l'article 151 de la Constitution.

L'intervenant ne parvient pas à se défaire de l'impression que les difficultés qui s'accumulent sur la route de ce projet traduisent le profond mécontentement qu'il inspire à certains membres de la majorité. Pareille façon de faire soulève des questions.

Un membre réplique qu'il ne faut pas voir dans les remarques et les réflexions formulées une marque d'opposition au projet. Elles n'ont d'autre but que de donner à la réforme proposée une assise juridique solide.

L'argument du préopinant, selon lequel la réforme proposée risque d'être inapplicable en raison des multiples modifications qui ont été apportées, concerne une question de fait sur laquelle il ne peut pas se prononcer à l'heure actuelle. Il faudra veiller, lors de l'examen, à ce que la loi en projet ne porte pas atteinte à des principes juridiques fondamentaux.

L'auteur de l'amendement nº 27, aux termes duquel le collège de recrutement doit donner son avis au sujet des candidats, continue à défendre celui-ci. Le Conseil d'État a d'ailleurs admis cette disposition (doc. Sénat, nº 1-490/6).

L'intervenant est convaincu que le Conseil d'État émettra des objections contre la proposition du Gouvernement. Aux termes de celle-ci, l'on demandera en effet un avis préalable, par exemple, au procureur général ou aux membres de la cour d'appel qui pourront être associés, ultérieurement, aux présentations.

Il estime dès lors que la procédure proposée par le Gouvernement est bien trop complexe et qu'elle contient les germes de toutes sortes de difficultés.

Son amendement offre au Gouvernement une solution temporaire et objective et fait intervenir une instance qui jouit de la considération générale.

Il peut comprendre l'argument selon lequel pareille mission consultative ne fait pas partie des compétences du Collège de recrutement des magistrats, mais le collège de nomination et de promotion, auquel il est fait allusion dans la proposition du Gouvernement, n'existe même pas encore. Il lui semble dès lors que l'on risque de mettre la charrue avant les boeufs, ce qui serait inopportun.

Il plaide dès lors pour que l'on en revienne au Collège de recrutement des magistrats.

En principe, le ministre reste opposé à la proposition d'accorder une compétence consultative au collège de recrutement, dans le cadre de la loi en projet.

En termes de mission et de composition, le collège de recrutement n'est pas l'instance appropriée pour apprécier l'aptitude d'un candidat à siéger comme conseiller suppléant.

En deuxième lieu, il estime que sa proposition et, en particulier, l'énumération des personnes qui doivent donner leur avis, n'est pas contraire à la Constitution.

En effet, il ne faut pas nécessairement que l'avis soit favorable. Les instances chargées de la présentation ne sont donc pas « influencées ».

Les personnes qui donnent un avis ne sont pas non plus associées à la présentation.

En effet, la procédure d'avis vaut uniquement pour les candidats visés à l'article 207bis, § 1er , proposé, du Code judiciaire, c'est-à-dire tous les candidats, à l'exception des membres des cours d'appel admis à la retraite. Pour ce qui est des magistrats de première instance admis à la retraite, par exemple, c'est le chef de corps qui n'est pas associé à la présentation, e.a., qui donne son avis. Les compétences ne se chevauchent donc pas, sauf en ce qui concerne le procureur général. On pourrait le radier de la liste, bien qu'il soit déjà tenu, en vertu d'une circulaire, de donner son avis dans certains cas.

Une autre procédure est applicable en ce qui concerne les membres des cours d'appel admis à la retraite. Ils sont désignés par les premiers présidents. Comme la procédure d'avis proposée par le Gouvernement ne s'applique pas en ce qui les concerne, il n'y a pas de chevauchement de compétences à craindre dans leur cas.

Le préopinant déclare que les avis qu'il faut demander selon la proposition du ministre sont déjà disponibles. L'on consulte le bâtonnier, le procureur général et le procureur du Roi à propos de tout avocat qui brigue un poste de magistrat.

La procédure d'avis que l'intervenant propose dans son amendement nº 27 ne fait pas partie de la pratique actuelle et doit offrir la garantie, maintenant que les procédures de nomination et de promotion en vigueur dans la magistrature sont remises en question, que les 148 conseillers suppléants seront nommés sur la base de critères objectifs.

Alors que la Chambre des représentants entame le débat concernant la révision de l'article 151 de la Constitution, l'intervenant ne peut pas accepter qu'on procède à une nomination de candidats qui remplissent, certes, les conditions de nomination formelles, mais qui ne seront pas sélectionnés sur la base de l'avis d'une instance objective.

L'intervenant estime que l'on ne peut se laisser obnubiler par les conditions de nomination formelles.

L'on peut d'ailleurs se demander s'il n'y a pas de discriminations entre les diverses catégories.

C'est ainsi que les avocats doivent avoir suivi le barreau pendant au moins vingt ans (article 207bis , § 1er , 1º), alors que les juges suppléants peuvent déjà être nommés conseiller suppléant au bout de dix ans, même s'ils n'ont jamais ou quasi jamais siégé comme juge suppléant. Comme les avocats peuvent être nommés juge suppléant après avoir suivi le barreau pendant cinq ans, ils pourraient déjà être nommés conseiller suppléant au bout de quinze ans, contrairement à la première catégorie.

Une autre membre fait remarquer que les personnes visées à l'article 207bis se seront de toute manière faite une bonne ou mauvaise réputation au bout d'un certain temps et que les gens de leur discipline en seront tous informés. Pourquoi faudrait-il encore recourir à une longue procédure consultative lorsque les candidats en question bénéficient d'une bonne réputation auprès de leurs confrères ? Elle ne pense pas qu'il y ait beaucoup de risques de voir nommer des candidats incompétents.

Le préopinant répond que lorsqu'il n'y a pas de candidats valables, l'on risque de nommer n'importe qui conseiller suppléant. Il faut absolument éviter cela. Il veut dès lors avoir la garantie qu'un organe externe fera une évaluation des candidats et rédige un avis.

Le ministre répète qu'en faisant sa proposition, il souhaite que l'on puisse objectiver les présentations de candidats. Toutefois, pour que ce soit possible, il faut que la présentation soit fondée sur un dossier solide et qu'elle indique, en guise de motivation, les titres et les mérites des candidats (cf. l'amendement nº 33 du Gouvernement visant à insérer un article 19bis , doc. Sénat, nº 1-490/5).

Le Conseil d'État a estimé ne pas devoir faire d'observations d'ordre constitutionnel concernant cet amendement dans son avis sommaire (doc. Sénat, nº 1-490/6).

Deux membres font remarquer que l'on ne peut pas motiver une présentation par la seule mention de titres et de mérites.

Le ministre répond que la motivation des présentations des cours d'appel et des conseils provinciaux devrait obligatoirement intégrer les avis; ceci constituerait une motivation.

En ce qui concerne la procédure d'avis elle-même, il ne s'oppose pas à ce qu'on limite le nombre d'avis à demander.

Un membre aimerait savoir quel sera le retard dans la nomination des conseillers suppléants si l'on opte pour la procédure d'avis proposée par le ministre.

À ses yeux, la procédure qui passe par le collège de recrutement et celle qui passe par les comités d'avis présentent toutes deux des avantages.

Le noeud de la discussion concerne la nécessité d'une objectivation supplémentaire de la procédure de nomination. Il serait inacceptable du point de vue politique que l'on nomme, en application de la réglementation actuelle, 148 conseillers suppléants qui auraient pour mission de résorber un arriéré de 100 000 affaires dans un délai de trois ans.

Il propose dès lors que l'on opte soit pour la procédure passant par le Collège de recrutement des magistrats, soit pour la procédure passant par les comités d'avis.

Avant d'adopter un point de vue définitif en la matière, il tient à savoir quand la procédure de nomination doit être achevée. Il estime que cette procédure doit durer moins d'un an.

Un autre membre fait remarquer que, si l'on associe les comités d'avis à la procédure, il y aura inévitablement du retard, étant donné que la composition de ceux-ci variera en fonction de la catégorie à laquelle appartiendront les candidats respectifs.

Pour faire face à l'argument selon lequel il y aura une perte de temps du fait que lesdits comités ou ledit collège de recrutement devront encore trouver l'occasion de se réunir, l'on peut demander aux membres de rendre leur avis par écrit.

Les candidats ne doivent donc pas être entendus.

Du reste, le collège de recrutement a l'avantage de siéger en permanence, et sa composition ne doit pas être modifiée. L'argument selon lequel les membres du collège de recrutement ne sont pas en mesure d'apprécier les candidatures à leur juste valeur ne tient pas selon l'intervenant. L'expérience dont disposent les membres du collège de recrutement offre suffisamment de garanties à cet égard.

Le ministre estime que l'on ne peut pas choisir simplement entre le collège de recrutement et les comités d'avis et que l'on doit également prendre en considération la troisième voie qu'il a lui-même proposée et qui consisterait à demander, en marge de la structure du collège de recrutement et des comités d'avis, les avis écrits d'un certain nombre de personnes, lesquels seraient transmis ensuite aux instances visées à l'article 151 de la Constitution.

Un membre objecte que cette dernière solution ne tient pas compte du souci de voir le ministre prendre l'arrêté de nomination sur la base d'avis écrits. S'il ne procède pas ainsi, il prendra une décision politique qu'il ne pourra pas objectiver.

Le ministre déclare qu'il est également délicat de demander à un bâtonnier de donner un avis sur un confrère inscrit au barreau depuis vingt ans.

L'intervenant suivant se demande quel bâtonnier rendrait un avis négatif dans de telles circonstances. Cet avis deviendra donc une simple formalité.

Il conclut que, si le but de la proposition est bon, sa mise en oeuvre paraît difficile.

Un membre déclare que, si le candidat sait que le ministre se base sur un avis rendu par le bâtonnier dont il n'a pas connaissance, il pourrait être fondé à demander quel en est le contenu.

Il lui est répondu que le candidat nommé n'a pas d'intérêt à le faire. Ce n'est que le candidat qui a été écarté qui en aurait un.

Le candidat qui veut contester l'avis, mais n'a pas été présenté par la cour d'appel ou le conseil provincial, n'a pas d'intérêt.

Seul le candidat présenté par l'une de ces instances et pour lequel l'avis serait négatif, en aurait un.

À la suite de la discussion précitée, le ministre dépose l'amendement nº 46 (doc. Sénat, nº 1-490/7), qui doit permettre de concilier les différents points de vue. Celui-ci prévoit la transmission d'un certain nombre d'avis écrits au collège de recrutement plutôt qu'aux organes qui font les présentations. Le collège donne ensuite directement un avis au ministre sur l'expérience professionnelle des candidats.

L'amendement nº 46 est libellé comme suit :

Compléter l'article 207bis proposé par un § 3, rédigé comme suit :

« § 3. Le ministre de la Justice sollicite, pour chaque candidat visé au § 1er , entre autres l'avis écrit des personnes suivantes, en fonction de la catégorie à laquelle appartiennent ces candidats :

1º pour les candidats visés au § 1er , 1º :

­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;

­ du président du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;

2º pour les candidats visés au § 1er , 2º :

­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat est inscrit au tableau;

­ du président du tribunal où le candidat est nommé juge suppléant;

3º pour les candidats visés au § 1er , 3º :

­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat a exercé sa fonction en dernier lieu;

­ du président du tribunal où le candidat a exercé sa fonction en dernier lieu;

4º pour les candidats visés au § 1er , 4º :

­ du doyen de la faculté à laquelle le professeur est attaché;

5º pour les candidats visés au § 1er , 5º :

­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;

­ du doyen de la faculté à laquelle le professeur est ou était attaché;

­ du président du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau.

Ces avis seront transmis par le ministre de la Justice au Collège de recrutement des magistrats qui donne un avis écrit sur l'expérience exigée et l'aptitude des candidats à siéger comme conseiller suppléant. Cet avis est communiqué au ministre de la Justice dans les trente jours suivant la réception de la demande d'avis. »

Justification

L'exposé des motifs précise qu'en raison du prescrit constitutionnel applicable aux conseillers des cours d'appel et contenu à l'article 151 de la Constitution, il est indispensable de reprendre cette procédure de nomination pour la nomination des conseillers suppléants prévus au § 1er . La procédure précitée suscite actuellement des discussions et subira sous peu des modifications. De ce point de vue, le projet se trouve donc dans une phase de transition et sera adapté aux développements ultérieurs en la matière.

À l'occasion des discussions, il a notamment été demandé de prévoir dès à présent une plus grande objectivation. Ceci ne peut cependant pas avoir pour effet d'alourdir la procédure de nomination au point de la rendre inopérante. Par ailleurs, il est imposé aux candidats de posséder une expérience substantielle qui doit attester l'aptitude requise. Le Collège de recrutement des magistrats est dès lors chargé d'évaluer, pour chaque candidat présenté, l'expérience exigée et de formuler un avis écrit en la matière. Pour ce faire, le Collège de recrutement disposera d'une série d'avis que le ministre de la Justice aura préalablement sollicités auprès de certaines personnes de l'entourage professionnel du candidat.

Un intervenant précédent demande que les avis précités ne passent pas par le conseil provincial ni par la cour d'appel.

Le ministre confirme ce point. L'avis est mis à la disposition du collège de recrutement, qui fait savoir au ministre si le candidat satisfait ou non aux conditions.

Un membre conclut que l'arrêté de nomination ne visera par conséquent que l'avis du collège de recrutement.

Un commissaire fait observer que l'amendement du Gouvernement est rédigé comme si l'article 151 de la Constitution avait déjà été modifié.

L'intervenant maintient que, soit on a la volonté de procéder rapidement à cette modification, soit on se trouvera dans une situation impossible. Si le conseil provincial et la cour d'appel choisissent chacun les deux mêmes candidats, le choix du ministre sera limité à ceux-ci. Si, par ailleurs, les avis sur ces deux candidats ne sont pas favorables, le ministre sera dans une situation difficile.

Le ministre admet que, dans ce cas, il ne pourra procéder aux nominations. Cependant, il ne veut pas lier le sort du présent projet, qui est urgent, à celui de l'article 151 de la Constitution.

Un des auteurs de l'amendement nº 27 déclare qu'il peut se rallier à l'amendement du Gouvernement, qui apporte des éléments d'objectivation.

La procédure est, il est vrai, assez lourde, mais elle démontre l'effort d'objectivation fait par le législateur.

À la question de savoir si des avis cumulés seront demandés pour un candidat qui a pratiqué le barreau pendant 20 ans et, simultanément, enseigne le droit en tant que professeur à la faculté, le ministre répond que l'avis sera demandé pour les personnes visées à l'article 207bis , § 3, selon la catégorie à laquelle le candidat appartient au moment où il postule.

b) Vote

L'amendement nº 46 du Gouvernement est adopté par 7 voix et 3 abstentions.

L'amendement nº 27 de MM. Erdman et Lallemand est retiré.

7. Paragraphe 2

Ce paragraphe ne donne lieu à aucune observation.

8. Observations finales et vote sur l'article 9

La commission décide de supprimer, dans l'énumération des conditions de nomination contenue au § 1er , premier alinéa, 1º à 5º, le mot « soit ».

Dans le but d'améliorer la lisibilité, il est décidé de formuler le 3º comme suit :

« 3º être un magistrat admis à la retraite, à l'exception des membres des cours d'appel visés au § 2 ».

L'article 9 ainsi amendé est adopté, en tant qu'article 10, par 6 voix contre 3.

12. Article 10 (article 11 du texte adopté)

Article 210ter du Code judiciaire (nouveau)

Cet article traite de la désignation du magistrat-coordinateur.

Le candidat magistrat-coordinateur doit être porteur d'un certificat attestant une formation spécialisée en management.

Un membre désire savoir en quoi consiste exactement cette formation. Quels diplômes ou quels certificats le candidat doit-il présenter ?

Le ministre répond qu'il a été opté pour une définition assez large. C'est pourquoi l'on n'exige pas de diplôme, mais seulement un certificat.

Il a été envisagé de préciser que les candidats devaient être porteurs du certificat qui est délivré aux chefs de corps ayant suivi la formation en management dans le cadre de la formation permanente.

L'on a toutefois renoncé à cette idée, pour ne pas mettre hors jeu les universités et les écoles supérieures.

Le candidat magistrat-coordinateur doit donc démontrer qu'il a suivi un cours relatif à des techniques de management qui peuvent être appliquées à la structure des tribunaux. C'est une définition assez large. Par conséquent, il n'est pas nécessaire d'être porteur du diplôme de licencié en sciences économiques appliquées, option management.

Il appartient au ministre de la Justice d'évaluer le poids des certificats qui seront présentés.

Un membre se demande si cette condition n'est pas trop stricte.

Le ministre répond que le Ministère de la Justice organise plusieurs cours à l'intention des magistrats, dont notamment un relatif aux techniques de management. Les magistrats peuvent s'inscrire à ces cours; ils peuvent même suivre un cours de ce type aux Pays-Bas.

Pour permettre aux magistrats néerlandophones et francophones de se rencontrer, il a néanmoins été décidé d'organiser ces cours en Belgique, dans les deux langues nationales. Ces rencontres constituent un enrichissement supplémentaire, car elles donnent aux magistrats l'occasion d'échanger leurs expériences, de se concerter et d'établir des contacts utiles.

Le ministre espère motiver suffisamment de magistrats à suivre ces cours.

L'intervenante précédente émet des réserves quant à l'utilisation du terme « management », qui a une connotation commerciale.

Un membre propose de remplacer, dans le texte français, le mot « management » par le mot « gestion ».

Le ministre fait remarquer que le mot « gestion » est traduit en néerlandais par le mot « beheer ». Ce terme a toutefois un sens trop étroit et il ne rend pas la signification de la notion de « management », qui comprend la direction et l'initiative.

Bien que management ne soit ni un mot français, ni un mot néerlandais, il est à ce point entré dans l'usage que nul ne songe encore à s'y arrêter.

L'intervenant précédent maintient que le mot « management » peut être parfaitement traduit en français par le mot « gestion ».

Un autre membre souscrit au point de vue du ministre. Management suppose plus qu'une simple gestion et recouvre la direction active d'une organisation.

D'ailleurs, les universités et les écoles supérieures n'organisent pas des cours de gestion, mais de management.

Partant de ce constat, un membre propose de remplacer, dans le texte français, le mot « management » par les mots « organisation et gestion ».

Plusieurs membres plaident pour le maintien du mot « management » dans le texte néerlandais. L'argument suivant lequel ce mot aurait une connotation commerciale n'est pas forcément négatif. Il s'agit en effet d'organiser les juridictions de la manière la plus efficace possible.

La commission souscrit à ce point de vue et décide de maintenir le terme « management » dans le texte français comme dans le texte néerlandais.

L'article 10 est adopté, en tant qu'article 11, à l'unanimité des 9 membres présents.

13. Article 11 (article 12 du texte adopté)

Article 213, deuxième alinéa, du Code judiciaire

Cet article vise à étendre le cadre des cours d'appel avec six conseillers effectifs, à savoir un conseiller, respectivement, pour les Cours d'appel d'Anvers, de Mons, de Gand et de Liège et deux pour la Cour d'appel de Bruxelles.

Un membre critique la justification sommaire qui a été donnée dans l'exposé des motifs (doc. Sénat, nº 1-490/1, p. 9).

Il est d'avis que cette extension du cadre représente le prix que le ministre doit payer pour que les conseillers effectifs acceptent les conseillers suppléants.

L'exposé des motifs ne donne aucune explication sur l'attribution des six nouveaux conseillers effectifs aux différentes cours d'appel.

Le ministre renvoie à la justification détaillée qui est donnée pour l'article 23 de la loi en projet (doc. Sénat, nº 1-490/1, p. 11).

Un commissaire insiste pour que les six conseillers soient nommés suivant la procédure qui sera élaborée dans le cadre de la révision de l'article 151 de la Constitution.

Compte tenu du caractère urgent du projet de loi en discussion, le ministre estime qu'il n'est pas opportun d'attendre cette révision. Il assure la commission que lors de la nomination de ces six conseillers, il ne pourra pas se permettre de petits jeux politiques. Le contrôle du Parlement et l'opinion publique empêchent que la nomination se fasse seulement en fonction de l'appartenance des candidats à un parti politique. Un ministre qui s'adonnerait à une telle pratique signerait son arrêt de mort politique.

La nomination de six conseillers se fera donc sur des bases objectives.

L'article 11 est adopté, en tant qu'article 12, à l'unanimité des 9 membres présents.

14. Article 11bis

Article 267, § 1er bis, du Code judiciaire

MM. Coveliers et Goris déposent l'amendement nº 6 (doc. Sénat, nº 1-490/2) :

« Insérer un article 11bis (nouveau), rédigé comme suit :

« Art. 11bis. ­ À l'article 267 du même Code est inséré un § 1er bis nouveau, rédigé comme suit :

« § 1er bis. Pour pouvoir être nommé greffier-informaticien, le candidat doit :

1º être âgé de vingt-cinq ans accomplis;

2º être porteur d'un diplôme de l'enseignement secondaire supérieur ou d'études déclarées équivalentes par le Roi, ainsi que du certificat de candidat-greffier;

3º justifier d'une formation de base en informatique portant sur la programmation et l'organisation de banques de données;

4º justifier d'une expérience minimale de trois ans en bureautique et informatique. »

Justification

Les amendements déposés visent à prévoir un poste de greffier-informaticien auprès de chaque cour d'appel, par analogie avec ce que l'on a déjà fait au Conseil d'État.

L'on peut invoquer plusieurs raisons à l'appui de ces amendements :

­ l'introduction du programme d'informatisation dans les cours justifie déjà en soi la présence d'au moins un greffier ayant une certaine formation et une certaine expérience en informatique;

­ l'utilisation d'un système informatique et la gestion partielle de celui-ci par une personne qualifiée ne peut qu'améliorer le fonctionnement du service et constituer ainsi un instrument permettant de combattre l'arriéré judiciaire.

Le ministre renvoie au commentaire qu'il a donné à propos de l'amendement nº 5 de MM. Goris et Coveliers (article 8bis ).

L'amendement nº 6 est rejeté par 6 voix contre 2 et 1 abstention.

15. Article 12 (article 13 du texte adopté)

Article 288, deuxième alinéa, du Code judiciaire (nouveau)

Cet article porte sur l'installation des conseillers suppléants.

Un membre demande si le ministre estime vraiment indispensable de donner tant de solennité à la réception des conseillers supplémentaires. La manie de tout réglementer ira-t-elle jusqu'à promulguer un arrêté royal fixant le costume des conseillers suppléants ?

Selon l'intervenant, il est préférable de limiter la cérémonie à la prestation de serment.

Le ministre répond que l'article 288 du Code judiciaire utilise le terme de « réception » pour tous les magistrats, en ce compris les juger suppléants et les juges sociaux. Les magistrats doivent donc être reçus. Quant à la manière dont se déroulera la réception des conseillers suppléants, le premier président pourra en décider. Leur réception implique qu'ils prêtent serment.

Étant donné qu'en vertu de l'article 341, quatrième alinéa, proposé, du Code judiciaire (nouveau), les conseillers suppléants ne font pas partie de l'assemblée générale (art. 18), il n'est pas nécessaire de prévoir pour eux un costume spécial. Ils porteront donc le costume noir, et non la robe rouge prescrite pour l'assemblée générale et les occasions spéciales comme les mercuriales.

Au vu de ce qui précède, le préopinant propose de remplacer le terme « réception » par les termes « prestation de serment » .

Un autre membre demande si le mot « réception » ne devrait pas être remplacé par le mot « installation ».

On souligne que l'article 288 du Code judiciaire emploie dans tous les cas les mots « installatie » et « réception », même si, en français, le terme « installation » conviendrait mieux.

L'article 12 est adopté en tant qu'article 13 par 6 voix et 3 abstentions.

16. Article 13 (art. 14 du texte adopté)

Article 300, premier alinéa, du Code judiciaire

Il y a lieu de renvoyer non seulement aux 1º et 2º de l'article 207bis , § 1er , mais également aux 4º et 5º de cette disposition.

Pour le surplus, cet article ne donne lieu à aucune observation. L'article 13 est adopté en tant qu'article 14 par 6 voix et 3 abstentions.

17. Article 14 (art. 15 du texte adopté)

Article 301 du Code judiciaire

Cet article ne fait l'objet d'aucune remarque. L'article 14 est adopté en tant qu'article 15 par 6 voix et 3 abstentions.

18. Article 15 (art. 16 du texte adopté)

Article 311 du Code judiciaire

Cet article ne donne lieu à aucune remarque. L'article 15 est adopté en tant qu'article 16 par 6 voix et 3 abstentions.

19. Article 16 (art. 17 du texte adopté)

Article 321, deuxième alinéa, du Code judiciaire (nouveau)

Cet article ne donne lieu à aucune observation. L'article 16 est adopté en tant qu'article 17 par 6 voix et 3 abstentions.

20. Article 17 (art. 18 du texte adopté)

Article 321bis du Code judiciaire (nouveau)

Cet article ne donne lieu à aucune observation. L'article 17 est adopté en tant qu'article 18 par 6 voix et 3 abstentions.

21. Article 18 (art. 19 du texte adopté)

Article 341, quatrième alinéa, du Code judiciaire (nouveau)

Cet article ne fait l'objet d'aucune remarque. L'article 18 est adopté en tant qu'article 19 par 6 voix et 3 abstentions.

22. Article 19 (art. 20 du texte adopté)

Article 342bis du Code judiciaire (nouveau)

Cet article oblige l'assemblée générale à rédiger un plan pluriannuel contenant des mesures qui peuvent contribuer à résorber l'arriéré dans l'administration de la Justice de son ressort.

a) Discussion

MM. Lallemand et Erdman déposent l'amendement nº 11 (doc. Sénat, nº 1-490/3) :

« Remplacer l'alinéa 1er de l'article 342bis proposé par ce qui suit :

« L'assemblée générale de la cour d'appel examine le rapport du magistrat-coordinateur. Sur la base de celui-ci, elle détermine notamment, dans le cadre d'un plan pluriannuel, les mesures qui peuvent contribuer à résorber l'arriéré judiciaire dans son ressort. »

Le ministre n'a aucune objection à formuler. Il précise que l'article 9 concerne bien l'insertion d'un article 342bis , et non d'un article 343bis .

M. Bourgeois dépose l'amendement nº 35 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Au premier alinéa de l'article 342bis proposé, remplacer les mots « qui peuvent contribuer à » par les mots « qui visent à ».

Justification

L'on précise ainsi que les mesures que la cour d'appel doit prendre ne sauraient en aucun cas être facultatives. Elles doivent mener à des résultats.

Concernant le troisième alinéa, la commission part du point de vue que le rapport annuel de l'assemblée générale, transmis par le ministre de la Justice aux présidents des Chambres fédérales, doit être communiqué aux Commissions de la Justice de la Chambre et du Sénat pour que celles-ci puissent en discuter. Il n'est toutefois pas nécessaire de le stipuler en toutes lettres dans la loi.

Concernant le troisième alinéa, M. Lallemand dépose l'amendement nº 37 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Remplacer le troisième alinéa de l'article 342bis proposé par ce qui suit :

« Le procureur général près la cour d'appel transmet ce rapport au ministre de la Justice, qui le communique ensuite aux présidents des Chambres législatives et au Conseil des ministres. »

Le ministre n'émet aucune objection à l'encontre de cet amendement.

b) Votes

Les amendements nº 11 de MM. Lallemand et Erdman, nº 35 de M. Bourgeois et nº 37 de M. Lallemand, de même que l'article 19 ainsi amendé (article 20 nouveau) sont adoptés à l'unanimité des 9 membres présents.

23. Article 19bis

Article 349, quatrième alinéa, du Code judiciaire

Le Gouvernement dépose un amendement contenant un article 19bis nouveau (doc. Sénat, nº 1-490/5, amendement nº 33), dont le contenu constitue une alternative à l'amendement nº 27 de MM. Erdman et Lallemand.

Cette alternative consiste à indiquer les titres et mérites des candidats dans la présentation.

Appelé à donner un avis à ce sujet, le Conseil d'État a fait savoir que, d'un point de vue constitutionnel, cet amendement n'appellait aucune remarque (doc. Sénat, nº 1-490/6).

L'amendement nº 33 du Gouvernement est retiré, étant donné que les avis sont déjà prévus à un autre stade de la procédure.

24. Article 20 (art. 21 du texte adopté)

Article 379ter du Code judiciaire (nouveau)

a) Discussion

M. Vandenberghe et consorts déposent l'amendement nº 43 (doc. Sénat, nº 1-490/7) :

« Compléter le § 2 de l'article 379ter proposé par la disposition suivante :

« S'il est appelé à siéger en qualité de président de ladite chambre, il a droit à une indemnité mensuelle, comme prévu à l'article 379. »

Justification

Compte tenu de l'importance de la fonction que remplissent les présidents des chambres supplémentaires et de l'engagement que l'on attend de leur part, il est indiqué de prévoir un statut financier approprié. Cette mesure permet en outre de rendre leur fonction plus attrayante.

Une solution de compromis a été trouvée à propos du fonctionnement des chambres supplémentaires, en indiquant qu'elles doivent de préférence être présidées par une personne qui n'est pas avocat. Pour rendre cette fonction à responsabilité plus attractive, l'amendement propose de prévoir un droit à une indemnité mensuelle telle que prévue à l'article 379.

Le ministre est d'accord sur le principe de l'amendement, mais il craint qu'il n'inspire des revendications aux présidents d'autres chambres.

Un membre demande s'il ne faut pas craindre que la rémunération envisagée n'ait un effet négatif sur la motivation des autres membres de la chambre.

La différence entre l'indemnité du conseiller suppléant ordinaire et celle du président risque d'être importante. D'autre part, un conseiller appelé à siéger comme président faisant fonction dans une chambre nouvellement créée ne reçoit pas de supplément de rémunération, dès lors qu'il n'y a pas, dans le cadre, de place vacante de président de chambre.

Un autre membre se rallie à cette observation. Il faut éviter de créer des disparités trop importantes dans la rémunération de magistrats de niveaux similaires sous peine de susciter des réactions négatives chez certains.

Le ministre répond qu'il existe d'autres différences dans le système, justifiées par la nature différente de la fonction, par exemple entre un conseiller suppléant visé par le présent projet, qui sera rémunéré par audience, et l'avocat qui siège de temps à autre comme suppléant dans le système actuel, et qui ne sera pas rémunéré. Le ministre demande si l'on ne pourrait pas atteindre l'objectif poursuivi par l'amendement en modifiant plutôt le § 2 de l'article.

M. Vandenberghe souscrit à cette suggestion, et dépose un nouvel amendement libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-490/7, amendement nº 47) :

« Remplacer le § 2 de l'article 379ter proposé comme suit :

« § 2. Le conseiller suppléant-président et le conseiller suppléant qui sont appelés à siéger dans une chambre supplémentaire comme prévu dans l'article 102, § 2, ont droit, en leur qualité de président ou de conseiller suppléant, à une indemnité par audience, dont les modalités d'application sont fixées par le ministre de la Justice. »

Justification

Voir l'amendement nº 43.

Un membre demande si le ministre peut déjà citer un ordre de grandeur pour l'indemnité par audience visée à l'article 20.

Pourquoi la décision est-elle, sur ce point, laissée au ministre ?

Le ministre répond que le chiffre de 1 500 francs par heure d'audience a été cité comme piste de travail, pour forfaitiser le système et rendre la fonction suffisamment attractive.

Sur la question d'un autre membre, il précise que ce chiffre a été défini en évaluant la rémunération adéquate pour un bâtonnier ou un avocat pratiquant le barreau depuis une vingtaine d'années, et qui consacrerait environ une demi-journée par semaine à cette activité.

Plusieurs membres font observer que la question du statut sous lequel la fonction de conseiller suppléant sera exercée doit être étudiée en fonction des différentes hypothèses possibles (magistrat émérite, avocat en activité, avocat cessant ses activités, professeur d'université ...) (voir note nº 3 en annexe).

b) Votes

L'amendement nº 47 de M. Vandenberghe et l'article ainsi amendé (article 21 nouveau) sont adoptés par 6 voix et 3 abstentions.

L'amendement nº 43 de M. Vandenberghe et consorts est retiré.

25. Article 21 (art. 22 du texte adopté)

Article 379quater du Code judiciaire (nouveau)

Un membre dit supposer que le ministre de la Justice tiendra compte, lors de la fixation de l'indemnité, des dispositions légales et réglementaires concernant l'activité professionnelle que peuvent exercer les personnes qui bénéficient d'une pension à charge du Trésor.

Cet article est adopté par 6 voix et 3 abstentions et devient l'article 22.

26. Article 22 (art. 23 du texte adopté)

Article 390, deuxième alinéa, du Code judiciaire (nouveau)

a) Discussion

Un membre aimerait savoir pourquoi seuls les magistrats admis à la retraite en raison de leur âge peuvent siéger en tant que conseiller suppléant jusqu'à l'âge de 70 ans. Pourquoi les conseillers suppléants nommés en vertu de l'article 207bis, § 1er , ne peuvent-ils siéger que jusqu'à l'âge de 67 ans ?

Le ministre précise que le droit commun vaut pour tous les conseillers suppléants (ce qui signifie que la limite d'âge est de 67 ans), sauf pour les magistrats admis à la retraite en raison de leur âge (qui ont ipso facto déjà 67 ans), qui peuvent siéger jusqu'à l'âge de 70 ans.

Si l'on prévoit que les autres catégories de conseillers suppléants, comme les avocats et les professeurs, ne peuvent pas exercer leur fonction jusque l'âge de 70 ans, c'est pour ne pas créer de discrimination au détriment des conseillers effectifs dont l'âge de la retraite est fixé à 67 ans. Par contre, la distinction qui est faite par rapport aux magistrats admis à la retraite en raison de leur âge est justifiée, parce que ceux-ci ont déjà 67 ans.

Le préopinant estime qu'il sera en tout cas positif, dans le cadre de la réforme proposée, de prévoir que tous les conseillers suppléants pourront exercer leur fonction jusqu'à l'âge de 70 ans. Il considère que l'on a commis une erreur en fixant la limite d'âge en question, parce que l'on trouvera suffisamment de professeurs et d'avocats qui seront disposés à siéger comme conseiller suppléant.

Un autre membre signale que les avocats doivent travailler jusqu'à l'âge de 65 ans pour avoir droit à une pension complète d'indépendant. S'ils ne peuvent exercer la fonction de conseiller suppléant que de 65 à 67 ans, ils auront à peine le temps de s'initier à celle-ci.

Le ministre note que les avocats ne doivent pas attendre d'avoir atteint l'âge de 65 ans. Comme ils doivent avoir suivi le barreau pendant au moins 20 ans, la plupart d'entre eux entreront en ligne de compte pour la nomination à une fonction de conseiller suppléant dès l'âge de 45 ans.

Il souligne que l'article 390, deuxième alinéa, proposé constitue une simple application du droit commun. Les juges de paix suppléants et les juges du tribunal de première instance sont eux aussi admis à la retraite à l'âge de 67 ans. Si l'on n'applique pas ce principe pour ce qui est des conseillers suppléants, l'on crée, de l'avis du Gouvernement, une discrimination aux dépens du premier groupe de magistrats.

Le Gouvernement estime cependant qu'il est légitime de permettre aux magistrats admis à la retraite en raison de leur âge d'exercer la fonction de conseiller suppléant jusqu'à l'âge de 70 ans.

Comme les conseillers suppléants n'exerceront leur fonction que pendant un temps limité et qu'ils ne s'occuperont que d'un nombre limité d'affaires relevant de l'arriéré judiciaire, le préopinant estime qu'il serait injustifié d'établir, en ce qui concerne l'âge de la retraite, une distinction entre les conseillers suppléants, selon qu'ils étaient avocat, professeur ou magistrat admis à la retraite, avant leur candidature. D'après lui, bien des candidats valables devront mettre fin prématurément à leurs activités de conseiller suppléant, si l'on établit cette distinction.

C'est pourquoi il faudrait fixer à 70 ans la limite d'âge pour tous les conseillers suppléants qui seront nommés en application de la présente loi.

Bien que ce relèvement de l'âge de la retraite déroge au droit commun en la matière, l'intervenant estime qu'il serait justifié en raison du caractère exceptionnel et temporaire de la loi en projet. Il permet à des candidats qui disposent d'une grande compétence juridique et qui sont libérés des tracas professionnels qu'ils avaient en tant qu'avocat et/ou professeur de continuer à exercer la fonction de conseiller suppléant. Ils peuvent s'attacher davantage, dès lors, à résorber l'arriéré judiciaire et l'objection du conflit d'intérêts et du risque de partialité, que l'on pourrait émettre à l'encontre des avocats, disparaît du même coup.

À la suite de la discussion précitée, M. Lallemand dépose l'amendement nº 36 (doc. Sénat, nº 1-490/5) :

« Remplacer cet article comme suit :

« Art. 22. ­ L'article 390 du même Code est complété par un deuxième alinéa, rédigé comme suit :

« Ces dispositions s'appliquent également aux conseillers suppléants. Ceux-ci peuvent toutefois être appelés à siéger dans les chambres supplémentaires jusqu'à 70 ans. »

À priori, le ministre n'a pas d'objection contre cet amendement. Il craint toutefois que, si l'on étend la limite d'âge de 70 ans à tous les conseillers suppléants, y compris les avocats et les professeurs visés à l'article 207bis , § 1er , l'on ira à l'encontre du droit commun selon lequel tous les magistrats ­ à l'exception des membres de la Cour de cassation pour lesquels l'âge de la retraite est fixé à 70 ans ­ sont admis à la retraite à l'âge de 67 ans (article 383, § 1er , du Code judiciaire).

Une membre souscrit aux propos du ministre. Il ne lui semble pas opportun, alors que l'on multiplie les catégories de juristes pouvant entrer en ligne de compte en vue d'une nomination à la fonction de conseiller suppléant, d'étendre la limite d'âge de 70 ans, qui vaut actuellement pour les seuls magistrats admis à la retraite en raison de leur âge, aux autres conseillers suppléants qui remplissaient les conditions définies à l'article 207bis , § 1er , 1º, 2º, 3º et 4º, proposé, du Code judiciaire au moment de leur nomination.

L'auteur de l'amendement fait remarquer qu'il veut répondre à la principale objection qui est émise à l'encontre du projet de loi à l'examen, à savoir le fait que des avocats qui travaillent encore au barreau rendront la justice en appel en tant que membre des chambres supplémentaires.

Il pourrait dès lors atténuer sa proposition en prévoyant que les avocats ayant quitté le barreau et les professeurs pourront siéger comme conseiller suppléant jusqu'à l'âge de 70 ans.

L'objectif est double : d'une part, attirer le plus grand nombre possible de candidats valables, d'autre part, éviter que trop d'avocats en exercice ne siègent comme conseillers suppléants.

Le ministre peut comprendre les considérations qui sous-tendent cette dernière proposition. Elles ne dissipent toutefois pas les objections qu'il a formulées. À son avis, rien ne justifie raisonnablement qu'à l'instar des magistrats mis à la retraite en raison de leur âge, on laisse siéger jusqu'à l'âge de 70 ans des avocats et des professeurs qui ont été nommés conseillers suppléants.

En effet, les avocats et les professeurs qui quittent le barreau et l'université après leur nomination en tant que conseillers suppléants n'ont pas eu la carrière d'un juge effectif qui est mis à la retraite à l'âge de 67 ans ou, pour les membres de la Cour de cassation, de 70 ans.

Le ministre est convaincu, sur la base de ses contacts entre autres avec le barreau, qu'il y aura suffisamment de candidats pour compléter les 148 vacances de conseiller suppléant. C'est pourquoi il estime inutile de permettre également aux avocats, juges suppléants et professeurs de siéger comme conseiller suppléant jusqu'à l'âge de 70 ans.

En conséquence, M. Lallemand retire son amendement nº 36.

b) Vote

L'article 22 est adopté en tant qu'article 23 par 5 voix et 4 abstentions.

27. Article 23 (art. 24 du texte adopté)

Loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire

a) Discussion

MM. Foret et Desmedt déposent l'amendement nº 9 (doc. Sénat, nº 1-490/2) :

« Modifier cet article comme suit :

A. Dans la colonne « Greffier » du tableau reproduit dans cet article, remplacer les nombres « 16/18/18/12/9 » par, respectivement, les nombres « 17/20/19/13/10 ».

B. Dans la colonne « Commis-greffier » du même tableau, remplacer les nombres « 8/7/7/5/4 » par, respectivement, les nombres « 9/8/8/6/4. »

Justification

Les dispositions du présent projet de loi vont entraîner un surcroît des tâches des greffes. On ne peut négliger cet aspect; et il est donc nécessaire de renforcer les services du greffe, pour pouvoir faire face aux audiences supplémentaires.

La réponse du ministre sur ce point soulevé lors de la discussion générale n'est pas satisfaisante. Nous estimons qu'on ne peut se contenter d'« expédients » tels que le détachement et le recours à des contractuels.

De plus, il est certain qu'une plus grande efficacité des services du greffe contribuera à la résorption de l'arriéré judiciaire, d'autant qu'une proposition de loi votée récemment au Sénat consacre le rôle des greffiers comme assistants des magistrats du siège.

Le ministre déclare qu'il n'est pas hostile à cet amendement quant au fond. Il faut cependant bien se rendre compte que les chambres supplémentaires n'ont qu'un caractère provisoire. L'objectif initial était d'élargir le cadre des greffiers et des commis-greffiers. Le Gouvernement a toutefois renoncé à ce projet pour des raisons budgétaires.

Il est dès lors décidé de déléguer des greffiers aux chambres supplémentaires et de les remplacer ensuite par des contractuels. À l'issue de la période pour laquelle les chambres supplémentaires auront été instituées, on examinera dans quelle mesure l'arriéré judiciaire aura été résorbé. Cela fera également ressortir si le cadre des greffiers et des commis-greffiers doit être élargi ou non.

L'un des auteurs peut admettre que le cadre des commis et des commis-greffiers ne puisse pas être élargi actuellement pour des raisons budgétaires.

Il n'est toutefois pas convaincu que l'arriéré judiciaire sera résorbé dans trois ans.

En outre, les 148 fonctions de conseiller suppléant entraîneront peut-être à terme une extension de cadre des cours d'appel et la création de chambres supplémentaires permanentes.

En conclusion, l'intervenant se dit plus que sceptique à l'égard de la proposition de faire siéger comme greffiers d'une cour d'appel des personnes engagées sur une base contractuelle. Comme il n'est pas exclu que les chambres supplémentaires soient composées exclusivement de conseillers suppléants, la tâche du greffier qui consiste à leur venir en aide gagnera en importance. Dans ces conditions, il ne semble absolument pas recommendable d'assigner à de telles chambres un greffier sans la moindre expérience et engagé sur une base contractuelle.

L'intervenant considère que le projet du ministre visant à engager des greffiers et des commis-greffiers sur une base contractuelle est inspiré purement et simplement par des considérations d'ordre budgétaire, et non par le souci d'assurer une organisation judiciaire efficace.

Le ministre réplique que l'on entend bien faire siéger les greffiers effectifs au sein des chambres supplémentaires. Ils seront aidés, pour leurs autres tâches, par les greffiers contractuels.

Un autre commissaire estime que le cumul des audiences des chambres ordinaires et supplémentaires alourdira certainement le volume de travail des greffiers. C'est donc à très juste titre que l'amendement soulève la question de savoir si le corps actuel des greffiers pourra y faire face. Le ministre dispose-t-il d'éléments qui indiquent qu'aucun problème ne se posera sur ce plan ? Les greffiers ont-ils été consultés à ce sujet ?

Le ministre répond que le projet à l'examen a été discuté à l'occasion de la concertation relative à la déclaration d'intention commune des acteurs de la Justice, à savoir la magistrature, le barreau, les greffiers, les secrétaires, les huissiers de justice et le département de la Justice.

Les greffiers sont donc au courant de la réforme que prévoit le projet. Lors de la concertation, leurs représentants n'ont formulé aucune objection à propos de l'option qui consiste à confier les tâches de greffier et de commis-greffier à du personnel contractuel.

Un commissaire propose de limiter aux greffiers l'extension de cadre proposée par l'amendement nº 9. Compte tenu des responsabilités qu'implique cette fonction, une extension de cadre serait la bienvenue.

Les auteurs de l'amendement marquent leur accord et retirent le point B de leur amendement.

En ce qui concerne la désignation des 148 conseillers suppléants, deux membres font observer que le ressort des Cours d'appel d'Anvers et de Gand couvre deux provinces, celui de la Cour d'appel de Liège, trois, et celui de la Cour d'appel de Bruxelles, les provinces du Brabant flamand et du Brabant wallon et la Région bilingue de Bruxelles-Capitale.

Ils souhaitent dès lors savoir comment le nombre de conseillers suppléants prévu à l'article 23 pour ces cours sera réparti entre les provinces concernées et, dans le cas de la Cour d'appel de Bruxelles, entre les provinces du Brabant flamand et du Brabant wallon et la Région bilingue de Bruxelles-Capitale.

Le ministre ne préconise pas de procéder à une répartition préalable, d'autant plus qu'il n'a pas un aperçu du nombre et de la formation professionnelle des candidats.

b) Vote

L'amendement nº 9 A de MM. Foret et Desmedt, et l'article 23 ainsi amendé (article 24 nouveau) sont adoptés à l'unanimité des 9 membres présents.

28. Article 24 (art. 25 du texte adopté)

Entrée en vigueur

M. Vandenberghe dépose un amendement ainsi libellé (doc. Sénat, nº 1-490/7, amendement nº 48) :

« Apporter les modifications suivantes à cet article :

A. Supprimer les mots « dont le Roi fixe la date d'entrée en vigueur ».

B. Compléter l'article par la disposition suivante :

« Les articles 4 et 6 entrent en vigueur à la date fixée par le Roi, mais au plus tard six mois après la publication de la présente loi au Moniteur belge. »

L'auteur de l'amendement estime qu'il n'appartient pas au Roi de déterminer la date d'entrée en vigueur d'une loi.

L'amendement et l'article ainsi amendé (article 25 nouveau) sont adoptés par 6 voix et 2 abstentions.

IV. VOTE SUR L'ENSEMBLE

L'ensemble du projet de loi ainsi amendé a été adopté par 5 voix contre 2 et 1 abstention.

Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 8 membres présents.

Les rapporteurs, Le président,
André BOURGEOIS. Roger LALLEMAND.

Claude DESMEDT.


V. TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

DE LA JUSTICE


TEXTE DU PROJET DE LOI TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION
CHAPITRE Ier CHAPITRE Ier
Disposition préliminaire Disposition préliminaire
Article 1er Article premier
La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution. La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.
CHAPITRE II CHAPITRE II
Modification du Code judiciaire Modification du Code judiciaire
Art. 2 Art. 2
Dans l'article 101 du Code judicaire, modifié par la loi du 19 juillet 1985, l'alinéa suivant est inséré entre les alinéas 2 et 3 : Dans l'article 101 du Code judiciaire, modifié par la loi du 19 juillet 1985, les alinéas suivants sont insérés entre les alinéas 2 et 3 :
« Il y a dans chaque cour d'appel un magistrat-coordinateur qui est chargé en particulier de l'organisation du travail et de la rédaction et de la publication annuelles d'un rapport d'activité. Le magistrat-coordinateur exécute ce travail sous l'autorité et la direction du premier président. » « Il y a dans chaque cour d'appel un magistrat-coordinateur chargé notamment , sous l'autorité [...] du premier président, de l'organisation du travail et de la rédaction et de la publication annuelles d'un rapport d'activité.
Ce rapport d'activité doit notamment analyser l'effet des mesures prises en vue de résorber l'arriéré judiciaire.
Le rapport du magistrat coordinateur est communiqué au ministre de la Justice, qui le transmet aux Chambres législatives. »
Art. 3 Art. 3
Dans le chapitre III du titre premier du livre premier de la deuxième partie du même Code, est insérée une section Ibis intitulée « Section Ibis. Des conseillers suppléants aux cours d'appel » et comportant l'article 102, abrogé par la loi du 19 juillet 1985, et rétabli dans la rédaction suivante : Dans le chapitre III du titre premier du livre premier de la deuxième partie du même Code, est insérée une section Ibis intitulée « Section Ibis. Des conseillers suppléants aux cours d'appel » et comportant l'article 102, abrogé par la loi du 19 juillet 1985, et rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 102. § 1er . Il y a des conseillers suppléants à la cour d'appel; ils sont nommés pour remplacer les conseillers lorsqu'ils sont empêchés. « Art. 102. § 1er . Il y a des conseillers suppléants à la cour d'appel; ils sont nommés pour remplacer les conseillers lorsqu'ils sont empêchés.
Les conseillers suppléants peuvent être appelés à siéger dans les cas où l'effectif est insuffisant pour composer le siège conformément aux dispositions de la loi. Les conseillers suppléants peuvent être appelés à siéger dans les cas où l'effectif est insuffisant pour composer le siège conformément aux dispositions de la loi.
§ 2. En outre, les conseillers suppléants siègent dans les chambres supplémentaires constituées conformément à l'article 106bis . » § 2. En outre, les conseillers suppléants siègent dans les chambres supplémentaires constituées conformément à l'article 106bis . »
Art. 4 Art. 4
Un article 106bis , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code : Un article 106bis , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 106bis. Pour une durée limitée fixée par le Roi, des chambres supplémentaires sont créées pour résorber l'arriéré judiciaire. « Art. 106bis. § 1er . Pour une durée limitée fixée par le Roi, des chambres supplémentaires sont créées pour résorber l'arriéré judiciaire. Après délibération des Chambres législatives sur les rapports du magistrat coordinateur, visés à l'article 101, troisième alinéa, la durée peut être prorogée par le Roi, si cette prorogation s'avère indispensable.
Un règlement particulier est fixé pour ces chambres suivant la procédure déterminée à l'article 106, alinéa 1er . Suivant la procédure déterminée à l'article 106, alinéa premier, un règlement particulier est fixé pour ces chambres qui siègent exclusivement en matière civile, fiscale et commerciale.
Ce règlement détermine le nombre de chambres supplémentaires de la cour d'appel. Le règlement détermine le nombre de chambres supplémentaires de la cour d'appel.
Ces chambres sont composées d'au moins deux conseillers suppléants. § 2. Les chambres supplémentaires sont composées d'au moins deux conseillers suppléants.
Elles ne peuvent être présidées par un avocat inscrit au tableau de l'Ordre des avocats. »
Les affaires sont distribuées par le premier président conformément au règlement prévu à l'alinéa 1er . » [...]
Art. 5
À l'article 109, premier alinéa, du même Code, les mots « en concertation avec le magistrat-coordinateur » sont insérés entre les mots « président » et « conformément ».
Art. 5 Art. 6
Dans l'article 109bis , § 2, alinéa 1er , du même Code inséré par la loi du 19 juillet 1985, il est inséré un 1ºbis , rédigé comme suit : Dans l'article 109bis , § 2, alinéa 1er , du même Code, inséré par la loi du 19 juillet 1985, il est inséré un 1ºbis , rédigé comme suit :
« 1ºbis . Les appels des décisions rendues par le tribunal de commerce, » « 1ºbis . Les appels des décisions rendues par le tribunal de commerce, »
Art. 6 Art. 7
Un article 109ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code : Un article 109ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 109 ter. Sont attribuées aux chambres supplémentaires visées à l'article 106bis , les causes pour lesquelles, soit une fixation a été accordée pour une date éloignée de plus d'un an de la date de mise en vigueur du présent article, soit aucune fixation n'a été accordée alors qu'elle a été demandée. L'attribution des causes se fait sans avoir égard au fait que la fixation initiale avait été accordée pour une chambre à trois conseillers ou une chambre à conseiller unique. « Art. 109 ter. Sont attribuées aux chambres supplémentaires visées à l'article 106bis , les causes pour lesquelles, soit une fixation a été accordée pour une date éloignée de plus d'un an de la date de mise en vigueur du présent article, soit aucune fixation n'a été accordée alors qu'elle a été demandée. L'attribution des causes se fait sans avoir égard au fait que la fixation initiale avait été accordée pour une chambre à trois conseillers ou une chambre à conseiller unique.
Les causes sont attribuées à une chambre ordinaire composée de trois conseillers ou d'un conseiller pour autant que la demande en soit faite par une partie au plus tard un mois après la notification de la date de plaidoirie pour la chambre supplémentaire sans autres formalités qu'une demande écrite adressée au premier président. Cette notification a lieu au plus tard dans un délai de 6 mois après l'entrée en vigueur du présent article. » Les causes sont attribuées à une chambre ordinaire composée du même nombre de conseillers que la chambre saisie initialement pour autant que la demande en soit faite par toutes les parties au plus tard un mois après la notification de la fixation pour la chambre supplémentaire sans autres formalités qu'une demande écrite commune adressée au premier président. Cette notification a lieu au plus tard dans un délai de six mois après l'entrée en vigueur du présent article. »
Art. 7 Art. 8
Dans l'article 120, alinéa 1er , du même Code, les mots « ou un membre de la cour d'appel admis à la retraite en raison de son âge qui n'a pas encore atteint l'âge de 70 ans » sont insérés entre les mots « d'appel » et « délégué ». Dans l'article 120, alinéa 1er , du même Code, les mots « ou un membre de la cour d'appel admis à la retraite en raison de son âge qui n'a pas encore atteint l'âge de 70 ans » sont insérés entre les mots « d'appel » et « délégué ».
Art. 8 Art. 9
L'article 120, alinéa 2, du même Code est complété comme suit « ou un membre de la cour d'appel admis à la retraite en raison de son âge qui n'a pas encore atteint l'âge de 70 ans ». L'article 120, alinéa 2, du même Code est complété comme suit : « ou un membre de la cour d'appel admis à la retraite en raison de son âge qui n'a pas encore atteint l'âge de 70 ans ».
Art. 9 Art. 10
Un article 207bis , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code : Un article 207bis , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 207 bis. § 1er . Pour pouvoir être nommé conseiller suppléant à la cour d'appel, le candidat doit être docteur ou licencié en droit et : « Art. 207 bis. § 1er . Pour pouvoir être nommé conseiller suppléant à la cour d'appel, le candidat doit être docteur ou licencié en droit et remplir, au moment de la nomination, l'une des conditions suivantes :
1º soit suivre le barreau au moins pendant vingt ans; avoir suivi le barreau au moins pendant vingt ans;
2º soit, être juge suppléant depuis dix ans au moins dans un tribunal de première instance, un tribunal du travail, un tribunal de commerce, une justice de paix ou un tribunal de police; 2º être juge suppléant depuis au moins dix ans dans un tribunal de première instance, un tribunal du travail, un tribunal de commerce, une justice de paix ou un tribunal de police;
3º soit être un magistrat admis à la retraite, à l'exception des membres des cours d'appel admis à la retraite. 3º être magistrat admis à la retraite, à l'exception des membres des cours d'appel visés au § 2;
4º soit être professeur d'université et avoir enseigné le droit pendant au moins vingt ans dans une faculté de droit;
5º soit avoir cumulé ou exercé successivement pendant au moins vingt ans les activités visées aux points 1º et 4º.
§ 2. Les membres des cours d'appel admis à la retraite sont, à leur demande, désignés par le premier président pour exercer la fonction de conseiller suppléant, sous réserve des exceptions reprises dans l'article 383, § 3. » § 2. Les membres des cours d'appel admis à la retraite sont, à leur demande, désignés par le premier président pour exercer la fonction de conseiller suppléant, sous réserve des exceptions reprises dans l'article 383, § 3.
§ 3. Le ministre de la Justice sollicite, pour chaque candidat visé au § 1er , entre autres l'avis écrit des personnes suivantes, en fonction de la catégorie à laquelle appartiennent ces candidats :
1º pour les candidats visés au § 1er , 1º :
­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;
­ du président du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;
2º pour les candidats visés au § 1er , 2º :
­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat est inscrit au tableau;
­ du président du tribunal où le candidat est nommé juge suppléant;
3º pour les candidats visés au § 1er , 3º :
­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat a exercé sa fonction en dernier lieu;
­ du président du tribunal où le candidat a exercé sa fonction en dernier lieu;
4º pour les candidats visés au § 1er , 4º :
­ du doyen de la faculté à laquelle le professeur est attaché;
5º pour les candidats visés au § 1er , 5º :
­ du bâtonnier de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau;
­ du doyen de la faculté à laquelle le professeur est ou était attaché;
­ du président du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel le candidat est ou était inscrit au tableau.
Ces avis seront transmis par le ministre de la Justice au Collège de recrutement des magistrats qui donne un avis écrit sur l'expérience exigée et l'aptitude des candidats à siéger comme conseiller suppléant. Cet avis est communiqué au ministre de la Justice dans les trente jours suivant la réception de la demande d'avis. »
Art. 10 Art. 11
Un article 210ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code : Un article 210ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 210 ter. Le Roi désigne parmi les conseillers de chaque cour d'appel sur la présentation de l'assemblée générale un magistrat-coordinateur pour une période de trois ans. « Art. 210 ter. Le Roi désigne parmi les conseillers de chaque cour d'appel sur la présentation de l'assemblée générale un magistrat-coordinateur pour une période de trois ans.
Pour pouvoir être désigné, le candidat magistrat-coordinateur doit être porteur d'un certificat attestant une formation spécialisée en management. Pour pouvoir être désigné, le candidat magistrat-coordinateur doit être porteur d'un certificat attestant une formation spécialisée en management.
Le magistrat-coordinateur peut siéger selon son rang dans les chambres de la cour. » Le magistrat-coordinateur peut siéger selon son rang dans les chambres de la cour. »
Art. 11 Art. 12
Article 213, alinéa 2, du même Code, est modifié comme suit : « dans 1, le chiffre 30 est remplacé par le chiffre 31; dans 2, le chiffre 19 est remplacé par le chiffre 20 et le chiffre 5 par le chiffre 6; dans 3, le chiffre 24 est remplacé par le chiffre 25; dans 4, le chiffre 22 est remplacé par le chiffre 23; dans 5, le chiffre 22 est remplacé par le chiffre 23. » Article 213, alinéa 2, du même Code, est modifié comme suit : « dans 1, le chiffre 30 est remplacé par le chiffre 31; dans 2, le chiffre 19 est remplacé par le chiffre 20 et le chiffre 5 par le chiffre 6; dans 3, le chiffre 24 est remplacé par le chiffre 25; dans 4, le chiffre 22 est remplacé par le chiffre 23; dans 5, le chiffre 22 est remplacé par le chiffre 23. »
Art. 12 Art. 13
Dans l'article 288 du même Code, l'alinéa suivant est inséré entre les alinéas 1er et 2 : Dans l'article 288 du même Code, l'alinéa suivant est inséré entre les alinéas 1er et 2 :
« La réception des conseillers suppléants près les cours d'appel visés à l'article 207bis, § 1er , se fait devant une des chambres de la cour d'appel présidée par le premier président ou le conseiller qui le remplace, ou devant la chambre des vacations. » « La réception des conseillers suppléants près les cours d'appel visés à l'article 207bis, § 1er , se fait devant une des chambres de la cour d'appel présidée par le premier président ou le conseiller qui le remplace, ou devant la chambre des vacations. »
Art. 13 Art. 14
À l'article 300, alinéa 1er , du même Code, les mots « conseillers suppléants visés à l'article 207bis, § 1er , 1º et 2º, et les » sont insérés entre les mots « les » et « juges ». À l'article 300, alinéa 1er , du même Code, les mots « conseillers suppléants visés à l'article 207bis, § 1er , 1º, 2º, 4º et 5º , et les » sont insérés entre les mots « les » et « juges ».
Art. 14 Art. 15
À l'article 301 du même Code, les mots « conseillers » sont insérés entre les mots « comme » et « juges » et les mots « conseillers suppléants » sont insérés entre les mots « juges » et « juges suppléants ». À l'article 301 du même Code, les mots « conseillers » sont insérés entre les mots « comme » et « juges » et les mots « conseillers suppléants » sont insérés entre les mots « juges » et « juges suppléants ».
Art. 15 Art. 16
À l'article 311 du même Code, les mots « Les conseillers suppléants qui satisfont aux conditions visées à l'article 207bis, § 2, dans l'ordre de leur nomination, et ensuite les conseillers suppléants qui satisfont aux conditions visées à l'article 207bis, § 1er , 3º, dans l'ordre de leur nomination, en ensuite, dans l'ordre de leur nomination les autres conseillers suppléants » sont insérés entre les mots « conseiller; » et « Le procureur général » sous l'intitulé « Membres de la cour ». À l'article 311 du même Code, les mots « les conseillers suppléants qui satisfont aux conditions visées à l'article 207bis, § 2, dans l'ordre de leur nomination, et ensuite les conseillers suppléants qui satisfont aux conditions visées à l'article 207bis, § 1er , 3º, dans l'ordre de leur nomination, et ensuite, dans l'ordre de leur nomination les autres conseillers suppléants » sont insérés entre les mots « conseiller; » et « le procureur général » sous l'intitulé « Membres de la cour ».
Art. 16 Art. 17
Dans l'article 321 du même Code, modifié par la loi du 17 juillet 1984, l'alinéa suivant est inséré entre les alinéas 1 et 2 : Dans l'article 321 du même Code, modifié par la loi du 17 juillet 1984, l'alinéa suivant est inséré entre les alinéas 1 et 2 :
« À la cour d'appel, le conseiller empêché peut aussi être remplacé par un conseiller suppléant désigné par le premier président de la cour. Le conseiller suppléant ne peut pas être appelé à remplacer un conseiller unique. » « À la cour d'appel, le conseiller empêché peut aussi être remplacé par un conseiller suppléant désigné par le premier président de la cour. Le conseiller suppléant ne peut pas être appelé à remplacer un conseiller unique. »
Art. 17 Art. 18
Un article 321bis, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code : Un article 321bis, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« En cas d'empêchement légitime d'un conseiller suppléant, le premier président de la cour d'appel peut par ordonnance désigner un remplaçant parmi les conseillers suppléants visés à l'article 102. » « En cas d'empêchement légitime d'un conseiller suppléant, le premier président de la cour d'appel peut par ordonnance désigner un remplaçant parmi les conseillers suppléants visés à l'article 102. »
Art. 18 Art. 19
Dans l'article 341 du même Code, modifié par la loi du 17 juillet 1984, l'alinéa suivant est inséré entre les alinéas 3 et 4 : Dans l'article 341 du même Code, modifié par la loi du 17 juillet 1984, l'alinéa suivant est inséré entre les alinéas 3 et 4 :
« Les conseillers suppléants à la cour d'appel ne font pas partie de l'assemblée générale. » « Les conseillers suppléants à la cour d'appel ne font pas partie de l'assemblée générale. »
Art. 19 Art. 20
Un article 342bis, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code : Un article 342bis, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 342 bis. L'assemblée générale de la Cour d'appel formule, dans le cadre d'un plan pluriannuel, les mesures qui peuvent contribuer à résorber l'arriéré judiciaire au niveau de l'administration de la Justice dans son ressort. « Art. 342 bis. L'assemblée générale de la cour d'appel examine le rapport du magistrat coordinateur. Sur la base de celui-ci, elle détermine notamment, dans le cadre d'un plan pluriannuel, les mesures qui visent à résorber l'arriéré judiciaire dans son ressort.
Chaque année, dans le courant du mois de septembre, elle consacre un examen aux affaires pendantes et en fait rapport au plus tard le 15 octobre. Chaque année, dans le courant du mois de septembre, elle consacre un examen aux affaires pendantes et en fait rapport au plus tard le 15 octobre.
Le procureur général près la Cour d'appel transmet ce rapport au ministre de la Justice qui le communique ensuite au Conseil des ministres et aux Présidents des chambres législatives. » Le procureur général près la cour d'appel transmet ce rapport au ministre de la Justice, qui le communique ensuite aux présidents des Chambres législatives et au Conseil des ministres . »
Art. 20 Art. 21
Un article 379ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code : Un article 379ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 379 ter. § 1er . Le conseiller suppléant qui est appelé à siéger selon l'article 102, § 1er , a droit à une indemnité mensuelle, comme prévu à l'article 379. « Art. 379 ter. § 1er . Le conseiller suppléant qui est appelé à siéger selon l'article 102, § 1er , a droit à une indemnité mensuelle, comme prévu à l'article 379.
§ 2. Le conseiller suppléant qui est appelé à siéger dans une chambe supplémentaire comme prévu dans l'article 102, § 2, a droit à une indemnité par audience dont les modalités d'application sont fixées par le ministre de la Justice. » § 2. Le conseiller suppléant-président et le conseiller suppléant qui sont appelés à siéger dans une chambre supplémentaire comme prévu dans l'article 102, § 2, ont droit, en leur qualité de président ou de conseiller suppléant, à une indemnité par audience dont les modalités d'application sont fixées par le ministre de la Justice. »
Art. 21 Art. 22
Un article 379quater , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code : Un article 379quater , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 379 quater. Le ministre de la Justice détermine l'indemnité qui peut être allouée aux membres de la cour d'appel admis à la retraite qui sont délégués pour présider la cour d'assises, conformément à l'article 120, alinéa 1er . » « Art. 379 quater. Le ministre de la Justice détermine l'indemnité qui peut être allouée aux membres de la cour d'appel admis à la retraite qui sont délégués pour présider la cour d'assises, conformément à l'article 120, alinéa 1er . »
Art. 22 Art. 23
L'article 390 du même Code est complété par un deuxième alinéa rédigé comme suit : L'article 390 du même Code est complété par un deuxième alinéa rédigé comme suit :
« Ces dispositions s'appliquent également aux conseillers suppléants à l'exception des magistrats admis à la retraite en raison de leur âge, lesquels peuvent siéger jusqu'à 70 ans. » « Ces dispositions s'appliquent également aux conseillers suppléants à l'exception des magistrats admis à la retraite en raison de leur âge, lesquels peuvent siéger jusqu'à 70 ans. »
CHAPITRE III CHAPITRE III
Modifications à la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire Modifications à la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire
Art. 23 Art. 24
Le tableau figurant à l'article premier de la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire, remplacé par la loi du 28 décembre 1990 et modifié par la loi du 30 mars 1994, est remplacé par le tableau suivant : Le tableau figurant à l'article premier de la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire, remplacé par la loi du 28 décembre 1990 et modifié par la loi du 30 mars 1994, est remplacé par le tableau suivant :

Tableau figurant dans le projet de loi

Siège
­
Zetel
Premier
président
­
Eerste
voorzitter
Présidents
­
Voorzitters
Conseillers
­
Raadsheren
Conseillers
suppléants
­
Plaatsver-
vangende
raadsheren
Procureur
général
­
Procureur-
generaal
Avocats
généraux
­
Advocaten-
generaal
Substituts
du Procu-
reur général
­
Substituten-
procureur-
generaal
Greffiers en
chef
­
Hoofdgrif-
fiers
Greffiers-
chef de
service
­
Griffiers-
hoofd van
dienst
Greffiers
­
Griffiers
Commis-
greffiers
­
Klerken-
griffiers
Anvers. ­ Antwerpen 1 14 29 30 1 11 8 1 2 16 8
Bruxelles. ­ Brussel 1 15 35 42 1 12 11 1 2 18 7
Gand. ­ Gent 1 14 32 28 1 12 7 1 2 18 7
Liège. ­ Luik 1 9 23 26 1 7 6 1 2 12 5
Mons. ­ Bergen 1 7 15 22 1 6 4 1 2 9 4

Tableau adopté par la Commission

Siège
­
Zetel
Premier
président
­
Eerste
voorzitter
Présidents
­
Voorzitters
Conseillers
­
Raadsheren
Conseillers
suppléants
­
Plaatsver-
vangende
raadsheren
Procureur
général
­
Procureur-
generaal
Avocats
généraux
­
Advocaten-
generaal
Substituts
du Procu-
reur général
­
Substituten-
procureur-
generaal
Greffiers en
chef
­
Hoofdgrif-
fiers
Greffiers-
chef de
service
­
Griffiers-
hoofd van
dienst
Greffiers
­
Griffiers
Commis-
greffiers
­
Klerken-
griffiers
Anvers. ­ Antwerpen 1 14 29 30 1 11 8 1 2 17 8
Bruxelles. ­ Brussel 1 15 35 42 1 12 11 1 2 20 7
Gand. ­ Gent 1 14 32 28 1 12 7 1 2 19 7
Liège. ­ Luik 1 9 23 26 1 7 6 1 2 13 5
Mons. ­ Bergen 1 7 15 22 1 6 4 1 2 10 4
CHAPITRE IV CHAPITRE IV
Disposition finale Disposition finale
Art. 24 Art. 25
À l'exception des articles 4 et 6 dont le Roi fixe la date d'entrée en vigueur, la présente loi entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge. À l'exception des articles 4 et 7 [...], la présente loi entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.
Les articles 4 et 7 entrent en vigueur à la date fixée par le Roi, mais au plus tard six mois après la publication de la présente loi au Moniteur belge.

VI. ANNEXES


1. Chiffres communiqués par le premier président de la Cour d'appel de Gand au ministre de la Justice dans sa lettre du 12 mars 1997

Données statistiques relatives au fonctionnement des chambres civiles de la Cour d'appel de Gand ­ Situation au 27 février 1997

Aperçu des chambres composées de trois conseillers :

Chambre
­
Kamer
Total d'affaires
en suspens
­
Totaal hangende
zaken
Rôle spécial ­
Fixées
­
Bijzondere rol ­
Vastgesteld
Demandes
article 750
­
Aanvragen
artikel 750
Demandes
article 751
­
Aanvragen
artikel 751
Total affaires
en cours
­
Totaal zaken
in omloop
Solde rôle
spécial
­
Saldo op de
bijzondere rol
1 2 069 755 85 0 840 1 229
7 1 978 619 5 145 769 1 209
9 1 195 396 8 0 404 791
11 1 036 137 0 150 287 749
11FI 2 482 128 Parties : État belge : 1 139 1 343
Partijen : 128 Belg. Staat : 883
12 1 184 513 6 0 519 665

Aperçu des chambres composées d'un conseiller :

Chambre
­
Kamer
Total d'affaires
en suspens
­
Totaal hangende
zaken
Rôle spécial ­
Fixées
­
Bijzondere rol ­
Vastgesteld
Demandes
article 750
­
Aanvragen
artikel 750
Demandes
article 751
­
Aanvragen
artikel 751
Total affaires
en cours
­
Totaal zaken
in omloop
Solde rôle
spécial
­
Saldo op de
bijzondere rol
13 906 300 0 78 378 528
14 604 83 0 19 102 502
15 876 218 0 24 242 634
JK 284 58 0 0 58 226
16 876 263 121 0 384 492
17 523 239 85 0 324 199
18 736 279 160 0 439 297
19 844 222 37 0 259 585
20 291 119 28 0 147 144
21 446 168 0 0 168 278
22 208 47 0 0 47 161
Totaux. ­ Totalen . . . 16 538 4 544 663 1 299 6 506 10 032

Partant des données contenues dans le système informatique et après élimination, dans la mesure du possible, des facteurs de distorsion inhérents à ce système, on obtient les résultats suivants qui donnent une image réaliste :

Conclusion (y compris affaires fiscales) :

16 538 affaires dont 4 544 + 663 + 1 299 = 6 506 affaires « en mouvement », soit 39 %.

Conclusion (sans les affaires fiscales) :

14 056 affaires dont 4 416 + 535 + 416 = 5 367 affaires « en mouvement », soit 38 %.

Données statistiques relatives au fonctionnement des chambres civiles de la Cour d'appel de Gand ­ Situation au 27 février 1997

Chambre
­
Kamer
Fixées
­
Vastgesteld
Rôle spécial
­
Bijzondere rol
Demandes
article 750
­
Aanvragen
artikel 750
Demandes
article 751
­
Aanvragen
artikel 751
1 755 1 314 85 0
7 619 1 359 5 145
9 396 799 8 0
11 137 899 0 150
11FI 128 2 354 Parties : État belge :
Partijen : 128 Belgische Staat : 883
12 513 671 6 0
13 300 606 0 78
14 83 521 0 19
15 218 658 0 24
JK 58 226 0 0
16 263 613 121 0
17 239 284 85 0
18 279 457 160 0
19 222 622 37 0
20 119 172 28 0
21 168 278 0 0
22 47 161 0 0
Total. ­ Totaal . . . 4 544 11 994 663 1 299

Partant des données contenues dans le système informatique et après élimination, dans la mesure du possible, des facteurs de distorsion inhérents à ce système, on obtient les résultats suivants qui donnent une image réaliste :

Conclusion (y compris affaires fiscales) :

16 538 affaires dont 4 544 + 663 + 1 299 = 6 506 affaires « en mouvement », soit 39 %.

Conclusion (sans les affaires fiscales) :

14 056 affaires dont 4 416 + 535 + 416 = 5 367 affaires « en mouvement », soit 38 %.

2. Note de management

Dans le cadre de la mission officieuse de management au niveau de la cour d'appel de Bruxelles, il a été tenté (en plus du travail d'audience habituel) de mettre sur pied ou de maintenir les projets suivants :

­ développer et gérer un système dans lequel les procès commerciaux civils en état d'être jugés, peuvent être réduits à des procédures écrites, tant pour un traitement plus rapide que pour un traitement « en surnombre » (ce qui signifie que ces dossiers sont traités, non à la place de, mais en plus du volume de travail normal, en tant que travail supplémentaire donc, en vue de diminuer l'arriéré judiciaire).

Ce système exige des efforts supplémentaires de la part de tous les conseillers de la cour, y compris de ceux qui siègent dans les chambres correctionnelles.

Outre ce projet général de procédure écrite, un projet expérimental particulier est en cours dans une seule chambre.

Il s'agit de la chambre fiscale, qui a l'avantage de traiter une matière très bien délimitée avec ses propres dossiers, de telle sorte qu'elle peut être considérée, en fait, comme une mini cour pour les projets expérimentaux.

L'expérience tentée dans cette chambre ­ par ailleurs à l'initiative du président de chambre faisant fonction, soutenu, il est vrai, par l'idéologie naissante en matière de management ­ consiste à traiter les affaires routinières de manière accélérée (réduire le plus possible les délais de procès dans les dossiers sélectionnés à cette fin, lesquels sont spécialement fixés à des audiences de 30 affaires et plus (au lieu des 5 à 7 procès habituels par audience) sur la base d'une procédure quasi écrite). L'objectif concret est de ramener, en plus ou moins une année, l'arriéré de fixation d'environ 18 mois à un arriéré acceptable de 4 mois.

Contrairement à ce qui est fait habituellement à ce jour, cet objectif est notamment atteint par les membres de cette chambre en assurant un maximum de stabilité (composition inchangée du siège) et un minimum de surcharge des audiences, afin de susciter de cette manière une motivation et une responsabilisation pour la gestion de sa propre charge de travail et une rapidité optimale de traitement au sein de la chambre.

À mon avis, s'il est couronné de succès (ce qui semble être clairement le cas à ce jour), ce projet expérimental doit permettre de convaincre les autres membres de la cour et la direction de l'utilité de cette méthode de travail, « pièces à l'appui ».

­ la réorganisation du schéma de travail et des audiences de l'ensemble de la cour et plus particulièrement des chambres civiles et consulaires, en instaurant les principes précités de stabilité au niveau de la situation de travail (tant en ce qui concerne la composition du siège que le nombre fixe et prévisible d'audiences par période (p. ex. par semaine)) dans le but d'augmenter la production (nombre d'arrêts et nombre d'affaires réglées) à un niveau de qualité pour le moins maintenu.

­ l'organisation de structures de concertation et de mécanismes de diffusion d'informations afin de préparer le terrain pour les innovations et ce, tant au sein de la cour que pour les autres acteurs (greffe, barreau).

À ce propos, il est d'ailleurs à souligner que la concertation avec le barreau se déroule de manière très positive (dans le cadre du « Groupe de Travail Barreau-Magistrature » que je préside et auquel participent personnellement les bâtonniers des quatres barreaux du ressort, ainsi d'ailleurs que le greffier en chef de la cour). Cette concertation ne se limite pas aux questions nécessitant la collaboration du barreau (p. ex. le projet de procédure écrite susmentionné ou le pool des référendaires volontaires : voir infra ) mais aborde également les questions que la cour pourrait à proprement parler aussi régler de manière interne (tels que p. ex. le programme de construction « 747, § 2 » : voir infra ).

­ la constitution, en concertation avec le Barreau, et la gestion d'un petit pool de référendaires volontaires (avocats stagiaires sélectionnés en dernière année de stage), qui apprendraient tout en travaillant en ce sens qu'ils bénéficieraient d'une formation en écriture de jugement basée sur la rédaction contrôlée d'avant-projets dans le cadre d'affaires simples relevant du système de la procédure écrite (avec extension ultérieure éventuelle aux stagiaires judiciaires, ce qui paraît très sensé).

­ l'élaboration de programmes standardisés (programmes de construction) pour un traitement plus rapide (via P.C.) de décisions (de procédure) très routinières.

D'autres projets sont encore prévus.

Il est peut-être intéressant de signaler qu'une des priorités à ce propos est la réalisation d'une étude de faisabilité et, si possible, l'ouverture d'une seule chambre d'introduction pour toutes les affaires civiles et commerciales, où toutes les affaires seraient gardées jusqu'à ce que leur mise en état par écrit soit terminée (jusqu'à la « clôture des débats écrits »), et que tous les incidents de procédure éventuels relatifs à la mise en état de l'affaire soient résolus ou jugés (projet expérimental « chambre-filtre »).

L'objectif d'un tel projet de chambre d'introduction (dans laquelle ne siège par définition qu'un conseiller) est de veiller à un suivi réel de la mise en état des affaires sous le contrôle du juge ainsi qu'à une application plus uniforme des règles de procédure relatives à la mise en état, ce qui à plus long terme permettra d'éviter en grande partie les incidents et de réduire le nombre de dispositions de procédure à écrire (747, § 2 etc.).

Par ailleurs, cela permet également de maîtriser et de remplir bien plus efficacement les rôles d'audience dans les autres chambres, qui deviennent alors exclusivement des chambres de plaidoirie devant lesquelles sont renvoyées uniquement des affaires définitivement mises en état (ne perdent donc plus de temps à régler des incidents, ne reportent plus inutilement à l'audience etc., ce qui permet de mettre plus d'affaires en délibéré à chaque audience et donc, globalement, de réduire le délai d'audience au profit de l'écriture d'un nombre plus grand d'arrêts).

De même, l'élaboration et la mise en oeuvre d'un système interne concluant par le contrôle de la production (par chambre et individuellement), du suivi et du retard de délibération devraient pouvoir figurer parmi les priorités.

J'estime que ces différents points constituent un programme ambitieux qui pourrait, non seulement, engendrer une amélioration sensible du fonctionnement, mais également indiquer au monde extérieur, sous la forme d'un signal puissant, qu'il est possible de faire bouger quelque chose au sein de la magistrature (en l'occurrence le siège) et de réaliser des innovations fondamentales au sein des outils existants.

Le plus grand problème en vue de la réalisation d'un tel programme est cependant que le « manager » occupe en fait une position particulièrement faible, et est tributaire de nombreuses manifestations de bonne volonté, que ce soit d'un point de vue institutionnel ou sur le plan matériel.

À titre d'exemple, je cite :

­ aucune compétence officielle (ce qui entraîne la contestation chez les personnes qui se sentent « visées » par les mesures projetées);

­ aucune infrastructure matérielle;

cela entraîne, en termes de management, une méthode de travail absolument « contraproductive » qui est totalement contraire au principe de la délégation vers le bas [faire exécuter un maximum de tâches au niveau le plus bas possible, où la réelle compétence est (encore) présente] :

­ le « manager » dactylographie tous ses documents lui-même, bien qu'il ne dispose pas personnellement d'un ordinateur, ni d'une imprimante. Souvent, il utilise le P.C. se trouvant dans un local et doit aller dans un autre local pour pouvoir imprimer. De même, il doit encore aller dans un troisième local pour pouvoir faire une photocopie, passer un fax etc.;

­ le « manager » doit assurer lui-même la traduction des notes, des programmes etc. qui doivent être rédigés dans les deux langues nationales;

­ le « manager » manipule lui-même les dossiers qui doivent être « retirés » pour faire tourner l'un ou l'autre projet, dactylographie lui-même les formulaires de distribution des dossiers aux collègues et autres.

N'oublions pas que tout ceci vient s'ajouter au travail d'audience normal (il est à juste titre psychologiquement inopportun d'envisager la dispense d'audiences aussi longtemps que la fonction de management n'est pas officialisée de l'une ou l'autre manière).

Le résultat est que le « manager » est en fait un homme à tout faire et un colosse aux pieds d'argile : pour autant qu'elles soient acceptées [ce qui actuellement pose moins de problèmes au niveau de la direction qu'au niveau (d'une partie) de la base], toutes les innovations possibles et les interventions au niveau du management avancent à une allure frustrante de tortue (malgré des semaines de travail de 50, 60 et plus d'heures).

Proposition en vue d'aborder les choses de manière plus professionnelle : le lancement à court terme (p.ex. commencement effectif le 1er janvier prochain) d'un projet pilote ou expérimental officiel (annoncé publiquement ?) sur une base plus structurée et avec un minimum d'appui matériel et administratif.

Bruxelles, le 3 octobre 1996,

Guy Delvoie,

président à la cour d'appel de Bruxelles.


3. Nature des indemnités des conseillers
suppléants aux cours d'appel

Aux conseillers suppléants des cours d'appel sera allouée une indemnité sur la même base légale que celle actuellement allouée aux magistrats suppléants, désignés en application de l'article 383, § 2, du Code judiciaire. Le montant de l'indemnité sera fixé par arrêté ministériel.

Sur ces indemnités ne s'effectuent ni les retenues au profit du Fonds des pensions de survie (application de l'arrêté royal du 25 novembre 1948), ni les retenues au profit de l'assurance maladie-invalidité (application de l'arrêté royal du 28 novembre 1969, article 9).

De cela, il ressort que ces prestations n'entrent pas en ligne de compte pour les interventions en matière d'assurance maladie-invalidité, ni aussi pour le calcul de n'importe quelle pension.

L'arrêté royal du 30 décembre 1993 en matière de précompte professionnel stipule que les indemnités et allocations payées occasionnellement ou périodiquement et en ordre subsidiaire sont soumises aux taux prévus ci-après :

jusqu'à 20 000 francs : 27,81 %;

de 20 001 à 25 000 francs : 32,96 %;

supérieur à 25 000 francs : 38,11 %.

Ces revenus sont ajoutés aux revenus totaux sur base annuelle afin de calculer le montant total de l'impôt. Ils ne sont nullement considérés comme des revenus occasionnels qui sont imposés séparément.


(1) Doc. Sénat, 1996-1997, nºs 1-447/1-5 et Annales du Sénat des 18 et 20 décembre 1996; doc. Chambre, 1996-1997, nºs 867/1-8, et Annales des 19 et 20 février 1997.