Profitez d'une évocation de la Grande Guerre par de futurs enseignants de la Haute École VIVES sous la direction de Hugo Verkest

Un matin ordinaire en novembre
En rangs successifs, les pierres tombales blanches se dressent
Ici, seul le silence soupire

En rangs successifs,
les pierres tombales grises se dressent
coloriées d'un drapeau belge

Souvenirs d'une guerre
Qui appela les pères sous les armes...
Souvenirs d'une guerre
qui blessa le paysage
Cicatrices visibles qui font toujours souffrir.

Tranchées écroulées,
cratères remplis d'eau,
bunkers couverts de mousse,
Ceux qui l'ont vécue
ne sont plus.

Mais le souvenir reste.
Le souvenir perdure dans
des histoires de familles,
des photos,
des cartes postales,
des médailles,
des monuments.

Se souvenir, c'est aussi commémorer et se remémorer
Vous venez de vous rassembler autour d'une flamme qui brûle continuellement
devant la Tombe du Soldat inconnu


Une flamme qui ne veut jamais s'éteindre
Une flamme qui veille
à ce que n'oubliions pas
ce qu'une guerre fait
avec un enfant
avec une mère
avec un réfugié
avec un soldat au front...

Vous venez de vous rassembler, toutes générations confondues,
pour déposer une couronne de fleurs
en signe de respect et de gratitude.

Nous ne voulons pas oublier ce que les êtres humains ont vécu
et vivent encore maintenant
quand les hommes se déclarent la guerre.

28 juin 1914.
L'archiduc François-Ferdinand visite Sarajevo avec son épouse.
L'archiduc est l'héritier du trône de l'Empire austro-hongrois.
Par cette magnifique journée d'été, le temps est idéal pour faire un tour en voiture dans la ville...
Soudain, un coup de feu retentit,
L'héritier du trône est mortellement touché...

L'empereur d'Allemagne prend prétexte de cet attentat de Sarajevo pour déclarer la guerre à la France.
L'armée allemande exige de pouvoir passer par la Belgique pour attaquer la France.

La neutralité de la petite Belgique est toutefois garantie par un traité international.
Si un pays envahit la Belgique, les autres États parties au traité doivent venir en aide à notre pays.
Le gouvernement belge refuse d'accéder à la demande de l'Allemagne.

Le 4 août 1914, l'armée allemande envahit la Belgique.
Les journaux relatent les faits.
L'indépendance
Belges ! La patrie est en danger. La neutralité violée. Belges, debout !
Het Volk
Voyez ! Le danger est à nos portes, nos frontières sont menacées.

Comme promis, des soldats français et britanniques se portent au secours de la Belgique. Le monde compatit à la souffrance en Belgique « Poor little Belgium » « Remember Belgium. Enlist today »

Dès l'invasion allemande, des milliers de personnes fuient en France, en Angleterre ou aux Pays-Bas.

Le curé de Dikkebus, près d'Ypres, écrit ce qui suit dans son journal :
« Vers 10 heures, les premiers réfugiés arrivent.
Quel triste cortège  !
Une multitude de chariots et de voitures, chargés d'enfants et de femmes.
Des gens à pied; certains avec de lourds bagages, d'autres sans rien car ils n'ont pas eu le temps d'emporter quoi que ce soit.
Çà et là, un homme conduit une vache.
Le chagrin et le découragement se lisent sur les visages mais au coeur demeure le doux espoir de rentrer à la maison dans quelques jours... »

Pendant l'exode, les membres d'une même famille sont séparés.
Pendant les premiers mois de la guerre, ils publient des avis de recherche dans les journaux pour se retrouver.
Ainsi, le 30 août 1914, Frans Laermans de Louvain essaie de retrouver la trace de sa femme et de ses enfants via la Nieuwe Gazet.
Frans Laermans, habitant à Louvain, Oratoriumhof, cherche sa femme et ses enfants qui ont pris la fuite sur un chariot à quatre roues couvert d'une bâche noire. Sur le chariot il y avait 3 femmes, 6 enfants et 2 hommes.
Ils séjourneraient dans les environs de Saint-Nicolas, Bruges, Deinze, Gand ou Anvers. Sus-nommé Frans Laermans, habite Anvers, Handschoenmarkt, 13. Prière d'envoyer les informations par dépêche aux frais de Frans Laermans.

En deux mois, les troupes de l'empereur allemand conquièrent la majeure partie de la Belgique et l'occupent.
La progression de l'armée allemande est arrêtée en octobre 1914.
Je suis Hendrik Geeraert, fils de capitaine, né à Nieuport.
À Nieuport, l'Yser se jette dans la mer...
Je connais l'Yser comme ma poche.
Je sais quand il faut ouvrir les écluses des canaux d'évacuation à Nieuport.
Avec des soldats, j'ai fait en sorte que l'eau de mer envahisse les polders.
Cela a créé un tampon de zones inondées entre les positions allemandes et les positions belges.
J'ai risqué ma vie. Comme les éclusiers avaient fui, j'ai monté la garde aux écluses pendant quatre ans.
Mon portrait a ensuite été imprimé sur un billet de banque.

Les armées ennemies se font face dans le Westhoek.
Parfois, elles sont séparées de 20 mètres à peine.
Les soldats s'abritent dans les tranchées qu'ils ont creusées. Ces tranchées seront souvent leur tombe.
Les tranchées sont consolidées par de planches et des poutres, et par des petits sacs remplis de sable ou de terre, comme on les utilise aujourd'hui encore en cas de risque d'inondation.
Les soldats espèrent recevoir des nouvelles de chez eux. Mais les Belges qui habitent le territoire occupé par les Allemands, ne peuvent pas écrire aux soldats au front. Dans d'autres pays, les enfants ont la possibilité d'écrire à leur papa au front.

Mon cher papa,
Comme je voudrais être ta petite souris, mon papa bien aimé.
Je me loverais dans ta poche.
Et comme ça, tu aurais une certaine consolation, lorsque tu as du chagrin.
Malgré que je sois bien petite, je vois bien que mon papa ne revient pas très vite.
Je vais à l'école tous les lundis et je suis sage pour que tu sois heureux, lorsque tu rentreras.
Ta petite fille qui t'envoie mille bisous
Coralie

Le Roi Albert Ier et la Reine Elisabeth habitent La Panne, dans la dernière petite partie de Belgique restée inoccupée. Un jour, la Reine Elisabeth reçoit une carte d'une petite fille qui, elle aussi, est réfugiée à La Panne.

Madame la Reine
Des petites filles de mon age m'ont dit, qye St–Nicolas était arrivé d'angleterre à la Panne, chez nous, comme nous sommes des refugées il n'est pas venu, ne Voudriez Vous pas lui causer pour moi j'ai 6,5 ans.

Recevez Madame la Reine, l'hommage respectueux de mon attachement filial
Marguerite Vansteenkiste
Villa petit poucet
86 Boulevard de Dunkerke
Le Panne

Le monde entier est entraîné dans cette guerre.
Les enfants du pays n'en reviennent pas de voir tous ces soldats de couleur, issus des cinq continents.
Des hommes venus d'Afghanistan, d'Algérie, d'Amérique, d'Australie, de Birmanie, du Canada, de Chine, de Côte d'Ivoire, d'Égypte, d'Inde, de Jamaïque, du Mali, du Maroc, du Népal, du Pakistan, du Sénégal, de Tunisie et du Viêt-Nam.
Des hommes dont la langue et les chants se sont tus au combat.
Des hommes dont un nombre important ne renteront jamais chez eux.
Des hommes dont le nom restera gravé sur une tombe blanche ou sur le mur des disparus.
Quatre années durant, les armées tiennent leur position. Une offensive est lancée de temps en temps, parfois au gaz. Des milliers de jeunes gens perdent la vie pour conquérir un peu de terrain.

C'est le cas lors de la bataille de Passchendaele.
Le 31 juillet 1917, les Britanniques, Canadiens, Australiens et Néo-Zélandais lancent une offensive contre les positions allemandes.
Les Alliés gagnent 2 km de terrain en trois jours, puis les combats s'enlisent.
En un mois, on dénombre déjà 125 000 morts et blessés.
La pluie et la boue ont momentanément raison des combats... jusqu'à ce que le temps devienne plus sec.

Le 6 novembre 1917, Passchendaele tombe enfin aux mains britanniques.
Au total, la bataille de Passchendaele aura coûté la vie à quelque 450 000 personnes.
450 000...
Autant que les populations de Gand et Charleroi réunies.
Tout ça pour gagner huit kilomètres de terrain...

Le soldat poète anglais Sassoon écrira en novembre 1918 :
We died in Hell
They Called it Passchendaele...

1918. Après quatre ans de combats, les alliés, renforcés par le soutien des États-Unis d'Amérique, parviennent à faire une percée. L'armée allemande est repoussée.

Emiel Selschotter est professeur à l'école communale pour garçons d'Alveringem, près de Dixmude. Deux de ses fils, Louis et André, sont soldats dans l'armée belge. Voici ce qu'il écrit dans son journal&bbsp;:

28 septembre 1918
Ce matin à 2h30, nous entendons les premiers coups de canon qui annoncent le lancement de l'offensive générale. Vers 3h30, les bombardements se font très intenses.
Cela se calme ensuite. Pluie battante à 7h qui dure jusqu'à 9h.
Les premières nouvelles du front sont encourageantes. Nos soldats font du bon boulot.
Adrien Dedeurwaerder est blessé, heureusement pas grièvement.
Il raconte : « Le froid et la soif sont ce qu'il y a de pire lorsqu'on est blessé et qu'on ne peut pas sortir de sa tranchée. J'ai lapé de l'eau dans un trou d'obus, alors que des bombes explosaient devant et derrière moi. »

2 novembre : Jour des Morts.
Dans la zone du front, tout n'est que ruine et désolation. Partout, des cadavres, et un silence assourdissant.
Le chagrin et la tristesse sont immenses.

Travail de secrétariat pour l'école. J'ai écrit pour obtenir des fournitures scolaires.

NOS PERTES DE SOLDATS BELGES
Nos pertes de soldats, pendant la guerre, ainsi qu'il résulte d'une déclaration faite par le ministre belge de la Défense Nationale se sont élevées à :
Tués : 843 officiers, 20 247 hommes de troupes
Décédés par suite de blessures, de maladies, d'accidents : 729 officiers, 16 523 hommes de troupes
Disparus : 33 officiers, 2 881 hommes de troupes
Soit, au total 1 605 officiers, 39 651 hommes de troupes

Novembre 1918.
Dans la commune française de Compiègne,
à 80 km au nord-est de Paris,
deux trains se rejoignent dans une clairière.
Dans l'un, une poignée de généraux allemands ;
dans l'autre, les alliés.
Le 11 novembre, à l'aube, les Allemands signent les conditions de l'Armistice.

En ce onzième jour
du onzième mois
de l'année 1918, à 11 heures,
les armes se taisent...