Transparence |
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OGER Lallemand, président du groupe PS du Sénat, a déposé une proposition de loi visant à instaurer une meilleure répression de la corruption. Nous lui avons demandé comment il propose de combler les lacunes de notre législation en cette matière. |
L'incrimination de la corruption publique est ancienne. De tous temps, des fonctionnaires (toute personne qui exerce une fonction publique) ont été poursuivis pour des faits de corruption.
Toutefois, notre législation ne sanctionne pas deux comportements pourtant générateurs d'une corruption importante.
Au niveau public tout d'abord, la loi permet, en cas de corruption active reconnue, de poursuivre tant le corrupteur que le corrompu. Elle permet aussi de punir celui qui tente de corrompre un fonctionnaire pour obtenir un avantage.
Par contre, la loi ne s'applique pas à la tentative de corruption passive, c'est-à-dire lorsqu'un fonctionnaire sollicite lui-même la corruption. Si la personne sollicitée porte plainte devant le procureur du Roi, celui-ci ne peut que constater qu'il n'y a pas matière à infraction.
Or, il est permis de supposer qu'un fonctionnaire capable d'une telle attitude constitue un noyau potentiel de corruption.
La seconde lacune vise la corruption privée qui, chez nous, ne relève pas du droit pénal. Une affaire comme l'Olympic de Marseille-Valenciennes en France ne pourrait être poursuivie du fait de corruption en Belgique.
Une conception ancienne veut que la passation de contrats entre personnes privées soit soumise au droit civil et ne concerne pas les autorités publiques. Jadis, l'intérêt d'une société commerciale se confondait avec celui de son propriétaire.
Aujourd'hui la notion d'intérêt social, d'intérêt de la société commerciale, concerne autant l'intérêt des actionnaires que celui des tiers contractants, des travailleurs, voire même celui de l'économie d'une région. Ainsi, un club de football qui perdrait volontairement un match, pourrait par exemple rétrograder en une division inférieure, ce qui risquerait d'entraîner une diminution de ses ressources et des pertes d'emploi. L'intérêt ponctuel de quelques corrompus risque donc d'avoir des conséquences sociales importantes. D'où l'intérêt de combattre la corruption privée et d'exiger la transparence dans la gestion des sociétés.
Parallèlement, au niveau européen, se développe un système juridique et économique de régulation des marchés en vue de préserver une relative égalité de chances entre les sociétés. On a interdit les ententes entre sociétés pour éviter les monopoles de fait. Il convient d'empêcher que des opérations frauduleuses ne permettent de contourner les dispositions légales et d'annihiler l'égalité face à la concurrence.
Une autre originalité de la loi en projet, qui a été proposée par un amendement du gouvernement, consiste à donner une compétence universelle à nos juridictions en matière de corruption. Le champ d'application de la loi est étendu aux fonctionnaires européens et touche également les faits de corruption commis depuis l'étranger par des acteurs étrangers.
L'incrimination la plus large possible des faits de corruption répond à une recommandation de l'Organisation pour la Coópération et le Développement Économique (OCDE) prônant l'unification en matière de répression de la corruption.
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