Version à imprimer bilingue Version à imprimer unilingue

Question écrite n° 5-1510

de Martine Taelman (Open Vld) du 25 février 2011

au ministre de la Justice

La révision d'affaires pénales

droit pénal
jugement
procédure pénale

Chronologie

25/2/2011Envoi question
19/10/2011Réponse

Requalification de : demande d'explications 5-554

Question n° 5-1510 du 25 février 2011 : (Question posée en néerlandais)

Dans notre droit pénal, on ne peut procéder à une révision d'affaires pénales que dans des circonstances très spécifiques et exceptionnelles.

La révision des condamnations passées en force de chose jugée dans des affaires criminelles ou correctionnelles n'intervient donc que dans des cas très exceptionnels qui sont strictement définis dans notre législation pénale. Depuis 2007, les personnes définitivement condamnées sur le plan pénal qui, après leur condamnation définitive en Belgique, ont obtenu gain de cause devant la Cour européenne des droits de l'homme à Strasbourg, peuvent introduire une demande de réouverture de la procédure.

J'aurais souhaité poser les questions suivantes au ministre.

1) Combien de fois, au cours de ces cinq dernières années, une demande de révision d'une condamnation pénale définitive a-t-elle été déclarée recevable?

2) Combien de fois, au cours de ces cinq dernières années, une demande de révision d'une condamnation pénale définitive a-t-elle été déclarée recevable sur la base de l'article 443, 1°, 2° (faux témoignage) ou 3° (nouvelle preuve) du Code d'instruction criminelle?

3) Combien de fois une personne définitivement condamnée au plan pénal a-t-elle réellement obtenu une révision de son affaire à la suite de l'apparition de nouvelles preuves (article 443, 3° du Code d'instruction criminelle) ou à la suite d'un faux témoignage (article 443, 2° du Code d'instruction criminelle)? Le ministre peut-il l'expliquer de manière détaillée?

4) Pensez-vous qu'un citoyen injustement et définitivement condamné au plan pénal dispose actuellement de moyens juridiques suffisants – si apparaissent par exemple de nouvelles preuves qui démontrent son innocence ou si la science peut livrer de nouveaux éléments disculpants – pour obtenir effectivement une révision de sa condamnation pénale? Le ministre peut-il apporter des explications détaillées?

5) Comment évaluez-vous le fonctionnement de la Criminal Cases Review Commission anglaise? Pensez-vous que notre pays doit prendre des initiatives semblables? Si oui, pouvez-vous l'expliquer? Si non, pourquoi pas?

Réponse reçue le 19 octobre 2011 :

Tout d'abord, il est indiqué de préciser les deux notions que sont « réouverture CEDH » et « révision »:

- Réouverture CEDH

Description

Le type d’inscription réouverture CEDH indique que la cour d’appel est saisie après que la Cour de cassation ait annulé la décision attaquée et ordonné la réouverture de la procédure.

Définition :

La loi du 1er avril 2007 modifiant le Code d'instruction criminelle en vue de la réouverture de la procédure en matière pénale (Moniteur belge du 9 mai 2007) introduit la possibilité de demander la réouverture, en ce qui concerne la seule action publique, de la procédure qui a mené à la condamnation s'il a été établi par un arrêt définitif de la Cour européenne des Droits de l'Homme que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou des protocoles additionnels, ont été violés.

Le droit de demander la réouverture de la procédure appartient :

Tant la demande, pour autant qu’elle réponde à certaines conditions de recevabilité, que le traitement de celle-ci sont du ressort de la Cour de cassation. .

Après que la Cour de cassation a ordonné la réouverture de la procédure, elle retire la décision attaquée, pour autant que ce soit elle qui l'ait rendue, et statue à nouveau sur le pourvoi en cassation initial dans les limites de la violation constatée par la Cour européenne des droits de l'homme.

Dans les autres cas, la Cour de cassation annule la décision attaquée et renvoie l'affaire à une juridiction de même rang que celle qui a rendu la décision attaquée ou annule la décision attaquée sans renvoi.

- Révision

Description :

Le type d’inscription révision indique que la cour d’appel est saisie après que la Cour de cassation se soit prononcée sur une demande de révision.

Définition :

La révision en matière criminelle ou correctionnelle est ce que l’on appelle un moyen de droit extraordinaire par lequel tant le condamné (ou un membre de sa famille en cas de décès) que le Ministre de la Justice peuvent saisir la Cour de cassation pour corriger une erreur judiciaire. Une révision est possible pour les causes suivantes :

Dans les cas prévus à l’article 443, 1° et 2° du Code d'instruction criminelle, la Cour de cassation annule la (ou les) condamnation(s) et laisse une autre cour d’appel rejuger l’affaire. Dans le cas prévu à l’article 443, 3° du Code d'instruction criminelle, la Cour de cassation renverra l’affaire pour avis à la cour d’appel.

1. On ne peut seulement fournir des données chiffrées que pour 2008, 2009 et 2010, et pour autant qu’elles aient été correctement encodées. Ceci s’explique par le fait que le projet « statistiques des Cours d’appel (affaires correctionnelles) – développement d’un datawarehouse et d’une application Web », a pris 2008 comme année statistique de départ.

Au niveau de la cour d’appel, en ce qui concerne la réouverture CEDH, aucune nouvelle affaire n’a été introduite durant les années 2008, 2009 et 2010.

Pour la révision, deux affaires ont été clôturées en 2008, aucune en 2009 et une seule affaire en 2010. Ces trois affaires ont été jugée recevables. En 2008 et 2009, aucune nouvelle affaire n’a été introduite en matière de révision. Deux nouvelles affaires de révision ont été introduites en 2010.

2. 3. Les informations nécessaires pour formuler une réponse à ces questions ne sont pas reprises dans les listes de codes nationales. On ne peut par conséquent pas générer de statistiques susceptibles d’apporter une réponse à ces questions.

4. L'on peut recourir à la révision pour annuler certaines condamnations qui s'avèrent reposer sur une erreur.

Il est possible de revenir sur une condamnation devenue définitive dans certains cas définis de façon restrictive par la loi (articles 443 à 447bis du Code d'Instruction criminelle).

Un premier cas de révision est celui où des condamnations prononcées à raison d'un même fait contre des personnes différentes ne peuvent se concilier de telle sorte que l'innocence de l'un des condamnés en résulte (article 443, alinéa 1er, 1°, du Code d'Instruction criminelle).

La révision est également possible après la condamnation définitive d'un témoin pour faux témoignage contre le condamné (article 443, alinéa 1er, 2°, du Code d'Instruction criminelle).

Enfin, une révision es t aussi possible en cas de fait nouveau apportant la preuve de l'innocence du condamné ou de l'application d'une loi pénale trop sévère. Cette nouvelle donnée peut être la condamnation ultérieure d'un autre prévenu dans des circonstances telles que l'innocence d'un condamné en résulte. Il se peut également que les progrès scientifiques suscite mettent en doute les conclusions d'un rapport d'expertise sur lequel reposait une condamnation (voir Declercq, R., Beginselen van strafrechtspleging, 2010, 1904 et Declercq, R., « herziening » in Comm.Straf., 2006)

La demande en révision peut émaner du condamné, et s'il est décédé, si son interdiction a été prononcée ou s'il se trouve dans un état d'absence déclarée, de son conjoint, de ses descendants et ascendants en ligne directe, de ses frères et sœurs ainsi que du ministre de la Justice.

Si la demande est fondée sur l'inconciliabilité de condamnations ou sur une condamnation ultérieure pour faux témoignage, la Cour de Cassation annule les condamnations. L'affaire est alors renvoyée devant une cour d'appel ou une cour d'assises en vue d'y être rejugée. Si la demande s'appuie sur un fait nouveau et est recevable, la Cour de Cassation la renvoie pour avis devant une cour d'appel. La cour d'appel vérifie si les faits nouveaux invoqués paraissent suffisamment concluants et rend un avis motivé. La Cour de Cassation suit l'avis dans la mesure où celui-ci a été rendu conformément à la loi. Elle rejette la demande en révision ou renvoie l'affaire devant une autre cour d'appel ou une autre cour d'assises.

Il ressort de la réglementation légale précitée et de son application dans la pratique qu'une personne injustement condamnée au plan pénal dispose d'une voie de recours suffisante pour obtenir une révision de sa condamnation pénale.

5. La Criminal Cases Review Commission est un organisme public indépendant qui examine les dossiers de personnes qui s'estiment condamnées à tort. Cet organisme vérifie s'il existe de nouvelles preuves ou de nouveaux arguments et peut, le cas échéant, renvoyer l'affaire devant l'instance judiciaire compétente aux fins de révision.

Je ne dispose pas de données permettant d'évaluer le fonctionnement de l'instance concernée. Je constate seulement que la demande en révision est introduite auprès de la Criminal Cases Review Commission, qui décide de manière autonome si l'affaire sera ou non renvoyée devant l'instance judiciaire compétente aux fins de révision.

En droit interne, la demande en révision peut être directement introduite auprès de la Cour de Cassation et celle-ci peut, s'il y a lieu, annuler une condamnation inique et renvoyer l'affaire devant une cour d'appel ou une cour d’assises.